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03/12/1992 | FRANCE | N°89PA01314;91PA00226

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3e chambre, 03 décembre 1992, 89PA01314 et 91PA00226


VU l'ordonnance en date du 10 janvier 1989 par laquelle le président de la 8ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour administrative d'appel de Paris, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée au Conseil d'Etat, pour M. Gérard X... demeurant ..., par la SCP LESOURD et BAUDIN, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ;
VU I) la requête sommaire et le mémoire ampliatif présentés pour M. X... ; ils ont été enregistrés au secrétariat de la section du contentieux du Conseil

d'Etat respectivement le 17 août 1988 et le 16 décembre 1988 et au g...

VU l'ordonnance en date du 10 janvier 1989 par laquelle le président de la 8ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour administrative d'appel de Paris, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée au Conseil d'Etat, pour M. Gérard X... demeurant ..., par la SCP LESOURD et BAUDIN, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ;
VU I) la requête sommaire et le mémoire ampliatif présentés pour M. X... ; ils ont été enregistrés au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat respectivement le 17 août 1988 et le 16 décembre 1988 et au greffe de la cour sous le n° 89PA01314 ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement n° 67698/1 en date du 14 juin 1988 par lequel le tribunal administratif de Paris a partiellement rejeté les conclusions de sa demande tendant à la décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1978 à 1981 et a ordonné une expertise avant de statuer sur le surplus des conclusions ;
2°) de lui accorder la décharge des impositions contestées ;
VU II) sous le n° 91PA00226, la requête sommaire et le mémoire ampliatif présentés pour M. Gérard X... demeurant ..., par la SCP LESOURD et BAUDIN, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; ils ont été enregistrés au greffe de la cour respectivement le 22 mars 1991 et le 22 mai 1991 ; M. X... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 67698/1 en date du 14 décembre 1990 par lequel le tribunal administratif de Paris, statuant après expertise, a partiellement rejeté le surplus des conclusions de sa demande tendant à la décharge des compléments d'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes résultant de la taxation d'office de revenus d'origine indéterminée au titre des années 1978 à 1981 ;
2°) de lui accorder la décharge des impositions et pénalités litigieuses ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
VU la loi n° 89-936 du 29 décembre 1989 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 novembre 1992 :
- le rapport de M. LOTOUX, conseiller,
- les observations de la SCP LESOURD et BAUDIN, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour M. X...,
- et les conclusions de M. MENDRAS, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées de M. X... sont dirigées contre deux jugements, en date des 14 juin 1988 et 14 décembre 1990, par lesquels le tribunal administratif de Paris a statué sur la demande de M. X... tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes auxquelles il a été assujetti au titre des années 1978, 1979, 1980 et 1981 ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt :
Sur l'étendue du litige :
Considérant que par une décision du 5 mai 1992, postérieure à l'introduction des requêtes, le directeur de la direction nationale des vérifications de situations fiscales a prononcé le dégrèvement en droits et pénalités à concurrence d'une somme de 1.166.603 F du complément d'impôt sur le revenu auquel M. X... a été assujetti au titre des années 1978, 1979, 1980 et 1981 ; que, dans cette mesure, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions des requêtes de M. X... ;
Sur la régularité de la vérification appro-fondie de situation fiscale d'ensemble :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 35 de la loi susvisée du 29 décembre 1989 :"II En cas d'examen contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale personnelle visée à l'article L.12 du livre des procédures fiscales ou de vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble mentionnée à l'article 67 de la loi de finances pour 1976, la demande au contribuable des relevés de compte dans l'avis de vérification ou simultanément à l'envoi ou à la remise de cet avis, ainsi que l'envoi ou la remise de toute demande de renseignements en même temps que cet avis, sont sans influence sur la régularité de ces procédures lorsque celles-ci ont été engagées avant la date d'entrée en vigueur de la présente loi" ; que, par suite, le moyen tiré par M. X... de ce que l'administration lui a adressé simultanément le 13 octobre 1982 un avis de vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble et une demande d'information portant sur des éléments de son patrimoine et sur l'identification de ses comptes bancaires et autres est inopérant ;
Considérant, en deuxième lieu, que si la demande formée à l'occasion d'une vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble ne revêt pour le contribuable aucun caractère contraignant, il ne ressort pas des dispositions de l'article L.47 du livre des procédures fiscales applicable en l'espèce, que l'avis de vérification préalablement reçu par le contribuable doive mentionner expressément, sous peine d'irrégularité de la procédure, l'absence pour l'intéressé de toute obligation de fournir les documents demandés ;
Considérant, en troisième lieu, que si le requérant soutient avoir reçu la convocation du 13 octobre 1982 l'invitant à se rendre le 3 novembre suivant au bureau de l'inspecteur muni de ses relevés de comptes bancaires avant qu'il n'ait accusé réception de l'avis de vérification qui lui a été également adressé le 13 octobre 1982, il ne résulte pas de cette seule circonstance, à la supposer établie, que l'intéressé n'aurait pas disposé d'un délai suffisant pour user de la faculté, mentionnée sur ledit avis, de se faire assister d'un conseil de son choix ;

