Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 21 octobre 1999, présentée pour M. X, demeurant ... par Me FARCY, avocat au barreau de Rouen ;
M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 971002 du Tribunal administratif de Caen en date du 6 juillet 1999 en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande tendant à la décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1989 et 1990, du complément de prélèvement social qui lui a été assigné au titre de 1989 et du supplément de contribution sociale généralisée mis à sa charge au titre de l'année 1990 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 13 937,52 F en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
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C
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 janvier 2004 :
- le rapport de M. MARTIN, premier conseiller,
- et les conclusions de M. LALAUZE, commissaire du gouvernement ;
Considérant que l'administration a réintégré dans les résultats de la société Alençon-Boissons-Distribution, qui exploite un commerce de vente de boissons en gros et au détail, des recettes qui avaient été omises au titre des exercices clos en 1989 et 1990 ; qu'après avoir mis en oeuvre la procédure prévue par les dispositions de l'article 117 du code général des impôts, l'administration a regardé M. X, président-directeur général et associé majoritaire de la société Alençon-Boissons-Distribution pendant la période en litige, comme étant le bénéficiaire des revenus réputés distribués par cette société, et l'a assujetti à des suppléments d'impôt sur le revenu, de prélèvement social et de contribution sociale généralisée au titre de ces deux années ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article 109-1 du code général des impôts relatif aux revenus de capitaux mobiliers : Sont considérés comme revenus distribués : 1. Tous les bénéfices et produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; qu'aux termes de l'article 110 du même code : Pour l'application de l'article 109-1-1°, les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés ; qu'enfin aux termes de l'article 117 du même code : Au cas où la masse des revenus distribués excède le montant total des distributions tel qu'il résulte des déclarations de la personne morale..., celle-ci est invitée à fournir à l'administration, dans un délai de trente jours, toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires de l'excédent de distribution... ;
En ce qui concerne l'existence et le montant des revenus distribués :
Considérant qu'il appartient à l'administration de justifier de l'existence et du montant des bénéfices réintégrés dans les bases de l'impôt sur les sociétés assigné à la société, qui sont à l'origine de cette distribution, dès lors que M. X a refusé les redressements qui lui ont été notifiés ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à l'occasion de la vérification de comptabilité dont la société a été l'objet, le vérificateur a calculé, pour chacune des 59 boissons sélectionnées par lui, un stock théorique par exercice égal à la différence entre, d'une part, la somme des unités stockées en début d'exercice et achetées et, d'autre part, les unités vendues ; que la comparaison entre ces stocks théoriques et les stocks déclarés a permis de mettre en évidence des écarts importants, positifs ou négatifs, au titre des exercices clos en 1989 et 1990 ; que, par ailleurs, la société n'a pas été en mesure de justifier le montant de ses ventes au détail réalisées durant une période de 141 jours ouvrés de l'exercice 1988/1989 et 27 jours ouvrés de l'exercice 1989/1990, faute pour elle d'avoir pu présenter des bandes de caisse enregistreuse qu'elle a déclaré avoir égarées ; que si M. X fait valoir que les écarts susmentionnés sont dus à des erreurs d'inventaire, à l'absence de prise en compte dans la comptabilité de la société des entrées et sorties de marchandises liées à une pratique courante de dépannage entre professionnels, à des erreurs commises par le vérificateur dans le dépouillement des factures de la société, à une évaluation nécessairement imprécise des ventes au détail à partir des bandes de caisse, ces allégations, non assorties d'éléments de preuve suffisants, ne sauraient justifier l'importance des écarts constatés ; qu'eu égard à la gravité des irrégularités et anomalies susmentionnées, et nonobstant la circonstance, invoquée par le requérant, que le rehaussement du chiffre d'affaires déclaré est d'une faible importance relative, l'administration était en droit d'écarter la comptabilité de la société comme dépourvue de valeur probante, et de reconstituer le bénéfice de l'entreprise ;
