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25/10/1995 | FRANCE | N°94PA00601

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2e chambre, 25 octobre 1995, 94PA00601


VU la requête présentée par M. BERDUGO, demeurant ..., par Me X..., avocat ; elle a été enregistrée au greffe de la cour le 13 mai 1994 ; M. BERDUGO demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 9001240/1 en date du 22 juin 1993 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des compléments d'impôt sur le revenu et pénalités y afférentes, auxquels il a été assujetti au titre des années 1980 à 1983 ;
2°) de lui accorder ladite décharge ;
3°) d'ordonner le sursis à l'exécution dudit jugement ;
VU les autres pièces du dos

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VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et d...

VU la requête présentée par M. BERDUGO, demeurant ..., par Me X..., avocat ; elle a été enregistrée au greffe de la cour le 13 mai 1994 ; M. BERDUGO demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 9001240/1 en date du 22 juin 1993 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des compléments d'impôt sur le revenu et pénalités y afférentes, auxquels il a été assujetti au titre des années 1980 à 1983 ;
2°) de lui accorder ladite décharge ;
3°) d'ordonner le sursis à l'exécution dudit jugement ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 octobre 1995 :
- le rapport de M. GIRO, président-rapporteur,
- les observations de Me X..., avocat, pour M. BERDUGO,
- et les conclusions de Mme BRIN, commissaire du Gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'il résulte des visas du jugement attaqué que M. BERDUGO a été régulièrement convoqué à l'audience publique du 25 mai 1993 du tribunal administratif de Paris mais qu'il n'y a, ni lui-même ni par l'entremise d'un mandataire, présenté d'observations orales ; qu'il n'est pas établi et qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier que ces mentions, qui font foi jusqu'à preuve contraire, seraient entachées d'inexactitude ; qu'ainsi le requérant n'est pas fondé à exciper de l'irrégularité dudit jugement tirée de ce qu'en violation des dispositions de l'article R.200 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, il ne mentionne pas les observations orales qu'aurait, lors de ladite audience, en réalité présentées dans son intérêt son avocat ;
Sur le contrôle fiscal :
Considérant que M. BERDUGO n'apporte en tout état de cause aucun élément de nature à établir que le vérificateur, qui n'était pas tenu d'engager sous la forme orale, dans le cadre de la vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble, le débat contradictoire avec le contribuable, se serait systématiquement refusé à tout dialogue avec lui ;
Sur l'application de l'article 168 :
Considérant qu'aux termes de l'article 168 du code général des impôts dans sa rédaction applicable aux années d'imposition 1980 à 1983 litigieuses : "1. En cas de disproportion marquée entre le train de vie d'un contribuable et les revenus qu'il déclare, la base d'imposition à l'impôt sur le revenu est portée à une somme forfaitaire ... Pour l'application des dispositions qui précèdent, la valeur locative est déterminée par comparaison avec d'autres locaux dont le loyer a été régulièrement constaté ou est notoirement connu et, à défaut de ces éléments, par voie d'appréciation ... 2. En ce qui concerne les contribuables disposant simultanément d'au moins quatre éléments caractéristiques du train de vie ... les bases d'imposition correspondant à la possession de chaque élément autre que la résidence principale ... sont majorés : ... de 60 % lorsque le nombre total de ces éléments est de cinq ... 2 bis. La disproportion marquée ... est établie lorsque la somme forfaitaire qui résulte de l'application du barème et des majorations ... excède d'au moins un tiers, pour l'année de l'imposition et l'année précédente, le montant du revenu net global déclaré. 3. Les contribuables ne pourront faire échec à l'imposition ... en faisant valoir que leurs revenus imposables à l'impôt sur le revenu seraient inférieurs aux bases d'imposition résultant du barème. Toutefois, lorsque la différence entre la base d'imposition forfaitaire ... et le revenu déclaré provient ... du fait que le contribuable a disposé de revenus expressément exonérés de l'impôt sur le revenu par une disposition particulière, l'intéressé peut ... obtenir que la base d'imposition forfaitaire soit diminuée du montant desdits revenus exonérés" ;
En ce qui concerne le principe de l'application de ces dispositions :

