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16/07/1991 | FRANCE | N°89PA00397

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 16 juillet 1991, 89PA00397


VU l'ordonnance en date du 1er décembre 1988 par laquelle le président de la 4ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour administrative d'appel de Paris, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée au Conseil d'Etat par le DEPARTEMENT du VAL-DE-MARNE ;
VU la requête et le mémoire complémentaire présentés pour le DEPARTEMENT du VAL-DE-MARNE, représenté par le président du conseil général, par la SCP d'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation LYON-CAEN, FABIANI, LIARD ; il

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VU l'ordonnance en date du 1er décembre 1988 par laquelle le président de la 4ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour administrative d'appel de Paris, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée au Conseil d'Etat par le DEPARTEMENT du VAL-DE-MARNE ;
VU la requête et le mémoire complémentaire présentés pour le DEPARTEMENT du VAL-DE-MARNE, représenté par le président du conseil général, par la SCP d'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation LYON-CAEN, FABIANI, LIARD ; ils ont été enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 21 septembre 1987 et 21 janvier 1988 ; le DEPARTEMENT du VAL-DE-MARNE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement n° 53634-66796/6 du 13 mai 1987 par lequel le tribunal administratif de Paris n'a fait que partiellement droit à ses demandes tendant à la condamnation du cabinet d'architectes "
X...
" et de l'entreprise "Moisant-Laurent-Savey", conjointement et solidairement à supporter le coût des réparations des désordres affectant le foyer "Le Parengon" à Joinville-Le-Pont ;
2°) de condamner le cabinet d'architectes "
X...
" et l'entreprise "Moisant-Laurent-Savey" ainsi que la société "SGE-BTP" venant aux droits de cette entreprise solidairement à lui verser les sommes de 979.052,90 F, 41.663,96 F, 8.798,68 F et 100.000 F avec les intérêts de droit à compter du 26 février 1985 et, plus d'un an s'étant écoulé, d'ordonner la capitalisation desdits intérêts ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code civil ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 2 juillet 1991 :
- le rapport de Mme TRICOT, conseiller,
- les observations de la SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour le DEPARTEMENT du VAL-DE-MARNE, et celles de la SCP MASSE-DESSEN, GEORGES, THOUVENIN, avocat au Conseil d'Etat et la Cour de cassation, pour la société anonyme "SOGEA",
- et les conclusions de Mme SICHLER, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le DEPARTEMENT du VAL-DE-MARNE a confié à M. X..., architecte, par contrat du 3 juin 1973, une mission complète de conception et d'exécution des travaux de remise en état et d'aménagement d'un ensemble de bâtiments dit "Le Parangon" situé ... en vue d'y installer un foyer départemental de l'enfance ; que le département a passé, le 27 juin 1974, un marché tous corps d'état avec l'entreprise "Moisant-Laurent-Savey" ; que, postérieurement à la réception définitive de l'ouvrage prononcée le 14 novembre 1977, des désordres sont apparus ; qu'ils consistaient en une détérioration du revêtement des façades, un descellement des gonds des volets en bois et une fissuration des marches d'un escalier préfabriqué en colimaçon créé en 1975 pour desservir un logement d'accueil situé dans le bâtiment trois ; que le DEPARTEMENT du VAL-DE-MARNE a, sur le fondement de la garantie décennale, présenté une demande tendant à ce que le cabinet d'architectes "
X...
" et l'entreprise "Moisant-Laurent-Savey" soient déclarés solidairement responsables des désordres et soient condamnés à l'indemniser des dommages que lui ont causés lesdits désordres ; que le tribunal administratif a, par jugement du 13 mai 1987, condamné solidairement M. X... et la société "SGE-BTP" venant aux droits de l'entreprise "Sainrapt et Brice", venant elle-même aux droits de l'entreprise "Moisant-Laurent-Savey", à payer au département une somme de 11.385,60 F toutes taxes comprises en réparation des désordres affectant les gonds de volets ; que le tribunal administratif a également condamné la seule société "SGE-BTP" à verser au DEPARTEMENT du VAL-DE-MARNE une somme de 41.320,24 F toutes taxes comprises en réparation des désordres affectant l'escalier ; que le tribunal administratif a décidé d'une part que l'entreprise devait garantir M. X... à hauteur de la moitié de la somme de 11.385,60 F et de 85 % de la somme de 31.784,80 F, d'autre part que M. X... devait garantir la société à hauteur de la moitié de la somme de 11.385,60 F et de 15 % de la somme de 31.784,80 F ; que, par ailleurs, les premiers juges ont écarté la responsabilité de M. X... et de l'entreprise à raison du décollement des peintures extérieures et de la fissuration des enduits de plâtre revêtant une partie de la façade du foyer ainsi que du préjudice esthétique affectant les façades ; que le DEPARTEMENT du VAL-DE-MARNE présente en appel des conclusions, tendant à obtenir, sur le fondement de la garantie décennale, réparation de l'ensemble des désordres affectant le foyer départemental de l'enfance ; que, par voie d'appels incidents et provoqués, M. X... et la société "SOGEA" venant aux droits de la société "SGE-BTP", qui demandent également en défense le rejet de la requête, font appel du jugement du tribunal administratif de Paris du 13 mai 1987 et demandent l'annulation de son article 1er qui les a condamnés solidairement à verser au département une somme de 11.385,60 F correspondant au coût des travaux de scellement des volets ; que la société "SOGEA" demande, en outre, à être garantie par M. X... des condamnations qui seraient mises à sa charge ;
Sur la régularité du jugement :

