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31/07/2001 | FRANCE | N°99NT02619;00NT00966

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1e chambre, 31 juillet 2001, 99NT02619 et 00NT00966


Vu, 1 ) sous le n 99NT02619, la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la Cour les 2 novembre et 17 décembre 1999, présentés par Mme X... demeurant ... (35000) Rennes ;
Mme X... demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 94.3176-94.3177 en date du 23 septembre 1999 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a, d'une part, sur la demande enregistrée sous le n 94.3176 tendant à la décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels elle a été assujettie au titre des années 1989, 1990 et 1991 et des pénalités dont ils ont été assort

is, ordonné un supplément d'instruction avant de statuer sur les conclusi...

Vu, 1 ) sous le n 99NT02619, la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la Cour les 2 novembre et 17 décembre 1999, présentés par Mme X... demeurant ... (35000) Rennes ;
Mme X... demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 94.3176-94.3177 en date du 23 septembre 1999 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a, d'une part, sur la demande enregistrée sous le n 94.3176 tendant à la décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels elle a été assujettie au titre des années 1989, 1990 et 1991 et des pénalités dont ils ont été assortis, ordonné un supplément d'instruction avant de statuer sur les conclusions se rapportant aux années 1990 et 1991, d'autre part, rejeté le surplus de cette demande et la demande enregistrée sous le n 94.3177 tendant à la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée de la période correspondant aux années 1989, 1990 et 1991 et des pénalités dont il a été assorti ;
2 ) de prononcer les décharges demandées ;
3 ) d'ordonner que, jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la requête, il soit sursis à l'exécution des articles de rôles et de l'avis de mise en recouvrement correspondants ;
4 ) de confirmer le maintien du sursis de paiement se rapportant aux compléments d'impôt sur le revenu des années 1990 et 1991 ;
5 ) d'ordonner la réduction des inscriptions hypothécaires ;
6 ) de condamner l'Etat aux dépens et à verser les sommes de 20 000 F et 10 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu, 2 ) sous le n 00NT00966 la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 31 mai 2000, présentée par Mme X... ;
Mme X... demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 94.3176-94.3177 en date du 3 février 2000 par lequel le Tribunal administratif de Rennes, à la suite du supplément d'instruction qu'il avait ordonné par son jugement du 23 septembre 1999, a rejeté ses demandes tendant à la décharge, d'une part, des compléments d'impôts sur le revenu auxquels elle a été assujettie au titre des années 1989, 1990 et 1991, d'autre part, du complément de TVA qui lui a été réclamé au titre de la même période par avis de mise en recouvrement du 9 septembre 1992, ainsi que des pénalités dont ces impositions ont été assorties ;
2 ) de prononcer les décharges demandées ;
3 ) d'ordonner que, jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la requête, il soit sursis à l'exécution des articles et rôles et de l'avis de mise en recouvrement correspondants ;
4 ) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 20 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 juillet 2001 :
- le rapport de M. AUBERT, président,
- et les conclusions de M. GRANGE, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées sont présentées par la même requérante et concernent les mêmes impositions ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
En ce qui concerne la régularité des jugements attaqués :
Considérant, d'une part, qu'en ordonnant, par son jugement en date du 23 septembre 1999, un supplément d'instruction contradictoire aux fins pour les parties de présenter toutes observations et justifications sur les charges à retenir pour déterminer les bénéfices industriels et commerciaux de Mme X... imposables au titre des exercices clos en 1990 et 1991, le tribunal administratif ne peut être regardé comme ayant ordonné une vérification de la comptabilité de l'entreprise de l'intéressée ; que d'ailleurs celle-ci ne saurait, en tout état de cause, se plaindre d'une telle mesure d'instruction qui, dans son intérêt, pouvait lui permettre de justifier des charges d'exploitation qu'elle revendiquait et réduire ainsi le montant des bases des impositions en litige ; que le tribunal a pu, sans contradiction dans les motifs de son jugement, et après avoir considéré que la comptabilité était dépourvue de caractère probant, faire porter la mesure d'instruction en cause sur certains des éléments de cette comptabilité dont la requérante se prévalait devant lui ;
Considérant, d'autre part, qu'à supposer même que, contrairement à ce qu'a estimé le tribunal administratif dans son jugement du 3 février 2000, l'impossibilité de procéder à la mesure d'instruction susmentionnée n'incomberait pas à Mme X..., cette circonstance est par elle-même sans incidence sur la régularité formelle dudit jugement ;
En ce qui concerne les conclusions aux fins de décharge des impositions :
Considérant, en premier lieu, que la vérification de la comptabilité de l'activité de brocante-antiquité exercée par Mme X... s'est déroulée dans les locaux professionnels de l'intéressée où le vérificateur s'est rendu à six reprises ; que, par les documents qu'elle produit, Mme X... n'établit pas qu'elle aurait été privée d'un débat oral et contradictoire avec le vérificateur ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L.73 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors en vigueur : "Peuvent être évalués d'office : 1 Le bénéfice imposable des contribuables qui perçoivent des revenus provenant d'entreprises industrielles, commerciales ou artisanales ou d'exploitations agricoles lorsque ces contribuables sont imposables selon un régime de bénéfice réel et que la déclaration annuelle des résultats n'a pas été déposée dans le délai légal ... Les dispositions de l'article L.68 sont applicables dans les cas d'évaluation d'office prévus aux 1 et 2 " ; qu'en vertu de l'article L.68 du même livre, la procédure d'imposition d'office n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une première mise en demeure ; qu'il résulte de l'instruction que, s'agissant des bénéfices industriels et commerciaux, Mme X..., qui était imposable selon le régime du bénéfice réel depuis le 1er janvier 1988, n'a pas souscrit la déclaration annuelle de ses résultats de l'exercice clos en 1989, malgré la mise en demeure qui lui a été adressée à cette fin le 13 juin 1990, et se trouvait dès lors en situation d'évaluation d'office desdits bénéfices ; que c'est, par suite, à bon droit que, d'une part, ses bénéfices imposables de l'année 1989 ont été évalués d'office, par une notification de redressement du 21 août 1990, et ont donné lieu à la mise en recouvrement de l'impôt sur le revenu correspondant le 30 septembre 1990 et que, d'autre part, sans méconnaître les dispositions précitées du livre des procédures fiscales, l'administration, dans le délai de reprise, a pu ultérieurement, après vérification de la comptabilité de Mme X..., qui n'avait toujours pas produit la déclaration sollicitée, notifier de nouveaux redressements selon la procédure d'évaluation d'office, au titre des mêmes bénéfices industriels et commerciaux de l'année 1989 ; que, par ailleurs, lorsque l'administration constate le dépassement, pour la seconde année consécutive, des chiffres limites du forfait, aucune disposition législative ou réglementaire ne l'oblige à informer le contribuable de ce dépassement préalablement à l'envoi d'une mise en demeure de produire la déclaration relative au régime réel ; que la documentation administrative 4 G 2326 invoquée à cet égard par la requérante concerne la procédure d'imposition et ne constitue pas, par suite, une interprétation du texte fiscal au sens des dispositions de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales et qui serait opposable à l'administration sur le fondement de ces dispositions ;

