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27/09/2016 | FRANCE | N°16NC01771

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 27 septembre 2016, 16NC01771


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société AXA France Iard, la SCI JCG Rollot et la société Rollot ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nancy de prescrire une expertise portant sur les conditions d'intervention du service départemental d'incendie et de secours des Vosges lors de l'incendie survenu dans la nuit du 5 au 6 janvier 2016 dans le bâtiment situé 343 rue du Stade à Pouxeux.

Par une ordonnance n° 1600351 du 19 mai 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Nancy a fait droit à ce

tte demande, ordonnant que l'expertise ait lieu en présence de la SCI JCG Rollot, de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société AXA France Iard, la SCI JCG Rollot et la société Rollot ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nancy de prescrire une expertise portant sur les conditions d'intervention du service départemental d'incendie et de secours des Vosges lors de l'incendie survenu dans la nuit du 5 au 6 janvier 2016 dans le bâtiment situé 343 rue du Stade à Pouxeux.

Par une ordonnance n° 1600351 du 19 mai 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Nancy a fait droit à cette demande, ordonnant que l'expertise ait lieu en présence de la SCI JCG Rollot, de la société Rollot et de son assureur la société AXA France Iard, du service départemental d'incendie et de secours des Vosges et de la commune de Pouxeux.

La société Groupama Grand Est a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nancy que les opérations d'expertise prescrites par l'ordonnance du 19 mai 2016 lui soient déclarées communes et opposables, ainsi qu'à l'Etat pris en la personne du préfet de Vosges.

Par une ordonnance n° 1602095 du 21 juillet 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Nancy a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistré le 9 août 2016, et des mémoires rectificatifs, enregistrés les 11 et 16 août 2016, la société Groupama Grand Est, représentée par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du 21 juillet 2016 du juge des référés du tribunal administratif de Nancy ;

2°) d'ordonner que les opérations d'expertise prescrites par l'ordonnance du 19 mai 2016 du juge des référés du tribunal administratif de Nancy et confiées à M. B...lui soient déclarées communes et opposables ;

3°) de lui donner acte de ce que la présente intervention est faite sous les plus expresses réserves de ses droits et notamment des éventuelles garanties d'assurance ;

4°) de déclarer communes et opposables à l'Etat, pris en la personne du préfet des Vosges, les opérations d'expertise prescrites par l'ordonnance du 19 mai 2016 du juge des référés du tribunal administratif de Nancy ;

Elle soutient que :

- elle est l'assureur de la commune de Pouxeux

- elle a, à ce titre, entendu présenter devant le juge des référés du tribunal administratif de Nancy une demande tendant, d'une part, à voir son intervention volontaire admise pour être associée aux opérations d'expertise et, d'autre part, à voir intervenir l'Etat en la personne du préfet des Vosges ;

- elle a intérêt à intervenir volontairement aux opérations d'expertise ;

- les compagnies d'assurance peuvent demander que les opérations d'expertise auxquelles sont parties leurs assurés leur soient déclarées opposables ;

- la responsabilité de l'Etat est susceptible d'être engagée en raison d'une carence du préfet dans le cadre de son pouvoir de substitution, prévu par l'article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales, du fait d'une inaction prolongée du maire de la commune de Pouxeux ;

- le réseau d'alimentation de lutte contre l'incendie de la commune était insuffisant depuis de nombreuses années ;

- le maire de la commune n'a jamais remédié à cette situation , malgré les alertes du service départemental d'incendie et de secours ;

Par des mémoires en défense enregistrés les 18 août et 24 août 2016, le préfet des Vosges conclut au rejet de la requête de la société Groupama Grand Est en tant qu'elle demande l'intervention forcée de l'Etat.

