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20/04/2006 | FRANCE | N°02NC00873

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2eme chambre - formation a 3, 20 avril 2006, 02NC00873


Vu la requête, enregistrée le 6 août 2002, complétée par un mémoire enregistré le 10 octobre 2005, présentée pour M et Mme Jean François X, élisant domicile ..., par la SCP Dreyfus-Schmidt-Ohana-Lietta, société d'avocats ; M. et Mme X demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 990636 en date du 13 juin 2002 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a rejeté leur demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 1991 ;

2°) de prononcer la décharge dema

ndée ;

3°) de condamner l'Etat à leur payer une somme de 1 500 euros au titre des frai...

Vu la requête, enregistrée le 6 août 2002, complétée par un mémoire enregistré le 10 octobre 2005, présentée pour M et Mme Jean François X, élisant domicile ..., par la SCP Dreyfus-Schmidt-Ohana-Lietta, société d'avocats ; M. et Mme X demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 990636 en date du 13 juin 2002 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a rejeté leur demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 1991 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à leur payer une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Ils soutiennent que la procédure de redressements suivie à l'encontre de la société financière Groupe Vignon n'a pas été régulière, les notifications de redressement ne comportant pas une motivation suffisante, les services fiscaux de Paris n'étant pas territorialement compétents pour évaluer la valeur vénale de biens situés à Belfort et la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires n'ayant pas été régulièrement consultée ; que la notification de redressements qui leur a été adressée n'était pas suffisamment motivée ; que l'administration n'établit pas que la valeur vénale du local professionnel que leur a cédé la SARL Financière Groupe Vignon était supérieure au prix de vente ; que le juge d'instruction du tribunal de grande instance de Belfort a rendu une ordonnance de non-lieu ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 22 janvier 2003, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre conclut au rejet de la requête en faisant valoir que les moyens ne sont pas fondés ;

Vu le mémoire, enregistré le 8 décembre 2005, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 mars 2006 :

- le rapport de Mme Richer, président ;

- et les conclusions de Mme Rousselle, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la SARL Financière Groupe Vignon dont le capital est détenu à raison de 49 % des parts par M. X, a été constituée en février 1989 pour la réalisation d'un immeuble de bureaux, l'Espace Vauban, situé à Belfort ; que les travaux de construction se sont achevés en juillet 1990 ; que lors de la vérification de la comptabilité de la SARL Financière Groupe Vignon, l'administration a constaté que des lots avaient été vendus à la société FINAMUR qui devait donner le bien en location- vente à la société SOGESCO, dont M. X est le dirigeant, à un prix anormalement bas au regard de leur valeur vénale ; qu'elle a, en conséquence, considéré que la différence entre le prix de vente et la valeur vénale, fixée à 7 000 F TTC le m², constituait un avantage occulte, imposable au nom de M. et Mme X ; que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté la demande de M. et Mme X tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 1991 ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition suivie à l'égard de la société Financière Groupe Vignon :

Considérant que le moyen tiré des irrégularités qui auraient entaché la procédure d'imposition suivie à l'égard de la société Financière Groupe Vignon et qui ont donné lieu à l'encontre de cette société à des rehaussements d'impôt sur les sociétés est inopérant au regard de la procédure d'imposition à l'impôt sur le revenu suivie à l'égard de M. et Mme X ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition suivie à l'égard de M et Mme X :

Considérant qu'aux termes de l'article L.57 du livre des procédures fiscales : « L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit être également motivée » ;

Considérant que la notification de redressement en date du 16 décembre 1993 indiquait clairement la nature du redressement envisagé, son montant, l'impôt et l'année d'imposition et comportait, quant au motif du redressement, des indications suffisantes pour permettre au contribuable de formuler des observations ; qu'ainsi, ladite notification de redressement est suffisamment motivée, alors même qu'elle ne précise pas si les prix indiqués pour les éléments de comparaison retenus par le vérificateur étaient hors taxes ou toutes taxes comprises ; que le moyen tiré d'une insuffisance de motivation manque en fait ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

