Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 5 septembre 2001 sous le n° 01NC00968, présentée pour M. Marc X, élisant domicile ..., par Me Bonhomme, avocat ;
M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 95-159 en date du 24 avril 2001 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu et au prélèvement social à laquelle il a été assujettie au titre de l'année 1989 ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 20 100 F au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Il soutient :
- que l'administration a commis une erreur substantielle en qualifiant les revenus qu'elle entendait redresser de revenus de capitaux mobiliers et non de bénéfices non commerciaux ;
- que l'opération à laquelle il a participé n'est pas une opération d'apport partiel d'actif mais une opération de fusion à l'anglaise, qui doit bénéficier du régime dit de l'échange à caractère intercalaire ;
- que la reconstitution des prix de revient des actions cédées présente nécessairement un caractère aléatoire ;
- qu'il entend se prévaloir sur le fondement de l'article L 80 A du livre des procédures fiscales de la réponse ministérielle à M. Correze et de la doctrine exprimée par le comité fiscal de la mission d'organisation administrative du 14 mars 1989 ;
- qu'il peut se prévaloir sur le fondement de l'article L 80 B du livre des procédures fiscales de la prise de position formelle de l'administration sur sa situation résultant de la réponse à ses observations du 17 mars 1987 sur un précédent redressement et de la notification de deux avis de dégrèvements pour la totalité de l'imposition contestée ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire enregistré le 27 février 2002, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie qui conclut au rejet de la requête au motif que les moyens invoqués ne sont pas fondés ;
Vu la lettre du 19 mai 2005 informant les parties de ce qu'un moyen était susceptible d'être soulevé d'office ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 juin 2005 :
- le rapport de Mme Richer, président,
- les observations de Me Drouot, du cabinet juridique Lorette et Associés, avocat de M. X,
- et les conclusions de Mme Rousselle, commissaire du gouvernement ;
Sur l'erreur de classement catégoriel :
Considérant que si, sur le premier feuillet de la notification de redressement, le vérificateur a rattaché les redressements envisagés à la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, il a précisé dans la motivation que les gains nets en capital seraient imposés en vertu des dispositions des articles 92 B et 94 A du code général des impôts, qui rattachent ces gains à la catégorie des bénéfices non commerciaux ; qu'ainsi, l'erreur commise sur le premier feuillet doit être regardée comme une erreur purement matérielle sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition ;
Sur le bien fondé de l'imposition :
En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :
Considérant qu'aux termes de l'article 92 B du code général des impôts alors applicable : Sont considérés comme des bénéfices non commerciaux, les gains retirés des cessions à titre onéreux, effectuées directement ou par personne interposée, de valeurs mobilières (...). ces dispositions ne sont pas applicables aux échanges de titres résultant d'une offre publique, de conversion, de division ou de regroupement, réalisée conformément à la réglementation en vigueur ; qu'aux termes de l'article 94 A du même code : 2. En cas de cession d'un ou plusieurs titres appartenant à une série de titres de même nature acquis pour des prix différents, le prix d'acquisition à retenir est la valeur moyenne pondérée d'acquisition de ces titres. ; qu'en vertu de l'article 200 A du même code, lesdites plus-values sont taxées au taux forfaitaire de 16 % ; qu'enfin, aux termes de l'article 301 C de l'annexe II au code général des impôts : I est assimilée à une fusion, l'opération qui aboutit au transfert à une société relevant du statut fiscal des sociétés de capitaux, en voie de formation ou préexistante, de droits représentant 75 % au moins du capital d'une société relevant du même statut (...) ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. Marc X, qui s'était vu attribuer le 28 janvier 1982 lors de la constitution de la société X Electronique des actions de cette société en rémunération des apports effectués sous forme d'actions des sociétés Elap et Saditel, a cédé 15 703 actions X Electronique en 1989 ; que si l'opération d'apport d'actif a permis à la société X Electronique de détenir 75 % au moins du capital de la société Sicart, M. X ne saurait utilement faire valoir que cette opération doit être assimilée à une fusion conformément aux dispositions susmentionnées de l'article 301 C de l'annexe II au code général des impôts qui ont trait aux droits d'enregistrement et non aux plus values ; que, par suite, c'est à bon droit qu'il a été fait application du régime de droit commun pour le calcul de l'imposition des plus values de cessions de valeurs mobilières résultant des dispositions susrappelées du 2 de l'article 94 A du code général des impôts qui prend en compte la valeur effective d'acquisition des titres cédés, sans référence à la valeur d'acquisition des titres apportés en échange lors de l'opération réalisée en 1982 ;
En ce qui concerne l'application de la doctrine fiscale :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 80-A du livre des procédures fiscales : Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente ; qu'aux termes de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales : La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable lorsque l'administration a pris formellement position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal ;
Considérant, d'une part, que M. X entend se prévaloir de la réponse du ministre du budget à M. Correze, député, en date du 10 mars 1979 et d'un compte rendu du Comité fiscal de la mission d'organisation administrative en date du 14 mars 1989 qui précisent qu'afin de ne pas pénaliser les actionnaires qui ont acquis leurs titres à une date très ancienne, et en tout état de cause avant le 1er janvier 1979, et qui ne sont pas en mesure de justifier de leur prix de revient, il a paru possible d'admettre que le prix d'acquisition soit fixé à la moitié du cours de cotation de ces valeurs à la date de la cession ; que, toutefois, les titres de la société X Electronique, qui ont été cédés en 1989, n'ont pas été acquis avant le 1er janvier 1979, mais en 1982 ; que le requérant ne peut invoquer utilement la circonstance que l'opération effectuée en 1982 n'était qu'une opération d'échange de titres, qualifiée d'intercalaire ; que, par suite, M. X qui n'entre pas dans le champ des prévisions de la doctrine invoquée ne peut s'en prévaloir sur le fondement de l'article L 80 A du livre des procédures fiscales ;
Considérant, d'autre part, que M. X invoque sur le fondement de l'article L 80 B précité, la décision qui lui a été signifiée dans la réponse aux observations du contribuable en date du 17 mars 1987 par laquelle l'administration fiscale avait renoncé à maintenir le redressement qui lui avait été notifié le 17 octobre 1986 en matière de plus value sur cession de droits sociaux ; que cependant cette décision qui comporte seulement l'indication selon laquelle votre engagement dans l'acte de fusion est admis au niveau de l'impôt sur le revenu ne saurait par son imprécision constituer une prise de position formelle de l'administration sur l'appréciation de fait au regard du texte fiscal ; que si M. X fait en outre valoir qu'il a bénéficié d'un dégrèvement total prononcé les 8 octobre et 29 novembre 1991 au vu de la réclamation et des déclarations rectificatives qu'il avait adressées à l'administration en demandant qu'il soit fait application de la doctrine résultant de la réponse ministérielle à M. Corrèze, ce dégrèvement qui n'est pas motivé ne comporte aucune prise de position formelle de l'administration sur la situation de fait du contribuable dont M. X pourrait se prévaloir sur le fondement de l'article L 80 B du livre des procédures fiscales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu et au prélèvement social à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1989 ;
Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. X la somme qu'il demande au titre des frais qu'il a exposés et qui ne sont compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Marc X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
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N° 01NC00968