La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/05/2003 | FRANCE | N°99NT02206

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ere chambre, 28 mai 2003, 99NT02206


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 24 août 1999, présentée pour la société Coopérative d'insémination artificielle (SCIA), qui a son siège chez M. X..., demeurant La Moinerie, aux Champs Géraux (22630), par Me HELOUET, avocat au barreau de Rennes ;

La société Coopérative d'insémination artificielle demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9303614 du Tribunal administratif de Rennes en date du 17 juin 1999 qui a rejeté sa demande tendant à titre principal à la décharge et à titre subsidiaire à la réduction des suppléments d'impôt

sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des années 1986 à 1988 ;

2°)...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 24 août 1999, présentée pour la société Coopérative d'insémination artificielle (SCIA), qui a son siège chez M. X..., demeurant La Moinerie, aux Champs Géraux (22630), par Me HELOUET, avocat au barreau de Rennes ;

La société Coopérative d'insémination artificielle demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9303614 du Tribunal administratif de Rennes en date du 17 juin 1999 qui a rejeté sa demande tendant à titre principal à la décharge et à titre subsidiaire à la réduction des suppléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des années 1986 à 1988 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

3°) de décider qu'il sera sursis à l'exécution du jugement ;

.............................................................................................................

C CNIJ n° 19-04-01-04-02

n° 19-04-02-01-04-04

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 72-516 du 27 juin 1972 amendant l'ordonnance n° 67-813 du 26 septembre 1987 relative aux sociétés coopératives agricoles, à leurs unions, à leurs fédérations, aux sociétés d'intérêt collectif agricole et aux sociétés mixtes d'intérêt agricole ;

Vu le code rural ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 avril 2003 :

- le rapport de M. ISAÏA, président,

- les observations de Me MALLET, substituant Me HELOUET, avocat de la société Coopérative d'insémination artificielle,

- et les conclusions de Mme MAGNIER, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant que la société Coopérative d'insémination artificielle d'Evran (SCIA) ne peut utilement invoquer, en se fondant sur l'article L.80 A du livre des procédures fiscales, une note du 27 mars 1963 qui, traitant d'une question touchant à la procédure d'imposition ne peut pas être regardée comme comportant une interprétation de la loi fiscale au sens dudit article L.80 A du livre des procédures fiscales ; que, par ailleurs, si ladite note, qui prévoit que lorsqu'un agent de l'administration constate que le fonctionnement d'une société coopérative agricole n'est pas conforme aux dispositions légales ou réglementaires régissant la coopération agricole, il doit adresser au directeur des services fiscaux dont il dépend un rapport relatant avec précision les faits constatés, a un caractère réglementaire, elle n'a pas été publiée au Journal officiel de la République française ; que, dans ces conditions, cette note n'est pas opposable aux contribuables et ne peut pas non plus être invoquée par eux ; qu'ainsi le moyen tiré d'une prétendue méconnaissance de la règle de procédure qu'elle énonce ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne l'assujettissement à l'impôt sur les sociétés ;

Considérant qu'aux termes de l'article 207 du code général des impôts dans sa rédaction applicable aux années en litige : 1. Sont exonérés d'impôt sur les sociétés : ... 2° Sauf pour les opérations effectuées avec des non-sociétaires et à condition qu'elles fonctionnent conformément aux dispositions qui les régissent : Les sociétés coopératives agricoles d'approvisionnement et d'achat ; 3° A condition qu'elles fonctionnent conformément aux dispositions qui les régissent, les sociétés coopératives de production, de transformation, conservation et vente de produits agricoles ainsi que les unions de sociétés coopératives de production, transformation, conservation et vente de produits agricoles... ;

Considérant que la société Coopérative d'insémination artificielle d'Evran qui bénéficiait de l'exonération prévue à l'article 207-1-2° et 3° du code général des impôts, a été soumise à l'impôt sur les sociétés au titre des années 1986, 1987 et 1988 au motif qu'elle ne fonctionnait pas conformément aux dispositions qui régissent les sociétés coopératives agricoles ;