Considérant qu'en vertu du 3 de l'article 158 du code général des impôts sont notamment imposables à l'impôt sur le revenu, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, les revenus considérés comme distribués en application des articles 109 et suivants du même code ; qu'aux termes de l'article 111 : « Sont notamment considérés comme revenus distribués :... c. Les rémunérations et avantages occultes” ; qu'en cas de cession par une société à un prix que les parties ont délibérément minoré par rapport à la valeur vénale de l'objet de la transaction, sans que cet écart de prix comporte de contrepartie, l'avantage ainsi octroyé doit être requalifié de libéralité représentant un avantage occulte constitutif d'une distribution de bénéfices au sens des dispositions précitées de l'article 111 c du code général des impôts ; que la preuve d'une telle distribution occulte doit être regardée comme apportée par l'administration lorsqu'elle établit l'existence, d'une part d'un écart significatif entre le prix convenu et la valeur vénale du bien cédé, d'autre part, d'une intention, pour la société, d'octroyer et, pour le co-contractant, de recevoir, une libéralité du fait des conditions de la cession ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que par acte du 13 mars 1991, la société Financière Groupe Vignon a cédé, pour un prix de 4 933 francs le m², à M. X, l'un des ses associés, des locaux à usage de bureaux situé à Belfort ;

Considérant, en premier lieu, que l'autorité de la chose jugée en matière pénale ne s'attache qu'aux décisions des juridictions de jugement qui statuent sur le fond de l'action publique ; que tel n'est pas le cas des ordonnances de non-lieu que rendent les juges d'instruction quelles que soient les constatations sur lesquelles elles sont fondées ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutiennent les requérants l'ordonnance de non-lieu rendue le 5 janvier 2005 par le juge d'instruction du tribunal de grande instance de Belfort en faveur de M. X n'avait pas l'autorité de la chose jugée ;

Considérant, en second lieu, que l'administration, à laquelle incombe en l'espèce la charge de la preuve d'une sous-évaluation du prix de cession établit, en se référant, d'une part, aux prix pratiqués à l'occasion de ventes d'autres lots dans le même immeuble à des sociétés qui avaient également pris des réservations pour permettre le financement de l'opération par un pool bancaire, d'autre part aux prix pratiqués à l'occasion de la vente d'immeubles à usage de bureaux sis dans la même commune, intervenues au cours des années 1990 et 1991, qui varient de 6 240 F à 7 950 F le m² toutes taxes comprises, que la société Financière Groupe Vignon a minoré le prix des locaux cédés aux requérants ; que, pour contredire les éléments d'appréciation dont se prévaut l'administration, M. et Mme X soutiennent que certaines ventes dans l'immeuble Espace Vauban sont postérieures à leur acquisition et qu'ils ont bénéficié d'un prix attractif en réservant leurs lots dès le début de la construction et en acceptant d'occuper les locaux avant l'achèvement des travaux pour faciliter la commercialisation des lots encore invendus ; que les ventes dont il est fait état sont toutes postérieures à leur acquisition ; que les conditions de l'installation dans des locaux dont l'aménagement n'était pas terminé avant même la fin du chantier ne suffisent pas à justifier la réduction de prix pratiquée ; que si les requérants font valoir que les termes de comparaison situés à Belfort en dehors de l'Espace Vauban bénéficieraient d'un environnement plus agréable en centre ville, ils ne l'établissent pas ; que si les éléments de comparaison qu'ils proposent ont été négociés à un prix moyen de 4 538 F le m², ces ventes qui ont porté sur des immeubles situés à Montbéliard ne constituent pas des termes de comparaison pertinents ; que les attestations produites qui ne donnent qu'une indication à caractère général sur la valeur au m² de l'immobilier de bureau « autour des années 1990 » à Belfort et qui ont été établies en 2002, ne permettent pas de remettre en cause l'évaluation faite par l'administration ; que cette dernière justifiant le redressement des bases d'imposition de la société Financière Groupe Vignon à l'impôt sur les sociétés au titre de l'année 1990 et établissant, compte tenu de la communauté d'intérêts existant entre cette société et M. X, l'intention, d'une part, d'octroyer et, d'autre part, de recevoir une libéralité a pu, à bon droit, regarder, par application des dispositions de l'article 111 c du code général des impôts, ledit redressement comme correspondant à due concurrence à des revenus distribués à M.X, l'imposer à due concurrence à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Besançon a rejeté leur demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, leurs conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE

Article 1er : La requête de M. et Mme X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Jean-François X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Délibéré à l'issue de l'audience du 30 mars 2006, à laquelle siégeaient :

Mme Felmy, président de chambre,

Mme Richer, président,

M. Montsec, président.

Lu en audience publique, le 20 avril 2006.

Le rapporteur, Le président,

Signé : M. RICHER Signé : J. FELMY

Le greffier,

Signé : Ph. MALETERRE

La République mande et ordonne au MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

Ph. MALETERRE

4

N°02NC00873


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 02NC00873
Date de la décision : 20/04/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : Mme FELMY
Rapporteur ?: Mme Michèle RICHER
Rapporteur public ?: Mme ROUSSELLE
Avocat(s) : SCP DREYFUS-SCHMIDT - OHANA - LIETTA

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2006-04-20;02nc00873 ?
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