Vu la requête, enregistrée le 16 décembre 2005, présentée par le préfet de Maine-et-Loire ; le préfet demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 05-5986 du 30 novembre 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Nantes a annulé son arrêté, en date du 24 novembre 2005, décidant la reconduite à la frontière de M. Mohamed X Y ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X Y devant le Tribunal administratif de Nantes ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la décision du 5 septembre 2005 par laquelle le président de la Cour a délégué Mme Perrot pour statuer sur les appels interjetés contre les jugements rendus par les présidents de tribunaux administratifs ou leurs délégués en matière de reconduite à la frontière ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 février 2006 :
- le rapport de Mme Perrot, magistrat délégué,
- les observations de Me Néraudau substituant Me Boezec, avocat de M. X Y,
- et les conclusions de M. Mornet, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) - 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré (...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Mohamed X Y, de nationalité tunisienne, est entré en France le 7 septembre 2003, muni d'un visa Schengen d'une durée de huit jours ; qu'il s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ; qu'il entrait, ainsi, dans le champ d'application de la disposition précitée ;
Considérant qu'au cours de l'enquête diligentée par le procureur de la République pour vérifier la sincérité de son mariage avec une ressortissante française prévu à la mairie de Cholet le 3 décembre 2005, M. X Y a été entendu le 24 novembre 2005 par des fonctionnaires de police en poste au commissariat de Cholet, et s'est vu notifier le jour même un arrêté de reconduite à la frontière pris par le préfet de Maine-et-Loire ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'en prenant cet arrêté et en décidant le placement immédiat de M. X Y en rétention administrative, le préfet a entendu exclusivement mettre fin à la présence irrégulière de M. X Y sur le territoire dont il n'avait pas eu connaissance jusqu'alors, et non s'opposer à son projet de mariage ; qu'ainsi, l'arrêté contesté ne saurait être regardé, dans les circonstances de l'espèce, comme ayant eu pour motif déterminant la prévention de ce mariage ; que, dès lors, ledit arrêté n'est pas entaché de détournement de pouvoir ; que, par suite, c'est à tort que le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Nantes s'est fondé sur ce motif pour en prononcer l'annulation ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X Y devant le Tribunal administratif et devant la Cour ;
Considérant que, si M. X Y soutient qu'il vit maritalement avec une ressortissante française depuis le mois d'août 2005, et que le couple a déposé un dossier de mariage à la mairie de Cholet, il ressort des pièces du dossier que, compte tenu des circonstances de l'espèce, et notamment du caractère récent de la vie commune invoquée à la date de la décision contestée, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté du préfet de Maine-et-Loire n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par ailleurs, cet arrêté ne pouvait avoir pour effet d'interdire à M. X Y de se marier ; que, par suite, en décidant sa reconduite à la frontière, le préfet de Maine-et-Loire n'a pas méconnu les stipulations des articles 8 et 12 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui énoncent que toute personne à droit au respect de sa vie familiale et que l'homme et la femme d'âge nubile ont le droit de se marier ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de Maine-et-Loire est fondé à demander l'annulation du jugement du 30 novembre 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Nantes a annulé son arrêté du 24 novembre 2005 décidant la reconduite à la frontière de M. X Y ;
Sur les conclusions à fin de régularisation de la situation administrative de l'intéressé :
Considérant que le présent arrêt, qui rejette la demande de M. X Y, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de l'intéressé tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de Maine-et-Loire sous astreinte de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à M. X Y la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 05-5986 du 30 novembre 2005 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Nantes est annulé.
Article 2 : La demande présentée devant le Tribunal administratif de Nantes par M. X Y et ses conclusions présentées en appel à fin d'injonction et de condamnation de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administratives sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Mohamed X Y et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire. Une copie sera transmise au préfet de Maine-et-Loire.
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