Considérant que M. BERDUGO ne saurait prétendre relever des dispositions de l'article 82-I de la loi n° 86-1317 du 30 décembre 1986, lesquelles autorisent le contribuable à apporter la preuve que son train de vie a été financé par l'utilisation de ses revenus ou l'aliénation de son capital, dès lors que, selon l'article 1er-II de ladite loi, elles ne sont applicables qu'à l'impôt sur le revenu dû au titre de 1986 et des années suivantes ; que s'il avance diverses instructions, circulaires et réponses ministérielles relatives à la mise en oeuvre de l'article 168, ces dispositions, dès lors qu'elles ne contiennent que des recommandations adressées aux agents du service, ne comportent pas d'interprétation formelle dont il puisse utilement se prévaloir sur le fondement de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales, et ne peuvent en tout état de cause être invoquées de façon opérante sur le fondement de l'article 1er du décret du 28 novembre 1983 ; que c'est en vain qu'il se prévaut de l'article 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme, lequel n'est pas applicable aux procédures administratives ;
Considérant que la prescription courant contre l'année 1980 ayant été régulièrement interrompue, quels qu'aient été les motifs fondant les redressements notifiés, par la notification du 20 décembre 1984, l'administration était en droit de substituer, par une nouvelle notification en date du 15 juillet 1985, l'évaluation forfaitaire prévue à l'article 168 du code général des impôts aux redressements catégoriels initialement envisagés, dans la limite du montant des redressements notifiés ; que la circonstance que l'impôt sur le revenu de 1979 était prescrit, ne faisait pas obstacle à ce que ladite année fût retenue pour l'appréciation de la disproportion marquée prévue par le 2 bis suscité dudit article 168 ; que le service n'a commis aucune irrégularité en adressant simultanément au contribuable, le 15 juillet 1985, ladite notification, laquelle indiquait avec précision les bases d'imposition, et le formulaire n° 2180 lui communiquant le détail des éléments de calcul des sommes forfaitaires ;
En ce qui concerne les revenus imposés :
Considérant qu'il résulte des termes mêmes des dispositions précitées que l'administration devait, ainsi qu'elle l'a finalement fait, dès lors qu'il existait des éléments le permettant, déterminer par voie de comparaison la valeur locative de la résidence principale de M. BERDUGO, et non point par référence au loyer payé pour le même immeuble par ce dernier lorsqu'il ne l'a plus occupé qu'à titre de locataire à compter de 1984 ; que, cependant, M. BERDUGO fournit à cet égard les éléments de comparaison constitués par trois appartements situés dans le même immeuble que le sien à un étage plus élevé d'où il ressort une valeur locative de 122.020 F pour 1983 ; que la circonstance que ces appartements sont de superficie moindre que le sien n'établit pas que le prix de la location au m2 en serait inférieur ; que, nonobstant le fait que ces appartements plus petits n'aient, assez naturellement de ce fait même, pas le même nombre de salles d'eau que le sien, M. BERDUGO doit donc être regardé comme justifiant que la valeur locative qu'il propose pour sa résidence principale procède d'une meilleure approximation que celle retenue par le service à partir de sept appartements certes de superficie comparable mais situés dans d'autres immeubles que le sien ;

