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23/10/1991 | FRANCE | N°89NT00831

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 23 octobre 1991, 89NT00831


VU l'ordonnance, en date du 1er février 1989, par laquelle le président de la 2ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la Cour administrative d'appel de NANTES, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, le dossier de la requête présentée au Conseil d'Etat pour la société BINDER FIRMA REISEBURO ainsi que la société d'assurances ZENTRALEUROPAISCHE et enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 11 septembre 1987 sous le n° 91.286 ;
VU la requête susmentionnée et le mémoire complémentaire,

enregistrés au greffe de la Cour sous le n° 89NT00831, présentés pour...

VU l'ordonnance, en date du 1er février 1989, par laquelle le président de la 2ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la Cour administrative d'appel de NANTES, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, le dossier de la requête présentée au Conseil d'Etat pour la société BINDER FIRMA REISEBURO ainsi que la société d'assurances ZENTRALEUROPAISCHE et enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 11 septembre 1987 sous le n° 91.286 ;
VU la requête susmentionnée et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la Cour sous le n° 89NT00831, présentés pour la société BINDER FIRMA REISEBURO, qui a son siège social 30 Wilhelm-Geiger-Platz à STUTTGART (République Fédérale d'Allemagne) et la société d'assurances ZENTRALEUROPAISCHE, qui a également son siège social Postpach 501080 à STUTTGART, par la société civile professionnelle BORE et XAVIER, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ;
Ces sociétés demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 14 mai 1987 par lequel le Tribunal administratif de NANTES a rejeté leur requête tendant à la condamnation de l'Etat et de la commune de Seiches-sur-le-Loir à leur verser diverses indemnités à raison des conséquences dommageables d'un accident de la circulation survenu le 7 novembre 1980 ;
2°) de condamner l'Etat et la commune de Seiches-sur-le-Loir à verser à la société BINDER la somme de 6.288 DM et à la société ZENTRALEUROPAISCHE la somme de 17.839,60 DM, avec intérêts de droit à compter du 29 décembre 1985 ;
3°) de condamner l'Etat et la commune aux dépens ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le décret n° 61-371 du 13 avril 1961 fixant les conditions d'exercice du concours technique du service des ponts et chaussées en matière de voirie des collectivités locales ;
VU l'arrêté interministériel du 7 décembre 1979, relatif aux concours apportés aux communes, aux départements et à leurs groupements par l'Etat (services de l'équipement et de l'agriculture) ;
VU le code civil ;
VU le code de la route ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 octobre 1991 :
- le rapport de M. ISAIA, conseiller,
- et les conclusions de M. LEMAI, commissaire du gouvernement,

Sur la recevabilité de la demande de la société d'assurances ZENTRALEUROPAISCHE :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société d'assurances ZENTRALEUROPAISCHE, justifie, par la production d'une quittance, avoir versé le 12 janvier 1981, soit avant la date d'enregistrement de sa demande d'indemnisation au greffe du tribunal administratif, une somme de 17.839,60 DM à la société BINDER en réparation des dommages qui sont à l'origine du litige ; qu'elle est, dès lors, en droit de se prévaloir de la subrogation légale prévue au code des assurances ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par la commune de Seiches-sur-le-Loir doit être rejetée ;
Sur la responsabilité :
Considérant que le 7 novembre 1980, vers 11 heures, au carrefour formé par la route nationale n° 23 et le chemin départemental n° 766, sur le territoire de la commune de Seiches-sur-le-Loir (Maine-et-Loire), un autocar appartenant à la société BINDER, dont le siège social est à STUTTGART (Allemagne), est entré en collision avec une camionnette du Laboratoire des Ponts et Chaussées de BLOIS ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment du témoignage de deux personnes présentes sur les lieux au moment de l'accident, ainsi que d'un rapport établi par les services de la gendarmerie, que cette collision est en relation directe de cause à effet avec un dérèglement des appareils de signalisation automatique établis dans ce carrefour, dont les feux étaient bloqués au vert simultanément dans les deux voies du croisement ;

Considérant, d'une part, qu'il est constant que le dispositif de signalisation litigieux qui a provoqué l'accident avait été installé pour le compte de la commune de Seiches-sur-le-Loir qui en était propriétaire ; que, par suite, il incombait à celle-ci de régler son fonctionnement et d'en assurer l'entretien ; que si, pour dégager sa responsabilité, la commune soutient que les feux de signalisation en cause avaient fait l'objet d'une vérification complète une semaine avant l'accident et, d'une inspection le matin où celui-ci est intervenu, ces vérifications, à les supposer établies, ne démontrent pas en elles-mêmes que toutes les dispositions avaient été prises pour prémunir les usagers contre le risque résultant du dérèglement des appareils ; que, d'autre part, la voie publique sur laquelle la collision a eu lieu était une route nationale et que, de ce seul fait, l'Etat, maître de l'ouvrage, était entièrement responsable envers les usagers des conséquences de l'insuffisance d'entretien des appareils susmentionnés qui en constituaient une dépendance ; que, dans ces circonstances, et en l'absence de toute faute relevée à la charge du préposé de la société BINDER, ni la commune ni l'Etat n'apportent la preuve qui leur incombe de l'entretien normal de l'ouvrage public dont il s'agit ; que, dès lors, la société BINDER et la société ZENTRALEUROPAISCHE sont fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de NANTES a rejeté leur demande tendant à ce que la commune de Seiches-sur-le-Loir et l'Etat soient déclarés responsables des conséquences dommageables de l'accident dans lequel s'est trouvé impliqué le véhicule appartenant à la société BINDER ;
Sur le préjudice :
Considérant que la société BINDER produit au dossier une copie de l'original et la traduction française de deux lettres adressées à la société d'assurances ZENTRALEUROPAISCHE le 17 décembre 1980 et le 2 avril 1981 dans lesquelles elle fait état, respectivement, des frais de réparation du véhicule endommagé, pour un montant de 17.839,60 DM, et de frais divers qui lui auraient été occasionnés à la suite de l'accident, pour un montant de 5.638 DM, ainsi que d'une somme de 650 DM correspondant à la perte d'une franchise d'assurance ; que si la société ZENTRALEUROPAISCHE justifie avoir effectivement remboursé à la société BINDER une somme de 17.839,60 DM, la société BINDER ne démontre pas, pour sa part, la réalité des frais divers qu'elle invoque et qui résulteraient du remorquage de l'autocar accidenté et de son remplacement par un autre véhicule venu d'Allemagne ; que, dès lors, il sera fait une exacte appréciation du préjudice en condamnant la commune de Seiches-sur-le-Loir et l'Etat à verser respectivement à la société ZENTRALEUROPAISCHE et à la société BINDER les sommes de 17.839,60 DM et de 650 DM ; que ces sommes seront converties en francs à la date du 11 décembre 1980, à laquelle les travaux de réparation de l'autocar ont été facturés ;
Sur les intérêts :

