La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/09/1989 | FRANCE | N°89PA00007

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1e chambre, 19 septembre 1989, 89PA00007


VU l'ordonnance en date du 1er décembre 1988 par laquelle le président de la 5e sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour administrative d'appel de Paris, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présen-tée au Conseil d'Etat pour Mme et M. GARRIGUES ;
VU la requête et le mémoire ampliatif enregistrés respectivement le 5 août et le 25 novembre 1985 au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour Mme et M. GARRIGUES demeurant à Pringy (Seine et Marne), 93 avenue de F

ontainebleau, par Me J. Le Prado, avocat au Conseil d'Etat et à la...

VU l'ordonnance en date du 1er décembre 1988 par laquelle le président de la 5e sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour administrative d'appel de Paris, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présen-tée au Conseil d'Etat pour Mme et M. GARRIGUES ;
VU la requête et le mémoire ampliatif enregistrés respectivement le 5 août et le 25 novembre 1985 au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour Mme et M. GARRIGUES demeurant à Pringy (Seine et Marne), 93 avenue de Fontainebleau, par Me J. Le Prado, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; Mme et M. Garrigues demandent :
1°) d'annuler le jugement n° 7060/84 du 31 mai 1985 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté leur requête tendant à ce que la commune de Soisy-sur-Ecole et le département de l'Essonne soient condamnés à réparer les conséquences dommageables de l'incendie qui a détruit leur habitation le 12 décembre 1980 ;
2°) de condamner la commune de Soisy-sur-Ecole au versement d'une somme de 417 271,06 F ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 77-1488 du 30 décembre 1977 ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987, le décret n° 88-707 du 9 mai 1988 et le décret n° 88-906 du 2 septembre 1988 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience du 5 septembre 1989 :
- le rapport de M. SIMONI, conseiller,
- les observations de la SCP LEPRADO, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation pour les époux GARRIGUES,
- et les conclusions de M. DACRE-WRIGHT, commissaire du gouvernement.

Considérant qu'il résulte des pièces du dossier et notamment du rapport d'expertise déposé le 4 décembre 1981, que les conséquences dommageables de l'incendie, survenu le 12 décembre 1980, au cours duquel l'habitation de Mme et M. Garrigues située à Soisy-sur-Ecole (Essonne) a été détruite, sont, pour leur plus grande partie, imputables aux propriétaires qui, alors que leur chalet était constitué de matériaux favorisant l'extension du feu, n'ont fait appel aux services de lutte contre l'incendie que 40 minutes après avoir découvert le début du sinistre dans le sous-sol de l'habitation ; que ces conséquences dommageables ont été aggravées par la faute lourde du service de lutte contre l'incendie de Soisy-sur-Ecole qui, alors que son véhicule-citerne était indisponible, n'a pu déployer sur place une longueur de tuyaux suffisante pour atteindre la bouche à incendie la moins distante et a dû faire appel aux sapeurs-pompiers d'une commune voisine dont les moyens ne sont parvenus sur les lieux qu'après la destruction totale du chalet ; qu'il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en mettant à la charge de la commune de Soisy-sur-Ecole une fraction de 20 % du préjudice causé par l'incendie aux époux Garrigues ;
Considérant qu'il n'est pas contesté que la parcelle sur laquelle était édifiée l'habitation n'avait donné lieu qu'à la délivrance du permis de construire un abri de jardin et que le changement de destination d'un tel abri, devenu maison d'habitation, a été effectué sans autorisation de construire ; que si, contrairement à ce qu'a décidé le tribunal administratif de Versailles, ces circonstances ne sont pas de nature à priver les époux Garrigues de tout droit à réparation, elles doivent avoir pour effet, en l'espèce, notamment en raison de ce que l'utilisation irrégulière de la construction en maison d'habitation s'est accompagnée d'un accroissement des risques d'incendie, de limiter les conséquences réparables du sinistre, prises dans leur ensemble, à la perte d'un abri de jardin ; qu'une telle perte ne saurait être évaluée à une somme supérieure à 50 000 F ; que par suite, compte-tenu du partage de responsabilité précédemment défini, l'indemnité qu'il convient d'allouer à Mme et M. Garrigues s'élève à 10 000 F ; que cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 22 février 1984, date de la réception par la commune de la demande de réparation ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme et M. Garrigues sont fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Versailles, par le jugement attaqué, a rejeté leurs conclusions tendant à la condamnation de la commune de Soisy-sur-Ecole ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Versailles en date du 31 mai 1985 est annulé.
Article 2 : La commune de Soisy-sur-Ecole est condamnée à verser à Mme et M. Garrigues une indemnité de 10 000 F, qui portera intérêts au taux légal à compter du 22 février 1984.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme et M. Garrigues, est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme et M. Garrigues, à la commune de Soisy-sur-Ecole et au ministre de l'Intérieur.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 89PA00007
Date de la décision : 19/09/1989
Sens de l'arrêt : Annulation indemnité
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITE EN RAISON DES DIFFERENTES ACTIVITES DES SERVICES PUBLICS - SERVICES PUBLICS COMMUNAUX - SERVICE PUBLIC DE LUTTE CONTRE L'INCENDIE (1) Existence d'une faute lourde - Mise en oeuvre d'un matériel inadapté aux circonstances du sinistre - (2) Cause exonératoire - Faute de la victime - Retard à appeler les pompiers.

60-02-06-01(1) Constitue une faute lourde l'incapacité pour un service d'incendie dont le véhicule-citerne était indisponible à déployer sur les lieux du sinistre une longueur de tuyaux suffisante pour atteindre la bouche d'incendie la plus proche.

- RJ1 RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - PREJUDICE - CARACTERE INDEMNISABLE DU PREJUDICE - AUTRES CONDITIONS - SITUATION EXCLUANT INDEMNITE - Préjudice partiellement indemnisable - Immeuble détruit ayant été illégalement transformé (1) - Préjudice indemnisable limité au coût de l'immeuble autorisé.

60-02-06-01(2) Incendie ayant entraîné la destruction totale d'un immeuble en raison de l'intervention tardive des pompiers, appelés par le propriétaire 40 minutes après la découverte du début du sinistre et de leur incapacité à mettre en oeuvre un matériel adéquat - Partage de responsabilité à hauteur de 20 % pour la commune et de 80 % pour le propriétaire.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - CAUSES EXONERATOIRES DE RESPONSABILITE - FAUTE DE LA VICTIME - Existence - Transformation irrégulière de l'immeuble ultérieurement détruit.

60-04-01-04-02, 60-04-02-01, 60-04-03-02-01-04 La transformation irrégulière en maison d'habitation d'un abri de jardin édifié en vertu d'un permis de construire limité à ce seul objet, ne prive pas les propriétaires du droit à réparation du préjudice subi du fait de sa destruction par un incendie dont les conséquences ont été aggravées par une faute lourde commise par le service municipal de sécurité, mais limite le montant de la réparation à la fraction indemnisable par la commune du coût de l'abri de jardin qui avait été seul autorisé.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - EVALUATION DU PREJUDICE - PREJUDICE MATERIEL - PERTE DE REVENUS - PERTE DE VALEUR VENALE D'UN IMMEUBLE - Immeuble illégalement transformé détruit par un incendie.


Références :

1. Comp. CE, 1984-02-24, Ville d'Hyères c/ époux Ossellame, T. p. 741-779


Composition du Tribunal
Président : M. Massiot
Rapporteur ?: M. Simoni
Rapporteur public ?: M. Dacre-Wright

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1989-09-19;89pa00007 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award