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14/03/2019 | FRANCE | N°19NC00327

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 14 mars 2019, 19NC00327


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de prescrire une expertise, en présence du centre hospitalier de Sedan et de la caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes, en vue de déterminer si les soins qui lui ont été prodigués ont été conformes aux règles de l'art.

Par une ordonnance n° 1802149 du 14 janvier 2019, le juge des référés du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cou

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Par une requête, enregistrée le 14 janvier 2019, et un mémoire en réplique enregistré le ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de prescrire une expertise, en présence du centre hospitalier de Sedan et de la caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes, en vue de déterminer si les soins qui lui ont été prodigués ont été conformes aux règles de l'art.

Par une ordonnance n° 1802149 du 14 janvier 2019, le juge des référés du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 14 janvier 2019, et un mémoire en réplique enregistré le 22 février 2019, MmeB..., représentée par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du 14 janvier 2019 du juge des référés du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;

2°) de faire droit à sa demande d'expertise ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Sedan la somme de 4 000 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la forclusion n'est pas opposable lorsque la demande se fonde sur une cause juridique distincte de celle sur laquelle reposait une demande antérieure ;

- sa demande indemnitaire préalable du 29 mars 2017 était en relation avec les suites de l'opération qu'elle avait subie et qu'elle considérait comme ayant été mal réalisée ;

- sa compagnie d'assurance a diligenté, postérieurement au rejet de sa demande indemnitaire par le centre hospitalier de Sedan, une expertise amiable et contradictoire de laquelle il ressort que l'intervention pratiquée n'était pas nécessaire ;

- sa demande d'expertise médicale porte sur la nécessité de l'intervention pratiquée, et non sur sa conformité aux règles de l'art, qui constitue une question distincte de celle qui fondait sa demande indemnitaire ;

- elle ne saurait être regardée comme forclose à la date où elle a saisi le juge des référés ;

- le recours indemnitaire qu'elle a formé n'est pas, par lui-même, de nature à priver d'utilité une mesure d'expertise dans le cadre d'une saisine de la commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales ;

- l'expertise sollicitée présente un caractère utile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 février 2019, le centre hospitalier de Sedan, représenté par MeC..., conclut au rejet de la requête de MmeB....

Il soutient que :

- une expertise ne présente pas d'utilité si l'instance au fond est irrecevable ;

- en matière de responsabilité pour faute, tous les moyens relatifs à la faute se rapportent à une même cause juridique ;

- la responsabilité pour faute constitue une cause juridique propre, quels que soient les moyens invoqués au titre de la faute ;

- la décision du directeur du centre hospitalier, en date du 19 mai 2017, rejetant la demande indemnitaire présentée par Mme B...mentionnait les voies et délais de recours, ainsi que la possibilité de saisine de la commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales ;

- cette décision, notifiée le 22 mai 2017, est devenue définitive dans la mesure où Mme B... n'a saisi le juge des référés du tribunal administratif que le 12 octobre 2018.

La procédure a été communiquée à la caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes qui n'a pas présenté de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. A l'occasion d'un suivi gynécologique ayant révélé le grossissement d'un fibrome l'affectant depuis plusieurs années, MmeB..., alors âgée de 63 ans, a été hospitalisée au centre hospitalier de Sedan le 9 novembre 2016 pour y subir une hystérectomie pour utérus fibromateux. Si les suites postopératoires ont été bonnes, Mme B...a présenté des douleurs à partir du 19 novembre 2016 la conduisant à une hospitalisation au centre hospitalier de Charleville-Mézières, du 21 au 23 novembre, au cours de laquelle un examen clinique a révélé la présence d'une fistule vésico-vaginale. Une chirurgie réparatrice a été programmée le 22 décembre 2016 dans ce même établissement. Par courrier du 29 mars 2017, l'intéressée a adressé au centre hospitalier de Sedan une demande indemnitaire aux fins de réparation du préjudice qu'elle estimait avoir subi. Cette demande a été rejetée par décision du 19 mai 2017 du directeur du centre hospitalier de Sedan qui mentionnait expressément les voies et délai de recours. Une expertise a été diligentée par l'assureur de la requérante en décembre 2017. L'expert a déposé son rapport le 21 mars 2018. Mme B...a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'une demande tendant à prescrire une expertise, en présence du centre hospitalier de Sedan et de la caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes, en vue de déterminer si les soins qui lui ont été prodigués ont été conformes aux règles de l'art. L'intéressée fait appel de l'ordonnance du 14 janvier 2019 ayant rejeté sa demande.

