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19/04/2011 | FRANCE | N°10NT02315

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, Reconduite a la frontiere, 19 avril 2011, 10NT02315


Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement les 5 novembre 2010 et 26 janvier 2011, présentés pour M. Sory X, demeurant ..., par Me Oger, avocat au barreau de Rennes ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 10-3853 en date du 1er octobre 2010 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 septembre 2010 du préfet de la Sarthe décidant sa reconduite à la frontière et fixant un pays de destination ;

2°) d'annuler ledit ar

rêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Sarthe de lui délivrer une autorisation p...

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement les 5 novembre 2010 et 26 janvier 2011, présentés pour M. Sory X, demeurant ..., par Me Oger, avocat au barreau de Rennes ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 10-3853 en date du 1er octobre 2010 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 septembre 2010 du préfet de la Sarthe décidant sa reconduite à la frontière et fixant un pays de destination ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Sarthe de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, moyennant la renonciation de son avocat à percevoir la contribution versée par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du 7 septembre 2010 par laquelle le président de la cour a désigné Mme Massias pour statuer sur les appels interjetés contre les jugements rendus par les présidents de tribunaux administratifs ou leurs délégués en matière de reconduite à la frontière ;

Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir, au cours de l'audience publique du 5 avril 2011, présenté son rapport et entendu les conclusions de Mme Specht, rapporteur public ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté préfectoral du 28 septembre 2010 :

Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : - 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ; qu'aux termes de l'article L. 741-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Lorsqu'un étranger, se trouvant à l'intérieur du territoire français, demande à bénéficier de l'asile, l'examen de sa demande d'admission au séjour relève de l'autorité administrative compétente ; qu'aux termes de l'article L. 741-4 du même code : (...) l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si (...) - 4° La demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente (...) ;

Considérant que ces dispositions ont pour effet d'obliger l'autorité de police à transmettre au préfet, et ce dernier à enregistrer, une demande d'admission au séjour lorsqu'un étranger, à l'occasion de son interpellation, formule une demande d'asile ; que, par voie de conséquence, elles font également obstacle à ce que le préfet fasse usage des pouvoirs que lui confère le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en matière de reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière avant d'avoir statué sur cette demande d'admission au séjour déposée au titre de l'asile ; que ce n'est que dans l'hypothèse où la demande d'admission a été préalablement rejetée par lui sur le fondement des dispositions des 2° à 4° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le préfet peut, le cas échéant, sans attendre que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ait statué, décider la reconduite à la frontière d'un étranger ;

Considérant que M. X, ressortissant guinéen, est entré irrégulièrement sur le territoire français, selon ses dires le 27 septembre 2010 ; qu'il a été interpellé par les services de police, le même jour, et placé en garde-à-vue ; qu'il ressort des pièces du dossier, notamment du procès-verbal de son audition par les services de police, que M. X a explicitement affirmé, avant que ne lui soit notifié l'arrêté de reconduite à la frontière litigieux, vouloir déposer une demande d'asile politique ; que le préfet de la Sarthe, qui avait été destinataire de la procédure, se trouvait, ainsi, saisi de la demande d'admission au séjour au titre de l'asile formulée par l'intéressé ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet ait statué sur cette demande ; que, par suite, il ne pouvait décider légalement la reconduite à la frontière de M. X ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ; et qu'aux termes de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Si l'arrêté de reconduite à la frontière est annulé, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues au titre V du présent livre et l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas. ;

Considérant que le présent arrêt, qui annule l'arrêté de reconduite à la frontière litigieux, implique que M. X soit muni, dans le délai de quinze à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que le préfet ait à nouveau statué sur son cas ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que M. X a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Oger, avocat de l'intéressé, renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros à verser à Me Oger ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Rennes en date du 1er octobre 2010 et l'arrêté du 28 septembre 2010 du préfet de la Sarthe décidant la reconduite à la frontière de M. X et fixant un pays de destination sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Sarthe de délivrer à M. X, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce qu'il ait été à nouveau statué sur son cas.

Article 3 : L'Etat versera à Me Oger, avocat de M. X, la somme de 1 200 euros (mille deux cents euros) en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que Me Oger renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Sory X et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration. Une copie pour information sera transmise au préfet de la Sarthe.

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N° 10NT023152


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : Reconduite a la frontiere
Numéro d'arrêt : 10NT02315
Date de la décision : 19/04/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Nathalie MASSIAS
Rapporteur public ?: Mme SPECHT
Avocat(s) : OGER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2011-04-19;10nt02315 ?
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