Vu la requête, enregistrée le 27 mai 2010, présentée pour la SOCIETE ARMOR SNC, dont le siège social est situé Quai du président Wilson à Nantes (44200), représenté par son gérant en exercice, par Me Balique, avocat au barreau de Paris ; la SOCIETE ARMOR SNC demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 06-3521 en date du 9 avril 2010 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 16 juin 2006 par laquelle la commission d'appel d'offres du département de la Vendée a rejeté son offre pour l'attribution du marché public relatif au dragage de l'estuaire du Lay et a retenu celle du département de la Charente-Maritime, ainsi que de la décision subséquente du président du conseil général de la Vendée de signer ledit marché avec ce département ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, lesdites décisions et, par voie de conséquence, annuler le marché en cause ;
3°) de mettre à la charge des départements de la Vendée et de la Charente-Maritime le versement de la somme de 10 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
....................................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 octobre 2011 :
- le rapport de M. Joecklé, président-assesseur ;
- les conclusions de M. Martin, rapporteur public ;
- les observations de Me Balique, avocat de la SOCIETE ARMOR SNC ;
- et les observations de Me Dunyach, avocat du département de la Charente-Maritime ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 19 octobre 2011, présentée pour la SOCIETE ARMOR SNC ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 21 octobre 2011, présentée pour le département de la Vendée ;
Considérant que le département de la Vendée a lancé, en 2006, une procédure d'appel d'offres en vue de la réalisation de travaux de dragage de l'estuaire du Lay ; que, par une décision du 16 juin 2006, la commission d'appel d'offres a attribué ce marché au département de la Charente-Maritime ; que la SOCIETE ARMOR SNC, dont l'offre n'a pas été retenue, relève appel du jugement en date du 9 avril 2010 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision précitée du 16 juin 2006, ainsi que de la décision du président du conseil général de la Vendée de signer ledit marché avec ce département ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 40 du code des marchés publics, dans sa rédaction applicable à l'espèce : (...) IV. - Pour les marchés de travaux d'un montant compris entre 90 000 euros HT et 5 270 000 euros HT, la personne publique est tenue de publier un avis d'appel public à la concurrence soit dans le Bulletin officiel des annonces des marchés publics, soit dans un journal habilité à recevoir des annonces légales. La personne publique apprécie de plus si, compte tenu de la nature ou du montant des travaux en cause, une publication dans un journal spécialisé correspondant au secteur économique concerné est par ailleurs utile pour assurer une publicité conforme aux objectifs mentionnés à l'article 1er du présent code. (...) VI. Les avis mentionnés aux III, IV et V sont établis conformément aux modèles fixés par arrêté du ministre chargé de l'économie. (...) ; que l'arrêté du 30 janvier 2004 par lequel le ministre chargé de l'économie a fixé les modèles de formulaires pour la publication desdits avis précise notamment les mentions obligatoires et celles présentant un caractère facultatif ;
Considérant qu'en application des dispositions précitées de l'article 40 du code des marchés publics et eu égard au montant du marché en cause, le département de la Vendée n'était tenu de procéder à la publication que d'un seul avis d'appel public à la concurrence ; qu'il ressort des pièces du dossier que l'avis d'appel public à la concurrence relatif au marché en litige a été publié le 29 avril 2006 au Bulletin officiel des annonces des marchés publics ; qu'il est constant que cet avis comportait les mentions obligatoires requises par l'arrêté susmentionné du 30 janvier 2004 ; que, par suite, la publication résumée d'un autre avis d'appel public à la concurrence par un groupe de presse privé qui n'a pas été sollicité à cet effet sur le fondement des dispositions précitées de l'article 40 du code des marchés publics est, en admettant même qu'il ne comportait pas certaines des mentions obligatoires exigées par l'arrêté ministériel précité du 30 janvier 2004, sans incidence sur la régularité de la procédure d'appel à concurrence contestée ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 3211-1 du code général des collectivités territoriales : Le conseil général règle par ses délibérations les affaires du département. / Il statue sur tous les objets sur lesquels il est appelé à délibérer par les lois et règlements et, généralement, sur tous les objets d'intérêt départemental dont il est saisi (...) ;
