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01/07/1992 | FRANCE | N°89NT01372

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1e chambre, 01 juillet 1992, 89NT01372


VU le recours du MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DU LOGEMENT, DES TRANSPORTS ET DE LA MER, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de NANTES le 29 août 1989 sous le n° 89NT01372 ;
Le ministre demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 15 mars 1989 par lequel le Tribunal administratif de NANTES a accordé à la société civile immobilière (S.C.I) "La Brise" la décharge du versement pour dépassement du plafond légal de densité dont elle est redevable à raison des constructions autorisées par un permis de construire délivré le 12 juin 1985 par le mair

e de la commune de LA BAULE-ESCOUBLAC ;
2°) de remettre intégralement ...

VU le recours du MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DU LOGEMENT, DES TRANSPORTS ET DE LA MER, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de NANTES le 29 août 1989 sous le n° 89NT01372 ;
Le ministre demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 15 mars 1989 par lequel le Tribunal administratif de NANTES a accordé à la société civile immobilière (S.C.I) "La Brise" la décharge du versement pour dépassement du plafond légal de densité dont elle est redevable à raison des constructions autorisées par un permis de construire délivré le 12 juin 1985 par le maire de la commune de LA BAULE-ESCOUBLAC ;
2°) de remettre intégralement ce versement à la charge de la S.C.I "La Brise" ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le livre des procédures fiscales ;
VU le code de l'urbanisme ;
VU la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
VU le décret n° 83-1205 du 28 novembre 1983 ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 juin 1992 :
- le rapport de M. BRUEL, conseiller,
- et les conclusions de M. LEMAI, commissaire du gouvernement,

Considérant que la S.C.I "La Brise" a déposé, le 18 avril 1985, une demande de permis de construire en vue de l'édification, à LA BAULE-ESCOUBLAC, d'un immeuble qui comportait un dépassement du plafond légal de densité ; qu'elle a indiqué que la valeur du terrain sur lequel elle envisageait de construire s'élevait, selon elle, à 2 000 F le mPOLICE 2 ; que, par lettre du 10 juin 1985, reçue le 12, le directeur départemental de l'équipement de Loire-Atlantique a informé la S.C.I "La Brise" que, pour la détermination du montant du versement dont elle serait redevable en raison du dépassement du plafond légal de densité, si elle était autorisée à construire, la valeur du terrain serait fixée à 4 700 F le mPOLICE 2 ; que le permis de construire a été accordé le 12 juin 1985 à la S.C.I "La Brise" par le maire de LA BAULE-ESCOUBLAC ; que la société, après avoir reçu notification du montant et des modalités de recouvrement du versement mis à sa charge, a saisi le Tribunal administratif de NANTES d'une demande tendant à l'annulation de la décision du 27 janvier 1986 du directeur départemental de l'équipement qui avait rejeté la réclamation qu'elle lui avait présentée en vue d'obtenir la réduction du versement litigieux ; qu'en cours d'instance, après le rejet, par une décision du même directeur, en date du 25 avril 1988, d'une seconde réclamation, elle a demandé au tribunal de lui accorder la décharge totale de ce versement ; que le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DU LOGEMENT, DES TRANSPORTS ET DE LA MER fait appel du jugement, en date du 15 mars 1989, par lequel le tribunal a fait droit aux conclusions de la S.C.I "La Brise" ;
Considérant qu'aux termes de l'article R.333-4 du code de l'urbanisme : "La valeur du mètre carré de terrain est déclarée à l'occasion de la demande de permis de construire par l'auteur de celle-ci. En cas de carence de l'intéressé, il n'y a pas lieu pour l'autorité compétente d'instruire la demande de permis de construire. L'intéressé en est informé par l'autorité compétente pour statuer sur le permis de construire. Le directeur des services fiscaux est consulté par le service chargé de l'instruction de la demande de permis de construire en vue d'émettre un avis sur la déclaration de la valeur du mètre carré de terrain souscrite par l'auteur de cette demande. Cet avis doit être émis par le directeur des services fiscaux dans le délai d'un mois suivant la réception de la demande d'avis. Il constitue l'estimation administrative ..." ;
Considérant qu'il est constant que le directeur des services fiscaux de Loire-Atlantique, consulté le 25 avril 1985, en application des dispositions précitées, sur la valeur du terrain d'assiette de la construction envisagée par la S.C.I "La Brise", n'a émis son avis que le 6 juin 1985, soit après le délai d'un mois prévu par ces dispositions ; que, toutefois, ce délai n'est pas prescrit à peine de nullité de la procédure ; que, par suite, c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur le moyen tiré de ce que le dépassement dudit délai aurait entaché d'irrégularité la procédure, pour accorder décharge à la S.C.I "La Brise" du versement pour dépassement du plafond légal de densité qui lui a été réclamé par avis de mise en recouvrement du 5 septembre 1985 ;

