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26/03/2019 | FRANCE | N°18NC02652

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 26 mars 2019, 18NC02652


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 30 novembre 2016 par laquelle le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1700279 du 5 avril 2018, le tribunal administratif de Nancy a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 30 septembre 2018 et un mémoire complémentaire enregistré le 28 février 2019, M. A... B..., représenté par Me C..., demande à la co

ur :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 5 avril 2018 ;

2°) d'annule...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 30 novembre 2016 par laquelle le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1700279 du 5 avril 2018, le tribunal administratif de Nancy a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 30 septembre 2018 et un mémoire complémentaire enregistré le 28 février 2019, M. A... B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 5 avril 2018 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 30 novembre 2016 ;

3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle de réexaminer sa situation administrative dans le délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour pendant cet examen ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil, sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- les premiers juges ne pouvaient rejeter sa demande sans se prononcer sur ses moyens au motif qu'il fait l'objet d'une interdiction judiciaire du territoire alors que la décision contestée n'est pas fondée sur ce motif et que celui-ci n'a pas été relevé d'office ;

- le jugement contesté est insuffisamment motivé ;

- la décision contestée est entachée d'incompétence ;

- cette décision est insuffisamment motivée ;

- sa situation n'a pas fait l'objet d'un examen sérieux ;

- la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense enregistré le 25 février 2019, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que le préfet se trouvait en situation de compétence liée pour rejeter, le 30 novembre 2016, la demande de titre de séjour présentée par M. B...dès lors que ce dernier fait l'objet d'un jugement du tribunal correctionnel de Nancy du 12 avril 2013 prononçant à son encontre une interdiction du territoire pour une durée de cinq ans.

M. B...a présenté ses observations sur le moyen relevé d'office par un mémoire enregistré le 14 février 2019.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 août 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guérin-Lebacq,

- et les observations de Me C...pour M.B....

Une note en délibéré, enregistrée le 18 mars 2019, a été présentée pour M.B....

Considérant ce qui suit :

1. M.B..., ressortissant turc né le 1er juillet 1980, déclare être entré irrégulièrement en France le 10 février 2010 afin de demander la reconnaissance du statut de réfugié. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 2 avril 2010, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 3 janvier 2011. La demande présentée par M. B...en vue du réexamen de sa situation au regard de l'asile a été rejetée par une décision de l'office du 15 décembre 2014. M. B...a présenté, le 24 avril 2015, une demande de titre de séjour en faisant état de promesses d'embauche et de sa situation privée et familiale en France. Par un arrêté du 24 octobre 2015, le préfet de Meurthe-et-Moselle a rejeté cette demande et assorti sa décision de refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français. Par un jugement du 22 septembre 2016, le tribunal administratif de Nancy a annulé cet arrêté et enjoint au préfet de délivrer une autorisation provisoire de séjour à M. B.... Après avoir délivré cette autorisation, pour la période du 27 septembre au 30 décembre 2016, et invité M. B...à produire tout élément utile sur sa situation, le préfet de Meurthe-et-Moselle a, le 30 novembre 2016, refusé de lui délivrer un titre de séjour. M. B...relève appel du jugement du 5 avril 2018 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Le juge ne peut se fonder, sans inviter les parties à présenter leurs observations, sur la situation de compétence liée dans laquelle se trouve l'administration pour statuer sur une demande s'il ne ressort ni des termes de la décision attaquée, ni des pièces du dossier que l'administration estimait être dans une telle situation.

3. Pour rejeter la demande de M.B..., le tribunal administratif a relevé que l'intéressé avait été condamné le 12 avril 2013 par le tribunal de grande instance de Nancy statuant en matière correctionnelle à une peine d'interdiction du territoire français d'une durée de cinq ans et en a tiré pour conséquence que le préfet de Meurthe-et-Moselle était en situation de compétence liée pour rejeter sa demande de titre de séjour. Il en a déduit que les moyens invoqués par M. B...contre la décision de refus de séjour du 30 novembre 2016 étaient inopérants. Il ne ressortait ni des termes de cette décision, ni du mémoire en défense présenté par le préfet qui se bornait à faire état de cette peine d'interdiction du territoire, ni encore d'aucune autre pièce du dossier que le préfet s'était fondé sur ce qu'il s'estimait en situation de compétence liée pour refuser un titre de séjour à M. B.... Dès lors, en se fondant lui-même sur ce motif sans avoir préalablement informé les parties de son intention de le relever d'office, le tribunal administratif a entaché son jugement d'irrégularité.

4. Il y a lieu, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen d'irrégularité soulevé par le requérant, d'annuler le jugement attaqué et de statuer par la voie de l'évocation sur la demande de M.B....

Sur la demande d'annulation de M.B... :

5. Aux termes de l'article L. 541-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La peine d'interdiction du territoire français susceptible d'être prononcée contre un étranger coupable d'un crime ou d'un délit est régie par les dispositions des articles 131-30, 131-30-1 et 131-30-2 du code pénal ci-après reproduites : " Art. 131-30 du code pénal. / " Lorsqu'elle est prévue par la loi, la peine d'interdiction du territoire français peut être prononcée, à titre définitif ou pour une durée de dix ans au plus, à l'encontre de tout étranger coupable d'un crime ou d'un délit. / " L'interdiction du territoire entraîne de plein droit la reconduite du condamné à la frontière, le cas échéant, à l'expiration de sa peine d'emprisonnement ou de réclusion (...) ". Aux termes de l'article R. 311-14 du même code : " Le titre de séjour est retiré : (...) 6° Si son détenteur fait l'objet d'une décision judiciaire d'interdiction du territoire (...) ".

6. Il ressort des pièces du dossier que M. B...a fait l'objet d'une mesure d'interdiction judiciaire du territoire de cinq années prononcée par un jugement du tribunal correctionnel de Nancy du 12 avril 2013, devenu définitif. Cette interdiction était applicable à la date à laquelle le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité le 30 novembre 2016. Le préfet, qui se trouvait en situation de compétence liée, était donc tenu de refuser la délivrance d'un titre de séjour au requérant. Par suite, l'ensemble des moyens soulevés par M. B...à l'encontre de cette décision doivent être écartés comme inopérants.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la demande de M. B... tendant à l'annulation de la décision du 30 novembre 2016 ne peut qu'être rejetée.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Le présent arrêt, qui rejette la demande de M.B..., n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions présentées à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme dont M. B...demande le versement au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nancy n° 1702825 du 5 avril 2018 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif de Nancy, ainsi que ses conclusions présentées en appel à fin d'injonction et sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.

2

N° 18NC02652


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18NC02652
Date de la décision : 26/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: M. Jean-Marc GUERIN-LEBACQ
Rapporteur public ?: Mme KOHLER
Avocat(s) : CAGLAR

Origine de la décision
Date de l'import : 03/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-03-26;18nc02652 ?
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