Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Par une ordonnance du 3 octobre 2022, le juge des référés du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, a, sur la requête n° 2201862 présentée par M. D... B..., la société Mafroco et la société Gan Assurances, prescrit une expertise confiée à M. A... F... et destinée à déterminer l'origine de l'incendie qui s'est déclaré dans la nuit du 14 au 15 juillet 2022, dans la propriété de M. B....
Par un mémoire enregistré le 19 janvier 2023, M. B..., la société Mafroco et la société Gan Assurances ont demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'étendre les opérations d'expertise à M. E... C... et à la société Smacl Assurances.
Par une décision n° 2201862 du 13 mars 2023, le juge des référés a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 27 mars 2023, M. B..., la société Mafroco et la société Gan Assurances, représentés par Me Montagne, demandent à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;
2°) de faire droit à leur demande d'extension d'expertise ;
3°) d'ordonner à la société Smacl Assurances de produire les polices d'assurance complètes pour les contrats n°40044B et 439333/L
4°) de statuer ce que de droit sur les dépens.
Ils soutiennent que :
- la responsabilité de M. E... C... pourrait être recherchée tant en sa qualité de maire de la commune de Clamanges qu'en sa qualité d'artificier et il relève donc d'une bonne administration de la justice qu'il soit partie aux opérations d'expertise en ces deux qualités ;
- la police d'assurance n°40044B " promut" souscrite par la commune de Clamanges auprès de la société Smacl Assurances est mobilisable ;
- il n'est pas démontré que la police n°439333/L " securité élu " souscrite par la commune de Clamanges auprès de la société Smacl Assurances ne soit pas mobilisable en l'absence de production par cette dernière des conditions particulières de la police.
Par un mémoire enregistré le 24 avril 2023, M. C... demande à la Cour de prendre acte qu'il formule les protestations et réserves d'usage sans s'opposer à sa participation à l'expertise.
Par un mémoire enregistré le 2 mai 2023, la société Smacl Assurances sollicite le rejet de la requête.
Par un mémoire enregistré le 1er juin 2023, la société Areas Dommages sollicite l'annulation de l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne et l'extension des opérations d'expertise à M. C... et à la société Smacl Assurances.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n°83-634 du 13 juillet 1983,
- le code de justice administrative.
Considérant ce qui suit :
1. M. D... B... est propriétaire d'un bien immobilier situé à Clamanges (51), composé de plusieurs bâtiments dont des bâtiments de stockage. Dans la nuit du 14 au 15 juillet 2022, un important incendie s'est déclaré dans trois de ces bâtiments, occupés par la société Mafroco dont M. B... est le gérant. L'ensemble immobilier incendié est assuré auprès de la société Gan Assurances. Le 19 juillet 2022, un expert mandaté par la société Gan Assurances a établi un rapport de reconnaissance selon lequel le feu d'artifice, tiré par M. E... C..., maire de la commune de Clamanges, à 200 mètres de la propriété de M. B..., serait à l'origine du sinistre. Le 9 août 2022, M. B..., la société Mafroco et la société Gan Assurances ont demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de prescrire une expertise en vue de déterminer l'origine de l'incendie sur le fondement des dispositions de l'article R. 532-1 du code de justice administrative. Par une ordonnance du 3 octobre 2022, le juge des référés du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a fait droit à cette demande et désigné comme expert M. A... F.... M. B..., la société Mafroco et la société Gan Assurances ont ensuite demandé l'extension des opérations d'expertise à M. E... C... et à la société Smacl Assurances sur le fondement des dispositions de l'article R. 532-3 du code de justice administrative. Ils font appel de l'ordonnance du 13 mars 2023 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leur demande.
Sur la demande d'expertise :
2. Aux termes de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple demande et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction. (...) ". Aux termes de l'article R. 532-3 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, à la demande de l'une des parties formée dans le délai de deux mois qui suit la première réunion d'expertise, ou à la demande de l'expert formée à tout moment, étendre l'expertise à des personnes autres que les parties initialement désignées par l'ordonnance, ou mettre hors de cause une ou plusieurs des parties ainsi désignées. (...). ". Il résulte de ces dispositions que, lorsqu'il est saisi d'une demande d'une partie ou de l'expert tendant à l'extension de la mission de l'expertise à des personnes autres que les parties initialement désignées par l'ordonnance, le juge des référés ne peut ordonner cette extension qu'à la condition qu'elle présente un caractère utile. Il peut, notamment, appeler à l'expertise en qualité de sachant toute personne dont la présence est de nature à éclairer ses travaux.
