Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 16 septembre 1993 sous le n° 93PA01072, présentée pour la société Editor Tennog dont le siège social est ... par Me Lemonnier, avocat à la cour ; la société Editor Tennog demande à la cour d'annuler le jugement n° 9001333 du 12 mars 1993 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à ce que la commune de Houilles soit condamnée à lui verser une indemnité de 681.264 F en réparation des préjudices qu'elle a subis à la suite de la rupture du contrat qu'elle avait passé le 2 février 1973 avec la commune pour l'édition du bulletin municipal officiel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 27 septembre 1994 :
- le rapport de M. Jannin, président-rapporteur,
- les observations de Me Lemonnier, avocat à la cour, pour la société Editor Tennog,
- et les conclusions de M. Paitre, commissaire du gouvernement ;
Sur la responsabilité de la commune de Houilles à raison de la résiliation du contrat passé avec la société à responsabilité limitée Editor Tennog :
Considérant que l'article 279 du code des marchés publics dispose que : "Les marchés des collectivités et établissements énumérés à l'article 249 donnent lieu à adjudication ou à appel d'offres sauf exceptions prévues aux articles 308 à 312 ter, 321 et 375" ; qu'aux termes de l'article 309 du même code : "Les collectivités locales et leurs établissements publics peuvent conclure des marchés négociés pour des travaux, fournitures ou services dont la valeur n'excède pas, pour le montant total de l'opération, des seuils fixés, pour chaque catégorie, par un arrêté conjoint du ministre de l'économie et des finances et des ministres de tutelle" ; que le montant total de l'opération objet d'un marché, au sens de ces dispositions, est égal au coût global de la prestation intégrant la rémunération du co-contractant ; que lorsque le contrat ne le fixe pas mais confie au prestataire le soin de collecter, à son profit, des ressources publicitaires, il correspond au total du montant prévisible de ces dernières et des sommes éventuellement versées par la collectivité ;
Considérant que la commune de Houilles a confié à la société à responsabilité limitée Editor Tennog l'édition de son bulletin municipal par contrat du 21 février 1973, dont l'article 7 précisait qu'il était conclu pour la durée du mandat municipal en cours, et serait renouvelé par tacite reconduction sauf dénonciation par l'une ou l'autre des parties six mois avant la date d'expiration ; que, par l'effet de cette clause, le contrat s'est trouvé tacitement renouvelé à la suite des différentes élections municipales qui ont eu lieu depuis sa signature, et, en dernier lieu, en 1989 ;
Considérant que, dans son article 3, le contrat tacitement reconduit en 1989, qui a le caractère d'un marché de prestations de service devant être passé conformément, notamment, aux dispositions précitées des articles 279 et 309 du code des marchés publics, autorisait la société à responsabilité limitée Editor Tennog à recueillir, après accord du maire, des "contrats de publicité conformes aux intérêts matériels ou moraux de la publication" ; que la commune de Houilles faisait ainsi abandon au profit de son co-contractant des recettes publicitaires que devait générer l'édition du bulletin durant les six années à venir ; que le montant desdites recettes s'est élevé, pour les trois dernières années de la précédente période d'exécution du contrat, à la somme totale de 965.866,68 F excédant ainsi le seuil de 350.000 F fixé en application des dispositions précitées de l'article 309 du code des marchés publics ; que, dès lors, le marché qui a lié à partir de 1989, par tacite reconduction du marché précédent et donc sans avoir donné lieu à adjudication ou à appel d'offres, la commune de Houilles et la société à responsabilité limitée Editor Tennog était nul et n'a pu faire naître d'obligation à la charge de la commune dont la responsabilité ne peut par suite être recherchée à raison de sa résiliation ; que la société à responsabilité limitée Editor Tennog ne réclame d'indemnité sur aucun autre fondement ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société à responsabilité limitée Editor Tennog n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué du 12 mars 1993, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à ce que la commune de Houilles soit condamnée à lui verser 681.264 F, montant des bénéfices dont elle estime avoir été privée par la résiliation du contrat du 21 février 1973 ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation de sommes non comprises dans les dépens :
Considérant, d'une part, que la société à responsabilité limitée Editor Tennog succombe dans la présente instance ; que sa demande tendant à ce que la commune de Houilles soit condamnée à lui verser une somme au titre des frais irrépétibles qu'elle a exposés doit, en conséquence, être rejetée ;
Considérant, d'autre part, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la société à responsabilité limitée Editor Tennog à payer à la commune de Houilles la somme de 10.000 F ;
Article 1er : La requête de la société à responsabilité limitée Editor Tennog est rejetée.
Article 2 : La société à responsabilité limitée Editor Tennog versera à la commune de Houilles une somme de 10.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.