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25/04/1990 | FRANCE | N°89NT00491

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 25 avril 1990, 89NT00491


Vu l'ordonnance en date du 2 janvier 1989 par laquelle le président de la 9ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la Cour administrative d'appel de NANTES le dossier de la requête présentée par M. BERTHIER et enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 2 février 1988 sous le n° 94 800 ;
Vu la requête susmentionnée présentée par M. Jean-Paul Y..., demeurant ..., enregistrée au greffe de la Cour sous le n° 89NT00491 ;
M. BERTHIER demande que la Cour :
1°) annule le jugement en date du 26 novembre 1987 par leque

l le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande en réduction du...

Vu l'ordonnance en date du 2 janvier 1989 par laquelle le président de la 9ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la Cour administrative d'appel de NANTES le dossier de la requête présentée par M. BERTHIER et enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 2 février 1988 sous le n° 94 800 ;
Vu la requête susmentionnée présentée par M. Jean-Paul Y..., demeurant ..., enregistrée au greffe de la Cour sous le n° 89NT00491 ;
M. BERTHIER demande que la Cour :
1°) annule le jugement en date du 26 novembre 1987 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande en réduction du complément d'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre des années 1975 à 1978 ainsi que de la majoration exceptionnelle mise à sa charge au titre de l'année 1975,
2°) prononce la réduction de ces impositions et des pénalités dont elles ont été assorties ;
Vu les autres piéces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience du 4 avril 1990 :
- le rapport de M. SALUDEN, conseiller,
- et les conclusions de M. CADENAT, commissaire du gouvernement,

Considérant que la société à responsabilité limitée "Laboratoire de biologie médicale LIDEC-ANDRE-BERTHIER" a fait l'objet, à la suite d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos le 31 décembre des années 1973 à 1978, de divers redressements en matière d'impôt sur les sociétés, tenant en la réintégration dans ses bénéfices imposables, notamment, de la part estimée excessive par l'administration des rémunérations allouées à MM Z..., X... et Y... au cours des exercices clos de 1975 à 1978, ainsi que de dépenses de téléphone et de cotisations au Conseil de l'Ordre des trois intéressés prises en charge par le laboratoire au titre des mêmes exercices ; que l'administration a regardé ces sommes comme des revenus distribués et les a soumises à l'impôt sur le revenu, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, au nom de chacun des intéressés, dont M. BERTHIER ; que ce dernier conteste les impositions supplémentaires en résultant qui lui ont été assignées au titre des années 1975 à 1978 ;
SUR LES REMUNERATIONS :
Sur la charge de la preuve :
Considérant, d'une part, que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, saisie du litige relatif au montant des rémunérations allouées aux dirigeants de la société "Laboratoire de biologie médicale LIDEC-ANDRE-BERTHIER", a émis l'avis que les appointements mensuels fixes alloués à ceux-ci constituaient une rémunération normale et suffisante de leur activité et que, de ce fait, les primes qui leur avaient été accordées en fin d'année rémunéraient leur participation dans le capital social ; que si, en qualifiant la nature de ces primes, la commission a excédé sa compétence, cette circonstance est sans influence sur la validité de l'avis émis ; que seul, en effet, un vice de forme ou de procédure de nature à entacher d'irrégularité l'avis de la commission peut être utilement invoqué pour faire obstacle aux conséquences quant à la charge de la preuve que la loi attache à la consultation de la commission et à la conformité entre les bases d'imposition retenues et les chiffres auxquels aboutit l'avis de la commission ; que, de même, et pour le même motif, l'erreur de raisonnement commise par cet organisme, à la supposer établie, ne serait pas de nature à rendre l'avis émis par la commission inopposable au requérant et à décharger celui-ci du fardeau de la preuve ;
Considérant, d'autre part, que lorsque l'administration, en application des dispositions de l'article 39-1-1° du code général des impôts, réintègre dans les bénéfices d'une société une fraction jugée excessive de la rémunération d'un dirigeant ou d'un salarié, elle ne remet pas en cause les termes du contrat de travail de ce dernier mais se borne à faire le partage, dans la rémunération résultant des stipulations de ce contrat, entre la fraction correspondant à un travail effectif et déductible des résultats, et la fraction qui doit être regardée comme un bénéfice distribué ; que le requérant n'est dès lors pas fondé à soutenir que le litige qui l'opposait à l'administration sur la part déductible de ses rémunérations devait être soumis à la consultation du comité consultatif pour la répression des abus de droit ;

