VU la requête présentée par M. Pierre MOUSSALI demeurant ... ; elle a été enregistrée au greffe de la cour le 20 aôut 1990 ; M. MOUSSALI demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 8800928/1 en date du 28 juin 1990 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1979, 1980, 1981 et 1982 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;
3°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement attaqué ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87.1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 juin 1992 : - le rapport de M. LOTOUX, conseiller, - et les conclusions de M. BERNAULT, commissaire du Gouvernement ;
Sur l'étendue du litige :
Considérant que, par une décision en date du 20 janvier 1992, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux chargé de la direction des vérifications de la région d'Ile-de-France Est a accordé à M. MOUSSALI des dégrèvements de 893.508 F en droits et 228.892 F en pénalités au titre de l'impôt sur le revenu des années 1981 et 1982 ; que, dans la limite de ces dégrèvements couvrant l'intégralité de l'imposition contestée au titre desdites années, la requête de M. MOUSSALI est devenue sans objet ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant que M. MOUSSALI soutient que le jugement attaqué n'aurait pas répondu au moyen selon lequel il se prévalait en première instance du bénéfice du paragraphe 6 de la lettre du ministre délégué au budget à l'ambassadeur du Liban à Paris en date du 15 juillet 1986 aménageant un régime d'imposition en faveur des libanais réfugiés en France ; que, toutefois, ce régime ne s'appliquait qu'aux revenus perçus à compter du 1er janvier 1985 ou faisant l'objet de contrôles en cours ; que M. MOUSSALI n'entrait pas dans le domaine d'application de ce texte ; que ce moyen étant inopérant, il ne saurait être fait grief aux premiers juges de n'y avoir pas explicitement répondu ;
Sur la procédure d'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article L.66 du livre des procédures fiscales : "Sont taxés d'office : 1° à l'impôt sur le revenu, les contribuables qui n'ont pas déposé dans le délai légal la déclaration d'ensemble de leurs revenus..." ;
Considérant qu'il est constant que l'administration a adressé à M. MOUSSALI le 25 janvier 1983 un avis de vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble portant, notamment, sur les années 1979 et 1980 et les 3 février et 8 mars 1983 des mises en demeure de souscrire la déclaration des revenus de chacune desdites années ; que le requérant n'établit, ni d'ailleurs n'allègue, que le vérificateur ait effectué préalablement à l'envoi de ces mises en demeure des démarches tendant à recueillir auprès de lui ou de tiers des informations ou des documents pour les besoins de la vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble annoncée ; qu'ainsi la situation de taxation d'office dans laquelle s'est trouvé M. MOUSSALI, faute d'avoir souscrit les déclarations de revenu global des années litigieuses, n'a pas été révélée à l'administration par ladite vérification ; que, par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de cette vérification est inopérant ;
Considérant qu'il appartient à M. MOUSSALI, qui a été régulièrement taxé d'office à l'impôt sur le revenu au titre des années 1979 et 1980 en application des dispositions précitées de l'article L.66-1 du livre des procédures fiscales, d'apporter la preuve de l'exagération des revenus catégoriels qui lui ont été assignés au titre de chacune desdites années ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
En ce qui concerne les revenus distribués par la société à responsabilité limitée Hauteville diffusion :
Au titre de l'année 1979 :
Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 109 du code général des impôts : "Sont considérés comme revenus distribués... 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices" ;
Considérant, d'une part, qu'il résulte des dispositions précitées que l'imposition comme revenus distribués des sommes mises à la disposition des associés et non prélevées sur les bénéfices est indépendante de tout redressement conduit à l'égard de la société ; qu'il s'ensuit que si l'administration est tenue d'établir qu'en l'espèce la société Hauteville diffusion a effectivement mis à la disposition de son associé, M. MOUSSALI, la somme contestée de 197.283,38 F en revanche, et contrairement à ce que soutient ce dernier, elle n'a pas à justifier, sur ce fondement, que ladite somme a le caractère d'un bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés au nom de cette personne morale ;
Considérant, d'autre part, que M. MOUSSALI, qui ne conteste pas que le compte n° 22070000317.26 ouvert à son nom à la Banque européenne pour le Moyen Orient a été crédité en mai 1979 d'une somme de 197.283,38 F, soutient que cette somme correspond à des intérêts versés par la société Hauteville diffusion au profit de la société libanaise Pierre Moussali X... ; que, s'il fait état d'un ordre de versement en date du 23 avril 1979 par lequel la société Hauteville diffusion a demandé à cette banque de créditer le compte de Pierre Moussali X... de la somme litigieuse, il n'établit ni que le compte sur lequel a été enregistré l'opération de crédit a été ouvert à son nom en qualité de représentant de la société libanaise, ni que la somme en cause a donné lieu à un transfert effectif au profit de ladite société ; que, dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme démontrant que la société Hauteville diffusion a effectivement mis à la disposition de son associé la somme de 197.283,38 F ; qu'ainsi, ces revenus distribués au sens du 2° du 1 de l'article 109 du code ont été à bon droit compris dans le revenu imposable de M. MOUSSALI, au titre de l'année 1979, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;