Il soutient que :

- la lutte contre l'incendie s'inscrit dans le cadre des pouvoirs de police administrative du maire en application des dispositions de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales ;

- le maire doit, en tant qu'autorité de police générale, s'assurer de l'existence et de la suffisance des moyens de lutte contre l'incendie ;

- les conditions selon lesquelles le préfet doit se substituer au maire dans l'exercice de ce pouvoir de police ne sont pas réunies au cas d'espèce ;

Par un mémoire, enregistré le 2 septembre 2016, la commune de Pouxeux, représentée par MeC..., demande à la Cour :

A titre principal :

1°) d'annuler l'ordonnance du 21 juillet 2016 du juge des référés du tribunal administratif de Nancy ;

2°) de déclarer commune et opposable à la société Groupama Grand Est l'ordonnance du 19 mai 2016 du juge des référés du tribunal administratif de Nancy et les opérations y relatives ;

3°) d'attraire l'Etat à la procédure d'expertise ;

A titre subsidiaire :

4°) d'annuler l'ordonnance du 21 juillet 2016 du juge des référés du tribunal administratif de Nancy ;

5°) d'étendre les opérations d'expertise décidées par l'ordonnance du 19 mai 2016 du juge des référés du tribunal administratif de Nancy à la société Groupama Grand Est ;

6°) d'attraire l'Etat à la procédure d'expertise ;

Elle soutient que :

- elle reprend à son bénéfice les moyens développés par la société Groupama Grand Est ;

- l'ordonnance attaquée encourt l'annulation faute d'avoir été rendue au terme d'une procédure contradictoire ;

- le premier juge a commis une erreur de droit en rejetant la demande d'extension de la procédure d'expertise présentée par la société Groupama Grand Est ;

- elle soutient la demande d'intervention formulée à l'endroit de l'Etat ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Considérant ce qui suit :

1. Par une ordonnance du 19 mai 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Nancy a, à la demande de la société AXA France Iard, de la SCI JCG Rollot et de la société Rollot, prescrit une expertise portant sur les conditions d'intervention du service départemental d'incendie et de secours des Vosges lors de l'incendie survenu dans la nuit du 5 au 6 janvier 2016 dans le bâtiment situé 343 rue du Stade à Pouxeux. Le service départemental d'incendie et de secours des Vosges et la commune de Pouxeux ont été attraits à cette expertise. La société Groupama Grand Est, assureur de la commune de Pouxeux, relève appel de l'ordonnance du 21 juillet 2016 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à ce que les opérations d'expertise ainsi ordonnées lui soient déclarées communes et opposables, ainsi qu'à l'Etat pris en la qualité du préfet des Vosges.

2. Aux termes de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure d'expertise ou d'instruction. / Il peut notamment charger un expert de procéder, lors de l'exécution de travaux publics, à toutes constatations relatives à l'état des immeubles susceptibles d'être affectés par des dommages ainsi qu'aux causes et à l'étendue des dommages qui surviendraient effectivement pendant la durée de sa mission. (...) ". Peuvent être appelées en qualité de parties à une expertise ordonnée sur le fondement de ces dispositions, les personnes qui ne sont manifestement pas étrangères au litige susceptible d'être engagé devant le juge de l'action qui motive l'expertise. Les dispositions de l'article R. 532-3 du code de justice administrative, relatives aux conditions de recevabilité d'une demande de modification de la mission de l'expert présentée par ce dernier ou une des parties déjà appelées à l'expertise, ne sauraient faire obstacle à la recevabilité de conclusions tendant à être associé aux opérations d'expertise présentées par une personne non encore attraite à celles-ci et n'étant manifestement pas étrangère au litige.

3. Il résulte des pièces du dossier que la commune de Pouxeux a souscrit auprès de la société Groupama Grand Est diverses garanties parmi lesquelles figure, notamment, la responsabilité générale des communes. La responsabilité de la commune étant susceptible d'être évoquée dans le cadre d'un éventuel litige engagé devant le juge de l'action qui motive l'expertise, la société Groupama Grand Est doit, dès lors, être regardée comme n'étant pas manifestement étrangère à ce litige. Par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner la régularité de l'ordonnance attaquée, la société requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que le juge des référés du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Il y a donc lieu d'annuler cette ordonnance.

4. Il appartient au juge des référés de la Cour, saisi par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner la demande présentée par la société Groupama Grand Est devant le juge des référés du tribunal administratif de Nancy.

