VU la requête présentée par M. BOSSE demeurant ... ; elle a été enregistrée au greffe de la cour le 28 mars 1991 ; M. BOSSE demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 865686 du 11 octobre 1990 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des compléments d'impôt sur le revenu, des majorations exceptionnelles et des pénalités y afférentes auxquels il a été assujetti au titre des années 1978, 1979, 1980 et 1981 ;
2°) de lui accorder la décharge des impositions contestées maintenues à sa charge ;
3°) de condamner l'administration au versement des intérêts moratoires et au remboursement des frais exposés ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU le décret n° 72-671 du 13 juillet 1972 ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 juin 1994 :
- le rapport de M. LOTOUX, conseiller,
- et les conclusions de Mme de SEGONZAC, commissaire du Gouvernement ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que, dans son mémoire en réplique en date du 27 juin 1990 enregistré au greffe du tribunal administratif de Versailles le 29 juin 1990, M. BOSSE a invoqué un moyen nouveau relatif à la procédure d'imposition et s'est prévalu de circonstances particulières justifiant selon lui que "soit ordonné une expertise de l'ensemble des pièces de banque" ; que le tribunal administratif ne s'étant pas prononcé sur l'expertise sollicitée et ayant rejeté par ailleurs la demande de l'intéressé par des motifs desquels il ne ressort pas clairement qu'il ait entendu écarter cette mesure d'instruction comme étant sans intérêt pour la solution du litige dont il était saisi, son jugement en date du 11 octobre 1990 doit, dès lors, être annulé en tant que, par son article 2 il a rejeté le surplus des conclusions de la demande de M. BOSSE ; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur ces conclusions de la demande présentée par M. BOSSE devant le tribunal administratif ;
Sur les conclusions de la demande :
Considérant qu'aux termes de l'article L.73 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable aux dates auxquelles ont été notifiés les redressements dont procèdent les impositions litigieuses des années 1978, 1979, 1980 et 1981 : "Peuvent être évalués d'office : ... 2°) Le bénéfice imposable des contribuables qui perçoivent des revenus non commerciaux ou des revenus assimilés, quel que soit leur régime d'imposition, lorsque la déclaration annuelle prévue à l'article 97 ou à l'article 101 du code général des impôts n'a pas été déposée dans le délai légal." ;
Considérant que M. BOSSE, qui exerce l'activité de conseil juridique, a fait l'objet, au titre de la période du 1er janvier 1978 au 31 décembre 1981, d'une vérification de comptabilité et d'une vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble ; que les déclarations souscrites par l'intéressé, selon le régime de l'évaluation administrative pour les années 1978, 1979 et 1980 et selon le régime de la déclaration contrôlée pour l'année 1981, sont parvenues au service pour chacune desdites années les 8 juin 1979, 18 août 1980, 22 juillet 1981 et 8 mars 1982 alors que la date limite de dépôt desdites déclarations était respectivement le 1er mars 1979, le 3 mars 1980, le 2 mars 1981 et le 2 mars 1982 ; qu'il s'ensuit qu'en vertu des dispositions précitées, et ainsi que le précisait le vérificateur dans les notifications de redressements du 8 décembre 1982 pour l'année 1978 et du 22 avril 1983, pour les années 1979, 1980 et 1981 M. BOSSE, était, en toute hypothèse, indépendamment du régime d'imposition dont il relevait, en situation d'évaluation d'office de ses bénéfices non commerciaux des années en cause ; que, par suite, et sans qu'y fasse obstacle la circonstance que l'administration ait notifié les redressements opérés au titre des années 1979, 1980 et 1981 en invoquant également la procédure de rectification d'office prévue à l'article L.75 alors en vigueur du livre des procédures fiscales, les moyens invoqués tirés de ce que des irrégularités entacheraient la procédure de vérification, sont, en tout état de cause, sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition ;
