(3ème Chambre)
VU la requête, présentée pour la société à responsabilité limitée NEGOCASH, dont le siège social est situé ..., par la SCP MILON-SIMON, avocat ; elle a été enregistrée le 17 août 1994 au greffe de la cour ; la société NEGOCASH demande à la cour :
1°) d'annuler partiellement le jugement du tribunal administratif de Paris n° 9000610/1 du 9 novembre 1993 en ce qu'il a soulevé d'office un moyen tiré de l'article 44 quinquiès du code général des impôts et rejeté en conséquence les conclusions de la requête tendant à la réduction des compléments d'impôt sur les sociétés mis à sa charge au titre des années 1983 et 1985 ainsi que des pénalités y afférentes ;
2°) de lui accorder les dégrèvements sollicités au titre des années 1983 et 1985 ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 février 1996 :
- le rapport de Mme TANDONNET-TUROT, conseiller,
- les observations de la SCP MILON-SIMON, avocat, pour la société NEGOCASH,
- et les conclusions de Mme MARTEL, commissaire du Gouvernement ;
Considérant qu'il n'appartient pas au juge de l'impôt, lorsqu'il n'y est pas invité par l'administration défenderesse, de substituer au fondement de l'imposition contestée un autre fondement, sur lequel serait justifié le maintien de cette imposition ; que, par suite, en retenant d'office, pour justifier les impositions contestées, les dispositions de l'article 44 quinquiès du code général des impôts qui limitent l'éligibilité au régime de faveur prévu à l'article 44 bis du même code aux seuls résultats déclarés dans les conditions et délais prévus par la loi, le tribunal a méconnu ses pouvoirs ; que dès lors, comme le demande la société NEGOCASH, son jugement doit être annulé sur ce point ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions de la demande de la société NEGOCASH relatives aux impositions mises à sa charge au titre des exercices 1983 et 1985 ;
Considérant que l'administration est en droit à tout moment de la procédure contentieuse, pour justifier le bien-fondé d'une imposition, de substituer une base légale à celle qui a été primitivement invoquée dès lors que cette substitution peut être faite sans priver le contribuable des garanties qui lui sont reconnues en matière de procédure d'imposition ; que le ministre peut invoquer, au regard de ces conditions, les dispositions de l'article 44 quinquiès du code général des impôts pour justifier les impositions litigieuses ;
Considérant qu'aux termes de l'article 11-II de la loi n° 85-1403 du 30 décembre 1985 codifié sous l'article 44 quinquiès du code général des impôts : "Le bénéfice à retenir pour l'application des dispositions des articles 44 bis, 44 ter et 44 quater s'entend du bénéfice déclaré selon les modalités prévues à l'article 53-A ou du bénéfice fixé sur la base des renseignements fournis en application de l'article 302 sexies" ;
Considérant qu'il est constant que la société NEGOCASH a déposé avec retard ses déclarations de résultats pour les exercices 1983 et 1985 ; que le caractère interprétatif des dispositions de l'article 11-II de la loi de finances du 30 décembre 1985 par lesquelles le législateur a entendu limiter le bénéfice de l'exonération prévue par les articles 44 bis, 44 ter et 44 quater du code général des impôts aux seuls bénéfices régulièrement déclarés permettait qu'il en soit fait application aux bénéfices réalisés avant l'entrée en vigueur de cette loi ; que c'est dès lors à bon droit que le service a refusé à la société NEGOCASH le bénéfice de l'abattement de moitié sur les bénéfices réalisés par elle au cours des exercices clos en 1983 et 1985 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requête de la société NEGOCASH doit être rejetée ;
Article 1er : L'article 2 du jugement n° 90610/1 du 9 novembre 1993 du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande présentée par la société NEGOCASH au tribunal administratif de Paris est rejetée.