Considérant, en premier lieu, que la société requérante, qui avait été créée en 1963, était tenue de mettre ses statuts en conformité avec les dispositions de la loi n° 72-516 du 27 juin 1972 avant le 1er octobre 1975, en application de l'article 20 de cette même loi ; que si, à la suite d'une assemblée générale extraordinaire réunie le 3 décembre 1986, elle a effectivement apporté des modifications à ses statuts il ne résulte pas de l'instruction que lesdites modifications auraient été discutées en présence d'au moins la moitié de ses associés inscrits à la date de la convocation et adoptées à la majorité des deux tiers des membres présents ou représentés comme le prévoient les dispositions de l'article R.524-15 du code rural ; qu'ainsi, au 1er janvier de chacune des années en litige, les statuts de la société requérante n'étaient pas conformes aux dispositions de la loi du 27 juin 1972 ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L.522-1 du code rural : Peuvent être associés coopérateurs d'une société coopérative agricole : 1° Toute personne physique ou morale ayant la qualité d'agriculteur ou de forestier dans la circonscription de la société coopérative agricole ; 2° Toute personne physique ou morale possédant dans cette circonscription des intérêts agricoles qui correspondent à l'objet social de la société coopérative et souscrivant l'engagement d'activité prévu par le a) du premier alinéa de l'article L.521-3 ; 3° Tout groupement agricole d'exploitation en commun de la circonscription ; 4° Toutes associations et syndicats d'agriculteurs ayant avec la coopérative agricole un objet commun ou connexe ; 5° D'autres sociétés coopératives agricoles, unions de ces sociétés et sociétés d'intérêt collectif agricole, alors même que leurs sièges sociaux seraient situés en dehors de la circonscription de la société coopérative agricole ; que, par ailleurs, en vertu de l'article L.522-3 du même code les sociétés coopératives agricoles peuvent autoriser l'admission d'associés non coopérateurs, à condition que cela soit prévu dans leurs statuts ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Coopérative d'insémination artificielle d'Evran, dont la circonscription territoriale telle qu'elle est fixée par ses statuts correspond au département des Côtes d'Armor, compte parmi ses membres 119 exploitants agricoles installés hors de sa circonscription, mais aussi la société civile Centre d'insémination artificielle de La Crespelle, sise en Ille-et-Vilaine, la société coopérative ouvrière de production anonyme Amélioratrice Bovine du Poitou et de la Vendée, sise en Vendée, et les sociétés Pil'art et Bove, dont les sièges sociaux se situent dans le Rhône ; que la société requérante n'établit pas que les membres susmentionnés posséderaient dans sa circonscription des intérêts agricoles correspondant à son objet social et auraient souscrit l'engagement prévu par le a) du premier alinéa de l'article L.521-3, conditions exigées par le 2° de l'article L.522-1 précité du code rural pour qu'une personne physique ou morale puisse devenir associé coopérateur d'une coopérative agricole sans être installée dans la circonscription de celle-ci ou sans avoir la qualité d'agriculteur ; que, par suite, de telles adhésions étaient contraires aux dispositions précitées des articles L.522-1 et L.522-3 du code rural, qui énumèrent de façon limitative les personnes morales et physiques admises comme associé coopérateur ou non coopérateur au sein des sociétés coopératives agricoles ; qu'à cet égard la société requérante ne saurait utilement invoquer, sur le fondement de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales, les dispositions du paragraphe 20 de la documentation administrative de base 4 H-1312 en date du 1er mars 1995, dès lors qu'en tout état de cause lesdites dispositions n'ajoutent rien à la loi fiscale ; qu'ainsi, en accueillant les adhésions dont il s'agit, la société coopérative d'insémination artificielle d'Evran n'a pas respecté les dispositions législatives et réglementaires régissant la coopération agricole ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article R.523-1 du code rural : Le capital des sociétés coopératives agricoles est constitué par des parts nominatives indivisibles souscrites par chacun des associés coopérateurs et transmissibles dans les conditions prévues aux articles R.522-5 et R.523-4. Ces parts sont libérées à la souscription. Toutefois, les statuts peuvent prévoir la faculté d'une délibération partielle au moins égale au quart à la souscription, le solde étant exigible en une ou plusieurs fractions dans un délai maximum de cinq ans à compter du jour de la souscription ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que 24 parts sociales de 50 francs, représentant un montant de 1 200 F sur un capital de 8 000 F et souscrites avant le 1er janvier 1986, n'ont jamais été libérées, en contravention avec l'article R.523-1 précité du code rural et en méconnaissance du paragraphe 4 de l'article 12 des statuts de la société requérante ; que, par ailleurs, de nouvelles parts sociales, d'un montant de 10 F, souscrites en 1986 et 1987, n'ont pas été libérées, comme elles devaient l'être, dès la souscription, par des versements opérés par les nouveaux adhérents, mais l'ont été tardivement, par des jeux d'écritures opérés dans les comptes de la société et aboutissant à une imputation sur des services rendus aux éleveurs ; qu'en l'absence de dispositions dans les statuts prévoyant une libération partielle des parts sociales lors de la souscription, cette façon de procéder était contraire aux dispositions au code rural ;