Considérant que l'administration n'ayant trouvé aucune propriété comparable louée dans les environs de la résidence secondaire du contribuable située à Savigny sur Clairis, ce que ce dernier, qui au demeurant ne propose lui-même pas de termes de comparaison, ne conteste pas sérieusement, elle devait, par application des dispositions précitées, procéder à son évaluation par voie d'appréciation directe ; qu'elle a pu, ce faisant, refuser de se référer au loyer réclamé par le requérant lors de sa location à compter d'une date postérieure au début de la vérification de l'immeuble en question ; que le requérant ne démontre pas l'exagération des valeurs locatives retenues par le service en appliquant à des valeurs vénales, au demeurant très proches de celles avancées par lui dans sa demande introductive d'instance devant le tribunal administratif, un taux de rentabilité de 5,5 % ; que s'il affirme, en effet, que cette propriété n'étant susceptible d'être louée, à cause de sa situation isolée dans un département peu en vogue, que lors de deux ou trois mois d'été, ledit taux de rentabilité ne saurait excéder 3 %, il est constant que la location susévoquée qu'il a consentie à compter du 1er octobre 1984 a été une location annuelle, selon bail conclu pour six ans ; qu'il n'établit pas davantage avoir fait un usage partiellement professionnel de cette propriété ;
Considérant, en revanche, s'agissant de la résidence secondaire de Crans-sur-Sierre (Suisse), qu'en admettant, dès lors que M. BERDUGO n'en propose pas davantage lui-même, que des éléments de comparaison pertinents n'aient pu être trouvés, la valeur locative de cet immeuble, telle qu'arrêtée par le requérant, à partir du loyer retiré de sa location à compter du 1er janvier 1984, donc d'une date de six mois antérieure au début de la vérification, à 14.000 F en 1979, 16.733 F en 1980, 19.000 F en 1981, 21.133 F en 1982 et 23.267 F en 1983, montants contre lesquels l'administration n'articule aucune critique sérieuse, doit être regardée comme résultant d'une méthode d'appréciation plus précise que celle adoptée par le service par application au prix d'achat de 1970 des coefficients d'actualisation et d'un taux de rentabilité habituellement utilisés en France ;
Considérant que M. BERDUGO ne justifie pas, y compris par les pièces produites à cet égard au dossier, que son employée de maison qu'il logeait dans une chambre de service de l'immeuble abritant sa résidence principale ne travaillait, comme il le soutient, qu'à temps partiel ; qu'en toute hypothèse, la circonstance, à la supposer même établie, que ladite employée eut en réalité travaillé à temps partiel, serait demeurée sans incidence sur le droit légal du service à la retenir, dès lors que M. BERDUGO n'évoque pas la doctrine administrative prise pour l'application du barème prévu à l'article 168 dans sa rédaction applicable, ce qu'il ne peut être regardé comme faisant implicitement ;

Considérant que compte tenu des montants des bases susceptibles d'être imposées résultant de ce qui précède, l'administration n'était pas fondée à imposer M. BERDUGO par application de l'article 168 du code général des impôts au titre des années 1980, 1981 et 1982 ;
En ce qui concerne les revenus déclarés au titre de l'année 1983 :
Considérant, d'une part, que le revenu déclaré qui doit être comparé au train de vie pour l'application des dispositions précitées de l'article 168 du code, s'entend du revenu net, c'est-à-dire, dans la catégorie des traitements et salaires, du revenu obtenu après application de la déduction de la dotation forfaitaire représentative des frais professionnels, ou des frais professionnels déduits, et avant l'application de l'abattement de 20 % prévu à l'article 158-5 du même code ;
Considérant, d'autre part, que si M. BERDUGO revendique l'inclusion dans les revenus déclarés au titre de l'année 1983, à comparer au train de vie, d'allocations familiales, d'intérêts de compte courant soumis à un prélèvement libératoire de l'impôt sur le revenu et de revenus de valeurs mobilières exonérées pour un montant total de 25.798 F, en toute hypothèse, compte tenu de l'écart persistant entre les bases forfaitaires et les revenus nets augmentés à due concurrence, majorés d'un tiers, les dispositions de l'article 168 dans leur rédaction applicable n'en demeureraient pas moins applicables à l'année 1983 ;
Article 1er : M. BERDUGO est déchargé des compléments d'impôt sur le revenu et pénalités y afférentes, auxquels il a été assujetti au titre des années 1980, 1981 et 1982.
Article 2 : Le jugement n° 90-01240/1 en date du 22 juin 1993 du tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er ci-dessus.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. BERDUGO est rejeté.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 94PA00601
Date de la décision : 25/10/1995
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-02-03-05 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES - IMPOT SUR LE REVENU - DETERMINATION DU REVENU IMPOSABLE - EVALUATION FORFAITAIRE DU REVENU


Références :

CGI 168, 158
CGI Livre des procédures fiscales L80 A
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R200
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 6-1
Décret 83-1025 du 28 novembre 1983 art. 1
Loi 86-1317 du 30 décembre 1986 art. 82


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. GIRO
Rapporteur public ?: Mme BRIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1995-10-25;94pa00601 ?
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