Considérant, en dernier lieu, que les irrégularités pouvant entacher la procédure de taxation d'office prévue par les articles L.16 et L.69 du livre des procédures fiscales sont sans influence sur la régularité de la procédure de vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble ;
Sur les revenus fonciers :
En ce qui concerne la régularité du jugement du 14 juin 1988 :
Considérant qu'il ressort de ce jugement que le tribunal administratif a statué sur les conclusions de la demande de M. X... portant sur les revenus fonciers des années 1978 à 1981 et a répondu de manière suffisante aux moyens qui lui étaient soumis ;
En ce qui concerne la procédure de taxation des revenus fonciers :
Considérant qu'aux termes de l'article 1649 quinquies B du code général des impôts applicable aux impositions contestées : "Les actes ...déguisant soit une réalisation, soit un transfert de bénéfice ou de revenus ...ne sont pas opposables à l'administration, laquelle supporte la charge de la preuve du caractère réel de ces actes devant le juge de l'impôt lorsque, pour restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse, elle s'est abstenue de prendre l'avis du comité consultatif dont la composition est indiquée à l'article 1653 C ..."; que, lorsque l'administration use des pouvoirs qu'elle tient de ce texte dans des conditions telles que la charge de la preuve lui incombe, elle doit, pour pouvoir écarter comme ne lui étant pas opposables certains actes passés par le contribuable, établir que ces actes ont un caractère fictif ou, à défaut, qu'ils n'ont pu être inspirés par aucun motif autre que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, s'il n'avait pas passé ces actes, aurait normalement supportées eu égard à sa situation et à ses activités réelles ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment des constatations de fait qui sont le support nécessaire du dispositif de l'arrêt définitif de la cour d'appel de Paris du 2 décembre 1987 rendu en matière correctionnelle, constatations qui s'imposent au juge administratif, que, par acte du 13 décembre 1971, le requérant a constitué avec son épouse et ses parents une société civile immobilière dite Courcelles-Tilsitt dont l'objet était d'acquérir un immeuble sis ... ; que ladite société a acquis cet immeuble le 14 janvier 1972 pour une somme de 2.250.000 F, financé à concurrence de 1.200.000 F par un prêt de 15 ans au taux de 11 % qui lui a été consenti par la société anonyme Unaco ; que le 15 janvier 1972 le compte courant ouvert au nom de M. X... dans les écritures de cette dernière société a été crédité de la même somme de 1.200.000 F ; qu'enfin, par acte sous-seing privé du 15 juin 1974, M. X... a acquis les 32 parts de la société civile immobilière, détenues par ses parents ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces faits que le prêt susmentionné doit s'analyser comme ayant été consenti, en fait, par M. X... à lui-même sous couvert des sociétés Courcelles-Tilsitt et Unaco et que ce montage n'a eu d'autre but que de permettre au requérant de déduire de ses revenus fonciers tirés des locations encaissées par la société civile les intérêts versés par cette dernière à raison de la somme de 1.200.000 F ; que, dans ces conditions, et sans qu'y fasse obstacle la circonstance que les mêmes faits aient été par ailleurs pénalement sanctionnés, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe que l'opération litigieuse, initiée par M. X... lequel, au demeurant, ne soutient pas qu'elle ait eu une finalité autre que fiscale, entrait dans le champ d'application des dispositions précitées ; que le redressement contesté ayant été régulièrement opéré sur ce fondement, l'administration était, dès lors, également en droit, par voie de conséquence, de faire application des dispositions de l'article 1732 du code général des impôts prévoyant l'exigibilité de plein droit d'une amende égale au double des impôts réellement exigibles ;
En ce qui concerne le montant des revenus fonciers :
Considérant, d'une part, que la circonstance que le contribuable aurait par ailleurs spontanément acquitté, en application de l'article 125 B du code général des impôts, un prélèvement libératoire d'impôt sur le revenu à raison des intérêts rémunérant ses apports en compte courant dans la société Unaco, est sans influence sur le montant des rehaussements de revenus fonciers passibles de l'impôt sur le revenu dans les conditions du droit commun ;
Considérant, d'autre part, que M. X... ne peut davantage être regardé comme contestant valablement l'évaluation du montant des minorations de ses revenus fonciers en faisant valoir que l'administration aurait formulé durant l'instruction de l'instance pénale diligentée à son encontre des propositions chiffrées inférieures aux bases de taxation dont procèdent les impositions contestées, dès lors que ces éléments sont étrangers au présent litige et, au surplus, n'ont pas été repris dans l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, qui a confirmé, pour 1980 et 1981, les montants retenus par l'administration ;
Sur les frais d'expertise :
Considérant que, par l'effet du dégrèvement susvisé, l'administration a renoncé à la taxation des revenus d'origine indéterminée initialement assignés au requérant ; que l'expertise ordonnée par les premiers juges ayant porté exclusivement sur cette catégorie de revenus, il y a lieu, en conséquence, de mettre à la charge de l'Etat l'intégralité des frais d'un montant de 48.566,10 F afférents à ladite expertise ;
Article 1er : A concurrence de la somme de 1.166.603 F, en ce qui concerne le complément d'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes auxquels M. X... a été assujetti au titre des années 1978, 1979, 1980 et 1981, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. X....
Article 2 : Les frais d'expertise d'un montant de 48.566,10 F sont mis à la charge de l'Etat.
Article 3 : Les jugements du tribunal administratif de Paris en date des 14 juin 1988 et 14 décembre 1990 sont réformés en ce qu'ils ont de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions des requêtes de M. X... est rejeté.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 89PA01314;91PA00226
Date de la décision : 03/12/1992
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - REGLES GENERALES D'ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - ABUS DE DROIT.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - REVENUS FONCIERS ET PLUS-VALUES ASSIMILABLES - REVENUS FONCIERS.


Références :

CGI 1649 quinquies B, 1732, 125 B
CGI Livre des procédures fiscales L47, L16, L69
Loi 89-936 du 29 décembre 1989 art. 35 Finances rectificative pour 1989


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. LOTOUX
Rapporteur public ?: M. MENDRAS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1992-12-03;89pa01314 ?
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