Considérant, en troisième lieu, que, pour établir que la notification à Mme X... de la mise en demeure de déposer sa déclaration de résultats de l'exercice clos en 1990 qui lui a été adressée le 12 juin 1991 a été régulièrement effectuée le 13 juin 1991, l'administration a produit la copie de l'enveloppe de réexpédition du pli contenant cette mise en demeure ; que, toutefois, si cette enveloppe mentionne que le pli a été présenté le 13 juin 1991 et a été mis en instance au bureau du service de la poste de Rennes-République, elle ne comporte pas d'autres mentions claires et précises que le destinataire aurait été avisé, par le dépôt à l'adresse mentionnée d'un avis de passage, de la mise en instance du pli recommandé avant le renvoi de ce dernier au service des impôts expéditeur ; que, dans ces conditions, Mme X... ne peut pas être regardée comme ayant été régulièrement mise en demeure de déposer ladite déclaration ; que, par suite, la procédure d'évaluation d'office de ses bénéfices industriels et commerciaux de 1990, ne pouvait être appliquée, au regard des prescriptions de l'article L.68 du livre des procédures fiscales et Mme X... est, dès lors, fondée à demander la décharge du complément d'impôt sur le revenu auquel elle a été assujettie au titre de ses bénéfices industriels et commerciaux de 1990, établis selon cette procédure ;
Considérant, en quatrième lieu, que le complément d'impôt sur le revenu auquel Mme X... a été assujettie au titre de l'année 1991 à raison des bénéfices industriels et commerciaux de ladite année a été établi selon la procédure contradictoire ; que la circonstance que, dans la notification de redressement du 21 juillet 1992, il n'ait pas été tenu compte des résultats qu'elle avait déclarés le 22 mai 1992, est par elle-même sans incidence sur le caractère contradictoire de la procédure de redressement mise en oeuvre au cours de laquelle l'intéressée a d'ailleurs pu faire valoir à cet égard ses observations ;
Considérant, en cinquième lieu, que la notification de redressement du 21 juillet 1992, qui comporte la mention des bases et des éléments ayant servi au calcul de la taxe sur la valeur ajoutée, établie selon la procédure de taxation d'office et réclamée à Mme X... au titre de la période du 1er janvier 1989 au 31 mars 1992, est ainsi suffisamment motivée au regard des prescriptions de l'article L.76 du livre des procédures fiscales ; que, dès lors qu'elle mentionne les éléments de la méthode ayant permis au vérificateur de déterminer les bénéfices industriels et commerciaux de 1991 et qui étaient en l'espèce suffisants pour permettre à Mme X... de présenter utilement ses observations sur ce point, ladite notification est également suffisamment motivée au regard des prescriptions de l'article L.57 du même livre ;
Considérant, en sixième lieu, que l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne saurait être utilement invoqué pour contester la procédure d'imposition ;

