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05/07/2016 | FRANCE | N°15NC01323

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 05 juillet 2016, 15NC01323


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...A...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler, d'une part, l'arrêté du 20 janvier 2014 par lequel le maire de la commune d'Escles a procédé à une retenue sur traitement de 30/30ème pour absence de service fait au titre du mois de janvier 2014 et, d'autre part, l'arrêté du 27 mars 2014 par lequel ce maire a prononcé sa radiation des cadres pour abandon de poste.

Par un jugement n° 1400600 et 1401195 du 16 avril 2015, le tribunal administratif de Nancy a annulé, d'une part, l'a

rrêté du 20 janvier 2014 en tant qu'il procède à une retenue sur traitement pour...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...A...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler, d'une part, l'arrêté du 20 janvier 2014 par lequel le maire de la commune d'Escles a procédé à une retenue sur traitement de 30/30ème pour absence de service fait au titre du mois de janvier 2014 et, d'autre part, l'arrêté du 27 mars 2014 par lequel ce maire a prononcé sa radiation des cadres pour abandon de poste.

Par un jugement n° 1400600 et 1401195 du 16 avril 2015, le tribunal administratif de Nancy a annulé, d'une part, l'arrêté du 20 janvier 2014 en tant qu'il procède à une retenue sur traitement pour absence de service fait au titre des périodes du 1er au 15 janvier et du 21 au 31 janvier 2014 et, d'autre part, l'arrêté du 27 mars 2014 la radiant des cadres.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 juin 2015, la commune d'Escles, représentée Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 16 avril 2015 ;

2°) de rejeter les demandes présentées par Mme A...devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de Mme A...une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.

Elle soutient que :

En ce qui concerne la décision de retenue sur traitement pour absence de service :

- MmeA..., qui avait été invitée à reprendre le travail dès le début du mois de janvier, n'a pas déféré à cette mise en demeure ; l'intégralité de la demande présentée par Mme A... devant le tribunal administratif doit être rejetée ;

En ce qui concerne la décision la radiant des cadres :

- MmeA..., qui avait été régulièrement mise en demeure de reprendre son service, n'a donné aucune suite positive à la proposition d'aménagement de son poste, n'a pas repris son travail dans le délai fixé par la mise en demeure et n'a apporté aucun élément médical complémentaire de nature à justifier ses absences ; les premiers juges ne pouvaient considérer qu'une contre-visite par un médecin agréé ou une nouvelle saisine du comité médical était nécessaire ; Mme A...doit être regardée comme ayant manifesté une volonté de rompre le lien qui l'unissait au service.

Par un mémoire en défense enregistré le 14 septembre 2015, Mme D...A..., représentée par MeB..., conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) par la voie de l'appel incident, à l'annulation du jugement en tant qu'il ne procède qu'à une annulation partielle de l'arrêté du 20 janvier 2014 et à l'annulation de cet arrêté dans son intégralité ;

3°) à ce qu'il soit enjoint à la commune d'Escles de produire le bulletin de salaire de Mme A...pour le mois de janvier 2014 et de lui verser une somme de 593,28 euros ;

4°) à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la commune d'Escles sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

En ce qui concerne la décision de retenue sur traitement pour absence de service fait :

- elle ne se trouvait pas dans une situation d'absence non justifiée puisqu'elle bénéficiait d'un arrêt de travail jusqu'au 15 janvier 2014, prolongé jusqu'au 28 février 2014 ;

- elle ne pouvait reprendre son poste le 6 janvier 2014 puisque celui-ci n'était pas aménagé ; les prescriptions imposées par le médecin du travail rendaient la reprise du travail sur un poste d'agent territorial spécialisé des écoles maternelles quasiment impossible ;

- le maire a usé de cette procédure pour la sanctionner financièrement du fait de son état de santé ;

- la commune ne lui a pas restitué les indemnités journalières qui lui ont été versées par la caisse primaire d'assurance maladie ;

En ce qui concerne la décision la radiant des cadres :

- la compétence de l'auteur de l'acte n'est pas établie ;

- elle n'a pas pu reprendre son poste, dans la mesure où celui-ci n'avait pas été aménagé pour prendre en compte son état de santé et les préconisations du médecin de prévention ; elle était en congé de maladie à la date de reprise fixée ; étant en congé de maladie, elle n'a pu se rendre en dehors des heures de sortie autorisées à la rencontre de pré-reprise organisée avec le centre départemental de gestion de la fonction publique territoriale des Vosges.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 62-765 du 8 juillet 1962 ;

- le décret n°87-602 du 30 juillet 1987 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Fuchs,

- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,

- et les observations de Me B...pour MmeA....

