VU la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 5 octobre 1989, présentée par M. Triki Y..., demeurant ... (Loire-Atlantique) ;
M. Y... demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 15 mars 1989 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande en décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé pour la période du 1er janvier 1979 au 30 juin 1983 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités dont elles ont été assorties ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mai 1992 :
- le rapport de M. ISAIA, conseiller,
- les observations de Me X..., se substituant à Me ROSSINYOL, avocat de M. Y...,
- et les conclusions de M. LEMAI, commissaire du gouvernement,
Sur la perquisition :
Considérant, en premier lieu, qu'il ne résulte pas des circonstances de l'espèce que la perquisition à la suite de laquelle un procès-verbal constatant les délits prévus par l'article 3 de l'ordonnance n° 45-1484 du 30 juin 1945, a été transmis au Parquet et a donné lieu à une transaction acceptée par M. Y..., ait été opérée à seule fin de permettre des redressements fiscaux ; que, par suite, le détournement de procédure allégué par M. Y... n'est pas établi ;
Considérant, en second lieu, que les perquisitions effectuées en vertu de l'ordonnance susmentionnée du 30 juin 1945 ne constituent pas des vérifications de comptabilité au sens de l'article L.47 du livre des procédures fiscales, et, par suite, n'ont pas à être assorties des garanties que ledit article accorde aux contribuables vérifiés ; qu'en outre, la perquisition effectuée au domicile et dans les locaux professionnels de M. Y... le 9 décembre 1982 ne faisait pas obstacle à ce que le service local des impôts procédât, à compter du 5 septembre 1983, à une vérification de la comptabilité de M. Y..., en application de l'article L.47 de ce même livre ;
Considérant, en troisième lieu, que la perquisition dont s'agit ne constitue pas un élément de la procédure d'imposition ; que, dès lors, M. Y... ne peut utilement se prévaloir des irrégularités dont elle aurait, selon lui, été entachée, pour demander la décharge des impositions contestées ;
Sur la vérification de comptabilité :
Considérant que le moyen tiré par M. Y... de ce que l'avis de vérification de comptabilité qui lui a été adressé n'aurait pas mentionné l'année 1979 manque en fait ;
Considérant qu'en se bornant à faire valoir que les documents saisis à l'occasion de la perquisition ne lui ont été restitués que postérieurement à la vérification de comptabilité, M. Y..., à qui il appartenait d'en demander la consultation et qui ne justifie pas s'être heurté à un refus, n'établit pas qu'il a été privé des garanties qu'il tenait des dispositions de l'article L.47 du livre des procédures fiscales, lesquelles ont pour objet d'assurer au contribuable, au lieu de son entreprise, des possibilités de débat oral et contradictoire avec le vérificateur ;
Sur la procédure suivie devant la Commission départementale des impôts :
Considérant que M. Y... ne conteste pas avoir été régulièrement convoqué devant la Commission départementale ; que, dès lors, la circonstance qu'il n'ait pas adressé à celle-ci ses observations en temps utile, alors qu'il était en mesure de le faire, est sans influence sur la régularité de la procédure suivie ;
Au fond :
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 302 ter du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition 1979 : "1 ... le chiffre d'affaires et le bénéfice imposables sont fixés forfaitairement, en ce qui concerne les entreprises dont le chiffre d'affaires annuel n'excède pas 500 000 F, s'il s'agit d'entreprises dont le commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place ..." et qu'aux termes de l'article L 8 du livre des procédures fiscales : "Le forfait de bénéfices industriels et commerciaux et de taxes sur le chiffre d'affaires ... devient caduc lorsque le montant en a été fixé au vu de renseignements inexacts ou lorsqu'une inexactitude est constatée dans les documents dont la production ou la tenue est exigée par la loi. Il est alors procédé dans les conditions fixées aux articles L 5 et L 7 à l'établissement d'un nouveau forfait ... si le contribuable remplit encore les conditions prévues pour bénéficier du régime correspondant" ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L 75 alors en vigueur du livre des procédures fiscales : "les éléments qui servent au calcul des taxes sur le chiffre d'affaires déclarés par le contribuable peuvent être rectifiés d'office dans les cas suivants : ... b) Lorsque des erreurs, omissions ou inexactitudes graves et répétées sont constatées dans la comptabilisation des opérations effectuées par les contribuables ; c) Lorsque l'absence de pièces justificatives prive la comptabilité ou les documents en tenant lieu de toute valeur probante" et qu'aux termes de l'article L 66 du même livre : "Sont taxés d'office ... aux taxes sur le chiffre d'affaires, les personnes qui n'ont pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'elles sont tenues de souscrire en leur qualité de redevables des taxes" ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. Y... avait fait inscrire au registre du commerce à son nom ou à celui de son épouse trois entreprises individuelles qui avaient pour activité la vente de viande et, accessoirement de boissons, et dont l'une avait été donnée en location-gérance à son neveu ; qu'il est constant que M. Y... effectuait lui-même tous les achats, utilisait pour les trois établissements des emballages portant sa marque et était considéré par les fournisseurs et l'ensemble du personnel comme le véritable chef d'entreprise ; que les achats réalisés pour les besoins du débit de boissons étaient enregistrés dans sa comptabilité ; que si le requérant soutient qu'il n'a pas assuré la gestion de cet établissement pendant la période du 7 mars au 20 juin 1981, il résulte de l'instruction qu'il n'a jamais informé l'administration d'un changement qui serait intervenu dans l'exploitation du fonds ; que l'attestation de circonstance qu'il produit au dossier ne saurait constituer la preuve d'un changement d'exploitant ; qu'ainsi, sous l'apparence de trois entreprises individuelles distinctes, M. Y... dirigeait en réalité une seule et même exploitation ; que, dès lors, c'est à bon droit que l'administration a fait masse des chiffres d'affaires annuels des trois établissements en cause pour, successivement, apprécier au titre de l'année 1979 la situation de l'entreprise au regard de la limite fixée par les dispositions précitées de l'article 302 ter-1 du code général des impôts et fixer un forfait, rectifier d'office le chiffre d'affaires de l'année 1980 et taxer d'office le chiffre d'affaires des années 1981 et 1982 ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. Y... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant au remboursement des impositions en litige déjà acquittées :
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que ces conclusions ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées ;
Sur l'application des dispositions de l'article L.8.1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'aux termes de l'article L.8.1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;
Considérant que les conclusions présentées par M. Y..., partie perdante à l'instance, et tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui payer la somme de 10 000 F au titre des sommes exposées par lui et non comprises dans les dépens, ne peuvent, dans les circonstances de l'espèce, qu'être rejetées ;
Article 1er - La requête de M. Y... est rejetée.
Article 2 - Le présent arrêt sera notifié à M. Y... et au ministre du budget.