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27/01/1995 | FRANCE | N°93PA00458

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2e chambre, 27 janvier 1995, 93PA00458


VU la requête présentée pour M. René Y... demeurant ... par Me X..., avocat ; elle a été enregistrée au greffe de la cour le 6 mai 1993 ; M. Y... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 8904230/1 du 2 juillet 1992 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée auquel il a été assujetti au titre de la période du 1er janvier 1981 au 31 décembre 1983 par avis de mise en recouvrement du 27 février 1986 ;
2°) de lui accorder la décharge demandée ;
3°) de condamner l'Etat

à lui verser une somme de 5.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribu...

VU la requête présentée pour M. René Y... demeurant ... par Me X..., avocat ; elle a été enregistrée au greffe de la cour le 6 mai 1993 ; M. Y... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 8904230/1 du 2 juillet 1992 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée auquel il a été assujetti au titre de la période du 1er janvier 1981 au 31 décembre 1983 par avis de mise en recouvrement du 27 février 1986 ;
2°) de lui accorder la décharge demandée ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 5.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
4°) d'ordonner à l'administration de produire le rapport de vérification ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 13 janvier 1995 :
- le rapport de M. DUHANT, conseiller,
- les observations de Me X..., avocat, pour M. Y...,
- et les conclusions de Mme BRIN, commissaire du Gouvernement ;

Sur l'étendue du litige :
Considérant que par décision, non datée, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux de Paris Nord a accordé à M. Y... un dégrèvement de 10.526 F, correspondant à la substitution des intérêts de retard aux pénalités de mauvaise foi dont avaient été assorties les compléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti, au titre de la période du 1er janvier 1981 au 31 décembre 1983 ; que dans cette mesure les conclusions de la requête sont devenues sans objet ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête :
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
En ce qui concerne la régularité de l'avis de vérification de comptabilité :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L.47 du livre des procédures fiscales : "Une vérification approfondie de la situation fiscale d'ensemble d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix ..." ;
Considérant que ni ces dispositions ni aucun texte n'obligent l'administration à informer le contribuable, avant la vérification, de la nature des impôts au titre desquels est entreprise la vérification ; qu'ainsi la circonstance que l'avis de vérification adressé le 6 février 1985 à M. Y... exploitant d'un fonds de café-bar-brasserie, qui comportait les mentions prévues par les dispositions susrappelées, ait indiqué que la vérification concernait l'impôt sur les sociétés et non les bénéfices industriels et commerciaux de l'entreprise individuelle du requérant, ce qui du reste ne pouvait raisonnablement l'amener à se méprendre sur ses droits, n'est pas de nature à vicier la procédure d'imposition ;
En ce qui concerne la régularité de la notification de redressements :
Considérant qu'aux termes de l'article R.75-1 du livre des procédures fiscales alors en vigueur : "La décision de recourir à la procédure de rectification d'office prévue à l'article L.75 est prise par un agent ayant au moins le grade d'inspecteur principal qui appose son visa sur la notification mentionnant les bases ou les éléments servant au calcul des impositions, prévue à l'article L.76" ;
Considérant qu'il ressort de l'examen des pièces du dossier que la notification de redressements, adressée au requérant le 25 avril 1985, lui notifiant des redressements de taxe sur la valeur ajoutée selon la procédure de rectification d'office du chiffre d'affaires déclaré, a été visée par un agent ayant le grade de directeur départemental adjoint des impôts, grade hiérarchiquement supérieur à celui d'inspecteur principal ; que, par suite, le moyen, tiré du défaut de visa de la notification de redressement par un supérieur hiérarchique du vérificateur, manque en fait ;
En ce qui concerne le recours à la rectification d'office du chiffre d'affaires :

