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28/07/2004 | FRANCE | N°01NT00185

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ere chambre, 28 juillet 2004, 01NT00185


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 5 février 2001, et les mémoires complémentaires enregistrés les 7 février 2001 et 15 mai 2001, présentés pour M. Jean-Claude X, demeurant ..., par Me MARGHIERI, avocat au barreau d'Angers ;

M. Jean-Claude X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 96.1898-96.1899 en date du 27 octobre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1990 et 1991 et du s

upplément de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 5 février 2001, et les mémoires complémentaires enregistrés les 7 février 2001 et 15 mai 2001, présentés pour M. Jean-Claude X, demeurant ..., par Me MARGHIERI, avocat au barreau d'Angers ;

M. Jean-Claude X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 96.1898-96.1899 en date du 27 octobre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1990 et 1991 et du supplément de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er juillet 1989 au 31 décembre 1992 ;

2°) à titre principal de prononcer les décharges demandées ;

3°)à titre subsidiaire de prononcer des réductions de ces impositions à concurrence de 211 217 F pour l'impôt sur le revenu de 1990, de 86 251 F pour l'impôt sur le revenu de 1991, et de 186 079 F pour la taxe sur la valeur ajoutée ;

C

4°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement ;

5°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 30 000 F hors taxes au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

.............................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 juin 2004 :

- le rapport de M. GRANGÉ, premier conseiller,

- les observations de M. X,

- et les conclusions de M. LALAUZE, commissaire du gouvernement ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que, par une décision en date du 7 octobre 2003, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux de Maine-et-Loire a prononcé le dégrèvement, en droits et pénalités, à concurrence de la somme de 11 056,82 euros, du supplément de taxe sur la valeur ajoutée auquel M. X a été assujetti correspondant à l'année 1992 ; que les conclusions de la requête de M. X relatives à cette imposition sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article L.47 du livre des procédures fiscales : ... En cas de contrôle inopiné tendant à la constatation matérielle des éléments physiques de l'exploitation ou de l'existence et de l'état des documents comptables, l'avis de vérification est remis au début des opérations de constatations matérielles. L'examen au fond des documents comptables ne peut commencer qu'à l'issue d'un délai raisonnable permettant au contribuable de se faire assister par un conseil ;

Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que des agents de la brigade de contrôle et de recherches des services fiscaux de Maine-et-Loire se sont présentés le 29 janvier 1993 à 14 heures au siège de l'entreprise d'hôtel-bar-restaurant qu'exploite M. X à titre individuel à Angers ; qu'il ressort du procès-verbal de cette intervention, signé sans réserves par le contribuable, que ces agents agissaient sous-couvert d'un avis de vérification de comptabilité remis en mains propres le même jour ; que si d'autres procès-verbaux relatant d'autres constatations effectuées par le vérificateur à 15 heures et 16 heures mentionnent également la remise d'un avis de vérification en mains propres, il ne ressort pas de ces procès-verbaux ni d'aucune autre pièce du dossier que l'avis de vérification dont il s'agit n'avait pas été remis lors de la première intervention et aurait été remis au contribuable à l'occasion des interventions ultérieures, soit postérieurement au début des opérations de constatations matérielles ;

Considérant, d'autre part, qu'il résulte de l'instruction que les agents de l'administration se sont bornés, lors de ces interventions, à constater l'effectif salarié de l'entreprise et l'absence de registre le concernant, à établir la situation de caisse, et à constater l'absence de production de certains documents comptables et l'état de ceux qui étaient présentés ; que le simple fait d'avoir relevé l'absence de dépenses ou de recettes comptabilisées au cours de certains mois ne saurait signifier que les agents se sont alors livrés à un examen critique des documents comptables ou des pièces justificatives en les comparant aux déclarations souscrites ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les opérations auraient, par leur nature et leur ampleur, dépassé de simples constatations matérielles et constitué le début effectif de la vérification de comptabilité doit être écarté ; que M. X ne peut utilement se prévaloir de la documentation administrative 13 L-1311 n°s 20 à 24 du 1er juillet 1989 qui, traitant de la procédure d'imposition, ne contient pas d'interprétation d'un texte fiscal au sens de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales ;