Considérant que, contrairement à ce que soutient le DEPARTEMENT du VAL-DE-MARNE, le jugement du tribunal administratif de Paris du 13 mai 1987 comporte des visas dans lesquels sont repris les conclusions et les moyens échangés par les parties et répond à l'ensemble des conclusions qui lui ont été présentées ; que, dès lors, le département n'est pas fondé à soutenir que le jugement contesté est entaché d'irrégularité pour défaut d'exposé des conclusions et moyens dans les visas et défaut de réponses à conclusions ;
Sur la responsabilité :
Sur les désordres afférents au décollement des peintures extérieures et à la fissuration des enduits de plâtre sur les façades :
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que les décollements de peintures extérieures et la fissuration des enduits de plâtre sur les façades du foyer ne sont pas à l'origine des pénétrations d'humidité au demeurant ponctuelles constatées à l'intérieur des locaux, lesquelles ont pour causes déterminantes la nature et l'ancienneté des bâtiments ; qu'il ne résulte pas du rapport de l'expert qu'il existe un risque de chute des éléments en plâtre du revêtement extérieur ; qu'ainsi, ces désordres, dont il ne ressort d'aucune pièce du dossier qu'ils ont été par eux-mêmes de nature à compromettre le fonctionnement d'un foyer de l'enfance, quels que soient le coût des réparations et les surfaces concernées, ne sont pas de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination ou à en compromettre la solidité ; qu'ainsi ils n'entrent pas dans le champ d'application de la garantie décennale ; que, dès lors, le DEPARTEMENT du VAL-DE-MARNE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté les conclusions de sa demande tendant à ce que les constructeurs soient condamnés à lui verser une indemnité en réparation des désordres dont s'agit ;
Sur l'indemnité demandée au titre du préjudice esthétique :
Considérant que, pour demander la condamnation des constructeurs à lui verser une indemnité de 100.000 F au titre du préjudice esthétique affectant les façades du foyer départemental de l'enfance, le DEPARTEMENT du VAL-DE-MARNE se fonde sur la dégradation des peintures extérieures et de l'enduit sur les façades ; que, dès lors, qu'ainsi qu'il a été jugé ci-dessus, lesdits désordres ne sont pas susceptibles d'entraîner la mise en jeu de la responsabilité décennale des constructeurs et nonobstant la circonstance que le foyer départemental appartienne à un ensemble architectural inscrit à l'inventaire des monuments historiques, le DEPARTEMENT du VAL-DE-MARNE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'indemnité au titre du préjudice esthétique ;
Sur la date d'évaluation du préjudice indemnisable ;