2. Aux termes de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple demande et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction. (...) ". L'utilité d'une mesure d'instruction ou d'expertise qu'il est demandé au juge des référés d'ordonner sur le fondement de ces dispositions doit être appréciée, d'une part, au regard des éléments dont le demandeur dispose ou peut disposer par d'autres moyens et, d'autre part, bien que ce juge ne soit pas saisi du principal, au regard de l'intérêt que la mesure présente dans la perspective d'un litige principal, actuel ou éventuel, auquel elle est susceptible de se rattacher. A ce dernier titre, il ne peut faire droit à une demande d'expertise lorsque, en particulier, elle est formulée à l'appui de prétentions qui ne relèvent manifestement pas de la compétence de la juridiction administrative, qui sont irrecevables ou qui se heurtent à la prescription.

3. En application de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, la personne qui a saisi une collectivité publique d'une demande d'indemnité et qui s'est vu notifier une décision expresse de rejet dispose d'un délai de deux mois à compter de cette notification pour rechercher la responsabilité de la collectivité devant le tribunal administratif. Conformément aux dispositions de l'article R. 421-5 du même code, ce délai n'est opposable qu'à la condition d'avoir été mentionné, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision. Eu égard à l'objectif poursuivi par le législateur en instituant une procédure de règlement amiable des litiges prévue au dernier alinéa de l'article L. 1142-7 du code de la santé publique, la notification de la décision rejetant la demande d'indemnité doit indiquer non seulement que le tribunal administratif peut être saisi dans le délai de deux mois mais aussi que ce délai est suspendu en cas de saisine de la commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux (CRCI). A ce titre, la notification ne fait pas courir le délai si elle ne comporte pas cette double indication.

4. Il résulte de l'instruction que la décision du 19 mai 2017 du directeur du centre hospitalier de Sedan, notifiée le 22 mai 2017, rejetant la demande indemnitaire de Mme B...en date du 29 mars 2017, indiquait expressément le délai de deux mois dans lequel pouvait être saisi le tribunal administratif, ainsi que la mention en vertu de laquelle ce délai de deux mois était suspendu en cas de saisine de la CRCI. La requérante n'établit ni même n'allègue qu'elle aurait saisi cette commission dans le délai de deux mois à compter de la notification du courrier du directeur du centre hospitalier. La requête de Mme B...tendant à la prescription d'une expertise n'a été enregistrée au greffe du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne que le 12 octobre 2018, soit au-delà du délai de deux mois, prévu par les dispositions précitées de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, qui n'a pas été suspendu en l'absence de saisine, en temps utile, de la CRCI. Le premier juge a déduit de ces éléments qu'une requête indemnitaire au fond, présentée à l'encontre de la décision expresse de rejet précitée, tendant à la condamnation du centre hospitalier de Sedan et alors qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'existerait une autre perspective contentieuse recevable, s'exposerait à l'irrecevabilité.

5. Pour contester l'ordonnance du premier juge, Mme B...fait valoir que la forclusion de sa demande ne lui était pas opposable dans la mesure où sa demande d'expertise était présentée dans le cadre d'une perspective contentieuse fondée sur une cause juridique distincte de celle sur laquelle reposait sa demande indemnitaire préalable.

6. Les demandes d'indemnisation des préjudices causés par un même événement relèvent d'une même cause juridique si elles sont fondées sur une faute que l'administration aurait commise. Ainsi MmeB..., qui fondait sa demande indemnitaire préalable sur une faute du centre hospitalier de Sedan, à savoir une prise en charge non conforme aux règles de l'art lors de l'intervention du 9 novembre 2016, n'est pas recevable à invoquer, au soutien de sa demande d'expertise, le moyen tiré de ce que l'intervention qu'elle a subie ne revêtait pas un caractère de nécessité, dès lors que celui-ci se rattache également à une faute qu'aurait commise l'établissement intimé lors de la même intervention.

7. Il résulte de ce qui précède que la demande indemnitaire de la requérante étant irrecevable, l'expertise sollicitée est dépourvue d'utilité. Par suite, Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Il y a donc lieu de rejeter sa requête et, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

ORDONNE :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme A...B..., au centre hospitalier de Sedan et à la caisse primaire d'assurance maladie des Ardennes.

Fait à Nancy, le 14 mars 2019.

La présidente de la cour

Signé : Françoise Sichler

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

Pour expédition conforme

Le greffier,

5

19NC00327


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Numéro d'arrêt : 19NC00327
Date de la décision : 14/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Avocat(s) : LEDOUX FERRI YAHIAOUI RIOU-JACQUES

Origine de la décision
Date de l'import : 22/03/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-03-14;19nc00327 ?
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