Sur le bien fondé de l'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction qu'aucun rappel de taxe sur la valeur ajoutée n'a été effectué au titre de la période antérieure au 1er janvier 1990 ; que, dès lors, le requérant n'est en tout état de cause pas fondé à invoquer la prescription au titre de cette période en ce qui concerne cette imposition ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L.169 du livre des procédures fiscales : Pour l'impôt sur le revenu... le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due... ; qu'aux termes de l'article 37 du code général des impôts : ... Si aucun bilan n'est dressé au cours d'une année quelconque, l'impôt dû au titre de la même année est établi sur les bénéfices de la période écoulée depuis la fin de la dernière période imposée ou, dans le cas d'entreprise nouvelle, depuis le commencement des opérations jusqu'au 31 décembre de l'année considérée. Ces mêmes bénéfices viennent ensuite en déduction des résultats du bilan dans lesquels ils sont compris ; qu'il résulte de l'instruction que le contribuable, dont l'entreprise avait été créée en juillet 1989, a clôturé le premier exercice le 30 juin 1990 ; que si l'administration était par suite en droit de vérifier en 1993 la comptabilité de cet exercice, elle ne pouvait, à raison de l'expiration du délai de reprise dont elle dispose, notifier de redressement correspondant aux résultats acquis jusqu'au 31 décembre 1989 ; que, toutefois, il est constant que le contribuable n'a déposé aucune déclaration des bénéfices réalisés au 31 décembre 1989, comme il y était tenu ; qu'il n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, du montant de ces bénéfices qui seraient ainsi atteints par la prescription ;

Considérant, toutefois, que le requérant invoque une instruction administrative du 22 avril 1980 13 L-7-80 et la documentation administrative 13 L 1212 n° 4 du 1er juillet 1989 qui disposent que lorsque l'exercice comptable comprend deux périodes d'imposition distinctes correspondant à des années différentes, le délai de reprise doit s'apprécier séparément pour chacune de ces périodes et prescrivent, lorsque les redressements envisagés se rapportent à des opérations dont la date exacte n'est pas connue, à défaut de tout élément justifiant une affectation plus précise, de procéder à une répartition entre les deux périodes de l'exercice en proportion de la durée de chacune d'elles ; que le requérant, dont le résultat de l'exercice clos le 30 juin 1990 a été reconstitué par l'administration, est fondé à se prévaloir de ces interprétations sur le fondement de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales, et, par suite, à demander que ce résultat ne soit imposé au titre de l'année 1990 qu'à raison de la moitié de son montant ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il est constant que la comptabilité de l'entreprise était affectée de graves irrégularités au titre de chacun des exercices vérifiés de nature à la priver de valeur probante, en l'absence notamment de pièces de nature à justifier les recettes enregistrées globalement par journées ; que l'administration était, par suite, fondée à reconstituer les résultats et le chiffre d'affaires en suivant une méthode extra comptable ; que les impositions en matière d'impôts sur le revenu ont été établies conformément à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; qu'il est également constant que le contribuable était en situation de taxation d'office en matière de taxe sur la valeur ajouté faute de déclarations récapitulatives annuelles souscrites dans les délais ; qu'il appartient, dès lors, à M. X, en vertu des articles L.192 et L.193 du livre des procédures fiscales, d'apporter la preuve du caractère exagéré des impositions ainsi établies ;

Considérant que le requérant, sans remettre en cause le principe des reconstitutions opérées par le vérificateur, séparément pour les activités d'hôtel, de bar et de restaurant, en conteste les résultats en proposant des adaptations ;

Considérant, d'une part, en ce qui concerne l'activité d'hôtel, que le vérificateur, faute de présentation du livre d'hôtel correspondant à la période vérifiée, s'est basé sur le livre d'hôtel de l'année en cours lors de la vérification, soit les mois de janvier et février 1993 ; qu'il en a tiré, en croisant les nombres de nuitées en ressortant avec les factures de location de draps de la même période, un ratio de 1,9 nuitée par drap ; qu'il a également relevé la répartition des nuitées de cette période entre les pensions complètes, les demi-pensions, les chambres simples et doubles ; qu'il a appliqué ce ratio et cette répartition aux nombres de draps utilisés pendant la période vérifiée et affecté les nuitées ainsi déterminées des tarifs indiqués par le contribuable ; qu'il a appliqué un abattement de 7 % pour tenir compte de l'occupation de deux chambres par le contribuable et sa famille en 1990 ; que le requérant propose de se baser sur le livre d'hôtel et les factures de draps qu'il produit de l'ensemble de l'année 1993, d'où ressort un ratio de 1,4 nuitée par drap ainsi qu'une répartition différente entre pensions complètes, demi-pensions et types de chambres ; que le calcul ainsi effectué, qui repose sur une période plus significative, peut être regardé, dans son principe, comme d'une précision meilleure que celui du vérificateur ; qu'il n'est pas précisément critiqué par l'administration ; qu'il y a lieu, par suite, de faire droit aux conclusions subsidiaires du requérant tendant à la réduction des redressements effectués à ce titre en matière de taxe sur la valeur ajoutée et de bénéfices industriels et commerciaux ;

