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03/10/1989 | FRANCE | N°89PA00314

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 03 octobre 1989, 89PA00314


VU l'ordonnance en date du 1er décembre 1988 par laquelle le président de la 9e sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour administrative d'appel de Paris, en appli-cation de l'article 17 du décret n°88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée au Conseil d'Etat par le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la privatisation, chargé du budget ;
VU, la requête, enregistrée le 20 août 1987 au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le ministre délégué auprès du mi

nistre de l'économie, des finances et de la privatisation ; le ministre de...

VU l'ordonnance en date du 1er décembre 1988 par laquelle le président de la 9e sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour administrative d'appel de Paris, en appli-cation de l'article 17 du décret n°88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée au Conseil d'Etat par le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la privatisation, chargé du budget ;
VU, la requête, enregistrée le 20 août 1987 au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la privatisation ; le ministre demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement n° 145/85, 146/85 et 42/86 du 12 mars 1987 par lequel le tribunal administratif de Basse-Terre a accordé à M. Roland X... la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu ainsi que des pénalités y afférentes auxquelles il a été assujetti au titre des années 1978 et 1979 dans les rôles de la commune de Basse-Terre ;
2°) de décider que M. Roland X... sera rétabli aux rôles à raison de l'intégralité des droits et pénalités qui lui avaient été assignés ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87.1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 19 septembre 1989 :

- le rapport de M. JEAN-ANTOINE, conseiller ;
- et les conclusions de M. BERNAULT, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X... qui exerce la profession de mécanicien a fait l'objet d'un contrôle fiscal portant sur les années 1977 à 1979 ; que par une première notification de redressements du 17 décembre 1980 ses revenus imposables dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux des années 1977, 1978 et 1979 ont été rectifiés par une remise en cause du forfait de l'année 1977 et par une évaluation d'office des bénéfices des années 1978 et 1979 ; que ces redressements ont été acceptés pour les années 1977 et 1978 et qu'en réponse aux observations du redevable présentées le 15 décembre 1980, le service a consenti une réduction de la base imposable de 1979 notifiée par une confirmation de redressement du 24 avril 1981 ; que pour tirer les conséquences de ces redressements au regard du revenu global de M. X..., le vérificateur a adressé à l'intéressé une nouvelle notification le 11 mai 1981 portant sur les mêmes années ; qu'au vu des observations présentées le 13 juin 1981 par le contribuable, les bases notifiées ont été confirmées le 3 juillet 1981 et les rappels d'impôt sur le revenu correspondants ont été mis en recouvrement le 31 août 1981 ; que par une décision du 9 avril 1984 le directeur départemental des services fiscaux a prononcé la décharge de ces impositions en raison d'un vice de forme entachant les avis de mise en recouvrement ; qu'ensuite les bases précédemment notifiées ont été à nouveau imposées par deux avis de mise en recouvrement du 30 juin 1984 à l'exclusion toutefois des rappels de l'année 1977 atteints par la prescription ; que, par jugement du 12 mars 1987, dont le ministre requérant fait appel, le tribunal administratif de Basse-Terre a prononcé l'annulation de ces avis d'imposition portant sur les années 1978 et 1979 ;
Considérant en premier lieu, que, contrairement à ce qu'ont relevé les premiers juges, l'administration n'était pas tenue, après avoir prononcé le dégrèvement des impositions supplémen-taires primitivement établies, de reprendre entière-ment la procédure prescrite par l'article 1649 quinquies A du code général des impôts alors en vigueur, et notamment, d'adresser une nouvelle notification de redressement au contribuable avant la mise en recouvrement des rappels notifiés antérieu-rement selon la procédure susrappelée ;
Considérant en second lieu, que M. X... n'établit pas, en tout état de cause, en produisant au dossier non les originaux mais seulement des copies incomplètes et en partie illisibles des deux avis d'imposition du 30 juin 1984, que ces avis comportaient des omissions qui pourraient les faire regarder comme insuffisamment motivées au regard des prescriptions de l'article 389 de l'annexe II du code général des impôts repris à l'article R 256-1 du livre des procédures fiscales ;
Considérant que, par suite, le ministre requérant est fondé à soutenir que c'est à tort que, par jugement du 12 mars 1987, le tribunal administratif de Basse-Terre a annulé les avis d'imposition du 30 juin 1984 ; qu'il y a lieu de prononcer l'annulation de ce jugement ;