Au titre de l'année 1980 :
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'au titre de 1980 la société Hauteville diffusion a comptabilisé dans ses charges des commissions facturées par la société suisse Jassica, pour un montant de 110.069 F ; que la société n'ayant fourni aucune preuve de la réalité des prestations qu'elle aurait obtenu en contrepartie des commissions litigieuses l'administration a pu, à bon droit, les réintégrer dans les bases de l'impôt sur les sociétés et considérer que le montant de ce rehaussement des bénéfices imposables de la société constituait un revenu distribué en application de l'article 109.1.1° du code général des impôts ; que par une notification de redressement du 5 août 1983 l'administration a invité la société Hauteville diffusion à lui faire connaître dans un délai de trente jours les noms et adresses du ou des bénéficiaires de ces distributions ; que M. MOUSSALI, qui a exprimé son refus d'accepter les redressements découlant de leur rattachement à ses revenus globaux, conteste la validité de sa désignation en faisant valoir qu'elle est intervenue tardivement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 117 du code général des impôts applicable en l'espèce : "Au cas où la masse des revenus distribués excède le montant total des distributions tel qu'il résulte des déclarations de la personne morale visée à l'article 116, celle-ci est invitée à fournir à l'administration dans un délai de trente jours, toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires de l'excédent de distribution. En cas de refus ou à défaut de réponse dans ce délai, les sommes correspondantes donnent lieu à l'application de la pénalité prévue à l'article 1763 A" ;
Considérant, d'une part, que si l'administration, en vertu de ces dispositions est en droit, en l'absence de réponse de la société dans le délai de trente jours qui lui est imparti, de faire application à son encontre de la pénalité prévue à l'article 1763 A, toutefois, ni ces dispositions, ni aucune autre à caractère législatif ou réglementaire, ne font obstacle à ce qu'elle puisse régulièrement imposer les revenus réputés distribués au nom du bénéficiaire expressément désigné par la société postérieurement à l'expiration du délai de trente jours ; qu'ainsi, dès lors qu'il s'est désigné lui-même, le 9 novembre 1983 ; en sa qualité de gérant de la société Hauteville diffusion comme le bénéficiaire des distributions litigieuses, M. MOUSSALI n'est pas fondé à soutenir que l'administration ne pouvait légalement lui notifier les redressements en découlant en vue de son imposition personnelle ;
Considérant, enfin, que M. MOUSSALI, ne fournit aucun élément de nature à justifier que les commissions d'où procèdent les distributions en litige seraient la contrepartie de prestations réellement fournies à la société Jassica ; que, dès lors, il n'apporte pas la preuve qui lui incombe de l'exagération des revenus taxés d'office à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 1980 dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers à concurrence de la somme de 110.069 F ; qu'il s'ensuit qu'il n'est pas fondé à demander la décharge du supplément d'impôt y afférent ;
En ce qui concerne les revenus d'origine indéterminée :
Au titre de l'année 1979 :
Considérant que, si M. MOUSSALI soutient que la somme de 535.000 F portée le 28 décembre 1979 au crédit du compte courant ouvert à son nom dans la société Piergil résulte du remboursement d'un prêt qu'il aurait consenti à son frère en janvier 1975, il ne justifie, par les documents qu'il produit, ni de l'existence de ce prêt ni de la réalité du remboursement qu'il allègue ; qu'il n'établit pas davantage que les deux virements bancaires de 50.000 F et 11.195 F correspondraient, ainsi qu'il l'allègue, à des réglements d'un client de la société libanaise Pierre Moussali furs ; qu'ainsi les sommes litigieuses ont été à bon droit comprises dans son revenu imposable ;
Au titre de l'année 1980 :
Considérant, d'une part, que si M. MOUSSALI soutient qu'une remise de chèque d'un montant de 53.000 F portée au crédit de son compte UBP représente le remboursement de l'achat de parts de la société civile immobilière Génépie pour le compte de la société Universal fourrures il ne produit sur ce point aucun justificatif probant ; qu'en outre, il n'établit pas davantage, par des attestations établies tardivement, que les autres crédits litigieux figurant sur ce même compte bancaire représentent des prêts familiaux à concurrence de 38.408 F ou un prêt d'un résident libanais à concurrence de 7.000 F ;
Considérant, d'autre part, que les attestations produites pour justifier la réalité de prêts auxquels correspondaient les sommes de 36.720 F et 470.257,50 F inscrites au compte courant de M. MOUSSALI dans la société Hauteville diffusion, ne présentent pas davantage de caractère probant en l'absence de date certaine et de précision sur les modalités des prêts ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. MOUSSALI n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions qui n'ont pas fait l'objet du dégrèvement précité ;
Article 1er : A concurrence de la somme de 893.508 F en droits et 228.892 F en pénalités, en ce qui concerne le complément d'impôt sur le revenu auquel M. MOUSSALI a été assujetti au titre des années 1981 et 1982, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. MOUSSALI,
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. MOUSSALI est rejeté.