Considérant que l'évaluation des dommages subis par le DEPARTEMENT du VAL-DE-MARNE du fait des désordres devant être indemnisés par les constructeurs doit être faite à la date où, leur cause ayant pris fin et leur étendue étant connue, il pouvait être procédé aux travaux destinés à les réparer ; que le département ne justifie d'aucune circonstance l'ayant empêché d'accomplir les travaux dont s'agit dès le dépôt du rapport de l'expertise ordonnée par les premiers juges, soit le 9 novembre 1985 ; que c'est par suite à bon droit que le tribunal administratif de Paris a évalué à cette date le coût des travaux dont s'agit ;
Sur les intérêts et leur capitalisation :
Considérant que les intérêts ont été fixés par les premiers juges à compter du 25 février 1985 ; que le DEPARTEMENT du VAL-DE-MARNE a demandé le 21 septembre 1987 la capitalisation des intérêts afférents à l'indemnité que le tribunal administratif de Paris lui a accordée ; qu'à cette date, au cas où le jugement attaqué n'aurait pas encore été exécuté, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande ; que le DEPARTEMENT du VAL-DE-MARNE a renouvelé sa demande de capitalisation des intérêts le 12 janvier 1989 ; que, plus d'une année s'étant écoulée depuis sa dernière demande relative aux intérêts, il y a lieu de faire droit à cette nouvelle demande, sous réserve que le jugement attaqué n'ait pas reçu exécution ;
Sur les appels incidents de M. X... et de la société "SOGEA" :
Considérant qu'il résulte de l'instruction, en particulier du rapport d'expertise, que le descellement des gonds des volets sur les façades où les enduits ont été refaits en 1975 présente le caractère d'un désordre généralisé et oblige à procéder à la dépose desdits volets pour éviter leur chute ; que ce risque de chute dans un foyer départemental de l'enfance en créant un grave danger pour les usagers, rend l'immeuble impropre à sa destination ; que le descellement des gonds de volets, en ce qui concerne les façades dont les enduits ont été refaits en 1975, est imputable à la fois à une erreur de conception et à un défaut d'exécution du fait de leurs conditions de scellement dans du plâtre alors que les gonds auraient dû être scellés dans du ciment solidaire ; que ces deux circonstances sont à l'origine des désordres constatés dans la fixation des volets et sont imputables à M. X... et à la société qui ne sont pas fondés à soutenir, par leurs appels incidents, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a estimé que les désordres affectant les conditions de scellement des volets engageaient leur responsabilité solidaire, sur le fondement de la garantie décennale ;
Sur les conclusions à fin d'appel en garantie présentées par la société "SOGEA" :
Considérant que la société "SOGEA" présente des conclusions tendant à ce que M. X... la garantisse de l'ensemble des condamnations prononcées à son égard par le tribunal administratif ; qu'aucune condamnation nouvelle n'est prononcée par le présent arrêt à l'encontre de la société "SOGEA" et que les premiers juges n'ont pas fait une inexacte appréciation des responsabilités encourues en condamnant M. X... à garantir la société "SOGEA" à hauteur de la moitié de la somme de 11.385,60 F toutes taxes comprises ;
Article 1er : La requête du DEPARTEMENT du VAL-DE-MARNE est rejetée.
Article 2 : Les intérêts afférents à l'indemnité de 52.705,84 F que M. X... et la société "SGE-BTP" ont été condamnés à verser au DEPARTEMENT du VAL-DE-MARNE par jugement du tribunal administratif de Paris en date du 13 mai 1987 et échus le 21 septembre 1987 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts au cas où le jugement du tribunal administratif n'aurait pas reçu exécution ; il est également accordé la capitalisation des intérêts des intérêts échus à la date du 12 janvier 1989, au cas où le jugement attaqué n'aurait pas été exécuté.
Article 3 : Les conclusions présentées par M. X... sont rejetées.
Article 4 : Les conclusions présentées par la société "SOGEA" sont rejetées.


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