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23/06/1993 | FRANCE | N°91NT00817

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1e chambre, 23 juin 1993, 91NT00817


VU la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la Cour le 23 octobre et le 6 novembre 1991, présentés pour M. et Mme X..., demeurant Saint-Vandrille, à PLANCHES (Orne), par Maître Z..., avocat au Barreau de NICE ;
M. et Mme X... demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 9 juillet 1991 par lequel le Tribunal administratif de CAEN a rejeté leur demande tendant : 1°) à l'annulation de la décision en date du 29 juillet 1988 par laquelle l'Association foncière de remembrement de FERRIERE-LA-VERRERIE a rejeté leur demande d'indemnité ; 2°) à

la condamnation de ladite association à leur verser, avec tous intérêts ...

VU la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la Cour le 23 octobre et le 6 novembre 1991, présentés pour M. et Mme X..., demeurant Saint-Vandrille, à PLANCHES (Orne), par Maître Z..., avocat au Barreau de NICE ;
M. et Mme X... demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 9 juillet 1991 par lequel le Tribunal administratif de CAEN a rejeté leur demande tendant : 1°) à l'annulation de la décision en date du 29 juillet 1988 par laquelle l'Association foncière de remembrement de FERRIERE-LA-VERRERIE a rejeté leur demande d'indemnité ; 2°) à la condamnation de ladite association à leur verser, avec tous intérêts de droit à compter du 12 juillet 1988, une somme de 133 425 F. éventuellement à parfaire en fonction des résultats de l'expertise qui pourra être ordonnée avec toutes conséquences de droit, en particulier quant aux dépens ;
2°) d'annuler la décision en cause et de condamner l'association foncière à leur payer, avec tous intérêts de droit à compter du 12 juillet 1988, la somme de 75 263 F. avec toutes conséquences de droit, en particulier quant aux dépens, y compris les frais d'expertise qui devront être mis à la charge de l'association foncière ;
3°) de condamner l'association foncière à leur rembourser sur le fondement de l'article R 222 du code, la somme de 20 000 F. ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code civil ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 mai 1993 :
- le rapport de M. ISAIA, conseiller,
- et les conclusions de M. LEMAI, commissaire du gouvernement,

Sur la fin de non-recevoir opposée par l'association foncière de remembrement :
Considérant que si la requête de M. et Mme X..., dirigée contre le jugement attaqué qui leur a été notifié le 30 août 1991, et enregistrée au greffe de la Cour le 23 octobre 1991 dans le délai du recours contentieux, a été présentée sans le ministère d'un avocat, contrairement aux dispositions de l'article R 116 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, le vice de forme dont cette requête se trouvait ainsi entachée a été régularisé par la production d'une nouvelle requête signée d'un avocat et présentée au nom de M. et Mme X... ; que, dans ces conditions, l'Association foncière de remembrement de FERRIERES-LA-VERRERIE, qui ne saurait utilement se prévaloir de ce que ce mémoire, enregistré au greffe de la Cour le 6 novembre 1991, serait intervenu après l'expiration du délai de recours contentieux, n'est pas fondée à soutenir que la requête est irrecevable ;
Sur l'appel principal de M. et Mme X... :
En ce qui concerne la responsabilité ;
Considérant qu'à l'issue des opérations de remembrement réalisées sur le territoire de la commune de FERRIERES-LA-VERRERIE, divers travaux connexes d'assainissement et de création de grands émissaires ont été effectués en amont de l'étang dit "Bois du Borgne", appartenant à M. et Mme X..., dans le courant du second semestre de l'année 1987, pour le compte de l'Association foncière de remembrement de FERRIERES-LA-VERRERIE, dans le but d'améliorer les conditions d'exploitation des nouveaux aménagements parcellaires en facilitant l'écoulement des eaux ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert désigné par le tribunal, que l'ensemble du réseau d'assainissement débouche dans le ruisseau alimentant l'étang des époux X... à environ 200 m. en amont du plan d'eau, d'une superficie d'environ deux hectares ; qu'à la suite de crues importantes intervenues au cours de l'hiver 1987-1988 et de l'érosion des collecteurs récemment creusés qui en a été la conséquence, des sédiments d'un volume évalué par l'expert à 2 052 m3 se sont déposés au fond de l'étang, formant au débouché du ruisseau un cône constitué d'éléments lourds et notamment de sables de couches d'environ 60 cm d'épaisseur sur environ 600 m, et une couche de sable de 7,7 cm d'épaisseur en moyenne pour le reste de la superficie du plan d'eau ; que, toutefois, l'accumulation de sédiments dans le fond de l'étang a eu pour origine à la fois les apports d'alluvions du ruisseau provenant de l'érosion naturelle et ceux résultant des travaux d'assainissement réalisés par l'Association foncière de remembrement de FERRIERES-LA-VERRERIE ; que, dans ces conditions, si les époux X... sont fondés à soutenir qu'en raison de l'atteinte qui a été portée à leur propriété immobilière, ils ont subi un préjudice de caractère anormal, la responsabilité de l'association foncière dans la survenance du dommage ne peut être engagée que pour partie ; qu'en outre, les désordres ont été facilités par le fait que l'étang était directement alimenté par le ruisseau alors qu'un raccordement par dérivation aurait permis de les éviter ou, au moins, d'en réduire l'ampleur ; qu'ainsi, les époux X... ont pris un risque de nature à atténuer également la responsabilité de l'association foncière ; qu'en raison de ces circonstances, il sera fait une juste appréciation de la part des dommages imputables à l'association foncière en mettant à sa charge la responsabilité d'un quart des désordres ; que, par suite, les requérants sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de CAEN a rejeté en totalité leur demande en indemnité ;
En ce qui concerne le préjudice ;
Considérant que le coût d'enlèvement des dépôts récents accumulés au fond de l'étang s'élève à la somme non contestée de 73 010 F. ; que, dès lors, il y a lieu de condamner l'Association foncière de remembrement de FERRIERES-LA-VERRERIE à verser aux époux X... le quart de ce montant, soit une somme de 18 253 F. ;
En ce qui concerne les intérêts ;
Considérant que les époux X... ont droit aux intérêts de la somme de 18 253 F. à compter du 12 juillet 1988, date de la première sommation de payer qu'ils ont adressée à l'Association foncière de remembrement de FERRIERES-LA-VERRERIE ;
En ce qui concerne les intérêts des intérêts ;
Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée les 11 octobre 1989, 30 octobre 1990, 6 novembre 1991 et 8 décembre 1992 ; qu'à chacune de ces dates il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à ces demandes ;
Sur l'appel provoqué de l'association foncière de remembrement :