Considérant, en dernier lieu, que sur l'ensemble de la période litigieuse la société requérante s'est approvisionnée en partie auprès de différents organismes qui n'étaient pas au nombre de ceux prévus à cette fin par les articles 3 et 3 bis de ses statuts ; qu'ainsi, elle ne fonctionnait pas conformément à ses statuts ;

Considérant que les manquements sus-analysés constituent autant de motifs permettant à l'administration de soutenir à bon droit que la société requérante ne fonctionnait pas conformément à ses statuts et aux dispositions législatives et réglementaires régissant la coopération agricole et qu'ainsi, elle ne satisfaisait pas aux conditions posées par l'article 207 précité du code général des impôts pour pouvoir être exonérée d'impôt sur les sociétés ; que, par suite, c'est à bon droit que le service a remis en cause ladite exonération au titre des trois années litigieuses ;

En ce qui concerne la réintégration des provisions pour dépréciation de stock ;

Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts : 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant... notamment... 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou à des charges nettement précisées et que des évènements en cours rendent probables... ; qu'aux termes de l'article 38 du même code 3°... les stocks sont évalués au prix de revient ou au cours du jour de la clôture de l'exercice, si ce cours est inférieur au prix de revient... ;

Considérant que la société requérante a constitué à la clôture des exercices en litige une provision pour dépréciation de stock, afin de faire face à la diminution de la valeur marchande des semences provenant de la société civile de La Crespelle ; que, toutefois, elle n'établit pas que la valeur probable de réalisation des semences au 1er janvier de chacun desdits exercices serait inférieure à leur prix de revient ; qu'ainsi, elle n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, de la réalité de la dépréciation qu'elle invoque ; que, dès lors, c'est à bon droit que l'administration a réintégré la provision dont il s'agit dans ses résultats des années 1986, 1987 et 1988 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Coopérative d'insémination artificielle d'Evran n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions de la société Coopérative d'insémination artificielle d'Evran tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la société Coopérative d'insémination artificielle d'Evran la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er :

La requête de la société Coopérative d'insémination artificielle d'Evran est rejetée.

Article 2 :

Le présent arrêt sera notifié à la société Coopérative d'insémination artificielle d'Evran et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

1

- 6 -


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 99NT02206
Date de la décision : 28/05/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. ISAIA
Rapporteur public ?: Mme MAGNIER
Avocat(s) : HELOUET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2003-05-28;99nt02206 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award