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22/03/2012 | FRANCE | N°11NC01595

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 5, 22 mars 2012, 11NC01595


Vu, I°) la requête, enregistrée le 28 septembre 2011 sous le numéro 11NC01595, présentée par le PREFET DU BAS-RHIN ; le préfet demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1104224 du 26 août 2011 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a, d'une part, annulé son arrêté en date du 23 août 2011 pris à l'encontre de M. portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination, prononçant une interdiction de retour pour une durée d'un an ainsi que son placement en rétention et, d'

autre part, l'a condamné à lui verser la somme de 1000 euros au titre de l'ar...

Vu, I°) la requête, enregistrée le 28 septembre 2011 sous le numéro 11NC01595, présentée par le PREFET DU BAS-RHIN ; le préfet demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1104224 du 26 août 2011 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a, d'une part, annulé son arrêté en date du 23 août 2011 pris à l'encontre de M. portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination, prononçant une interdiction de retour pour une durée d'un an ainsi que son placement en rétention et, d'autre part, l'a condamné à lui verser la somme de 1000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la requête en annulation de M. A ;

3°) de rejeter la demande présentée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Le PREFET du BAS-RHIN soutient que :

- le moyen tiré du défaut de motivation de la décision portant refus de séjour présentée par M. est irrecevable en tant qu'il est dirigé contre une décision inexistante ;

- il n'a pas méconnu les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et libertés fondamentales dès lors que M. réside de façon illégale sur le territoire français depuis 2007, qu'il est célibataire et sans enfant et qu'il dispose d'attaches familiales importantes dans son pays d'origine où vivent sa mère ainsi que deux frères et une soeur et où il a lui-même vécu jusqu'à l'âge de 30 ans ;

- M. ne justifie ni d'un hébergement stable et permanent ni de garanties de représentation suffisantes et présente un risque de fuite au sens du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'ainsi en refusant de lui accorder un délai de départ volontaire, il n'a pas commis d'erreur d'appréciation ;

- il était fondé à prendre la mesure de placement en rétention administrative sur le fondement de l'obligation de quitter le territoire prise à son encontre ;

- la décision portant interdiction de retour n'est pas disproportionnée dès lors que l'intéressé s'est maintenu sur le territoire français sans avoir entrepris de démarches en vue de régulariser sa situation, qu'il a travaillé illégalement sous couvert de la copie d'une carte de séjour contrefaite et qu'il ne justifie pas de l'existence de liens particuliers avec la France ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 octobre 2011, présenté pour M. par Me Thabet, qui conclut à ce que le jugement du 26 août 2011 soit confirmé et à ce que lui soit versée la somme de 1 500 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

M. soutient que :

- le préfet était tenu de saisir préalablement la commission du titre de séjour au titre de l'article 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'interdiction de retour est entachée d'une erreur de droit, dès lors que le préfet s'est mépris sur les critères qu'il lui appartenait d'appliquer pour prendre cette décision, son comportement n'étant pas constitutif d'une menace à l'ordre public et n'ayant pas fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement ;

Vu le mémoire complémentaire, enregistré le 8 novembre 2011, présenté pour M. par Me Thabet, qui maintient ses précédentes écritures et fait valoir que l'appel du PREFET DU BAS-RHIN est irrecevable dès lors que celui-ci n'a aucun intérêt à agir contre le jugement qui oppose M. au préfet de la Moselle ;

Vu, en date du 19 janvier 2012, la décision du président du bureau d'aide juridictionnelle accordant à M. le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu, II°) la requête, enregistrée le 3 octobre 2011 sous le numéro 11NC01608, présentée par le PREFET DU BAS-RHIN ; le préfet demande à la Cour, en application de l'article R.811-15 du code de justice administrative, de surseoir à l'exécution du jugement n°1104224 en date du 26 août 2011 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a annulé son arrêté du 23 août 2011 obligeant M. à quitter, sans délai, le territoire français, fixant le pays de destination, l'interdisant de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an et le plaçant en rétention administrative ;