Considérant, enfin, qu'il appartient toujours au contribuable de justifier tant du montant de ses charges que de leur exacte inscription en comptabilité, c'est à dire du principe même de leur déductibilité ; que si Mme X..., en contestant le jugement du tribunal administratif en date du 3 février 2000, doit être regardée comme persistant dans sa demande tendant à la prise en compte de charges d'exploitation pour la détermination de ses bénéfices industriels et commerciaux imposables au titre de l'année 1991, elle n'apporte aucune justification à l'appui de ses conclusions qui ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;
En ce qui concerne les conclusions aux fins de main-levée d'hypothèques ;
Considérant que ces conclusions sont irrecevables comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître ;
En ce qui concerne les conclusions aux fins de dommages-intérêts :
Considérant que Mme X... n'est pas recevable à demander au juge de l'impôt, dans le cadre du litige tendant à la décharge des impositions, la condamnation de l'administration à réparer les préjudices qu'elle aurait subis à la suite d'opérations d'établissement ou de recouvrement de l'impôt ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X... est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, en date des 23 septembre 1999 et 3 février 2000, le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la décharge des compléments d'impôt sur le revenu mis en recouvrement le 28 février 1993 au titre des bénéfices industriels et commerciaux imposables de l'année 1990 ;
Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, anciennement codifiées sous l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, et de condamner l'Etat à payer à Mme X..., les sommes qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Mme X... est déchargée du complément d'impôt sur le revenu mis en recouvrement le 28 février 1993 à raison des bénéfices industriels et commerciaux de l'année 1990.
Article 2 : Les jugements du Tribunal administratif de Rennes en date des 23 septembre 1999 et 3 février 2000 sont réformés en ce qu'il ont de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions des requêtes de Mme X... est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme X... et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 99NT02619;00NT00966
Date de la décision : 31/07/2001
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - TEXTES FISCAUX - OPPOSABILITE DES INTERPRETATIONS ADMINISTRATIVES (ART - L - 80 A DU LIVRE DES PROCEDURES FISCALES) - ABSENCE.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - TEXTES FISCAUX - CONVENTIONS INTERNATIONALES.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - REGLES GENERALES D'ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - CONTROLE FISCAL - VERIFICATION DE COMPTABILITE - GARANTIES ACCORDEES AU CONTRIBUABLE.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - REGLES GENERALES D'ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - REDRESSEMENT - NOTIFICATION DE REDRESSEMENT - MOTIVATION.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - QUESTIONS COMMUNES - COMPETENCE JURIDICTIONNELLE.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - DEMANDES ET OPPOSITIONS DEVANT LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF - REGULARITE DU JUGEMENT.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - REQUETES D'APPEL - FORMES ET CONTENU DE LA REQUETE.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - DETERMINATION DU BENEFICE NET - CHARGES DIVERSES.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - BENEFICE REEL - REDRESSEMENTS.


Références :

CGI Livre des procédures fiscales L73, L68, L80 A, L76, L57
Code de justice administrative L761-1
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. AUBERT
Rapporteur public ?: M. GRANGE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2001-07-31;99nt02619 ?
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