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16/07/1991 | FRANCE | N°90PA00034

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 16 juillet 1991, 90PA00034


VU la requête et le mémoire complémentaire présentés pour Mme Odile Y... agissant tant en son nom personnel qu'au nom de ses enfants mineurs Alexandre, Hélène et René et pour Melle Marina Y... demeurant l'une et l'autre ... par la SCP VIER et BARTHELEMY, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; ils ont été enregistrés au greffe de la cour administrative d'appel de Paris respectivement les 12 janvier 1990 et 13 avril 1990 ; Mme et Mlle Y... demandent à la cour administrative d'appel de Paris :
1°) d'annuler le jugement n° 883136 du 31 octobre 1989 par lequel le tr

ibunal administratif de Versailles a rejeté leur requête tendant ...

VU la requête et le mémoire complémentaire présentés pour Mme Odile Y... agissant tant en son nom personnel qu'au nom de ses enfants mineurs Alexandre, Hélène et René et pour Melle Marina Y... demeurant l'une et l'autre ... par la SCP VIER et BARTHELEMY, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; ils ont été enregistrés au greffe de la cour administrative d'appel de Paris respectivement les 12 janvier 1990 et 13 avril 1990 ; Mme et Mlle Y... demandent à la cour administrative d'appel de Paris :
1°) d'annuler le jugement n° 883136 du 31 octobre 1989 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté leur requête tendant à l'annulation de la décision en date du 22 février 1988 par laquelle le ministre de l'éducation nationale a rejeté la demande présentée par Mme Y... en vue d'obtenir le paiement d'une indemnité en réparation du préjudice causé par le refus opposé à sa demande de pension de reversion à la suite du décès de son mari et tendant, en outre, à la condamnation de l'Etat à leur verser une somme correspondant à la différence entre le montant des prestations à percevoir au titre du régime général de la Sécurité sociale et le montant des prestations qu'elles devraient percevoir au titre du régime des pensions et prestations sociales de la fonction publique ;
2°) de condamner l'Etat à leur verser l'indemnité sollicitée avec les intérêts de droit et la capitalisation desdits intérêts ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
VU le décret n° 84-431 du 6 juin 1984 ;
VU le décret n° 85-733 du 17 juillet 1985 ;
VU le décret n°49-1239 du 13 septembre 1949 ;
VU le code des pensions civiles et militaires de retraites ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 2 juillet 1991 :
- le rapport de Mme TRICOT, conseiller,
- les observations de la SCP VIER, BARTHELEMY, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour Mme Odile Y... et Melle Marina Y...,
- et les conclusions de Mme SICHLER, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement du tribunal administratif :
Considérant que, contrairement à ce que soutiennent les requérantes, le jugement du tribunal administratif de Versailles du 31 octobre 1989 a répondu à l'ensemble des moyens invoqués en première instance ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué n'est pas suffisamment motivé doit être écarté ;
Sur la compétence de l'auteur de l'acte :
Considérant en tout état de cause qu'il résulte de l'instruction que, par arrêté en date du 25 janvier 1988 publié au Journal officiel de la République française le 31 janvier 1988, M. X..., signataire de la décision litigieuse du 22 février 1988, a reçu du ministre de l'éducation nationale délégation de signature dans la matière faisant l'objet du litige ; que dès lors, Mme et Melle Y... ne sont pas fondées à soutenir que l'acte litigieux a été signé par une autorité incompétente ;
Sur la responsabilité pour faute ;
Considérant que les requérantes demandent la condamnation de l'Etat à leur verser une indemnité en se fondant sur la faute qu'aurait commise le ministre de l'éducation nationale en imposant à M. Y... une obligation de stage préalablement à sa titularisation en qualité de maître de conférence ;