1. Considérant que MmeA..., agent territorial spécialisé des écoles maternelles, est employée par la commune d'Escles (Vosges) depuis 1984 ; que le comité médical départemental a estimé, dans son avis du 5 décembre 2013, qu'à l'issue de son placement en disponibilité d'office pour raison de santé à compter du 2 novembre 2012 et pour une durée de douze mois, l'intéressée était apte à reprendre ses fonctions dans le cadre d'un poste aménagé ; qu'après avoir invité Mme A...à rejoindre le service par deux courriers des 11 et 24 décembre 2013, le maire de la commune d'Escles a prononcé, par le premier arrêté contesté en date du 20 janvier 2014, une retenue sur traitement de 30/30ème pour absence de service fait au cours du mois de janvier 2014 ; que le 28 février, le maire a mis en demeure l'agent de reprendre son poste à compter du 20 mars 2014 ; que par le second arrêté contesté en date du 27 mars 2014, il a prononcé la radiation des cadres de l'intéressée pour abandon de poste à compter de cette même date ; que par le jugement attaqué en date du 16 avril 2015, dont il est relevé appel, le tribunal administratif de Nancy, d'une part, a annulé l'arrêté du 20 janvier 2014 en tant qu'il procède à une retenue sur traitement pour absence de service fait au titre des périodes du 1er au 15 janvier 2014 et du 21 au 31 janvier 2014 et, d'autre part, a annulé l'arrêté radiant Mme A...des cadres ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne l'arrêté du 20 janvier 2014 procédant à une retenue sur traitement :

Quant aux conclusions d'appel principal présentées par la commune d'Escles :

2. Considérant que la commune d'Escles se borne à soutenir qu'elle " ne peut partager l'approche du premier juge " car " dans un contexte médical et administratif parfaitement vérifiable, Mme A... n'a pas déféré à la demande qui lui était présentée de reprendre son activité dès le début de l'année 2014 " ; que cet unique moyen n'étant pas assorti de précisions suffisantes pour permettre d'en apprécier le bien-fondé, ces conclusions ne peuvent être accueillies ;

Quant aux conclusions d'appel incident présentées par MmeA... :

3. Considérant que Mme A...demande, par la voie de l'appel incident, l'annulation du jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté en litige pour la période du 16 au 20 janvier inclus ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 dans sa version alors applicable : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie (...) en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions (...) " ; qu'en vertu des articles 14 et 15 du décret du 30 juillet 1987 pris pour l'application de cette loi, le fonctionnaire territorial, pour être placé de droit en congé de maladie, adresse un certificat d'un médecin à l'autorité territoriale dont il relève, laquelle peut faire procéder à une contre-visite par un médecin agréé ou saisir le comité médical compétent ; qu'enfin, aux termes de l'article 17 du même décret : " Lorsque le fonctionnaire a obtenu pendant une période de douze mois consécutifs des congés de maladie d'une durée totale de douze mois, il ne peut, à l'expiration de sa dernière période de congé, reprendre son service sans l'avis favorable du comité médical " ; qu'il résulte de ces dispositions que le congé de maladie est un droit pour le fonctionnaire qui fait parvenir à l'autorité territoriale l'avis d'interruption de travail prévu à l'article 15 du décret du 30 juillet 1987 ; que si, postérieurement à un avis d'aptitude rendu par le comité médical, une aggravation de son état ou une nouvelle affection le met dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, il lui appartient de faire parvenir à l'autorité administrative un nouveau certificat médical attestant l'existence de circonstances nouvelles ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le comité médical départemental a estimé, dans son avis du 5 décembre 2013, que Mme A...était apte à reprendre ses fonctions à compter du 6 janvier 2014 ; que l'intéressée a transmis à son employeur un avis médical daté du 13 décembre 2013 prescrivant une interruption de travail jusqu'au 15 janvier 2014, qui a été prorogée jusqu'au 26 janvier 2014 par un nouvel avis médical ;