Considérant que pour reconstituer le chiffre d'affaires et le bénéfice de la société, le vérificateur n'a procédé au redressement des recettes qu'à concurrence du montant des ventes reconstituées des produits dont il avait déterminé, de la manière qui a été indiquée précédemment, qu'ils ne figuraient plus physiquement dans les stocks ; que ces recettes manquantes ont été calculées en faisant le produit du prix moyen de vente pondéré par les quantités manquantes pour les exercices clos en 1989 et 1990 ; que, pour critiquer la méthode de reconstitution, le requérant soutient que l'administration aurait dû prendre en compte non seulement les écarts positifs mais aussi les écarts négatifs qu'elle avait révélés ; que toutefois l'absence de prise en compte des écarts négatifs ne peut, par elle-même, avoir pour effet de conduire à une exagération des rehaussements de recettes dès lors que ces écarts auraient pu être regardés comme le révélateur d'achats dissimulés ; que si M. X soutient que l'estimation du montant des ventes au détail par produit ne pouvait être qu'approximative du fait que des produits différents pouvaient avoir un prix unitaire identique, il n'apporte aucun élément de nature à permettre d'apprécier l'incidence de cette critique sur les résultats retenus par le vérificateur ; que si le vérificateur n'a pas pris en compte de façon spécifique les pertes consécutives à la casse de bouteilles, dont le requérant prétend qu'elles représentent pour chaque exercice une perte de 2 % du stock sans assortir cette affirmation de pièces justificatives, il résulte de l'instruction que ces pertes ont été prises en compte par le biais de l'arrondissement des chiffres retenus par le service ; que M. X ne peut utilement faire valoir que l'administration n'a utilisé qu'une seule méthode de reconstitution en invoquant sur le fondement de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales une instruction administrative qui ne formule, à l'intention des agents des impôts, que de simples recommandations en matière de reconstitution de chiffre d'affaires ; que le moyen du requérant tiré de ce que le taux de marge brute n'a pas été contesté par le vérificateur est inopérant eu égard à la méthode adoptée pour la reconstitution ; qu'ainsi l'administration doit être regardée comme apportant la preuve de l'existence et du montant des revenus distribués résultant des redressements apportés aux bénéfices de la société ;
En ce qui concerne l'appréhension des revenus distribués :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, dans sa réponse à la demande que lui avait faite, l'administration, par application des dispositions de l'article 117 précité, la société Alençon-Boissons-Distribution, représentée par son nouveau président-directeur général, M. Y, a désigné comme bénéficiaire des distributions M. X en mentionnant toutefois que cette désignation ne valait pas reconnaissance de la perception des produits distribués ; que malgré cette formulation, et alors que le requérant fait valoir que cette désignation avait pour seul objet d'éviter de voir appliquer à la société les pénalités prévues à l'article 1763 A du code général des impôts, ce document doit être regardé comme valant désignation formelle de M. X comme bénéficiaire de ces distributions ; que ce dernier, président-directeur général de la société pendant les exercices concernés, possédait 4 965 actions sur 5 000 ; qu'il disposait des pouvoirs les plus étendus et exerçait la responsabilité effective de la gestion ; qu'il devait, dans les circonstances de l'espèce, être regardé comme le maître de l'affaire ; que, dès lors, nonobstant la circonstance qu'elle n'a pas engagé un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle afin de vérifier l'existence d'un enrichissement personnel, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve de l'appréhension par M. X des sommes en litige au cours des années 1989 et 1990 ; qu'à cet égard M. X ne saurait utilement invoquer la documentation administrative de base 4J-1121, n°s 16 et 17, dès lors que celle-ci n'ajoute rien à la loi fiscale ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Caen a rejeté le surplus de ses demandes ;
Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui en appel et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er :
La requête de M. X est rejetée.
Article 2 :
Le présent arrêt sera notifié à M. René X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
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