Considérant que la société BINDER et la société ZENTRALEUROPAISCHE ont droit aux intérêts des sommes, respectivement de 650 DM et de 17.839,60 DM, converties en francs dans les conditions susindiquées, à compter du 2 janvier 1985, date d'enregistrement de leur demande ;
Sur la capitalisation des intérêts :
Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée le 7 novembre 1990 par la société BINDER et la société ZENTRALEUROPAISCHE ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande ;
Sur l'appel en garantie de la commune de Seiches-sur-le-Loir dirigé contre l'Etat :
Considérant que si, pour fonder son appel en garantie contre l'Etat, la commune invoque une délibération du conseil municipal en date du 14 février 1980 par laquelle elle avait demandé à la direction départementale de l'équipement d'assurer une mission d'aide technique à la gestion communale, il ressort des dispositions de l'arrêté interministériel du 7 décembre 1979, sur le fondement duquel cette délibération a été prise, que la mission dont s'agit ne pouvait concerner que la voirie communale ; que, par ailleurs, la commune ne justifie pas de l'existence d'une convention spécifique qu'elle aurait passée avec l'Etat pour l'entretien des feux de signalisation lui appartenant ; que, dans ces conditions, l'appel en garantie de la commune de Seiches-sur-le-Loir dirigé contre l'Etat ne peut qu'être rejeté ;
Sur l'appel en garantie de l'Etat dirigé contre la commune de Seiches-sur-le-Loir :
Considérant que les feux de signalisation qui sont à l'origine de l'accident avaient été installés pour le compte de la commune de Seiches-sur-le-Loir et que celle-ci en était propriétaire ; que, par suite, il lui incombait de veiller au bon fonctionnement de ces appareils et d'en assurer l'entretien ; que, dès lors, l'Etat est fondé à demander à être garanti par la commune de Seiches-sur-le-Loir des condamnations prononcées contre lui à la suite de l'accident provoqué par le dérèglement des installations ;
Sur l'application des dispositions de l'article R.222 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article R.222 et de condamner la commune de Seiches-sur-le-Loir et l'Etat à payer la somme de 3.000 F au titre des frais exposés par les sociétés BINDER et ZENTRALEUROPAISCHE et non compris dans les dépens ;
Article 1er - Le jugement du Tribunal administratif de NANTES en date du 14 mai 1987 est annulé.
Article 2 - La commune de Seiches-sur-le-Loir et l'Etat sont condamnés à verser la somme de six cent cinquante deutsche mark (650 DM) à la société BINDER et la somme de dix sept mille huit cent trente neuf deutsche mark et soixante pfennigs (17.839,60 DM) à la société ZENTRALEUROPAISCHE. Ces sommes seront converties en francs à la date du 11 décembre 1980. Elles porteront intérêts à compter du 2 janvier 1985.
Article 3 - Les intérêts afférents à chacune des deux sommes susmentionnées, échus le 7 novembre 1990, seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 4 - La commune de Seiches-sur-le-Loir et l'Etat sont condamnés à verser la somme de trois mille francs (3.000 F) au titre des frais exposés par les sociétés BINDER et ZENTRALEUROPAISCHE et non compris dans les dépens.
Article 5 - Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 6 - L'appel en garantie de la commune de Seiches-sur-le-Loir dirigé contre l'Etat est rejeté.
Article 7 - La commune de Seiches-sur-le-Loir devra garantir l'Etat des condamnations prononcées contre lui par le présent arrêt.
Article 8 - Le présent arrêt sera notifié à la société BINDER, à la société ZENTRALEUROPAISCHE, à la commune de Seiches-sur-le-Loir et à l'Etat (ministre de l'équipement, du logement, des transports et de l'espace).


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Numéro d'arrêt : 89NT00831
Date de la décision : 23/10/1991
Type d'affaire : Administrative

Analyses

TRAVAUX PUBLICS - REGLES COMMUNES A L'ENSEMBLE DES DOMMAGES DE TRAVAUX PUBLICS - PERSONNES RESPONSABLES - ETAT OU AUTRE COLLECTIVITE PUBLIQUE - ACTION EN GARANTIE.

TRAVAUX PUBLICS - DIFFERENTES CATEGORIES DE DOMMAGES - DOMMAGES SUR LES VOIES PUBLIQUES TERRESTRES - DEFAUT D'ENTRETIEN NORMAL - SIGNALISATION.


Références :

Arrêté du 07 décembre 1979
Code civil 1154
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R222


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: ISAIA
Rapporteur public ?: LEMAI

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;1991-10-23;89nt00831 ?
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