Considérant que l'imposition ayant été établie conformément à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, la charge de la preuve incombe, sur les questions de fait litigieuses, au requérant ;
Sur le bien-fondé du redressement :
Considérant qu'aux termes de l'article 111 du code général des impôts : "Sont notamment considérés comme revenus distribués : ... d) la fraction des rémunérations qui n'est pas déductible en vertu de l'article 39-1-1° ..." ; que l'article 39 du même code applicable, en vertu de l'article 209, en matière d'impôt sur les sociétés, dispose que : "1 ...1° ... les rémunérations ne sont admises en déduction des résultats que dans la mesure où elles correspondent à un service effectif et ne sont pas excessives eu égard à l'importance du service rendu ..." ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les rémunérations totales de M. Z..., pharmacien-biologiste, co-gérant de la société "Laboratoire de biologie médicale LIDEC-ANDRE-BERTHIER" dont il détient 25 % des parts sociales, se sont élevées à 386 475 F en 1975, 453 177 F en 1976, 337 308 F en 1977 et 539 809 F en 1978, compte-tenu d'une prime de fin d'année d'un montant de 102 500 F en 1975 et 1976 et de 100 000 F en 1978 ; que celles de M. X..., médecin-biologiste, également co-gérant de la société et détenteur de 25 % des parts sociales, ont été de 338 537 F en 1975, 402 850 F en 1976, 337 308 F en 1977 et 492 308 F en 1978, y compris une prime de fin d'année d'un montant de 55 000 F en 1975 et 1976 et de 100 000 F en 1978 ; qu'enfin, celles de M. BERTHIER, pharmacien-biologiste, employé par la société dont il détient 24,6 % des parts sociales en qualité de directeur technique, se sont élevées à 308 409 F en 1975, 378 007 F en 1976, 287 359 F en 1977 et 469 857 F en 1978, montants incluant une prime de fin d'année de 82 500 F en 1975 et 1976 et de 100 000 F en 1978 ; qu'après avis de la commission départementale, les bénéfices réalisés par la société ont été rehaussés des sommes de 240 000 F en 1975 et 1976 et de 300 000 F en 1978, égales au total des primes de fin d'année allouées par la société aux trois intéressés, correspondant à la fraction estimée excessive de leurs rémunérations ;
Considérant que, pour justifier le montant de ces rémunérations portées en charges, le requérant fait valoir que MM Z..., X... et Y..., exercent au sein du laboratoire une activité particulièrement intense et productive, qu'établit, selon lui, un ensemble de ratios mettant en rapport le nombre de techniciens employés et celui des biologistes, l'effectif dans chacune de ces catégories et le chiffre d'affaires du laboratoire, ainsi que le bénéfice réalisé et le capital social ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le chiffre d'affaires et l'activité de la société "Laboratoire de biologie médicale LIDEC-ANDRE-BERTHIER" ont connu une croissance régulière et significative au cours de la période litigieuse sans augmentation du personnel employé de façon permanente ; que MM Z..., X... et Y... ont joué un rôle important dans les gains de productivité ainsi obtenus ;

Considérant, toutefois, que la société n'a déclaré pendant cette même période qu'un bénéfice d'un très faible montant par rapport au chiffre d'affaires qu'elle a réalisé ; que les trois intéressés disposaient du pouvoir de déterminer le montant et la forme de leurs rémunérations ; que celles-ci représentaient une part importante du chiffre d'affaires de l'entreprise, environ 30 %, et de sa masse salariale, environ 65 % ; que ces rémunérations, qui ont été multipliées par 2 entre 1974 et 1978, ont connu une progression plus rapide que celle du chiffre d'affaires et du bénéfice du laboratoire ; qu'elles sont nettement plus élevées que celles qui ont été pratiquées dans les laboratoires de même importance de la région avec lesquelles l'administration a établi une comparaison ; que, si le requérant soutient que la productivité de ces laboratoires est inférieure à celle de la société où il exerce son activité, il n'apporte pas d'indications précises sur le rôle qu'il joue dans la société et n'établit pas qu'en fixant le montant de ses rémunérations déductibles à des valeurs sensiblement supérieures à celles pratiquées dans les laboratoires retenus comme terme de comparaison, l'administration a fait une insuffisante appréciation du travail accompli et des services rendus par le requérant ;
SUR LES DEPENSES DE TELEPHONE ET DE COTISATIONS :
Considérant que, par arrêt en date de ce jour, la Cour, statuant sur la requête de la société "Laboratoire de biologie médicale LIDEC-ANDRE-BERTHIER", a jugé que c'est à tort que l'administration a réintégré dans les résultats de la société au titre des exercices clos de 1975 à 1978 les sommes relatives aux dépenses de téléphone et de cotisations au Conseil de l'Ordre des trois associés dirigeants prises en charge par la société ; que, par suite, les sommes de 1 026 F en 1975, 390 F en 1976, 410 F en 1977 et 440 F en 1978, correspondant à la partie des dépenses précitées concernant M. BERTHIER, n'ont pu à bon droit être imposées au nom de celui-ci en tant que revenus distribués ;
Considérant que, de tout ce qui précède, il résulte que M. BERTHIER est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande en réduction en ce qu'elle concernait les dépenses de téléphone et les cotisations à l'Ordre ;
Article 1 - Les bases rectifiées d'imposition de M. BERTHIER à l'impôt sur le revenu au titre des années 1975, 1976, 1977 et 1978 sont réduites, respectivement, des sommes de 1 026 F, 390 F, 410 F et 440 F.
Article 2 - M. BERTHIER est déchargé de la différence entre le complément d'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre des années 1975 à 1978 ainsi que de majoration exceptionnelle mise à sa charge au titre de l'année 1975 et celui qui résulte de l'article 1er du présent arrêt, ainsi que des pénalités correspondantes.
Article 3 - Le jugement du Tribunal administratif de Rennes du 26 novembre 1987 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 - Le surplus des conclusions de la requête de M. BERTHIER est rejeté.
Article 5 - Le présent arrêt sera notifié à M. BERTHIER et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Numéro d'arrêt : 89NT00491
Date de la décision : 25/04/1990
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-02-03-01-01-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - REVENUS DES CAPITAUX MOBILIERS ET ASSIMILABLES - REVENUS DISTRIBUES - NOTION DE REVENUS DISTRIBUES - IMPOSITION PERSONNELLE DU BENEFICIAIRE


Références :

CGI 39 par. 1, 111, 39, 209


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: SALUDEN
Rapporteur public ?: CADENAT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;1990-04-25;89nt00491 ?
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