Considérant, d'autre part, en ce qui concerne l'activité de restaurant, que le vérificateur a reconstitué le nombre de repas à partir du nombre de bouteilles de vin et d'eau servies, des quantités moyennes de boisson consommées par personne et des prix déterminés en accord avec le contribuable ; qu'il a déduit les repas pris en compte dans la reconstitution de l'activité d'hôtel au titre des pensions complètes et demi-pensions ; qu'il a entendu corroborer les résultats obtenus par d'autres méthodes fondées sur le nombre de serviettes en papier et de sets de table utilisés ; que le requérant n'est pas fondé à mettre en doute la validité de la méthode dite des liquides sur les résultats de laquelle les redressements sont en définitive fondés au motif que les résultats des méthodes basées sur le nombre de serviettes et de sets de table aboutissent à des résultats supérieurs ; que s'il fait valoir qu'il n'est pas tenu compte du fait que certains clients, outre leur consommation de vins, boivent aussi de l'eau, il n'assortit pas cette remarque de précisions permettant d'en apprécier la portée ; qu'il n'établit pas que le nombre de bouteilles de vins acquises en janvier 1990 est inférieur à celui retenu en définitive par le vérificateur ; que la prise en compte d'un nombre inférieur de repas inclus dans les pensions complètes et demi-pensions à partir, comme il a été dit ci-dessus, du dépouillement du livre d'hôtel de l'ensemble de l'année 1993, est défavorable au contribuable ; qu'il ne peut donc utilement s'en prévaloir au niveau de la reconstitution propre au restaurant pour les années 1990, 1991 et 1992 et l'exercice clos le 30 juin 1991 ; qu'il résulte de l'instruction qu'aucun redressement n'a été apporté au chiffre d'affaires déclaré de cette activité de l'exercice clos le 30 juin 1992 ; que le requérant n'est dès lors pas fondé à contester les chiffres ressortant de sa déclaration par une reconstitution de chiffre d'affaires ;

Considérant, enfin, en ce qui concerne l'activité de bar, que le requérant n'établit pas l'existence de consommation du personnel correspondant à 6 % des quantités vendues ; que le moyen tiré de ce qu'un tel abattement a été admis dans la reconstitution du restaurant est inopérant ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, s'agissant des impositions restant en litige, M. Jean-Claude X est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nantes a rejeté en totalité sa demande ;

Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à payer à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er :

A concurrence de la somme de 11 056,82 euros (onze mille cinquante six euros quatre vingt deux centimes) correspondant au supplément de taxe sur la valeur ajoutée auquel M. X a été assujetti au titre de l'année 1992, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. X.

Article 2 :

Le supplément de taxe sur la valeur ajoutée assigné à M. X est réduit de 1 861,40 euros (mille huit cent soixante et un euros quarante centimes) au titre de l'année 1990, et de 1 444,45 euros (mille quatre cent quarante quatre euros quarante cinq centimes) au titre de l'année 1991.

Article 3 :

La cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu mise à la charge de M. X au titre de l'année 1990 sera déterminée à raison de la moitié du résultat imposable reconstitué de son activité de bar-hôtel-restaurant, et compte tenu d'un chiffre d'affaires de l'activité d'hôtel pour l'ensemble de l'exercice clos en 1990 de 51 989,99 euros (cinquante et un mille neuf cent quatre vingt neuf euros quatre vingt dix neuf centimes) hors taxes. La cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu de l'année 1991 sera calculée, toutes choses égales par ailleurs, sur la base d'un chiffre d'affaires de l'activité d'hôtel de 44 945,78 euros (quarante quatre mille neuf cent quarante cinq euros soixante dix huit centimes) hors taxes.

Article 4 :

M. X est déchargé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu formant surtaxe par rapport à celles résultant de l'application de l'article 3 du présent arrêt.

Article 5 :

Le jugement du Tribunal administratif de Nantes en date du 27 octobre 2000 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 6 :

Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 7 :

Le présent arrêt sera notifié à M. Jean-Claude X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

1

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 01NT00185
Date de la décision : 28/07/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. LEMAI
Rapporteur ?: M. Etienne GRANGE
Rapporteur public ?: M. LALAUZE
Avocat(s) : MARGHIERI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2004-07-28;01nt00185 ?
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