Considérant que les travaux d'assainissement réalisés pour le compte de l'Association foncière de remembrement de FERRIERES-LA-VERRERIE ont fait l'objet d'une réception définitive sans réserves le 4 octobre 1987 ; que cette réception a mis fin aux relations contractuelles existant entre le maître d'ouvrage et le maître d'oeuvre ; que, par suite, l'association foncière, maître d'ouvrage, n'est pas fondée à mettre en cause la responsabilité contractuelle de M. Y... en sa qualité de maître d'oeuvre ; que les désordres pour lesquels elle lui demande réparation au titre de la responsabilité décennale ont été constatés, non dans l'ouvrage qu'il était chargé de réaliser, mais uniquement dans l'étang appartenant aux époux X... ; que ces dommages ne sont pas de ceux dont, en vertu des principes qui sont à la base des articles 1792 et 2290 du code civil, réparation puisse être demandée sur le fondement de la responsabilité décennale des entrepreneurs et architectes ; que, par suite, les conclusions d'appel en garantie de l'Association foncière de remembrement de FERRIERES-LA-VERRERIE dirigées contre M. Y... doivent être rejetées ;
Sur les frais d'expertise :
Considérant que les frais d'expertise, d'un montant de 2 353 F., doivent être mis à la charge de l'Association foncière de remembrement de FERRIERES-LA-VERRERIE ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L-8.1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant, d'une part, que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner l'Association foncière de remembrement de FERRIERES-LA-VERRERIE à payer à M. et Mme X... la somme de 3 000 F. au titre des sommes exposées par eux et non comprises dans les dépens ;
Considérant, d'autre part, que les conclusions présentées par l'Association foncière de remembrement de FERRIERES-LA-VERRERIE, qui est perdante à l'instance, et tendant à ce que les époux X... soient condamnés à lui payer la somme de 20 000 F. au titre des sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens, ne peuvent qu'être rejetées ;
Article 1er - Le jugement du Tribunal administratif de CAEN du 9 juillet 1991 est annulé.
Article 2 - L'Association foncière de remembrement de FERRIERES-LA-VERRERIE est condamnée à verser aux époux X... la somme de dix huit mille deux cent cinquante trois francs (18 253 F.) avec intérêts au taux légal à compter du 12 juillet 1988. Les intérêts échus les 11 octobre 1989, 30 octobre 1990, 6 novembre 1991 et 8 décembre 1992 seront capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 3 - Les frais d'expertise, d'un montant de deux mille trois cent cinquante trois francs (2 353 F.), sont mis à la charge de l'Association foncière de remembrement de FERRIERES-LA-VERRERIE.
Article 4 - L'Association foncière de remembrement de FERRIERES-LA-VERRERIE versera à M. et Mme X... une somme de trois mille francs (3 000 F.) au titre de l'article L-8.1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 5 - Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme X... et les conclusions d'appel en garantie de l'Association foncière de remembrement de FERRIERES-LA-VERRERIE sont rejetés.
Article 6 - Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme X..., à l'Association foncière de remembrement de FERRIERES-LA-VERRERIE et à M. Y....


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 91NT00817
Date de la décision : 23/06/1993
Type d'affaire : Administrative

Analyses

TRAVAUX PUBLICS - REGLES COMMUNES A L'ENSEMBLE DES DOMMAGES DE TRAVAUX PUBLICS - LIEN DE CAUSALITE - EXISTENCE.

TRAVAUX PUBLICS - REGLES COMMUNES A L'ENSEMBLE DES DOMMAGES DE TRAVAUX PUBLICS - PERSONNES RESPONSABLES - ETAT OU AUTRE COLLECTIVITE PUBLIQUE - ACTION EN GARANTIE.

TRAVAUX PUBLICS - DIFFERENTES CATEGORIES DE DOMMAGES - DOMMAGES CAUSES PAR L'EXISTENCE OU LE FONCTIONNEMENT D'OUVRAGES PUBLICS - EXISTENCE DE L'OUVRAGE.


Références :

Code civil 1154, 1792, 2290
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R116, L-8-1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. ISAIA
Rapporteur public ?: M. LEMAI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;1993-06-23;91nt00817 ?
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