Le PREFET DU BAS-RHIN soutient que M. , âgé de 40 ans, s'est déclaré célibataire et sans enfant à charge et a vécu l'essentiel de sa vie dans son pays d'origine où vivent ses deux frères et sa soeur ; que l'intéressé n'a pas demandé le renouvellement de son titre de séjour mais s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français sous couvert d'une carte de résident contrefaite en exerçant une activité professionnelle sans autorisation à cette fin ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'absence d'erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle de M. est sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 décembre 2011, présenté pour M. par Me Thabet, qui conclut au rejet de la requête N°11NC01608 et au versement de la somme de 1 500 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

M. soutient que :

- l'appel du PREFET DU BAS-RHIN est irrecevable dès lors que celui-ci n'a aucun intérêt à agir contre le jugement qui oppose M. au préfet de la Moselle ;

- le texte applicable est l'article R. 811-16 du code de justice administrative, et non l'article R. 811-15 du même code, dans la mesure où le PREFET n'était pas demandeur en première instance ;

- en application des dispositions de l'article R. 811-16 du code de justice administrative, le PREFET DU BAS-RHIN ne justifie d'aucune perte définitive d'argent ;

- le recours en référé-suspension présenté par le PREFET DU BAS-RHIN est tardif et ne présente aucune urgence ;

- sa présence en France depuis plus de dix ans n'est pas contestée par le PREFET DU BAS-RHIN ;

- le premier juge a fait une juste application de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le PREFET DU BAS-RHIN était tenu de saisir la commission de titre de séjour en application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- faute d'une précédente décision d'éloignement ou de menace à l'ordre public, la décision portant interdiction de retour sur le territoire français doit être annulée ;

Vu, en date du 22 novembre 2011, la décision du bureau d'aide juridictionnelle accordant à M. le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 février 2012 :

- le rapport de Mme Piérart, président de la Cour,

- et les conclusions de Mme Dulmet, rapporteur public ;

Sur la jonction :

Considérant que les requêtes susvisées du PREFET DU BAS-RHIN sont dirigées contre un même jugement et présentent à juger la même question ; qu'elles ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur la fin de non-recevoir de M. :

Considérant que le PREFET DU BAS-RHIN, auteur des décisions en litige dont l'annulation a été prononcée par le jugement attaqué, justifie en cette qualité d'un intérêt à faire appel dudit jugement ; que la circonstance que le préfet de la Moselle était compétent en première instance pour représenter l'Etat en défense, eu égard au lieu de rétention de M. Laadoubi au centre de rétention administrative de Metz, est sans incidence ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par M. ne peut qu'être écartée ;

Sur le jugement attaqué :

Considérant que pour annuler l'arrêté contesté du 23 août 2011, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg s'est fondé sur les circonstances que M. A réside en France depuis le 19 août 2001 et qu'il y justifie de liens familiaux et personnels importants ; que toutefois il ressort des pièces du dossier, et notamment du procès-verbal d'audition de l'intéressé du 23 août 2011, que M. est célibataire et sans enfant et qu'il a résidé et travaillé irrégulièrement en France sous couvert d'une carte de résident falsifiée par ses soins ; que s'il fait valoir des projets de mariage avec une ressortissante française, il ignore tant l'adresse que les coordonnées téléphoniques de cette dernière ; qu'enfin, si un de ses frères réside en France, sa mère, ses deux autres frères et sa soeur résident toujours au Maroc, pays dans lequel il a lui-même vécu jusqu'à l'âge de 30 ans ; qu'ainsi, malgré la durée non contestée du séjour de M. en France et le caractère régulier de ce séjour en qualité d'étudiant entre février 2002 et octobre 2007, eu égard aux conditions de son séjour depuis cette dernière date sous couvert d'un titre de séjour frauduleux et au peu d'attaches dont il se prévaut sur le territoire français, la mesure d'éloignement prise à son encontre n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, dès lors, le PREFET DU BAS-RHIN est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a estimé qu'il avait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour annuler l'arrêté contesté du 23 août 2011 ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés tant en première instance qu'en appel par M. à l'encontre desdites décisions ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant que M. , qui n'a présenté aucune demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne peut ainsi utilement se prévaloir desdites dispositions à l'appui de sa demande d'annulation, en ce qu'elles prévoient la consultation de la commission du titre de séjour sur la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l 'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 4° Si l'étranger n'a pas demandé le renouvellement de son titre de séjour temporaire et s'est maintenu sur le territoire français à l'expiration de ce titre (...) " ; que M. , qui n'a déposé aucun dossier tendant au renouvellement de son titre de séjour ni formulé une nouvelle demande de titre de séjour, s'est maintenu sur le territoire français après l'expiration de sa carte de séjour temporaire valable jusqu'au 15 octobre 2007 ; que l'intéressé entre ainsi dans le champ d'application des dispositions précitées et peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ;