Considérant qu'aux termes de l'article 32 du décret n° 84-431 du 4 juin 1984 relatif au statut des enseignants chercheurs de l'enseignement supérieur : "Les maîtres de conférences sont nommés en qualité de stagiaires par arrêté du ministre de l'éducation nationale. Après un stage de deux ans, les maîtres de conférences sont soit titularisés, soit maintenus en qualité de stagiaires pour une dernière période d'un an, soit réintégrés dans leur corps d'origine, soit licenciés, par arrêté du ministre de l'éducation nationale" ; qu'aux termes de l'article 10 du décret n° 85-733 du 17 juillet 1985 relatif aux personnels enseignants associés ou invités dans les établissements d'enseignement supérieur et de recherche relevant du ministre de l'éducation nationale : "Jusqu'au 30 septembre 1986, les professeurs associés à temps plein de nationalité française ou étrangère, en fonction à la date de publication du présent décret, qui ont été recrutés en application de la réglementation en vigueur antérieurement à cette dernière date et qui justifient de sept ans d'ancienneté en qualité d'enseignant associé à temps plein à cette même date, peuvent être nommés par voie d'inscription sur une liste d'aptitude soit dans le corps des professeurs des universités, soit dans le corps des maîtres de conférences. Peuvent également être nommés dans ce dernier corps jusqu'au 30 septembre 1986, selon les mêmes modalités, les maîtres assistants associés à temps plein, de nationalité française ou étrangère, et qui remplissent les mêmes conditions que celles définies ci-dessus pour les professeurs associés. Les personnels associés mentionnés aux alinéas 2 et 3 du présent article et qui justifient de trois ans d'ancienneté en qualité d'enseignant associé à temps plein à la date de publication du présent décret peuvent jusqu'au 30 septembre 1986 être nommés dans le corps des professeurs des universités ou dans celui des maîtres de conférences, dans la limite d'un nombre d'emplois fixé par le ministre de l'éducation nationale, et selon les modalités prévues par les articles 27 à 31 et par l'article 48 du décret du 6 juin 1984 susvisé" ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions combinées que les maîtres assistants associés recrutés dans le corps des maîtres de conférences dans les conditions prévues par l'article 10 précité du décret du 17 juillet 1985 pris sur habilitation législative résultant de l'article 77 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 sont nommés, conformément aux dispositions susvisées de l'article 32 du décret du 6 juin 1984 en qualité de stagiaire pour une durée d'au moins deux ans ; que si le décret du 17 juillet 1985 a instauré un régime dérogatoire de recrutement des personnels concernés, il est constant qu'il ne comporte aucune disposition particulière dérogatoire en ce qui concerne l'accès au grade de maître de conférences titulaire permettant d'écarter l'application des dispositions de l'article 32 précité ; que la circonstance que l'article 10 du décret du 17 juillet 1985 mentionne les articles 27 à 31 du décret du 6 juin 1984 relatifs à la procédure à mettre en oeuvre pour procéder au recrutement par voie de concours n'a pas eu pour objet et n'aurait pu avoir pour effet de rendre inapplicables les dispositions de l'article 32 du même décret qui se rapportent aux conditions de nomination des maîtres de conférences et qui prévoient expressément l'accomplissement d'un stage ; que si les assistants associés sont immédiatement nommés en qualité d'assistants titulaires par voie d'inscription sur une liste d'aptitude, en application des dispositions dérogatoires de l'article 11 du décret du 17 juillet 1985, cette circonstance est sans influence sur la situation faite aux maîtres de conférences nommés en application de l'article 10 du même décret ; que si les requérantes se prévalent de la discrimination créée par cette situation entre les enseignants associés nommés soit maîtres de conférences et soumis de ce fait à une obligation de stage, soit professeurs ou assistants et non soumis à l'obligation de stage, cette circonstance ne peut être utilement invoquée, dès lors qu'il s'agit de l'accès à des corps de fonctionnaires de l'Etat, dont les membres n'auront ni les mêmes fonctions, ni les mêmes responsabilités et sont soumis à des statuts comme à des conditions d'accès différents ;
Considérant qu'il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire que le recrutement dans un corps de fonctionnaires de l'Etat par voie de liste d'aptitude implique nécessairement la titularisation immédiate des intéressés quelle qu'ait pu être la durée de leurs services antérieurs ; que les requérantes ne sauraient ainsi se prévaloir utilement d'une erreur manifeste d'appréciation du gouvernement en ce qui concerne l'obligation de stage imposée aux maîtres de conférences ;
Considérant que la circulaire du ministre de l'éducation nationale du 3 janvier 1986 s'est bornée, en ce qui concerne l'obligation de stage contestée, à exposer le régime prévu par les dispositions légales et réglementaires en vigueur ; que, par suite les requérantes ne sont pas fondées à exciper de l'illégalité de ladite circulaire ;