Considérant qu'aux termes de l'article L.75 du livre des procédures fiscales alors en vigueur : "Les bénéfices ou éléments qui servent au calcul des taxes sur le chiffre d'affaires déclarés par les contribuables peuvent être rectifiés d'office dans les cas suivants : ...c) lorsque l'absence de pièces justificatives prive la comptabilité ou les documents en tenant lieu de toute valeur probante ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'au cours des années en litige les recettes du bar-café-brasserie exploité par M. Y... ont été enregistrées globalement en fin de journée sans être assorties de pièces justificatives, telles que bandes enregistreuses de caisse ou doubles des notes des clients ; que si le requérant soutient qu'une caisse enregistrait les recettes de la brasserie, il n'a pas pu présenter les bandes correspondantes au vérificateur ; que de même s'il invoque les dispositions du 3 de l'article 286 du code général des impôts qui prévoient que peuvent être inscrites globalement en fin de journée les recettes au comptant d'un montant unitaire inférieur à un plafond de 200 F, ces dispositions n'exonèrent pas le contribuable de l'obligation de produire des justifications de nature à établir la consistance des recettes ainsi globalisées ; que, par suite, le requérant ne peut soutenir que ses recettes comptabilisées étaient justifiées ; que cette anomalie justifiait à elle seule le rejet de la comptabilité et le recours à la procédure de rectification d'office du chiffre d'affaires déclaré ; qu'il suit de là que la commission départementale des impôts n'avait pas à être saisie ; qu'enfin le moyen tiré d'une confusion de procédures n'est pas assorti de précisions de nature à permettre d'en apprécier la pertinence ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Considérant qu'aux termes de l'article L.193 du livre des procédures fiscales : "Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition" ;
Considérant, en premier lieu, que l'activité de "tabac-tabletterie-jeux" n'a fait l'objet de redressements qu'en ce qui concerne les recettes produites par les appareils de jeux ; que si M. Y... soutient que la différence entre les recettes déclarées et celles constatées par le vérificateur, 990 F en 1982 et 1.770 F en 1983, s'explique par les charges déduites par le propriétaire des appareils, il ne produit aucune justification de ces charges ; que, par suite, les redressements notifiés ne peuvent qu'être maintenus ;

Considérant, en second lieu, que le requérant, qui ne peut se prévaloir de sa comptabilité qui, comme il a été indiqué ci-dessus n'est pas probante, critique la méthode de reconstitution de son chiffre d'affaires, mise en oeuvre par le vérificateur ; que, s'il soutient, tout d'abord, qu'il n'a pas eu connaissance des détails des calculs conduisant aux coefficients de marge brute des recettes des "liquides", il résulte de l'instruction que la notification de redressements du 25 avril 1985 était accompagnée d'annexes précisant, pour chacune des années en cause, le détail des calculs qui ont abouti aux coefficients de "4,39" pour 1981 et 1982 et de "4,42" pour 1983 ; que le requérant, qui n'allègue pas ne pas avoir reçu lesdites annexes, ne peut soutenir valablement qu'il n'a pas eu connaissance des détails de la méthode de reconstitution ; que de même, si M. Y... reproche au tribunal administratif d'avoir admis l'utilisation d'un coefficient de marge brute unique pour la reconstitution du chiffre d'affaires des trois années vérifiées, il résulte également de l'instruction que si les calculs ont abouti au même coefficient pour les "liquides" en 1981 et 1982, ils ont permis de fixer un coefficient différent pour 1983 ; qu'à partir desdits coefficients le calcul des recettes "liquides" a été établi par leur application aux achats revendus, lesquelless ont servi de base pour la détermination des recettes "solides" calculées en pourcentage des achats totaux, lesquels ont été évalués à 64 % en 1981, 68 % en 1982 et 78 % en 1983 ; qu'ainsi, le requérant ne peut soutenir qu'un seul coefficient de marge brute a été utilisé conférant en cela un caractère excessivement sommaire à la méthode de reconstitution ;
Considérant, enfin, que si M. Y... propose une méthode de reconstitution de son chiffre d'affaires, il n'apporte aucune justification des éléments de ladite méthode ; qu'en particulier ne peuvent être retenus les coefficients de marge brute utilisés, la circonstance qu'ils ont été retenus par l'administration fiscale au cours de vérifications effectuées chez des clients de son comptable étant inopérante à son égard ; que de même, la méthode proposée ne peut être regardée comme plus précise que celle du vérificateur pour la seule raison qu'elle aboutit à un chiffre d'affaires reconstitué proche de celui déclaré ; que, par ailleurs, la reconstitution des recettes de la vente du café et de la bière établie à partir de données ressortant, selon le requérant, de monographies professionnelles, que d'ailleurs il ne produit pas, ne peut être retenue ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le requérant n'apporte pas la preuve qui lui incombe de l'exagération des bases d'imposition retenues par l'administration ;
Sur les conclusions relatives à la communication du rapport de vérification :
Considérant qu'en toute hypothèse la production du rapport de vérification n'apparaît pas en l'espèce nécessaire à la solution du litige ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. Y... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti, au titre de la période du 1er janvier 1981 au 31 décembre 1993 ;
Sur l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que l'article L.8-1 précité dispose : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens" ; qu'il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce de faire application desdites dispositions au bénéfice de M. Y... ;
Article 1er : A concurrence de la somme de 10.526 F dont le dégrèvement a été prononcé, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. Y..., devenues, dans cette mesure, sans objet.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 93PA00458
Date de la décision : 27/01/1995
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-02-01-06-01-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - BENEFICE REEL - RECTIFICATION ET TAXATION D'OFFICE


Références :

CGI Livre des procédures fiscales L47, R75-1, L75
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. DUHANT
Rapporteur public ?: Mme BRIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1995-01-27;93pa00458 ?
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