Considérant, en second lieu, que la décision portant obligation de quitter le territoire français, après avoir visé les textes applicables, indique que M. , entré en France en 2001, s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire national au-delà de l'expiration de son visa étudiant le 15 octobre 2007 sans avoir entrepris de démarches dans le cadre du renouvellement de sa carte de séjour temporaire ou en vue de régulariser sa situation ; que la décision contestée précise que l'intéressé a travaillé illégalement sous couvert d'une fausse carte de résident ; que la décision indique également que, compte tenu des circonstances propres au cas d'espèce, il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé au sens de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que M. déclare être célibataire et sans enfants à charge sur le territoire national et qu'il n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine ; qu'elle précise enfin que l'intéressé n'allègue pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne des droits de l'homme en cas de retour dans son pays d'origine ; que la décision contestée portant obligation de quitter le territoire français comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, et est, par suite, suffisamment motivée ;

En ce qui concerne la décision de refus d'octroi d'un délai de départ volontaire :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " II. - Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; (...) f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2. (...) " ;

Considérant que si M. soutient qu'il dispose des garanties de représentation suffisantes, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il s'est maintenu irrégulièrement en France au-delà de l'expiration de son visa étudiant le 15 octobre 2007 sans avoir entrepris de démarches en vue de régulariser sa situation à compter de cette date ; que si l'intéressé, lors de son interpellation, justifiait de la possession d'une carte d'identité marocaine à son nom en cours de validité, il était également porteur de la photocopie d'une carte de résident falsifiée à son nom et supportant sa photographie ; que M. , considéré par les services de police comme étant sans domicile fixe, a déclaré dans son procès-verbal d'audition être domicilié chez sa belle-soeur à Montereau-Fault-Yonne avant de produire à l'instance un certificat d'hébergement de son frère daté du 25 août 2011 attestant qu'il réside chez ce dernier à Strasbourg ; qu'ainsi, il ne peut être regardé comme justifiant d'une résidence effective ou permanente en France ; que, dans ces conditions, M. ne justifiant pas de garanties de représentation suffisantes au sens du f) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, en refusant de lui accorder un délai de départ volontaire, le PREFET DU BAS-RHIN n'a pas entaché sa décision d'une erreur d'appréciation en se fondant sur un risque de fuite ;

En ce qui concerne la décision de placement en rétention administrative :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de l'exception de l'illégalité des décisions portant refus de délivrance de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ne peuvent qu'être écartés ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : / (...) 6° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 554-1 du même code : " Un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration doit exercer toute diligence à cet effet " ; qu'aux termes de l'article L. 561-2 de ce code : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation (...) " ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, M. , qui n'établit pas présenter des garanties de représentation effectives au sens des dispositions précitées de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment parce qu'il ne justifie pas d'une résidence effective ou permanente et qu'il était porteur d'une copie d'une carte de résident falsifiée, présente un risque de fuite au sens du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'ainsi, s'il soutient qu'il aurait pu être assigné à résidence chez son frère, il n'apporte aucun élément probant de nature à démontrer qu'il résiderait habituellement au domicile de ce dernier ; que, par suite, dès lors qu'il n'existe pas de perspective raisonnable d'exécution volontaire de la mesure d'éloignement, le PREFET DU BAS-RHIN, en décidant de placer M. en rétention administrative, n'a pas commis d'erreur d'appréciation ;

