Vu enregistrée au greffe de la Cour le 7 septembre 1995, la requête présentée pour la société civile immobilière de la Croix de Kerno, ayant son siège social ... (Mayenne), par Me de X..., avocat au barreau de Laval ;
La S.C.I de la Croix de Kerno demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 90-675 en date du 29 juin 1995 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 5 février 1990 par laquelle le maire de l'Ile-aux-Moines lui a délivré un certificat d'urbanisme négatif pour un terrain situé au lieu-dit "Kerno" à l'Ile-aux-Moines ;
2 ) d'annuler ladite décision ;
3 ) de condamner la commune de l'Ile-aux-Moines à lui verser 10 000 F en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 janvier 1998 :
- le rapport de Mme THOLLIEZ, conseiller,
- les observations de Me GOSSELIN, avocat de la commune de l'Ile-aux-Moines,
- et les conclusions de Mme DEVILLERS, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L.146-6 du code de l'urbanisme : "les documents et décisions relatifs ... à l'occupation et à l'utilisation des sols préservent les espaces terrestres et marins, sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral ..." ; que l'article R.146-1 du même code dispose que : "en application du premier alinéa de l'article L.146-6, sont préservés, dès lors qu'ils constituent un site ou un paysage remarquable ou caractéristique du patrimoine naturel et culturel du littoral ... g) les parties naturelles des sites inscrits ... en application de la loi du 2 mai 1930 ..." ; et qu'aux termes de l'article L.410-1 du même code : " ...Lorsque toute demande d'autorisation pourrait, du seul fait de la localisation du terrain, être refusée en fonction des dispositions d'urbanisme, et, notamment, des règles générales d'urbanisme, la réponse à la demande de certificat d'urbanisme est négative ..." ;
Considérant que les parcelles D 362 et D 363 dont la S.C.I de la Croix de Kerno est propriétaire au lieu-dit La Croix de Kerno, dans l'Ile-aux-Moines, et qui ont fait l'objet du certificat d'urbanisme négatif attaqué, délivré le 5 février 1990 par le maire de l'Ile-aux-Moines, sont situées dans le site inscrit du Golfe du Morbihan ; qu'il ressort des pièces du dossier que si ces parcelles sont proches sur leur bordure est de terrains comportant quelques constructions, elles constituent, à l'écart du hameau, un ensemble d'une superficie de plus d'un hectare couvert de landes et de bosquets, et doivent, ainsi, être regardées comme constituant une partie naturelle du site inscrit ; qu'eu égard à leur situation dominante, le long de la côte rocheuse du sud de l'Ile-aux-Moines, elles sont visibles depuis la mer et permettent de découvrir le Golfe du Morbihan et les abords de l'Ile ; que les caractéristiques paysagères de cet ensemble en font un site remarquable au sens des dispositions susrappelées ; que, par suite, le maire de l'Ile-aux-Moines a pu se fonder sur lesdites dispositions pour délivrer, le 5 février 1990, un certificat d'urbanisme négatif à la S.C.I de la Croix de Kerno ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le motif opposé par le maire était juridiquement fondé et l'obligeait, en vertu des dispositions précitées de l'article L.410-1 du code de l'urbanisme, à délivrer un certificat d'urbanisme négatif à la S.C.I de la Croix de Kerno ; que, dans ces conditions, les autres moyens de la requête tirés du défaut de motivation du certificat d'urbanisme et de l'absence de consultation préalable de l'architecte des bâtiments de France et de la commission des sites sont inopérants ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la S.C.I de la Croix de Kerno n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :
Considérant qu'aux termes de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;
Considérant que la S.C.I de la Croix de Kerno succombe dans la présente instance ; que sa demande tendant à ce que la commune de l'Ile-aux-Moines soit condamnée à lui verser une somme au titre des frais qu'elle a exposés doit, en conséquence, être rejetée ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la S.C.I de la Croix de Kerno à payer à la commune de l'Ile-aux-Moines la somme de 6 000 F ;
Article 1er : La requête de la S.C.I de la Croix de Kerno est rejetée.
Article 2 : La S.C.I de la Croix de Kerno versera à la commune de l'Ile-aux-Moines une somme de 6 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la S.C.I de la Croix de Kerno, à la commune de l'Ile-aux-Moines et au ministre de l'équipement, des transports et du logement.