Vu la requête, enregistrée le 18 février 1993 sous le n 93NT00182, présentée par le MINISTRE DU BUDGET ;
Le ministre demande à la cour :
1°) de réformer le jugement en date du 15 octobre 1992 par lequel le tribunal administratif de Rouen a accordé à la S.A.R.L SOLACHAR la réduction des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices 1981, 1982, 1983 et 1984 dans les rôles de la commune de Rouen ;
2°) de remettre, à concurrence de bases d'imposition de 526 237 F au titre de 1981, 109 113 F au titre de 1982, 50 800 F au titre de 1983 et de 48 030 F au titre de 1984, les impositions contestées à la charge de la S.A.R.L SOLACHAR ;
3°) à titre subsidiaire, de rétablir la S.A.R.L SOLACHAR au rôle de l'impôt sur les sociétés initialement établi, au titre de l'exercice 1981, pour un montant en droits et pénalités de 152 125 F et de réformer en ce sens le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 février 1995 :
- le rapport de M. Margueron, conseiller,
- et les conclusions de M. Cadenat, commissaire du gouvernement,
Considérant que la S.A.R.L Société des Lavoirs Charbonniers de Rouen (SOLACHAR) a contesté devant le tribunal administratif de Rouen la réintégration par l'administration, dans ses bénéfices imposables à l'impôt sur les sociétés au titre de chacun des exercices clos en 1981, 1982, 1983 et 1984, d'une provision qu'elle avait constituée à raison du risque d'arasement de l'usine où elle exerce son activité de lavage et criblage de charbon, à l'échéance de l'autorisation d'occupation du domaine portuaire dont elle bénéficiait jusqu'au 31 décembre 1985, en vertu d'une convention signée le 4 mars 1981 avec le port autonome de Rouen ; que, par jugement en date du 15 octobre 1992, le tribunal administratif de Rouen lui a accordé la réduction de ses bases d'imposition à l'impôt sur les sociétés du montant des provisions litigieuses constituées au titre des années en cause et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande tendant à la décharge totale des impositions supplémentaires mises à sa charge, lesquelles tenaient également compte, au titre de 1984, d'un redressement relatif à un accroissement d'actif ; que le MINISTRE DU BUDGET fait appel de ce jugement en demandant sa réformation en tant qu'il a fait droit, dans la mesure précitée, à la demande de la société SOLACHAR ;
Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts, dont les dispositions sont applicables en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : "1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant ... 5 Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables ..." ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'usine de la société SOLACHAR était installée sur le domaine public portuaire depuis 1953, en vertu de conventions d'occupation successives ; que si la société fait valoir qu'elle ne tenait de la convention signée le 4 mars 1981 aucun droit acquis au renouvellement de l'autorisation d'occupation dont elle bénéficiait et qu'à la fin de cette autorisation elle avait l'obligation de remettre les lieux en l'état, il n'est ni établi, ni même allégué qu'au cours des exercices à l'issue desquels ont été constituées les provisions litigieuses le port autonome de Rouen aurait, de quelque manière, manifesté son intention de mettre fin à l'autorisation d'occupation alors en cours du domaine portuaire ou de ne pas la renouveler à son échéance ; que, dès lors, la société ne justifie à la clôture d'aucun des exercices concernés de la probabilité de devoir supporter une charge ; que, par suite, le MINISTRE DU BUDGET est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a réduit ses bases d'imposition à l'impôt sur les sociétés, à demander le rétablissement de la société SOLACHAR au rôle de l'impôt sur les sociétés à raison de la réintégration dans ses bases d'imposition des sommes dont le tribunal administratif a réduit celles-ci, et à demander, dans cette mesure, la réformation du jugement attaqué ;
Article 1er - L'impôt sur les sociétés auquel la société SOLACHAR a été assujettie est remis à sa charge en droits et pénalités à concurrence de la réintégration dans ses bases d'imposition des sommes de cinq cent vingt six mille deux cent trente sept francs (526 237 F) au titre de l'exercice 1981, cent neuf mille cent treize francs (109 113 F) au titre de l'exercice 1982, cinquante mille huit cent francs (50 800 F) au titre de l'exercice 1983 et quarante huit mille trente francs (48 030 F) au titre de l'exercice 1984.
Article 2 - Le jugement du tribunal administratif de Rouen en date du 15 octobre 1992 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 - Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DU BUDGET et à la société SOLACHAR.