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25/04/1990 | FRANCE | N°89NT00269

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 25 avril 1990, 89NT00269


Vu l'ordonnance en date du 2 janvier 1989, par laquelle le président de la 4ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la Cour administrative d'appel de NANTES le dossier de la requête présentée par l'Office Public d'H.L.M. de DREUX et enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 29 mars 1985, sous le n° 67 284 ;
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés au greffe de la Cour administrative d'appel de NANTES le 3 janvier 1989, sous le n° 89NT00269, présentés pour l'Office Public d'H.L.M. de DREUX dont

le siège est à DREUX (Eure et Loir), ..., représenté par son prési...

Vu l'ordonnance en date du 2 janvier 1989, par laquelle le président de la 4ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la Cour administrative d'appel de NANTES le dossier de la requête présentée par l'Office Public d'H.L.M. de DREUX et enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 29 mars 1985, sous le n° 67 284 ;
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés au greffe de la Cour administrative d'appel de NANTES le 3 janvier 1989, sous le n° 89NT00269, présentés pour l'Office Public d'H.L.M. de DREUX dont le siège est à DREUX (Eure et Loir), ..., représenté par son président en exercice, par la société civile professionnelle "LESOURD et BAUDIN", avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, et tendant à ce que la Cour :
1°) réforme le jugement du 22 janvier 1985 du Tribunal administratif d'ORLEANS en tant qu'il n'a fait droit que partiellement à sa demande tendant à la condamnation solidaire de M. Jacques Z..., architecte, et de l'Entreprise Drouaise de Bâtiments et Travaux Publics (E.D.B.T.P) à lui verser la somme de 400 388,73 F (avec intérêts de droit à compter de la demande), de 230 000 F (avec intérêts de droit à compter du jugement à intervenir) et de 383 747,67 F (avec intérêts de droit à compter du jugement à intervenir) en réparation des désordres survenus dans l'ensemble immobilier "Les Bergeronnettes" à DREUX ;
2°) condamne M. Jacques Z..., architecte et l'Entreprise Drouaise de Bâtiments et Travaux Publics (E.D.B.T.P), conjointement et solidairement, à lui payer :
- les sommes précitées de 400 388,73 F, 230 000 F et 383 747,67 F ;
- les intérêts de droit des sommes précitées de 400 388,73 F, 230 000 F et 383 747,67 F à compter, pour la première de la date de la demande et, pour les deux suivantes, de la date de l'arrêt à intervenir ;
- les intérêts desdites sommes capitalisés à la date d'enregistrement de l'acte d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil, notamment, les articles 1792 et 2270 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience du 21 mars 1990 :
- le rapport de M. DUPUY, conseiller,
- les observations de Me X..., se substituant à Me BOULLOCHE, avocat de M. Z...,
- et les conclusions de M. CADENAT, commissaire du gouvernement,

Considérant que par un jugement du 22 janvier 1988, le Tribunal administratif d'ORLEANS a condamné M. Z..., architecte, conjointement et solidairement avec l'Entreprise Drouaise de Bâtiments et Travaux Publics (E.D.B.T.P) chargée du lot "gros oeuvre", à verser à l'Office Public d'H.L.M de DREUX la somme de 91 787,40 F toutes taxes comprises, majorée des intérêts légaux à compter du 27 mai 1981, en réparation des désordres survenus dans les bâtiments à usage d'habitation construits pour le compte de cet établissement public au lieudit "Les Bergeronnettes" à DREUX (Eure et Loir) ; qu'il a, en outre, condamné l'Entreprise Drouaise de Bâtiments et Travaux Publics à garantir M. Z... à concurrence de 65 % des condamnations prononçées contre ce dernier ; que l'office interjette appel dudit jugement en reprenant ses prétentions soumises aux premiers juges tendant à la condamnation conjointe et solidaire de M. Z... et de l'Entreprise Douaise de Bâtiments et Travaux Publics à lui verser les sommes de 400 388,73 F au titre des réfections extérieures, 383 747,67 F au titre des réfections intérieures et 230 000 F à titre de dommages et intérêts ; que, pour leur part, M. Z... et l'Entreprise Drouaise de Bâtiments et Travaux Publics ont assorti leurs observations en défense tendant au rejet de la requête de l'office de recours incidents par lesquels ils contestent les condamnations prononçées à leur encontre ;
Sur la requête de l'Office Public d'H.L.M de DREUX :
Considérant qu'il résulte de l'instruction et, notamment, du rapport de l'expert commis par l'ordonnance du 17 juin 1981 du président du Tribunal administratif d'ORLEANS, statuant par voie de référé, que les désordres restant en litige sont dûs, d'une part, à des infiltrations au droit des bandeaux horizontaux d'étanchéité sur les façades les plus exposées aux intempéries, d'autre part, à des phénomènes de condensation liés à un défaut d'imperméabilisation des murs extérieurs ainsi qu'à une ventilation insuffisante et une suroccupation des logements ;
Considérant que les désordres extérieurs et intérieurs entraînés par les infiltrations sont imputables à la fois à l'Entreprise Drouaise de Bâtiments et Travaux Publics qui n'a pas effectué la pose des bandeaux d'étanchéité horizontaux dans les règles de l'art et à l'architecte Z... qui n'a pas exercé une surveillance suffisante sur le déroulement des travaux ;
En ce qui concerne la réparation des désordres extérieurs :
Considérant que les mesures nécessaires pour mettre fin à la cause de ces malfaçons et en réparer les conséquences dommageables comportent la reprise des bandeaux défectueux et des fissures périphériques ainsi que l'exécution de travaux d'imperméabilisation des façades ;

