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10/11/1994 | FRANCE | N°92NT00826

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1e chambre, 10 novembre 1994, 92NT00826


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 24 novembre 1992, présentée par Mme Jeannine X..., demeurant ... ;
Mme X... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 22 septembre 1992 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande en décharge du complément d'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes auxquels elle a été assujettie au titre des années 1982, 1983 et 1984, ainsi que des compléments de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 1982 a

u 31 décembre 1984 ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
Vu les autres pi...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 24 novembre 1992, présentée par Mme Jeannine X..., demeurant ... ;
Mme X... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 22 septembre 1992 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande en décharge du complément d'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes auxquels elle a été assujettie au titre des années 1982, 1983 et 1984, ainsi que des compléments de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 1982 au 31 décembre 1984 ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 octobre 1994 :
- le rapport de Mme COENT-BOCHARD, conseiller,
- et les conclusions de M. ISAIA, commissaire du gouvernement,

Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant qu'il résulte de l'ensemble des dispositions du livre des procédures fiscales relatives aux opérations de vérification de comptabilité que celles-ci se déroulent chez le contribuable ou au siège de l'entreprise vérifiée ; que si, sur la demande écrite du contribuable, le vérificateur peut emporter certains documents dans les locaux de l'administration qui en devient ainsi dépositaire, et ce après avoir remis à l'intéressé un reçu détaillé, cette pratique ne doit pas avoir pour effet de priver le contribuable des garanties qu'il tient des articles L 47 à L 52 du livre des procédures fiscales et qui ont notamment pour objet de lui assurer, sur place, des possibilités de débat oral et contradictoire avec le vérificateur ;
Considérant, d'une part, que si Mme X..., qui exploite à Nantes un bar de nuit et a fait l'objet en 1986 d'une vérification de comptabilité, soutient que l'emport des pièces comptables par le vérificateur a eu lieu dans des conditions irrégulières du fait que cet emport n'aurait pas été opéré réellement à sa demande, il résulte de l'instruction que l'intéressée a expressément demandé par écrit le 4 mars 1986 au vérificateur de procéder à un emport de pièces comptables "en raison des difficultés matérielles que susciteraient dans son entreprise l'examen sur place" desdites pièces ; que cette demande comportait en annexe une liste précise des documents remis qui a été complétée par Mme X... elle-même le 11 mars et le 4 avril 1986 ; que cette dernière n'établit ni que l'emport des pièces comptables aurait été effectué dans le seul intérêt du service ni que sa demande lui aurait été dictée par le vérificateur ;

Considérant, d'autre part, qu'au cours des opérations de vérification, le vérificateur a, le 2 mai 1986, adressé à Mme X... une demande d'informations portant sur l'origine de certaines sommes encaissées sur le compte bancaire mixte, la ventilation des tarifs pratiqués selon le tarif de jour et le tarif de nuit, les modalités de règlement en numéraire des frais professionnels, enfin la nature des comptes bancaires utilisés pour les retraits d'espèces ainsi que les dates des opérations et le montant des sommes retirées pour le cas où ces retraits auraient été effectivement opérés au guichet de la banque ; que Mme X... soutient qu'elle n'était pas en mesure de répondre utilement à cette demande dès lors qu'elle était démunie de l'ensemble des documents comptables de l'exploitation qui ne lui ont été restitués que le 28 mai 1986 ; qu'il résulte cependant de l'instruction que les relevés afférents au compte bancaire mixte ont été restitués le 15 mai 1986 au conseil de la requérante, à ce dûment mandaté par elle ; qu'ainsi, Mme X... pouvait répondre, ce qu'elle a d'ailleurs fait le 22 mai 1986, à la demande d'informations en tant que celle-ci portait sur ce compte ; que si les autres documents ne lui ont pas été restitués, cette circonstance ne permet pas à elle seule à la requérante de soutenir qu'elle aurait été privée d'un débat oral et contradictoire dès lors, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que le vérificateur les lui a rendus avant la clôture de la vérification et que, d'autre part, ainsi qu'il sera dit ci-après, celui-ci s'est rendu à plusieurs reprises au siège de l'exploitation et, qu'au surplus, il a proposé, sans succès, à Mme X... de le rencontrer à son bureau ;
Considérant, enfin, qu'il résulte de l'instruction qu'au cours de la vérification, qui s'est déroulée du 4 mars au 28 mai 1986, le vérificateur a rencontré la requérante quatre fois, soit les 4 mars, 11 mars, 4 avril et 28 mai 1986 ; qu'à supposer, comme celle-ci le soutient, que la première intervention ait eu seulement pour objet d'emporter des documents comptables, il n'est pas établi que les autres rencontres, notamment celles du 11 mars et du 4 avril 1986 au cours desquelles des documents ont été également emportés, n'auraient pas donné lieu à des entretiens entre le contribuable et le vérificateur ; qu'il ressort d'ailleurs des pièces du dossier que lors de l'entrevue du 28 mai 1986 où les documents ont été restitués, le vérificateur s'est entretenu avec Mme X..., en présence de son conseil, des résultats des opérations de vérification ; que, dans ces conditions, la requérante ne peut soutenir qu'elle aurait été privée d'un débat oral et contradictoire ;
Sur la caducité des forfaits :