Considérant qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la S.C.I "La Brise", tant devant la Cour que devant le tribunal administratif ;
Considérant qu'aux termes de l'article R.421-15 du code de l'urbanisme : "Le service chargé de l'instruction de la demande (de permis de construire) procède, au nom de l'autorité compétente pour statuer, à cette instruction et recueille, auprès des personnes publiques, services ou commissions intéressés par le projet, avis ou décisions prévus par les lois ou règlements en vigueur ... Sous réserve des dispositions particulières à la consultation des autorités appelées à émettre un avis ou à donner un accord en application des articles R.421-38-2 et suivants, tous services, autorités ou commissions qui n'ont pas fait connaître leur réponse motivée dans le délai d'un mois à dater de la réception de la demande d'avis, sont réputés avoir émis un avis favorable" ;
Considérant que la S.C.I "La Brise" n'est pas fondée à soutenir, sur le fondement de ces dispositions, que l'avis émis par le directeur des services fiscaux plus d'un mois après sa saisine serait réputé favorable, dès lors que lesdites dispositions ne concernent que la procédure d'instruction des permis de construire ;
Considérant qu'aux termes de l'article R.333-4 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction issue du décret n° 84-669 du 17 juillet 1984 : "Si le directeur des services fiscaux retient une valeur différente de celle que l'intéressé a déclarée, celui-ci en est informé, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, par le service chargé de l'instruction de la demande de permis de construire" ;
Considérant que l'estimation administrative de la valeur vénale du terrain a été notifiée à la S.C.I "La Brise" le 12 juin 1985, soit le même jour que la délivrance du permis de construire mentionnant le montant de la participation ; que la S.C.I "La Brise" soutient que cette notification serait illégale, au motif que l'article R.333-4, dans sa rédaction antérieure au décret du 17 juillet 1984, imposait que la valeur vénale soit portée à la connaissance du pétitionnaire au plus tard avant la délivrance du permis de construire ; qu'à supposer même que ce décret soit entaché d'illégalité en ce qu'il aurait omis de reprendre l'obligation de notifier la valeur vénale avant la délivrance du permis de construire, cette illégalité n'aurait pas pour effet de faire revivre l'article R.333-4 dans sa rédaction antérieure ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'interdit à l'administration de notifier l'estimation administrative concomitamment à la délivrance du permis de construire ; qu'enfin, s'il est constant que l'évaluation a été notifiée par le directeur départemental de l'équipement et non, conformément aux dispositions de l'article R.333-4, par le maire de LA BAULE, chargé d'instruire la demande de permis de construire, cette circonstance est sans influence sur la régularité de la procédure ;

