(2ème Chambre)
VU la requête et le mémoire complémentaire enregistrés le 2 juin 1994 et le 19 août 1994 au greffe de la cour, présentés pour la SOCIETE ANONYME CLINIQUE DU CHATEAU DE LA MAYE dont le siège est 47, rue du Parc de Clagny, à Versailles (Yvelines) par Me X..., avocat ; la SOCIETE ANONYME CLINIQUE DU CHATEAU DE LA MAYE demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 8781 en date du 17 mars 1994 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1980 à 1983 ;
2°) de la décharger des impositions contestées ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le code de la santé publique ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 juin 1996 :
- le rapport de Mme PERROT, conseiller,
- et les conclusions de M. MENDRAS, commissaire du Gouvernement ;
Considérant que la SOCIETE ANONYME CLINIQUE DU CHATEAU DE LA MAYE conteste les compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des années 1980 à 1983 à la suite de la réintégration dans ses résultats imposables de sommes correspondant à la rémunération de prestations de services qu'elle avait gratuitement fournies, au cours desdits exercices, à deux laboratoires d'analyses médicales et vingt six praticiens, soit en assurant pour leur compte la perception et le reversement des honoraires, soit en mettant à leur disposition ses locaux, équipements et personnels et en tenant les listes des patients traités ; qu'elle fait appel du jugement en date du 17 mars 1994 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande en décharge des impositions litigieuses ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant en premier lieu que si, en vertu de l'article R.204 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la minute des jugements et arrêts doit être signée par le président de la formation de jugement, par le rapporteur et par le secrétaire-greffier, l'article R.210 du même code dispose que "les expéditions des jugements sont signées et délivrées par le secrétaire greffier en chef ou par l'un des secrétaires-greffiers, selon le cas" ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que l'expédition du jugement attaqué délivrée à la société requérante n'aurait pas été signée par le président du tribunal et le rapporteur doit être écarté ;
Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments avancés par la société requérante, ont répondu de manière suffisamment complète et motivée aux moyens présentés par celle-ci ; que, par suite, la SOCIETE ANONYME CLINIQUE DU CHATEAU DE LA MAYE n'est pas fondée à invoquer l'irrégularité du jugement attaqué ;
Sur la procédure d'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article L.57 du livre des procédures fiscales : "L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée." ;
Considérant qu'il ressort de son examen que la notification des redressements en date du 12 juillet 1984 comporte l'énoncé des circonstances de fait et des motifs de droit au nom desquels l'administration entendait procéder à la réintégration dans les résultats de la société de sommes correspondant à la rémunération des services rendus par elle ; qu'en estimant, eu égard aux conditions connues de fonctionnement de la clinique, qu'il y avait lieu de fixer lesdites rémunérations à 10% des honoraires perçus et reversés en ce qui concerne les laboratoires et, eu égard à l'importance de chaque spécialité médicale exercée dans la clinique, aux sommes forfaitaires annuelles respectives de 10.000 F, 20.000 F et 30.000 F en ce qui concerne les cardiologues, les oto-rhino-laryngologistes et les gynécologues, l'administration doit être regardée comme ayant motivé les redressements dans des conditions ayant mis le contribuable en mesure de présenter ses observations quant à leur principe comme quant à leur montant ; que, dès lors, la société requérante ne peut valablement soutenir, en invoquant le caractère forfaitaire des calculs effectués par le service, que les exigences de motivation prévues à l'article L.57 précité du livre des procédures fiscales auraient été méconnues en l'espèce ;
Sur le bien fondé des impositions :
Considérant, en premier lieu, qu'il est constant qu'au cours des années 1980 à 1983 en litige, la SOCIETE ANONYME CLINIQUE DU CHATEAU DE LA MAYE a rendu gratuitement à certains praticiens et aux laboratoires qui exerçaient une partie de leur activité dans ses locaux les services susindiqués ; que cet abandon de créances était constitutif d'un acte anormal de gestion ; que si la société fait valoir qu'en réclamant les redevances litigieuses elle aurait risqué de perdre le concours de certains praticiens assurant le renom de son établissement, la réalité de ce risque n'est pas établie ; que l'opposition que certains praticiens ont manifestée au principe de telles participations n'était pas de nature à autoriser la société à s'abstenir de les prélever ; qu'ainsi ladite société, qui se borne en outre à des allégations de caractère général sur le contexte de l'exploitation et le rapport de forces où se serait trouvé l'établissement vis à vis des praticiens et laboratoires, ne peut être regardée comme établissant que la renonciation à recettes à laquelle elle s'est livrée aurait été faite dans son propre intérêt ;
Considérant, en deuxième lieu, que si la SOCIETE ANONYME CLINIQUE DU CHATEAU DE LA MAYE a entendu se prévaloir, sur le fondement des dispositions des articles L.80 A et L.80 B du livre des procédures fiscales, de ce que cet abandon de créances aurait été admis lors d'une précédente vérification, cette absence de redressement n'a constitué ni une interprétation du texte fiscal ni une prise de position sur la situation de fait du contribuable qui auraient été formellement adoptées par l'administration ;
Considérant, en troisième lieu, que les dispositions du code de la santé publique qui interdisent aux médecins ou aux laboratoires d'analyses médicales de prévoir contractuellement le reversement de tout ou partie de leurs honoraires ou d'accorder des ristournes sur les sommes perçues, ne font pas obstacle à la rémunération par eux des services rendus par un tiers, même calculée forfaitairement sur la base d'un pourcentage desdits honoraires ; qu'ainsi la société requérante n'est pas fondée à invoquer pour ce motif le caractère erroné en droit de la méthode de calcul des sommes retenues à titre de redevances par le service ; que, par ailleurs, si la SOCIETE ANONYME CLINIQUE DU CHATEAU DE LA MAYE invoque le caractère arbitraire des sommes forfaitaires arrêtées, ainsi qu'il a été précisé ci-dessus, en ce qui concerne les praticiens, elle n'établit d'aucune manière le caractère exagéré desdites redevances ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE ANONYME CLINIQUE DU CHATEAU DE LA MAYE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;
Article 1er : La requête de la SOCIETE ANONYME CLINIQUE DU CHATEAU DE LA MAYE est rejetée.