Considérant, dans ces conditions, que les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que l'arrêté en date du 29 septembre 1986 par lequel le ministre de l'éducation nationale a nommé M. Y... en qualité de maître de conférences stagiaire à compter du 25 septembre 1986 est entaché d'illégalité ; que M. Y... exerçait ses fonctions en qualité de stagiaire , lors de son décès le 11 juin 1987, et qu'il ne pouvait dès lors, en vertu de l'article 7 du décret n° 49-1239 du 13 septembre 1949 susvisé, être affilié au régime de retraite des fonctionnaires de l'Etat ; que, par suite, Mme Y... et les enfants du couple ne pouvaient bénéficier d'un droit à pension de reversion ; qu'ainsi, par sa décision du 22 février 1988, le ministre de l'éducation nationale a pu, sans commettre d'illégalité, refuser le versement d'une indemnité en réparation du refus opposé à la demande de pension de reversion présentée par Mme Y... ;
Sur la demande d'indemnisation fondée sur la responsabilité sans faute de l'Etat :
Considérant que les requérantes demandent que l'Etat soit condamné à leur verser une indemnité, en l'absence de faute, eu égard au caractère anormal et spécial du préjudice subi ; qu'il leur appartient d'établir le caractère de spécialité et de gravité de ce préjudice ;
Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que M. Y... qui n'avait jamais eu la qualité de fonctionnaire titulaire, ne justifiait d'aucun droit à être nommé maître de conférences titulaire au regard des dispositions législatives et réglementaires en vigueur lors de sa nomination en qualité de maître de conférences stagiaire ; que, dès lors, M. Y... auquel le décret du 17 juillet 1985 offrait la possibilité de devenir maître de conférences titulaire à l'issue d'une période de stage obligatoire ne saurait se prévaloir, et par là même ses ayants-droit, d'un préjudice présentant un caractère de spécialité et de gravité susceptible d'ouvrir droit à réparation ; que ce droit ne saurait davantage résulter de dispositions réglementaires intervenues postérieurement à l'époque des faits ; que, dès lors les requérantes ne sont pas fondées à soutenir, en invoquant le principe de l'égalité des citoyens devant les charges publiques, que la responsabilité de l'Etat est engagée à leur égard, en l'absence de faute ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme Odile Y... et Melle Marina Y... ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté leurs conclusions tendant à obtenir la condamnation du ministre de l'éducation nationale à leur verser une indemnité ;
Article 1er : La requête de Mme Odile Y... et de Melle Marina Y... est rejetée.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Numéro d'arrêt : 90PA00034
Date de la décision : 16/07/1991
Type d'affaire : Administrative

Analyses

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITE - RESPONSABILITE ET ILLEGALITE - ABSENCE D'ILLEGALITE ET DE RESPONSABILITE.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - PREJUDICE - CARACTERE SPECIAL ET ANORMAL DU PREJUDICE - ABSENCE DE CARACTERE SPECIAL.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - PREJUDICE - CARACTERE SPECIAL ET ANORMAL DU PREJUDICE - ABSENCE DE CARACTERE ANORMAL.


Références :

Arrêté du 29 septembre 1986
Arrêté du 25 janvier 1988
Circulaire du 03 janvier 1986
Décret 49-1239 du 13 septembre 1949
Décret 84-431 du 04 juin 1984 art. 32
Décret 84-431 du 06 juin 1984 art. 32
Décret 85-733 du 17 juillet 1985 art. 10
Loi 84-16 du 11 janvier 1984 art. 77


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: TRICOT
Rapporteur public ?: SICHLER

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1991-07-16;90pa00034 ?
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