Considérant qu'aux termes de l'article R.333-5 du code de l'urbanisme pris sur le fondement de l'article L.333-16 : "Le montant du versement est calculé par le responsable de l'Etat dans le département, chargé de l'urbanisme ..." ; qu'aux termes de l'article R.333-6 : "Le responsable du service de l'Etat dans le département, chargé de l'urbanisme, arrête le montant global du versement et le communique avec les indications nécessaires à la détermination de la part revenant à chaque attributaire au directeur des services fiscaux et au maire. Il le communique également au pétitionnaire ... Le service des impôts notifie le montant du versement au redevable" ;
Considérant que la décision qui notifie le montant du versement pour dépassement du plafond légal de densité n'est pas au nombre de celles qui doivent être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979 ; que, par suite, le moyen tiré de la violation de l'article 8 du décret du 28 novembre 1983, selon lequel lesdites décisions ne peuvent légalement intervenir qu'après que l'intéressé ait été mis à même de présenter des observations écrites, est inopérant ;
Considérant que la S.C.I "La Brise" soutient que l'administration ne pouvait légalement redresser la surface hors oeuvre nette déclarée sans avoir au préalable provoqué ses observations, en application de l'article L.55 du livre des procédures fiscales, selon lequel : "Sous réserve des dispositions de l'article L.56, lorsque l'administration des impôts constate une insuffisance, une inexactitude, une omission ou une dissimulation dans les éléments servant de base au calcul des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes quelconques dus en vertu du code général des impôts, les redressements correspondants sont effectués suivant la procédure de redressement contradictoire définie aux articles L.57 à L.61 A" ;
Considérant, toutefois, qu'une telle procédure n'est exigée que pour la détermination des bases d'imposition et lorsque celle-ci repose, soit sur une déclaration du contribuable, soit sur une estimation forfaitaire débattue avec lui ; qu'il ressort des dispositions précitées des articles R.333-5 et R.333-6 du code de l'urbanisme qu'il appartient à l'administration de déterminer elle-même les éléments de l'assiette du versement autres que la valeur vénale du terrain, notamment la surface hors oeuvre nette et la surface du terrain, à partir des indications contenues dans la demande de permis de construire ; qu'ainsi, la rectification éventuelle de la surface hors oeuvre nette résultant des énonciations du permis de construire, à laquelle le directeur départemental de l'équipement était compétent pour procéder, en vertu de l'article R.333-5 précité, contrairement à ce que soutient la société, ne constitue pas un redressement au sens de l'article L.55 du livre des procédures fiscales qui n'est, dès lors, et en tout état de cause, pas applicable en la matière ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DU LOGEMENT, DES TRANSPORTS ET DE LA MER est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de NANTES a accordé décharge à la S.C.I "La Brise" du versement litigieux ;
Article 1er - Le jugement du Tribunal administratif de NANTES du 15 mars 1989 est annulé.
Article 2 - Le versement pour dépassement du plafond légal de densité mis en recouvrement le 5 septembre 1985 est remis à la charge de la S.C.I "La Brise".
Article 3 - Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DU LOGEMENT ET DES TRANSPORTS, à la S.C.I "La Brise" et au ministre du budget.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 89NT01372
Date de la décision : 01/07/1992
Sens de l'arrêt : Annulation mise en recouvrement
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

- RJ1 CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - REGLES GENERALES D'ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - REDRESSEMENT - GENERALITES - PROCEDURE CONTRADICTOIRE - Champ d'application - Absence - Versement pour dépassement du plafond légal de densité (1).

19-01-03-02-01-01, 19-03-05-04 La procédure de redressement contradictoire prévue par l'article L. 55 du livre des procédures fiscales n'est pas applicable pour la détermination des éléments d'assiette du versement pour dépassement du plafond légal de densité bien que celui-ci ait la nature d'un prélèvement fiscal, dès lors que la liquidation du prélèvement ne constitue pas un redressement.

- RJ1 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILEES ET REDEVANCES - TAXES ASSIMILEES - VERSEMENT POUR DEPASSEMENT DU PLAFOND LEGAL DE DENSITE - Procédure de détermination de l'assiette - Procédure de redressement contradictoire inapplicable (1).


Références :

CGI Livre des procédures fiscales L55
Code de l'urbanisme R333-4, R421-15, R333-5, L333-16, R333-6
Décret 83-1205 du 28 novembre 1983 art. 8
Décret 84-669 du 17 juillet 1984
Loi 79-587 du 11 juillet 1979

1.

Rappr. CE, 1985-11-18, T. p. 575


Composition du Tribunal
Président : M. Megier
Rapporteur ?: M. Bruel
Rapporteur public ?: M. Lemai

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;1992-07-01;89nt01372 ?
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