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16/05/1991 | FRANCE | N°89NT01060

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 16 mai 1991, 89NT01060


VU, sous le n° 89NT01060, la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de NANTES le 21 mars 1989, présentée pour la S.C.I." RESIDENCE DAUPHINE" dont le siège social est situé ..., par Me TOUSSAINT, avocat à la Cour de Paris ;
La S.C.I. "RESIDENCE DAUPHINE" demande que la Cour :
1°) annule le jugement, en date du 5 janvier 1989, par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties et des taxes additionnelles auxquelles elle a été assujettie au titre des

années 1984, 1985 et 1986, ainsi que des pénalités y afférentes ;
2°) ...

VU, sous le n° 89NT01060, la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de NANTES le 21 mars 1989, présentée pour la S.C.I." RESIDENCE DAUPHINE" dont le siège social est situé ..., par Me TOUSSAINT, avocat à la Cour de Paris ;
La S.C.I. "RESIDENCE DAUPHINE" demande que la Cour :
1°) annule le jugement, en date du 5 janvier 1989, par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties et des taxes additionnelles auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1984, 1985 et 1986, ainsi que des pénalités y afférentes ;
2°) lui accorde la décharge des cotisations litigieuses ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts et les lois n° 83-1179 du 29 décembre 1983 et n° 86-1318 du 30 décembre 1986 ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 avril 1991 :
- le rapport de M. PLOUVIN, conseiller,
- et les conclusions de M. CADENAT, commissaire du gouvernement,

Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'à l'appui de ses conclusions en annulation du jugement, en date du 5 janvier 1989, la société civile immobilière RESIDENCE DAUPHINE allègue qu'il est insuffisamment motivé ; qu'en estimant "que la société requérante ne peut utilement se prévaloir de ce que les impositions litigieuses méconnaîtraient les dispositions de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme dès lors qu'elles ont été établies sur le fondement de la loi précitée du 30 décembre 1986 qui est postérieure à l'entrée en vigueur de ladite Convention", le tribunal a suffisamment motivé son jugement ;
Sur le principe de l'imposition :
Considérant que la société civile immobilière RESIDENCE DAUPHINE, propriétaire à ORLEANS d'immeubles d'habitation à usage locatif construits avant le 1er janvier 1973 et pour lesquels elle soutient pouvoir bénéficier d'une exonération temporaire de taxe foncière d'une durée de 25 ans qui aurait dû courir jusqu'au 31 décembre 1990, demande la décharge des impositions qui lui sont réclamées à ce titre pour les années 1984, 1985 et 1986 ;
Considérant, d'une part, qu'en vertu des dispositions de l'article 1385-I du code général des impôts, les constructions nouvelles achevées avant le 1er janvier 1973 dont les trois-quart au moins de leur superficie totale sont affectés à l'habitation principale sont exonérées de la taxe foncière sur les propriétés bâties durant les vingt-cinq années qui suivent celle de leur achèvement ; qu'aux termes de l'article 1385-II bis du même code, issu de l'article 14-I de la loi n° 83-1179 du 29 décembre 1983 portant loi de finances pour 1984, "à compter de 1984, la durée de l'exonération de 25 ans mentionnée aux I et II est ramenée à 15 ans, sauf en ce qui concerne les logements à usage locatif remplissant les conditions définies à l'article L.411-1 du code de la construction et de l'habitation..." ; que, d'autre part, aux termes de l'article 20-V de la loi n° 86-1318 du 30 décembre 1986, portant loi de finances rectificative pour 1986 les impositions dues au titre des années antérieures au 1er janvier 1987 en application de l'article 20-IV sont réputées régulières, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée" ; qu'il résulte de ces dispositions que les logements qui, construits avant le 1er janvier 1973 sous certaines conditions, bénéficiaient jusqu'à la promulgation des lois du 29 décembre 1983 et du 30 décembre 1986 précitées, d'une exonération de 25 ans de la taxe foncière sur les propriétés bâties, sont devenus imposables à ladite taxe, à compter du 1er janvier 1984 ;
Considérant en premier lieu, que si la société requérante se prévaut de ce que la durée de l'exonération avait été fixée initialement par le législateur à 25 ans et que, par voie de conséquence, la loi du 29 décembre 1983 précité n'a pu réduire un avantage accordé par une loi précédente sans présenter un caractère rétroactif contraire à la Constitution, il n'appartient pas au juge administratif d'apprécier la constitutionnalité de la loi ;

Considérant, en second lieu, qu'à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation des impositions litigieuses, la société soutient qu'elles ont été établies en méconnaissance des dispositions de l'article 14 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales ainsi que de l'article 1er du protocole additionnel n° 1 ; que, d'une part, aux termes de l'article 14 de cette Convention : "La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation." ; que, si le paragraphe V de l'article 20 de la loi de finances rectificative du 30 décembre 1986 pose le principe que les impositions établies au titre des années antérieures au 1er janvier 1987 sont réputées régulières sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, cette disposition, valable pour tous les contribuables se trouvant dans la même situation procédurale, n'introduit aucune discrimination ni inégalité de traitement entre les personnes assujetties à l'impôt ; que, d'autre part, l'article 1er du protocole additionnel n° 1 précité, s'il dispose : "Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international", ajoute aussi : "Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes." ; que les dispositions fiscales en cause, destinées à préciser les modalités d'imposition de diverses catégories de contribuables à la taxe foncière, n'ont pas pour objet et ne sauraient avoir eu pour effet de porter atteinte au droit de propriété ; que, par suite, les moyens tirés de la violation de la Convention Européenne et du protocole additionnel précités ne peuvent qu'être rejetés ;
Considérant, en troisième lieu, que si la société requérante se prévaut, en des termes généraux, de la primauté de l'ordre juridique communautaire et de la prohibition du caractère rétroactif de la norme juridique sanctionnée, selon elle, par la Cour de justice des Communautés Européennes, elle n'apporte à l'appui de ces allégations aucune précision permettant d'en apprécier le bien fondé, eu égard à l'objet du litige ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la S.C.I RESIDENCE DAUPHINE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande en décharge de la taxe foncière des propriétés bâties ;
Article 1er - La requête de la S.C.I "RESIDENCE DAUPHINE" est rejetée.
Article 2 - Le présent arrêt sera notifié à la S.C.I RESIDENCE DAUPHINE et au ministre délégué au budget.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Numéro d'arrêt : 89NT01060
Date de la décision : 16/05/1991
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - TEXTES FISCAUX - LEGALITE DES DISPOSITIONS FISCALES.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILEES ET REDEVANCES - TAXES FONCIERES - TAXE FONCIERE SUR LES PROPRIETES BATIES.


Références :

CGI 1385, 1385 bis
Convention européenne du 04 novembre 1950 sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales art 14
Loi 83-1179 du 29 décembre 1983 art. 14 Finances pour 1984
Loi 86-1318 du 30 décembre 1986 art. 20 Finances rectificative pour 1986


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: PLOUVIN
Rapporteur public ?: CADENAT

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;1991-05-16;89nt01060 ?
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