Considérant toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... devant le tribunal administratif de Basse-Terre ;
Sur la prescription :
Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 1966 du code général des impôts alors applicable en matière d'impôts directs : "Les omissions totales ou partielles constatées dans l'assiette ... ainsi que les erreurs commises dans l'établissement des impositions, dans l'application des tarifs ou dans le calcul des cotisations peuvent ... être réparées jusqu'à l'expiration de la quatrième année suivant celle au titre de laquelle l'imposition est due ..." et qu'aux termes du premier alinéa de l'article 1975 du même code : "Les prescriptions sont interrompues par des notifications de redressements" ;
Considérant que l'interruption de la pres-cription reste acquise à l'administration, même dans le cas où, après avoir mis en recouvrement les impositions correspondant au redressement notifié, elle en accorde ultérieurement d'office la décharge ; que, par suite, l'administration est en droit de procéder, dans la limite dudit redressement, à de nouvelles impositions jusqu'à l'expiration du délai de répétition qui a recommencé à courir à compter de la notification ;
Considérant que l'administration a notifié à M. X... le 17 décembre 1980 des redressements de ses bases d'imposition dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ; que cette notification qui, contrairement à ce que soutient le contribuable était suffisamment motivée, a, en vertu de l'article 1975 du code général des impôts, interrompu la prescription quadriennale définie à l'article 1966 ; que cette interruption restait acquise à l'administration alors même qu'après avoir mis en recouvrement les impositions correspondant aux redressements ainsi notifiés, elle en avait accordé la décharge le 9 avril 1984 en raison d'irrégularités commises dans l'établissement des rôles ; que cette décision n'a pu en conséquence supprimer les effets de la notification de redressement à l'égard du délai de prescription ; que l'administration était ensuite en droit de procéder dans la limite de ces redressements, à l'établissement de nouvelles impositions jusqu'à l'expiration du délai de prescription quadriennale qui avait recommencé à courir à compter de la notification du 17 décembre 1980 ; qu'ainsi les avis de mise en recouvrement du 30 juin 1984 n'étaient pas atteints par cette prescription ;
Sur la régularité de la procédure d'impo-sition :

Considérant qu'aux termes de l'article 1649 quinquies A du code général des impôts alors en vigueur : "1. Sous réserve des dispositions du 4, lorsque l'administration constate une insuffisance, une inexactitude, une omission ou une dissimulation dans les éléments servant de base au calcul des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes quelconques dues en vertu du code général des impôts, ou conteste les justifications produites par les redevables en ce qui concerne les investissements ouvrant droit à la déduction visée aux articles 244 quinquies et 244 septies, les redressements correspondants sont effectués suivant la procédure unifiée ci-après. 2. L'administration fait connaître au redevable la nature et les motifs du redressement envisagé. Elle invite en même temps l'intéressé à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de cette notification. Si le redevable donne son accord dans le délai prescrit ou si des observations présentées dans ce délai sont reconnues fondées l'administration procède à l'établissement d'un rôle ou à l'émission d'un avis de mise en recouvrement sur la base acceptée par l'intéressé. A défaut de réponse ou d'accord dans le délai prescrit, l'administration fixe la base de l'imposition et calcule le montant de l'impôt exigible, sous réserve du droit de réclamation du redevable après l'établissement du rôle ou l'émission d'un avis de mise en recouvrement. 3. Par dérogation aux dispositions de l'alinéa qui précède, lorsque le désaccord persiste, il peut être soumis, sur l'initiative de l'administration ou à la demande du redevable, à l'avis soit de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires dans les matières prévues aux arti-cles 55, 98 et 287-3, soit de la commission départementale de conciliation dans les cas visés à l'article 667-2. L'avis de la commission est notifié au redevable par l'administration qui l'informe, en même temps, du chiffre qu'elle se propose de retenir comme base d'imposition et il est procédé à l'établissement d'un rôle ou à l'émission d'un avis de mise en recouvrement" ;

