VU la requête enregistrée le 6 janvier 1995 au greffe de la cour présentée pour M. A... de CASTRO demeurant ..., par Me X..., avocat ; M. A... de CASTRO demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 15 mars 1994 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à déclarer l'Etat responsable du préjudice que lui a causé l'accident dont il a été victime le 19 juillet 1992 au musée d'Orsay ; à condamner l'Etat d'une part à réparer le préjudice corporel résultant de cet accident, ledit préjudice devant "être déterminé par dires d'experts" et d'autre part à lui verser la somme de 35.000 F en réparation du préjudice résultant de l'interruption de son voyage en Europe, ainsi que la somme de 10.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 50.000 F à titre de provision ainsi que la somme de 10.000 F au titre des frais irrépétibles ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 décembre 1995 :
- le rapport de Mme HEERS, conseiller,
- les observations de Me X..., avocat, pour M. A... de CASTRO,
- et les conclusions de Mme BRIN, commissaire du Gouvernement ;
Considérant que M. A... de CASTRO, a été victime d'une chute dans l'escalier central du musée d'Orsay le 19 juillet 1992 ; qu'il impute cette chute à l'état défectueux des bandes antidérapantes normalement fixées sur les marches ;
Sur la responsabilité :
Considérant qu'il résulte de quatre témoignages émanant de personnes faisant partie du même groupe de visiteurs que le requérant que les bandes anti-dérapantes de l'escalier emprunté par celui-ci étaient usées et que ce dernier a glissé à un endroit où aucune protection n'était plus assurée ; que la circonstance, invoquée par le ministre, qu'aucune fiche d'entretien n'ait été transmise au service de sécurité et de maintenance n'est pas en elle-même de nature à établir l'entretien normal des bandes antidérapantes de l'escalier en cause ; qu'en l'espèce eu égard aux caratéristiques de l'ouvrage public constitué par l'édifice du musée d'Orsay -particulièrement son escalier central- qui n'est pas un équipement vétuste, M. A... de CASTRO n'a fait preuve d'aucun défaut d'attention anormal ; que dès lors la chute dont il a été victime doit être regardée comme étant exclusivement imputable à l'administration ; qu'ainsi le requérant est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à réparer le préjudice qu'il a subi du fait de cette chute ;
Sur le préjudice :
En ce qui concerne le préjudice corporel :
Considérant que l'état du dossier ne permet pas de déterminer l'ampleur du préjudice corporel subi par M. A... de CASTRO du fait de l'accident susvisé ; que, par suite, il y a lieu avant de statuer sur sa demande d'indemnité présentée à ce titre, d'ordonner une expertise à cette fin et de fixer la mission de l'expert ainsi qu'il est précisé au dispositif de la présente décision ;
Considérant qu'en l'état du dossier, il y a lieu d'accorder au requérant une provision de 15.000 F sur l'indemnisation de son préjudice corporel ;
En ce qui concerne les autres chefs de préjudice :
Considérant qu'il résulte du témoignage de M. Truppel Y... do Cabo versé par le requérant que celui-ci a rejoint le groupe de touristes à Bonn et à la fin du voyage est rentré au Brésil avec ce groupe ; qu'il n'y a pas lieu à indemniser le déplacement aérien Francfort-Rio de Janeiro mais seulement celui Paris-Bonn ; que compte tenu du coût de celui-ci et des troubles de toutes natures subis par M. A... de CASTRO, notamment du fait de l'interruption de son déplacement touristique en Europe, il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en condamnant d'ores et déjà l'Etat à lui verser 5.000 F ;
Sur les frais non compris dans les dépens :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner l'Etat, partie dès à présent perdante, à payer à M. A... de CASTRO la somme de 10.000 F en application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 15 mars 1994 est annulé.
Article 2 : L'Etat est déclaré responsable du préjudice subi par M. A... de CASTRO du fait de la chute dont il a été victime le 19 juillet 1992 au musée d'Orsay.
Article 3 : L'Etat paiera à M. A... de CASTRO, la somme de 5.000 F en réparation du préjudice résultant des troubles causés à son voyage en Europe.
Article 4 : Une expertise est ordonnée par un expert chirurgien orthopédiste qui sera désigné par le président de la cour en vue de statuer sur la demande de M. A... de CASTRO tendant à l'indemnisation de son préjudice corporel. L'expert aura pour mission de :
- Procéder à l'examen de M. Z..., José, Rodrigues A... de CASTRO et déterminer tous les dommages corporels subis à la suite de l'accident dont il a été victime le 19 juillet 1992 au musée d'Orsay.
- Décrire les lésions imputées à l'accident et vérifier si celles-ci sont bien en relation directe et certaine avec l'accident. Après s'être fait communiquer tous documents relatifs aux examens, soins et interventions pratiqués, en préciser l'évolution.
- Déterminer la durée de l'incapacité temporaire de travail en indiquant si celle-ci a été totale ou si une reprise partielle est intervenue ; dans ce cas, en préciser les conditions et la durée.
- Fixer la date de consolidation des blessures.
- Dire s'il résulte des lésions constatées une incapacité permanente et dans l'affirmative après en avoir précisé les éléments, chiffrer le taux du déficit physiologique existant au jour de l'examen.
- Dire si l'état de la victime est susceptible d'aggravation ou d'amélioration ; dans ce cas, fournir toutes précisions utiles sur cette évolution.
- Dégager en les spécifiant les éléments propres à justifier une indemnité au titre de la douleur, éventuellement du préjudice esthétique, en en qualilifiant l'importance ainsi qu'au titre des troubles dans les conditions d'existence.
L'expert pourra en tant que de besoin se faire assister par un sapiteur chirurgien spécialisé en chirurgie bucco maxilo faciale.
Article 5 : L'expert prêtera serment par écrit. Il déposera son rapport dans les deux mois de l'acceptation de sa mission.
Article 6 : Les frais d'expertise sont réservés pour y être statué en fin d'instance.
Article 7 : L'Etat paiera à M. A... de CASTRO une provision de 15.000 F sur l'indemnisation de son préjudice corporel.
Article 8 : L'Etat paiera à M. A... de CASTRO la somme de 10.000 F en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.