Considérant qu'il est constant que M. BOSSE n'a justifié ni lors des opérations de vérification diligentées à son encontre ni davantage au cours de la procédure contentieuse, de la tenue régulière de la comptabilité à laquelle il était astreint en application des dispositions des articles 101 bis ou 99 du code général des impôts ; que l'intéressé, qui a notamment omis de comptabiliser une partie de ses recettes professionnelles, a cependant enregistré les opérations afférentes à son activité exclusive de conseil juridique sur ses différents comptes bancaires qui retracent également ses opérations privées ; que pour évaluer d'office, dans ces conditions, les bénéfices non commerciaux de M. BOSSE, l'administration a retenu au titre des recettes, celles des sommes créditées sur les comptes bancaires dont l'origine a été regardée par elle comme demeurant inexpliquée à la suite des demandes adressées à cette fin à l'intéressé et a déduit des montants des versements de nature professionnelle ainsi déterminés, les dépenses suffisamment justifiées et apparaissant comme nécessitées par l'exercice de la profession ; que M. BOSSE, qui ne conteste pas que ses bénéfices non commerciaux ont été régulièrement arrêtés d'office en application de l'article L.73 précité du livre des procédures fiscales et à qui il appartient, par suite, de démontrer le caractère erroné d'un tel rattachement, ne conteste pas la méthode de reconstitution ainsi suivie par l'administration mais soutient que l'évaluation par le service de ses bénéfices non commerciaux est exagérée dès lors que l'analyse qu'il propose de ses opérations bancaires confirme l'exacti-tude de ses déclarations ; qu'à cet égard il sollicite une expertise de l'ensemble des pièces de banque utilisées par lui pour établir les tableaux annexés à sa demande ;
Considérant que si, à l'appui de sa réclamation initiale dont était saisi le tribunal administratif en application de l'article R.199-1 du livre des procédures fiscales, M. BOSSE s'est prévalu de tableaux établis à partir de ses relevés bancaires récapitulant les opérations afférentes à ses recettes professionnelles, ces éléments qui ne sont assortis d'aucun document comptable, d'aucune pièce justifi-cative ni au surplus d'aucune référence utile permettant de les rapprocher des crédits bancaires pris en compte dans les notifications de redressements, sont par eux-mêmes dépourvus de toute valeur probante ; que l'intéressé ne démontre pas davantage par les décomptes chiffrés invérifiables dont il se prévaut que les évaluations faites par l'administration de ses bénéfices imposables aboutissent à des taux de marge très supérieurs à ceux normalement pratiqués dans l'exercice de la profession de conseil juridique ou que certains crédits bancaires pourraient résulter d'opé-rations non professionnelles telles que pertes ou gains aux jeux et remboursements de dépenses effectuées pour le compte de membres de sa famille ou correspondants à des emprunts contractés antérieurement à la période vérifiée ; qu'enfin le requérant ne justifie pas davantage du caractère déductible des dépenses professionnelles qu'il allègue ; que, par suite, les éléments susindiqués invoqués ou produits par M. BOSSE devant le tribunal administratif de Versailles ne sont de nature ni à établir le caractère exagéré des impositions retenues par l'administration pour les années 1978 à 1981, ni à constituer des commencements de preuve pouvant justifier l'utilité d'une expertise visant "l'ensemble des pièces de banque" non versées au dossier utilisées par le requérant ; que ladite expertise présenterait en l'espèce un caractère frustratoire, et ne saurait, dès lors, être ordonnée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la demande présentée par M. BOSSE devant le tri-bunal administratif de Versailles doit être rejetée ;
Sur les autres conclusions de la requête :
Considérant, en premier lieu, que si M. BOSSE demande à la cour de condamner l'administration "au versement des intérêts moratoires sur les sommes acquittées", en tout état de cause, cette demande dont il n'est pas justifié qu'elle concerne un litige né et actuel, n'est pas recevable ;
Considérant, en second lieu, que les conclu-sions non chiffrées présentées par M. BOSSE sur le fondement de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ne peuvent qu'être rejetées ;
Article 1er : L'article 2 du jugement du tribunal administratif de Versailles en date du 11 octobre 1990 est annulé.
Article 2 : Les conclusions de la demande de M. BOSSE présentées devant le tribunal administratif de Versailles et tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu des majorations exceptionnelles et des pénalités y afférentes maintenues à sa charge au titre des années 1978, 1979, 1980 et 1981 et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.