Considérant que, dès lors qu'il ne s'agit pas de la prise en charge par le département de la Charente-Maritime d'une activité économique mais uniquement de la candidature d'un de ses services, dans le respect des règles de la concurrence, à un marché public passé par le département de la Vendée, le département de la Charente-Maritime n'était pas tenu de justifier d'un intérêt public départemental pour pouvoir présenter une telle offre en dehors de ses limites territoriales ; qu'ainsi, la SOCIETE ARMOR SNC ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 3211-1 du code général des collectivités territoriales ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L.1412-1 du code général des collectivités territoriales : Les collectivités territoriales, (...) pour l'exploitation directe d'un service public industriel et commercial relevant de leur compétence, constituent une régie soumise aux dispositions du chapitre 1er du titre II du livre II de la deuxième partie (...) ; que ces dispositions offrent aux collectivités territoriales la faculté de créer des régies mais ne leur en font pas une obligation ; que, par ailleurs, en vertu des dispositions de l'article L. 2221-4 du code général des collectivités territoriales, rendues applicables aux départements par l'effet des dispositions précitées de l'article L. 1412-1 du même code : Les régies mentionnées aux articles L. 2221-1 et L. 2221-2 sont dotées : 1° Soit de la personnalité morale et de l'autonomie financière, si le conseil municipal ou le comité du syndicat en a ainsi décidé ; 2° Soit de la seule autonomie financière. ; qu'aux termes de l'article L. 2221-1 du même code : Les communes et les syndicats de communes peuvent exploiter directement des services d'intérêt public à caractère industriel ou commercial (...) ;
Considérant qu'il ne résulte pas des dispositions précitées qu'un service public industriel et commercial ne pourrait être exploité par un département que sous la forme d'une régie mentionnée aux articles L.2221-1 et L.2221-2 du même code ; que, par suite, le moyen invoqué par la SOCIETE ARMOR SNC et tiré de ce que la gestion, par le département de la Charente-Maritime, de son activité de dragage pour le compte de tiers dans le cadre d'un service doté d'un budget annexe méconnaîtrait lesdites dispositions ne peut qu'être écarté ;
Considérant, en dernier lieu, que lorsqu'une collectivité publique est candidate à l'attribution d'un marché public, le prix qu'elle propose doit être déterminé en prenant en compte l'ensemble des coûts directs et indirects concourant à la formation du prix de la prestation objet du contrat ; qu'en outre, cette collectivité ne doit pas avoir bénéficié, pour déterminer le prix proposé, d'un avantage découlant des ressources ou des moyens qui lui sont attribués au titre de sa mission de service public et doit, si nécessaire, en justifier par ses documents comptables ou tout autre moyen d'information approprié ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'activité de dragage exercée par le département de la Charente-Maritime est assurée par un service doté d'un budget annexe et soumis à des obligations fiscales et comptables comparables à celles des entreprises privées ; que la commission d'appel d'offres du département de la Vendée, après avoir constaté que l'offre du département de la Charente-Maritime se situait légèrement en dessous de sa propre estimation mais était largement en dessous de celle des deux entreprises privées ayant soumissionné, a demandé à ce dernier département la production d'un sous-détail des prix de dragages avec clapage et dragages avec dépôt sur l'estran , lequel lui a, notamment, permis de procéder à la comparaison des prix unitaires, à l'identification de prix journaliers d'intervention et à la vérification, en particulier, de la prise en compte, dans l'offre du département de la Charente-Maritime, de l'ensemble des charges directes et indirectes se rattachant à cette activité ; que la commission d'appel d'offres a déduit de cette analyse que l'offre présentée par le département de la Charente-Maritime n'était pas anormalement basse et que la différence de prix s'expliquait en l'espèce par la mise en oeuvre de techniques différentes caractérisées essentiellement par l'emploi d'une drague aspiratrice par le seul département de la Charente-Maritime ; qu'eu égard à la nature des précisions demandées par la commission d'appel d'offres, il ne ressort pas des pièces du dossier que ledit département aurait présenté une offre qui ne tenait pas compte de tous ses coûts et notamment des frais d'amortissement de la drague aspiratrice ou de l'intégralité de ses charges de personnels ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que le département de la Charente-Maritime aurait procédé à une sous-estimation du coût de la prestation proposée ou aurait bénéficié d'avantages en méconnaissance des principes de libre concurrence et d'égalité de traitement, doit être écarté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE ARMOR SNC n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge des départements de la Vendée et de la Charente-Maritime, qui ne sont pas dans la présente instance les parties perdantes, le versement d'une somme au titre des frais exposés par la SOCIETE ARMOR SNC et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière le versement de la somme de 1 000 euros à chacun de ces départements au titre de ces mêmes frais ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SOCIETE ARMOR SNC est rejetée.
Article 2 : La SOCIETE ARMOR SNC versera aux départements de la Vendée et de la Charente-Maritime la somme de 1 000 euros à chacun au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE ARMOR SNC, au département de la Vendée et au département de la Charente-Maritime.
''
''
''
''
1
N° 10NT01095 2
1