En ce qui concerne la légalité de l'interdiction de retour sur le territoire français :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'exception de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. / L'étranger à l'encontre duquel a été prise une interdiction de retour est informé qu'il fait l'objet d'un signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen, conformément à l'article 96 de la convention signée à Schengen le 19 juin 1990. Les modalités de suppression du signalement de l'étranger en cas d'annulation ou d'abrogation de l'interdiction de retour sont fixées par voie réglementaire. (...) Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger obligé de quitter le territoire français, l'autorité administrative peut prononcer l'interdiction de retour pour une durée maximale de trois ans à compter de sa notification (...) L'interdiction de retour et sa durée sont décidées par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) " ;

Considérant qu'en indiquant que M. , célibataire et sans enfant, s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français et n'a effectué aucune démarche afin de régulariser sa situation, qu'il a travaillé illégalement sous couvert de la copie d'une carte de séjour contrefaite à son nom et qu'il ne démontre pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, le PREFET DU BAS-RHIN a entendu justifier que puissent être prises, à l'encontre de l'intéressé, une obligation de quitter le territoire français sans être assortie d'un délai de départ volontaire, ainsi qu'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an ; qu'il ressort de la décision contestée ainsi que des pièces versées au dossier, notamment le procès-verbal d'audition du 23 août 2011 qui démontre que M. n'est pas dépourvu d'attaches au Maroc où vivent sa mère ainsi que deux frères et une soeur et où il a vécu jusqu'à l'âge de 30 ans, que le PREFET DU BAS-RHIN a pris l'interdiction de retour sur le territoire français en tenant compte, notamment, de la durée de présence de l'intéressé en France, de la nature et de l'ancienneté de ses liens, tant juridiques que familiaux, avec la France, ainsi que de l'atteinte à l'ordre public du fait de sa présence irrégulière ; que, dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que le PREFET DU BAS-RHIN aurait commis une erreur de droit en ne prenant pas en compte les éléments d'appréciation définis par le septième alinéa du III de l'article L. 511-1 pour adopter la décision litigieuse ni qu'il aurait porté, en prenant une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an, une atteinte excessive à la situation personnelle de l'intéressé au regard des buts en vue desquels elle a été prise ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DU BAS-RHIN est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a annulé son arrêté du 23 août 2011 pris à l'encontre de M. portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination, prononçant une interdiction de retour pour une durée d'un an ainsi que son placement en rétention ;

Sur les conclusions à fin de sursis à exécution présentées par le PREFET DU BAS-RHIN :

Considérant que le présent arrêt statuant sur les conclusions aux fins d'annulation du jugement contesté, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions aux fins de sursis à exécution présentées par le PREFET DU BAS-RHIN contre ce même jugement ;

Sur les conclusions présentées par M. tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à M. la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg en date du 26 août 2011 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. devant le Tribunal administratif de Strasbourg est rejetée.

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions aux fins de sursis à exécution du jugement du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg du 26 août 2011.

Article 4 : La demande présentée en appel par M. tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 est rejetée.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration et à M. .

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N°11NC01595 ; 11NC01608


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 5
Numéro d'arrêt : 11NC01595
Date de la décision : 22/03/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme PIERART
Rapporteur ?: Mme Odile PIERART
Rapporteur public ?: Mme DULMET
Avocat(s) : THABET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2012-03-22;11nc01595 ?
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