Considérant en premier lieu que M. X... soutient que la notification des redressements du 11 mai 1981 et la lettre de confirmation du 3 juillet 1981 relatives chacune au revenu global seraient insuffisamment motivées ; qu'il résulte de l'instruction qu'après les avoir arrêtés d'office l'administration a régulièrement notifié à l'intéressé les bénéfices industriels et commerciaux à raison desquels elle entendait l'imposer au titre des années 1978 et 1979 ; et que notamment, comme il a été rappelé ci-dessus, la notification du 17 décembre 1980 était suffisamment motivée ; qu'à défaut de remise en cause de tout autre élément concourant à la détermination du revenu global net imposable, cette notification initiale du 17 décembre 1980 confirmée le 21 avril 1981 intéressait nécessairement en l'espèce, tant les revenus de M. X... imposables dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux que le revenu global ; que la circonstance, à la supposer établie, que le vérificateur aurait insuffisamment motivé la seconde notification et sa confirmation en date des 11 mai et 3 juillet 1981 n'est pas de nature à faire regarder la procédure d'imposition comme irrégulière dès lors que la mise en oeuvre de cette seconde procédure de notification n'était pas légalement nécessaire ;
Considérant en second lieu que le vice qui aurait entaché les avis d'imposition initialement émis et qui ont donné lieu au dégrèvement du 9 avril 1984 n'altérait pas la régularité de l'ensemble de la procédure d'imposition et notamment la validité de la notification de redressement du 17 décembre 1980 laquelle n'est pas devenue caduque en raison de l'intervention de ladite décision de dégrèvement qui n'avait pas à être motivée ; qu'ainsi M. X... n'est pas fondé à soutenir que l'administration aurait dû notifier à nouveau les redressements à l'origine des impositions contestées ;
Considérant en troisième lieu que si M. X... entend se prévaloir des dispositions de l'article 3-I-1° de la loi n° 77-1453 du 29 décembre 1977 aux termes desquelles : "La procédure de taxation d'office en cas de défaut de production de la déclaration des revenus prévue à l'article 170 du code général des impôts n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une première mise en demeure", il est constant que le vérificateur a suivi la procédure d'évaluation d'office des résultats déclarés par M. X... en raison d'une comptabilité ni régulière ni probante, que dès lors le moyen ainsi présenté applicable seulement aux taxations d'office pour absence ou dépôt tardif de déclaration ne peut être, en l'espèce, utilement invoqué ;
Sur les pénalités :

Considérant, qu'aux termes de l'article 42 de la loi n° 86-1318 du 30 décembre 1986 repris à l'article L.80 D du livre des procédures fiscales : "I - Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, quand un document ou une décision adressé au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable. II - Les décisions notifiées antérieurement à la publication de la présente loi, dans les conditions prévues au paragraphe I, sont réputées régulièrement motivées" ;
Considérant qu'il ressort de l'examen du dossier que par une lettre du 3 juillet 1981 dont M. X... a accusé réception le 6 juillet 1981, le vérificateur a indiqué à l'intéressé la nature des redressements qu'il entendait soumettre à la majoration de 50 % prévue aux articles 1725 et suivants du code ; qu'en vertu des dispositions précitées du II de l'article 42 de la loi du 30 décembre 1986 ayant une portée rétroactive les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales et notifiées avant la publication de la loi sont réputées régulièrement motivées dès lors que, comme en l'espèce, un document en a porté la motivation à la connaissance du contribuable ;
Considérant que la réponse aux observations du 3 juillet 1981 indiquait que la bonne foi de M. X... n'avait pu être admise compte tenu de la nature des manquements relevés portant sur les recettes et les frais généraux et que les suppléments d'impôts seraient assortis des majorations prévues aux articles 1726 et suivants du code général des impôts applicables en cas de mauvaise foi ; que les modalités d'application de ces articles figuraient dans les notifications précédemment envoyées à l'intéressé ; qu'ainsi la motivation contestée, quelle que soit sa pertinence, était à la fois utilement énoncée et suffisante ;
Sur les autres moyens :
Considérant qu'en les admettant invoqués les autres moyens présentés concernent la procédure de recouvrement et, à ce titre, soit ne relèvent pas de la compétence de la juridiction administrative, soit ne sont pas recevables dans la présente instance à l'appui des conclusions en décharge des impositions litigieuses ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la privatisation, chargé du budget est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué en date du 12 mars 1987 et la remise à la charge de M. X... des rappels d'impôt sur le revenu ainsi que des pénalités correspondantes dont il lui a été accordé décharge par ce jugement ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Basse-Terre du 12 mars 1987 est annulé.
Article 2 : Les rappels d'impôt sur le revenu et les pénalités y afférentes qui ont été assignés à M. X... au titre des années 1978 et 1979 par deux avis de mise en recouvrement du 30 juin 1984 sont remis à la charge de l'intéressé.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. X... et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Numéro d'arrêt : 89PA00314
Date de la décision : 03/10/1989
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-01-03-04 CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - REGLES GENERALES D'ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - PRESCRIPTION


Références :

. CGI Livre des procédures fiscales L80 D
. CGI Livre des procédures fiscales R256-1
. CGIAN2 389
. Loi 86-1318 du 30 décembre 1986 art. 42 Finances rectificative pour 1986
CGI 1649 quinquies A, 1966 par. 1, 1975, 170, 1725, 1726
Loi 77-1453 du 29 décembre 1977 art. 3 par. I 1°


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: JEAN-ANTOINE
Rapporteur public ?: BERNAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1989-10-03;89pa00314 ?
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