Considérant, d'une part, que dans le cadre de la mission qui lui était assignée, l'expert a constaté que sur les 3 694 mètres linéaires de bandeaux de façades posés par l'entreprise Drouaise de Bâtiments et Travaux Publics, seuls ceux des façades les plus exposées aux intempéries, représentant une longueur de 194,40 mètres, présentaient des défectuosités compromettant leur étanchéité ; que, dès lors, et bien qu'il soit constant que la pose de l'ensemble des bandeaux ait été faite suivant le même procédé techniquement contestable, l'office n'est pas fondé à se prévaloir d'un préjudice au titre de bandeaux d'étanchéité restés intacts et dont l'hypothétique défaillance ne peut que conférer au dommage allégué un caractère purement éventuel ; qu'il n'est d'ailleurs pas établi ni même allégué par l'office qui, sur ce point, se borne à invoquer "un dommage différé", que l'étendue des désordres causés par les infiltrations se serait aggravée depuis le dépôt du rapport d'expertise ; que, dès lors, c'est à bon droit que le coût des travaux strictement nécessaires pour rétablir l'étanchéité des façades a été déterminé en fonction de la longueur précitée de 194,40 mètres représentant 5,26 % du linéaire total ; que contrairement à ce que soutient l'office, ce taux a pu être porté à 10 % par l'expert pour tenir compte des contraintes techniques non utilement contestées qui s'attachent à l'exécution de travaux de cette nature ;
Considérant, d'autre part, que la réparation qui est due au maître de l'ouvrage par application des principes découlant des articles 1792 et 2270 du code civil ne saurait comporter des travaux excédant par leur importance et leur coût la remise en état des ouvrages tels qu'ils ont été commandés ; qu'il est constant que les travaux d'imperméabilisation des façades ne figuraient pas au nombre des prestations dont l'Entreprise Drouaise de Bâtiments et Travaux Publics avait la charge en exécution des prescriptions du marché ; qu'ainsi, bien que de tels travaux eussent fourni une meilleure isolation extrieure de nature à réduire les phénomènes de condensation relevés par l'expert, l'office n'est pas fondé à demander que l'indemnité fixée par le tribunal à raison du préjudice lié aux malfaçons apparues sur les façades soit majorée du montant desdits travaux ;
Considérant, toutefois, que les travaux d'imperméabilisation ayant été évalués à 62 148 F hors taxes, par l'expert à la date du dépôt de son rapport, le montant du préjudice subi par l'office du fait des malfaçons apparues sur les façades ne pouvait pas être fixé à 80 000 F comme l'a décidé le tribunal mais, devait s'établir à la différence entre le coût total des travaux de reprise des éléments de façade défectueux évalué à la somme actualisée de 122 685 F hors taxes et la somme précitée de 62 148 F hors taxes soit, à la somme de 71 796 F toutes taxes comprises à laquelle il y a lieu de réduire l'indemnisation due à ce titre conjointement et solidairement par l'architecte Z... et l'Entreprise Drouaise de Bâtiments et Travaux Publics ;
En ce qui concerne la réparation des désordres intérieurs :