En ce qui concerne l'extension à M. C... :
3. La commune de Clamanges a été organisatrice du feu d'artifice tiré à l'occasion de la fête nationale le 14 juillet 2022, et son maire, M. E... C..., titulaire d'un agrément préfectoral pour la mise en œuvre d'articles pyrotechniques catégorie F4 ou T2 ou d'articles pyrotechniques de catégories 1 et 2 conçus pour être lancés par un mortier, délivré le 10 juin 2020 pour 5 ans, a été chargé de procéder au tir. Accomplies dans le cadre de l'exécution d'un service public, ces opérations sont, au cas de faute, susceptibles d'engager la responsabilité de la commune devant la juridiction administrative à raison des dommages qu'elles auraient causés.
4. Ainsi qu'il l'a été dit ci-dessus, M. C... a procédé au tir du feu d'artifice dont les requérants considèrent qu'il est à l'origine de l'incendie dont ils ont été victimes. Alors même que sa responsabilité personnelle ne pourrait être utilement recherchée devant les juridictions administratives, M. C... est à même de décrire les conditions dans lesquelles le tir a été réalisé et les précautions qui ont été prises pour prévenir tout incident. En conséquence, sa participation à l'expertise en qualité de sachant, à laquelle il ne s'est, au demeurant, pas opposé, apparaît comme présentant le caractère d'utilité requis par les dispositions citées au point 2. Les requérants sont, dès lors, fondés à soutenir que c'est à tort que le juge des référés du tribunal administratif de Châlons-en- Champagne a refusé de faire droit à leur demande en ce sens.
En ce qui concerne l'extension à la société Smacl Assurances :
5. Il ressort des pièces du dossier que la commune de Clamanges a souscrit auprès de la société Smacl Assurances un contrat " promut " assurant les dépenses entrant dans le cadre de la protection fonctionnelle des agents et élus prises en charge par la collectivité. Eu égard à l'objet de cette garantie, défini à l'article 4 des conditions générales du contrat comme comprenant notamment la prise en charge des frais de défense consécutifs à toute action amiable ou judiciaire engagée par des tiers à l'encontre de l'agent ou de l'élu pour des faits n'ayant pas le caractère d'une faute détachable du service, incluant donc, le cas échéant, l'assistance d'un avocat lors des opérations d'expertise au cas où M. C... demanderait la protection fonctionnelle à ce titre, la participation de la Smacl Assurances à l'expertise apparaît comme présentant également une utilité. Dans ces conditions, et bien que l'article 8.11 du même contrat exclue la prise en charge par l'assureur des indemnités auxquelles la commune pourrait être civilement condamnée du fait de dommages causés par l'emploi d'explosifs (article 8.11 du contrat), et bien que la garantie dont bénéficie M. C... au titre d'un autre contrat Smacl " sécurité élus " n'apparaisse pas, en l'état, comme étant mobilisable dans les instances susceptibles d'être engagées devant la juridiction administrative en vue d'obtenir la réparation des préjudices causés par l'incendie litigieux, les requérants sont fondés à soutenir que c'est à tort que le premier juge a rejeté leur demande d'expertise sur ce point.
6. Il résulte de tout ce qui ce qui précède que l'ordonnance n° 2201862 du 13 mars 2023 dont il est fait appel doit être annulée.
ORDONNE :
Article 1er : L'ordonnance n° 2201862 du 13 mars 2023, du juge des référés du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne est annulée.
Article 2 : Les opérations d'expertise confiées à M. F... par l'ordonnance initiale portant le même numéro du 3 octobre 2022 sont étendues à M. E... C... et à la société Smacl Assurances.
Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B..., à la Société mafroco, à la société Gan assurances, à la commune de Clamanges, à M. C..., à la société Smacl Assurances, à la Compagnie areas dommages et à M. F....
La présidente,
Signé : S. Favier
La République mande et ordonne au préfet de la Marne, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.
Pour expédition conforme,
La greffière,
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N° 23NC00956