6. Considérant que la commune d'Escles soutient que Mme A...ne peut être regardée comme ayant bénéficié, pour la période du 15 au 20 janvier 2016, d'un congé de maladie régulier dans la mesure où les avis médicaux produits n'apportent aucun élément nouveau dont le comité médical départemental n'aurait pas tenu compte dans son avis du 5 décembre 2013 ; que toutefois, le 3 janvier 2013, postérieurement à cet avis, le médecin de prévention a émis les préconisations suivantes quant à l'aménagement du poste de travail de MmeA... : éviter le port des charges supérieures à cinq kilogrammes ou tout effort équivalent, prendre en compte dans ses activités l'impossibilité d'agenouillement et d'accroupissement et limiter les montées-descentes de l'escalier menant à la salle de sieste des enfants à trois fois par jour en les espaçant d'au moins cinq minutes, sans que ces derniers déplacements puissent être effectués en urgence ; que ces réserves, dont la commune a eu connaissance le 9 janvier 2013, sont incompatibles avec les fonctions d'agent territorial spécialisé des écoles maternelles, qui impliquent des contraintes posturales fortes, nécessitant notamment d'alterner très régulièrement les positions assise et accroupie et la station debout, de travailler avec du mobilier adapté de petite taille et de porter fréquemment les enfants ; qu'en outre, alors qu'une assistante maternelle doit pouvoir préparer le lieu de sieste des enfants et les surveiller lors de la sieste, l'aménagement de l'école d'Escles suppose d'emprunter un escalier pour accomplir ces tâches, ce que la requérante ne peut pas faire plus de trois fois par jour ni en cas d'urgence ; que, compte tenu de ces circonstances nouvelles, la transmission par MmeA..., le 15 janvier 2014, d'un avis d'interruption de travail du 15 au 26 janvier 2014 ne constitue pas une manoeuvre de l'agent ; qu'il en résulte que la commune d'Escles ne pouvait procéder à une retenue sur traitement pour absence de service fait durant cette période, Mme A... devant être regardée comme étant régulièrement placée en congé de maladie ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens présentées au soutien des conclusions de Mme A...à fin d'annulation de l'arrêté du 20 janvier 2014, que celle-ci est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de cet arrêté pour la période comprise entre le 16 janvier et le 20 janvier 2014 inclus ; qu'en revanche, la commune d'Escles n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont annulé l'arrêté en litige pour les périodes du 1er au 15 janvier inclus et du 21 au 31 janvier ;

En ce qui concerne l'arrêté du 27 mars 2014 radiant Mme A...des cadres :

8. Considérant qu'une mesure de radiation des cadres pour abandon de poste ne peut être régulièrement prononcée que si l'agent concerné a, préalablement à cette décision, été mis en demeure de rejoindre son poste ou de reprendre son service dans un délai qu'il appartient à l'administration de fixer ; que lorsque l'agent ne s'est ni présenté ni n'a fait connaître à l'administration aucune intention avant l'expiration du délai fixé par la mise en demeure, et en l'absence de toute justification d'ordre matériel ou médical, présentée par l'agent, de nature à expliquer le retard qu'il aurait eu à manifester un lien avec le service, cette administration est en droit d'estimer que le lien avec le service a été rompu du fait de l'intéressé ;

9. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A...a transmis à son employeur deux avis d'arrêt de travail couvrant la période du 26 février au 26 avril 2014 ; qu'ainsi qu'il a été dit au point 6, la commune d'Escles ne pouvait considérer, compte tenu de l'avis rendu par le médecin de prévention le 3 janvier 2016, que ces avis médicaux ne reposaient sur aucun élément nouveau dont le comité médical départemental n'aurait pas tenu compte dans son avis du 5 décembre 2013 ; qu'il en résulte que cette commune ne pouvait légalement radier des cadres pour abandon de poste l'intéressée, qui doit être regardée comme ayant bénéficié d'un congé de maladie et n'a dès lors pas rompu le lien avec le service ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune d'Escles n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

11. Considérant qu'ainsi que l'ont estimé les premiers juges, il résulte de l'attestation en date du 20 mai 2014, émanant de la commune d'Escles et visée par le trésor public de Darney, que l'autorité territoriale a reversé à Mme A...la somme de 1 746,88 euros correspondant aux indemnités journalières qui lui ont été versées par la caisse primaire d'assurance maladie ; que, dès lors, les conclusions de la requérante tendant à ce qu'il soit enjoint à la commune d'Escles de procéder au versement de ses indemnités journalières doivent être rejetées, de même que celles tendant à la production de ses bulletins de salaire ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge Mme A..., qui n'est pas la partie perdante, la somme demandée par la commune d'Escles au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de cette commune une somme de 2 000 euros à verser à Mme A...sur le fondement de ces dispositions ;

D E C I D E :

Article 1 : L'arrêté du maire de la commune d'Escles du 20 janvier 2014 est annulé pour la période du 16 au 20 janvier 2014 inclus.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Nancy du 16 avril 2015 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : La commune d'Escles versera une somme de 2 000 (deux mille) euros à Mme A...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...A...et à la commune d'Escles.

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N° 15NC01323


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC01323
Date de la décision : 05/07/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-10-04 Fonctionnaires et agents publics. Cessation de fonctions. Abandon de poste.


Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. SICHLER
Rapporteur ?: M. Olivier FUCHS
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : HARQUET LAGRANGE

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-07-05;15nc01323 ?
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