Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 27 septembre 1996, présenté par le ministre de l'aménagement du territoire, de la ville et de l'intégration ;
Le ministre demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 92-4833 du 25 juillet 1996 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de Mme Fanny Y..., la décision du 21 novembre 1991, maintenue le 14 octobre 1992, par laquelle le ministre des affaires sociales et de l'intégration avait déclaré irrecevable la demande de naturalisation de l'intéressée ;
2 ) de rejeter la demande présentée par Mme Y... devant le tribunal administratif ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la nationalité française ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, notamment son article R.27 ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 avril 1998 :
- le rapport de Mme LISSOWSKI, premier conseiller,
- les observations de Me X..., représentant Me KOHN, avocat de Mme Y...,
- et les conclusions de Mme JACQUIER, commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité du recours du ministre chargé des naturalisations :
Sur la recevabilité de la demande de première instance de Mme Y... :
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la notification de la décision du 21 novembre 1991 rejetant la demande de naturalisation de Mme Y... ait comporté la mention des voies et délais de recours ; qu'ainsi, le délai de recours contentieux n'ayant pas commencé à courir en vertu de l'article R.104 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la requête de Mme Y..., enregistrée au greffe du tribunal administratif le 20 juillet 1992 était recevable, alors même que la lettre qu'elle a adressée le 23 décembre 1991 à l'administration aurait constitué un recours gracieux dont le rejet serait devenu définitif ;
Sur la légalité de la décision du 21 novembre 1991 :
Considérant qu'aux termes de l'article 61 du code de la nationalité applicable à la décision attaquée : "Nul ne peut être naturalisé s'il n'a en France sa résidence au moment du décret de naturalisation" ; qu'il résulte de ces dispositions que la demande de naturalisation n'est pas recevable lorsque l'intéressé n'a pas fixé en France de manière stable le centre de ses intérêts ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme Y..., de nationalité argentine, réside en France depuis 1976 ; que si les ressources dont elle bénéficie proviennent de l'activité professionnelle de son mari, ressortissant australien et fonctionnaire international à l'UNESCO, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'emploi de M. Y... relèverait d'un poste réservé par quota à l'Etat australien, ni que l'intéressé pourrait être regardé comme ayant le statut d'un agent de l'Etat dont il a la nationalité ; que, dans ces conditions, alors même que les traitements de M. Y... ne sont pas assujettis à l'impôt sur le revenu en France, en application d'une convention internationale, le ministre ne pouvait légalement considérer que Mme Y... n'avait pas transféré sa résidence en France au motif qu'elle bénéficierait de ressources provenant de l'étranger ; que, par suite, il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé les décisions susvisées du 21 novembre 1991 et du 14 octobre 1992 ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel de condamner l'Etat à verser à Mme Y... la somme de 6 000 F ;
Article 1er : Le recours du ministre de l'aménagement du territoire, de la ville et de l'intégration est rejeté.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser à Mme Y... la somme de six mille francs (6 000 F) au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 3 : Le surplus des conclusions de Mme Y... tendant au bénéfice de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'emploi et de la solidarité et à Mme Y....