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19/09/1989 | FRANCE | N°89PA01699

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1e chambre, 19 septembre 1989, 89PA01699


VU la requête présentée pour la société anonyme "Le Pavillon Royal" par Me X..., avocat au barreau de Paris ; elle a été enregistrée le 3 mars 1989 au greffe de la cour administrative d'appel de Paris ; la société demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 8807993-7 du 28 novembre 1988 par lequel le tribunal administratif de Paris a décidé qu'elle devait, sous peine d'une astreinte de 1.000 F par jour, libérer immédiatement le terrain et les bâtiments qu'elle occupe dans le Bois de Boulogne ;
2°) subsidiairement d'ordonner une expertise aux fins de constater l'

existence ou l'absence d'infrastructure destinée à la promenade publique...

VU la requête présentée pour la société anonyme "Le Pavillon Royal" par Me X..., avocat au barreau de Paris ; elle a été enregistrée le 3 mars 1989 au greffe de la cour administrative d'appel de Paris ; la société demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 8807993-7 du 28 novembre 1988 par lequel le tribunal administratif de Paris a décidé qu'elle devait, sous peine d'une astreinte de 1.000 F par jour, libérer immédiatement le terrain et les bâtiments qu'elle occupe dans le Bois de Boulogne ;
2°) subsidiairement d'ordonner une expertise aux fins de constater l'existence ou l'absence d'infrastructure destinée à la promenade publique à proximité de l'immeuble en cause ;
3°) de condamner la ville de Paris à lui payer la somme de 30.000 F sur le fondement de l'article 1er du décret du 2 septembre 1988 ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987, le décret n° 88-707 du 9 mai 1988 et le décret n° 88-906 du 2 septembre 1988 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 5 septembre 1989 :
- le rapport de Mme LACKMANN, conseiller,
- les observations de Me GANIER-RAYMOND, avocat à la Cour pour Me X..., avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation pour le Pavillon Royal et de Me Y..., avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation pour la ville de Paris,
- et les conclusions de M. DACRE-WRIGHT, commissaire de gouvernement,

Considérant que si la société "Le Pavillon Royal" a été mise en liqidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Paris en date du 22 août 1989, le représentant des créanciers et liquidateur de la société a donné mandat au conseil de la société "Le Pavillon Royal" pour le représenter également dans le présent litige ; qu'ainsi l'ensemble de la procédure lui a été communiqué ; qu'il n'y a donc pas lieu de surseoir à statuer ;
Sur l'appel principal :
Considérant que le Bois de Boulogne constitue une promenade publique affectée à l'usage public et aménagée à cette fin ; que ce parc appartient au domaine public ; que la parcelle cadastrée 16-03-EJ sur laquelle est implanté le restaurant "Le Pavillon Royal" est incluse dans cette promenade publique et fait partie, par voie de conséquence et sans qu'il soit besoin de procéder à une quelconque expertise, du domaine public de la ville de Paris ; que si cette parcelle n'a fait elle-même l'objet d'aucun aménagement spécial à destination du public, si la société requérante n'est investie d'aucune mission de service public, si les concessions du Bois de Boulogne sont régies en tant qu'espaces boisés par les dispositions du code forestier et si le service du cadastre a inscrit ladite parcelle au domaine privé de la commune, ces circonstances sont sans influence sur son appartenance au domaine public qui résulte, ainsi qu'il vient d'être dit, de son inclusion dans ce domaine ; qu'au surplus, le contrat en date du 27 février 1964 en vertu duquel la société requérante était concessionnaire de l'exploitation du restaurant jusqu'au 31 décembre 1987 comporte plusieurs clauses exorbitantes du droit commun, notamment en matière de résiliation d'office du contrat par arrêté préfectoral ; que ces clauses confèrent au contrat dans son ensemble le caractère de contrat administratif soumis aux règles de droit public ; qu'il suit de là qu'en vertu du décret-loi du 17 juin 1938, lequel a attribué aux conseils de préfecture, devenus tribunaux administratifs, compétence pour connaître des litiges relatifs aux contrats comportant occupation du domaine public passés notamment par les communes, le moyen tiré de ce que le tribunal administratif de Paris se serait reconnu à tort compétent pour statuer en la présente affaire et, de ce qu'en n'analysant pas la nature du contrat ce tribunal aurait violé le principe selon lequel la compétence suit le fond, doit être écarté ;
Considérant qu'il appartient au juge adminis-tratif de se prononcer sur l'existence, l'étendue et les limites du domaine public même en l'absence d'acte administratif délimitant ce domaine ; qu'en constatant que le Bois de Boulogne fait partie du domaine public et en décidant que le terrain d'assiette du restaurant "Le Pavillon Royal" situé dans ce bois fait donc également partie du domaine public, le tribunal administratif de Paris n'a pas fait acte de règlement de portée générale mais a statué sur le litige particulier dont il était saisi ; que, par suite, si la société requérante soutient que les premiers juges ont violé l'article 5 du code civil qui interdit au juge de se prononcer par voie de disposition générale ou réglementaire sur les causes qui lui sont soumises et qu'ils ont ainsi excédé leur compétence, ce moyen ne peut être retenu ;