Considérant qu'il résulte de l'instruction et, notamment, du rapport de l'expert que des travaux de réfection des peintures intérieures et papiers peints, évalués à 39 171,83 F toutes taxes comprises (valeur octobre 1983), ont été rendus nécessaires par les infiltrations des façades et des phénomènes de condensation, ceux-ci étant en partie dus au défaut d'imperméabilisation de ces dernières ; que, cependant, compte-tenu de leur longévité normale depuis leur réception définitive prononçée le 14 septembre 1973, les travaux originels de peintures et de papiers peints dont, au demeurant, l'office ne conteste pas qu'ils ne figuraient pas dans les prescriptions du marché, présentaient à la date de l'apparition des désordres correspondant à la demande du 27 mai 1981 faite par le maître d'ouvrage pour obtenir la constatation des désordres par voie de référé, un degré de vétusté tel qu'ils ne sauraient, en tout état de cause, ouvrir droit à réparation au profit de l'office ; qu'ainsi, il y a lieu de faire droit sur ce point aux conclusions des recours incidents des constructeurs et de réformer en conséquence le jugement attaqué ;
En ce qui concerne l'allocation de dommages et intérêts :
Considérant que l'Office Public d'H.L.M de DREUX, qui a obtenu du tribunal administratif les intérêts au taux légal sur les indemnités qui lui ont été allouées à compter du dépôt de sa demande en référé, n'établit pas l'existence du préjudice financier qu'il aurait subi du fait de la réalisation des travaux de reprise nécessités par les désordres litigieux ; que, dès lors, ses conclusions tendant au versement d'une indemnité de 230 000 F à titre de dommage et intérêts auxquelles, d'ailleurs, le jugement attaqué a expressément répondu, ne peuvent qu'être écartées ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'indemnité mise à sa charge conjointe et solidaire de M. Z... et de l'Entreprise Drouaise de Bâtiments et Travaux Publics doit être ramenée à 71 796 F toutes taxes comprises ;
En ce qui concerne les intérêts des intérêts dus par les constructeurs :
Considérant que l'office a demandé le 29 mars 1985 la capitalisation des intérêts dont le tribunal a fixé le point de départ au 27 mai 1981 ; qu'à cette date, au cas où le jugement attaqué n'aurait pas encore été exécuté, il était dû plus d'une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément à l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande ;
Sur les autres conclusions de M. Z..., architecte, et de l'Entreprise Drouaise de Bâtiments et Travaux Publics :
Considérant, d'une part, que ces constructeurs ne sont pas fondés, en raison de la part qu'ils ont prise, respectivement, tant à la conception de l'ouvrage et la surveillance des travaux qu'à la mauvaise exécution desdits travaux, à demander, par la voie du recours incident, à être déchargés de l'obligation qui résulte pour eux, comme il vient d'être dit, de réparer, conjointement et solidairement, les conséquences dommageables des désordres dont s'agit ;

Considérant, d'autre part, que dans les circonstances de l'espèce, les premiers juges ont fait une appréciation excessive de la part de cette obligation qui doit demeurer à la charge de l'Entreprise Drouaise de Bâtiments et Travaux Publics en la condamnant à garantir l'architecte Z... à concurrence de 65 % des condamnations prononçées à son encontre ; que pour tenir compte des fautes de conception et de surveillance des travaux imputables à cet homme de l'art dans la survenance des désordres, il y a lieu de ramener à 50 % la limite de cette garantie ;
Sur les frais d'expertise :
Considérant que les constructeurs ayant succombé dans l'instance, c'est à bon droit que le tribunal administratif a mis entièrement les frais d'expertise à leur charge conjointe et solidaire ;
Article 1 - La somme que M. Z..., architecte et l'Entreprise Drouaise de Bâtiments et Travaux Publics ont été conjointement et solidairement condamnés à verser à l'Office Public d'H.L.M de DREUX par l'article 2 du jugement du Tribunal administratif d'ORLEANS en date du 22 janvier 1985 est ramenée à 71 796 F toutes taxes comprises.
Article 2 - L'Entreprise Drouaise de Bâtiments et Travaux Publics est condamnée à garantir M. Z..., architecte, à concurrence de 50 % des condamnations prononçées à l'encontre de ce dernier.
Article 3 - Les articles 2 et 4 du jugement du Tribunal administratif d'ORLEANS en date du 22 janvier 1985 sont réformés en ce qu'ils ont de contraire au présent arrêt.
Article 4 - Les intérêts de la somme due à l'office en application de l'article 1er ci-dessus seront capitalisés à la date du 29 mars 1985 pour porter eux-mêmes intérêts.
Article 5 - Le surplus des conclusions de la requête de l'Office Public d'H.L.M de DREUX et des recours incidents de M. Z... et de l'Entreprise Drouaise de Bâtiments et Travaux Publics est rejeté.
Article 6 - Le présent arrêt sera notifié à l'Office Public d'H.L.M de DREUX, à M. Z..., à l'Entreprise Drouaise de Bâtiments et Travaux Publics, à l'Entreprise GUERY, à la S.A.R.L Y... JARDIN, à Me A..., syndic à la liquidation des biens de la S.A Y... Roger PIERRE.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Numéro d'arrêt : 89NT00269
Date de la décision : 25/04/1990
Type d'affaire : Administrative

Analyses

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE - L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - REPARATION - PREJUDICE INDEMNISABLE.

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE - L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - REPARATION - PREJUDICE INDEMNISABLE - EVALUATION - ABATTEMENT POUR VETUSTE.


Références :

Code civil 1792, 2270, 1154


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: DUPUY
Rapporteur public ?: CADENAT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;1990-04-25;89nt00269 ?
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