Considérant qu'aux termes de l'article L 8 du livre des procédures fiscales : "Le forfait de bénéfices industriels et commerciaux et de taxes sur le chiffre d'affaires ... devient caduc lorsque le montant en a été fixé au vu de renseignements inexacts ou lorsqu'une inexactitude est constatée dans les documents dont la production ou la tenue est exigée par la loi. Il est alors procédé ... à l'établissement d'un nouveau forfait ... si le contribuable remplit encore les conditions prévues pour bénéficier du régime correspondant" ; qu'aux termes de l'article 302 ter du code général des impôts : POLICE "1. Le chiffre d'affaires et le bénéfice imposables sont fixés forfaitairement en ce qui concerne les entreprises dont le chiffre d'affaires annuel n'excède pas 500 000 F s'il s'agit d'entreprises dont le commerce principal est de vendre des ... denrées à emporter ou à consommer sur place.. 1 bis. Le régime d'imposition forfaitaire du chiffre d'affaires et du bénéfice demeure applicable pour l'établissement de l'imposition due au titre de la première année au cours de laquelle les chiffres d'affaires limites prévus pour ce régime sont dépassés ..." ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les chiffres d'affaires dont Mme X... avait fait état dans les déclarations souscrites par elle en vertu de l'article 302 sexies du code général des impôts en vue de la fixation des forfaits primitifs des périodes biennales 1981-1982 et 1983-1984 s'élevaient pour 1981 et 1983 respectivement à 361 500 F et 385 200 F ; que l'examen des comptes bancaires professionnels et mixte ont fait apparaître des encaissements d'un montant respectif de 343 813 F et 421 982 F auxquels il y avait lieu d'ajouter les sommes non déclarées par l'intéressée et non contestées de 38 183 F et de 56 677 F représentant les salaires versés en numéraire au personnel et celles de 30 000 F et de 40 000 F correspondant aux dépenses de train de vie réglées en espèces ; qu'ainsi, les sommes réellement encaissées par Mme X... se sont élevées au minimum à 411 996 F en 1981 et 518 659 F en 1983 ; que si la requérante soutient que les dépenses payées en numéraire ont été supportées en partie par les disponibilités dégagées par son époux de son activité professionnelle ainsi que de la cession d'un restaurant appartenant à ce dernier et en partie par le produit de la vente de meubles, elle ne l'établit pas ; qu'ainsi, la vérification de comptabilité a révélé d'importantes discordances entre les recettes déclarées et celles réellement encaissées par Mme X... ; que par suite, et sans qu'elle ait été tenue de procéder à une vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble l'administration était en droit de prononcer la caducité des forfaits ;
Sur le bien fondé des impositions :

Considérant que le service a procédé à la reconstitution des recettes des années 1981 et 1982 en déterminant les achats consommés, les dosages servis par type d'alcool et en utilisant les tarifs de consommation indiqués par Mme X... laquelle ne conteste ni la méthode suivie par l'administration ni les éléments de calculs effectués ; que suivant cette méthode le service établit que le chiffre d'affaires effectivement réalisé par l'exploitation s'est élevé à 540 785 F TTC en 1981, montant qui a pu différer de celui obtenu en totalisant les encaissements bancaires et les dépenses professionnelles et de train de vie, et de 617 833 F TTC en 1982 ; qu'il établit également que les chiffres d'affaires des années 1983 et 1984 se sont élevés respectivement à 518 659 F TTC et 635 588 F TTC ; que ces chiffres d'affaires sont supérieurs à la limite de 500 000 F au delà de laquelle le régime forfaitaire cesse d'être applicable ; qu'il suit de là que, même si aucun nouveau forfait n'a été fixé pour l'année 1981 qui était prescrite, l'administration a pu, à bon droit, estimer que Mme X... ne pouvait bénéficier de ce nouveau forfait, ni pour l'année 1982 qui était la seconde au cours de laquelle la requérante avait réalisé un chiffre d'affaires dépassant la limite susindiquée, ni pour les années suivantes ; que dès lors l'administration était en droit d'imposer Mme X... selon les règles définies pour le régime réel d'imposition ;
Considérant que Mme X... s'étant abstenue de souscrire les déclarations exigées par les dispositions de l'article 53 A du code général des impôts des contribuables relevant du régime réel d'imposition, l'administration a pu, à bon droit, pour les années 1982, 1983 et 1984 la taxer d'office à la taxe sur la valeur ajoutée et évaluer d'office ses bénéfices imposables en vertu des dispositions des articles L 66 3° et L 73 1° du livre des procédures fiscales ;
Considérant que Mme X... ne tente même pas, pour obtenir la décharge ou la réduction des impositions supplémentaires qui lui ont été assignées, d'apporter la preuve de l'exagération des évaluations faites par l'administration ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, lequel est régulier, le tribunal administratif de Nantes, a rejeté sa demande ;
Article 1er - La requête de Mme X... est rejetée.
Article 2 - Le présent arrêt sera notifié à Mme X... et au ministre du budget.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 92NT00826
Date de la décision : 10/11/1994
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-01-03-01-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - REGLES GENERALES D'ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - CONTROLE FISCAL - VERIFICATION DE COMPTABILITE


Références :

CGI 302 ter, 302 sexies, 53 A
CGI Livre des procédures fiscales L47 à L52, L8, L66, L73


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme COENT-BOCHARD
Rapporteur public ?: M. ISAIA

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;1994-11-10;92nt00826 ?
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