Considérant que l'expulsion de particuliers occupant les dépendances du domaine public en vertu des contrats venus à expiration n'a pas à être subordonnée à la fixation préalable d'une indemnité ; que la société "Le Pavillon Royal" s'étant trouvée dépourvue de tout titre d'occupation du domaine public à compter du 1er janvier 1988, le juge administratif était tenu de faire droit à la demande de la ville de Paris tendant à son expulsion du domaine désormais indûment occupé ; que, de surcroît, la ville de Paris avait informé la société plus de six mois avant l'expiration du contrat qu'elle entendait procéder à un appel à la concurrence par voie publicitaire en vue d'attribuer la concession à partir du 1er janvier 1988 ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la société n'ait pas pu participer à cet appel ni qu'elle ait été irrégulièrement évincée lors de l'attribution de la concession ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que les premiers juges auraient privé à tort la société de l'indemnité à laquelle elle estimait avoir droit en vertu des dispositions du décret du 30 septembre 1953 relatif aux baux commerciaux et de ce que la principe d'égalité aurait été violé à son encontre, n'est pas fondé ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société "Le pavillon Royal" n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a décidé qu'elle devait libérer immédiatement le terrain et les bâtiments en cause ;
Sur les conclusions incidentes de la ville de Paris
Considérant d'une part qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de porter à 10.000 F par jour le montant de l'astreinte prononcée par les premiers juges et, d'autre part, qu'il n'appartient qu'au tribunal administratif de Paris de procéder à sa liquidation ; que, dès lors, les conclusions incidentes de la ville de Paris tendant à la majoration précitée et à la condamnation de la société "Le pavillon Royal" au paiement de la somme de 132.000 F, montant de l'astreinte liquidée au 17 mai 1989, avec intérêts de droit à compter du 18 mai 1989, doivent être rejetées ;
Sur les conclusions de la société "Le Pavillon Royal" et de la ville de Paris tendant à l'application des dispositions de l'article 1er du décret du 2 septembre 1988
Considérant qu'il n'apparaît pas inéquitable, dans les circonstances de l'espèce, de laisser à la charge tant de la société "Le Pavillon Royal" que de la ville de Paris les sommes exposées par elles et non comprises dans les dépens ; qu'ainsi les conclusions susvisées doivent être rejetées ;
Article 1er : La requête n° 89PA01699 de la société anonyme "Le Pavillon Royal" et les conclusions incidentes de la ville de Paris sont rejetées.
Article 2 : Les conclusions de la ville de Paris tendant à ce que la société précitée lui verse la somme de 25.000 F, sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société "Le Pavillon Royal", à la ville de Paris et au Ministre de l'Intérieur.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 89PA01699
Date de la décision : 19/09/1989
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Astreinte

Analyses

COMPETENCE - COMPETENCE A L'INTERIEUR DE LA JURIDICTION ADMINISTRATIVE - COMPETENCE DES COURS ADMINISTRATIVES D'APPEL - ABSENCE - Conclusions relevant de la compétence des tribunaux administratifs - Incompétence de la cour administrative d'appel pour liquider une astreinte prononcée en référé par le tribunal administratif.

17-05-015-01, 54-03-01-01 Il n'appartient pas à une cour administrative d'appel de liquider une astreinte prononcée par un tribunal administratif seul compétent pour procéder à cette liquidation.

- RJ1 DOMAINE - DOMAINE PUBLIC - CONSISTANCE ET DELIMITATION - DOMAINE PUBLIC ARTIFICIEL - BIENS FAISANT PARTIE DU DOMAINE PUBLIC ARTIFICIEL - Terrain d'assise d'un restaurant dans le Bois de Boulogne (1).

24-01-01-01-01 La parcelle sur laquelle est édifié un restaurant et qui est incluse dans le Bois de Boulogne, promenade publique affectée à l'usage public et aménagée à cette fin, fait partie du domaine public.

PROCEDURE - PROCEDURES D'URGENCE - REFERE TENDANT AU PRONONCE D'UNE MESURE URGENTE - COMPETENCE - Compétence au sein de la juridiction administrative - Liquidation d'une astreinte prononcée en référé par un tribunal administratif - Compétence du tribunal administratif.


Références :

Code civil 5
Décret 53-960 du 30 septembre 1953
Décret 88-907 du 02 septembre 1988 art. 1
Décret-loi du 17 juin 1938

1.

Cf. CE, 1979-02-23, Gourdain, p. 78


Composition du Tribunal
Président : M. Massiot
Rapporteur ?: Mme Lackmann
Rapporteur public ?: M. Dacre-Wright

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1989-09-19;89pa01699 ?
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