Sur le bien fondé de la demande de la société Groupama Grand Est tendant à être attraite aux opérations d'expertise :

5. Aux termes de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales : " La police municipale a pour objet le bon ordre, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend (...) 5° Le soin de prévenir, par des précautions convenables et de faire cesser, par la distribution de secours nécessaire, les accidents et les fléaux calamiteux ainsi que les pollutions de toute nature, tel que les incendies (...) ".

6. Il résulte de l'instruction, d'une part, que le litige susceptible d'être engagé devant le juge de l'action, qui a motivé l'expertise, a pour origine l'incendie d'un bâtiment survenu sur le territoire de la commune de Pouxeux et que la responsabilité de la commune est susceptible d'être engagée en raison d'une supposée carence dans l'exercice de ses pouvoirs de police et, d'autre part, que la commune avait souscrit auprès de la société Groupama Grand Est une assurance garantissant, notamment, la responsabilité générale de la commune. Dès lors, la présence de cette société est utile à la solution du litige susceptible de naître des désordres imputables à cet incendie. Il y a donc lieu d'ordonner que les opérations d'expertise prescrites par ordonnance du 19 mai 2016 du juge des référés du tribunal administratif de Nancy soient réalisées au contradictoire de la société Groupama Grand Est.

Sur les demandes de la société Groupama Grand Est et de la commune de Pouxeux tendant à attraire l'Etat aux opérations d'expertise :

7. Aux termes de l'article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales : " La police municipale est assurée par le maire, toutefois : 1° Le représentant de l'Etat dans le département peut prendre, pour toutes les communes du département ou plusieurs d'entre elles, et dans tous les cas où il n'y aurait pas été pourvu par les autorités municipales, toutes mesures utiles relatives au maintien de la salubrité, de la sûreté et de la tranquillité publiques. (...) ".

8. Au soutien de sa demande tendant à voir attrait l'Etat aux opérations d'expertise, la société Groupama Grand Est fait valoir que le réseau de défense extérieure contre l'incendie de la commune aurait été défectueux depuis de nombreuses années et que le préfet des Vosges aurait commis une faute en s'abstenant d'intervenir, dans le cadre du pouvoir de substitution qui lui est conféré par les dispositions précitées de l'article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales, pour remédier à ces dysfonctionnements.

9. Toutefois, ces simples allégations, qui ne sont étayées par aucun document probant de nature à établir, d'une part, la réalité des défectuosités ainsi évoquées et, d'autre part, que le préfet des Vosges aurait été informé ou aurait eu connaissance d'une telle situation, ne sont pas de nature, à elles seules, à démontrer que les conditions lui permettant d'user de son pouvoir de substitution, dans le cadre des dispositions précitées de l'article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales auraient été réunies. Dès lors, le préfet des Vosges, représentant de l'Etat dans le département, ne saurait être regardé comme une personne n'étant manifestement pas étrangère au litige. Par suite, la présence de l'Etat aux opérations d'expertise ne présente pas, en l'état de l'instruction, un caractère utile au sens des dispositions de l'article R. 532-1 du code de justice administrative.

ORDONNE :

Article 1er : L'ordonnance du 21 juillet 2016 du juge des référés du tribunal administratif de Nancy est annulée.

Article 2 : L'expertise prescrite par l'ordonnance du 19 mai 2016 du juge des référés du tribunal administratif de Nancy est déclarée commune à la société Groupama Grand Est.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la société Groupama Grand Est et de la commune de Pouxeux est rejeté.

Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à la société Groupama Grand Est, au ministre de l'intérieur, à la commune de Pouxeux, au service départemental d'incendie et de secours des Vosges, à la société AXA France Iard, à la SCI JCG Rollot et à la société Rollot. Copie en sera adressée au préfet des Vosges et à M.B..., expert.

Fait à Nancy, le 27 septembre 2016.

La présidente de la Cour

Signé :

6

16NC01771


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Numéro d'arrêt : 16NC01771
Date de la décision : 27/09/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP LEBON et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-09-27;16nc01771 ?
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