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30/06/2005 | FRANCE | N°00NC00556

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2eme chambre - formation a 3, 30 juin 2005, 00NC00556


Vu la requête, enregistrée au greffe le 20 avril 2000, complétée par des mémoires enregistrés le 14 mai 2001 et le 16 mars 2005, présentée pour M. Louis X, élisant domicile ..., par la société BR CONSEILS, avocats ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9602384, en date du 17 février 2000, par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et pénalités y afférentes auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1991 ;

2°) de prononcer la

décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à lui rembourser la somme de 3 048,98 eur...

Vu la requête, enregistrée au greffe le 20 avril 2000, complétée par des mémoires enregistrés le 14 mai 2001 et le 16 mars 2005, présentée pour M. Louis X, élisant domicile ..., par la société BR CONSEILS, avocats ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9602384, en date du 17 février 2000, par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et pénalités y afférentes auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1991 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à lui rembourser la somme de 3 048,98 euros, au titre des frais irrépétibles, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient :

- que la notification de redressement qui lui a été adressée le 14 décembre 1994 est insuffisamment motivée ;

- que l'administration a modifié la motivation de son redressement au cours de l'instruction, renversant ainsi à son détriment la charge de la preuve ;

- que la réalité de la prestation facturée par la société Canetti Tec International à la SNC 75 Allée de la Robertsau, en vertu du contrat conclu le 1er mars 1991, et l'intérêt de la prestation pour la société sont justifiés ;

- que l'administration n'a pas établi sa mauvaise foi ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 février 2003, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, qui conclut au rejet de la requête, par les motifs qu'aucun des moyens présentés par M. X n'est fondé ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 juin 2005 :

- le rapport de M. Montsec,

- les observations de Me Anjuere, avocat de M. X,

- et les conclusions de Mme Rousselle, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par un contrat en date du 6 juillet 1990, la société Canetti Tec International (CTI) aurait chargé l'architecte Patrick Z d'un projet architectural relatif à l'installation du consulat soviétique dans les locaux d'un immeuble sis au 75 allée de la Robertsau à Strasbourg ; que la société SOGECOB a conclu le 13 novembre 1990 une promesse de vente avec la compagnie GAN Vie, propriétaire dudit immeuble ; que les autorités soviétiques, également titulaires d'une option d'achat en date du 14 décembre 1990, ont chargé M. Y de la défense de leurs intérêts ; que la société COFINVAL a signé le 15 février 1991 un contrat de bail avec le ministère des affaires étrangères de l'Union Soviétique pour ces mêmes locaux, le bail devant entrer en vigueur dès l'acquisition de l'immeuble par la société COFINVAL ; que la SNC 75 Allée de la Robertsau a été créée le 25 février 1991, son capital étant détenu à parts égales par M. X, la société EUROBURO et la société SOGECOB, associée-gérante ; que la SNC s'est substituée à la SOGECOB dans la promesse de vente précitée, et a acquis l'immeuble dont s'agit le 27 février 1991, pour un prix de 26 000 000 F ; que la SNC a conclu le 1er mars 1991 une convention avec la société CTI dont M. Y était le dirigeant, lui donnant mandat pour rechercher un acquéreur moyennant une commission de 4 000 000 F ; qu'elle a cédé l'immeuble le 19 mars 1991 à la société COFINVAL, appartenant au groupe GAN, pour un prix de 37 000 000 F ; que la société COFINVAL a loué l'immeuble aux services consulaires russes et l'a revendu à ces derniers, le 7 octobre 1993, pour un prix de 37 550 000 F ; que, suite à une vérification de la comptabilité de la SNC 75 Allée de la Robertsau, l'administration fiscale a remis en cause la déduction de la charge correspondant à la commission de commercialisation de 4 000 000 F payée à la société CTI ; qu'en conséquence du redressement notifié à la SNC, M. X a été assujetti, à proportion du nombre de parts détenues par celui-ci dans cette SNC, à une cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu, et pénalités y afférentes, au titre des bénéfices industriels et commerciaux de l'année 1991 ; que M. X fait régulièrement appel du jugement qui a rejeté sa demande tendant à la décharge de cette imposition ;

Sur la régularité de la procédure :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) ;

Considérant que, si M. X fait valoir que la notification de redressement qui lui a été adressée le 14 décembre 1994 est insuffisamment motivée, il résulte de l'instruction que ladite notification précisait qu'elle était consécutive à la vérification de comptabilité de la SNC 75 Allée de la Robertsau, qu'elle était accompagnée de la notification de redressement précédemment adressée à ladite SNC, et qu'elle faisait connaître à M. X, en sa qualité d'associé de la SNC et compte-tenu de sa quote-part du capital social de celle-ci, les conséquences dudit redressement sur son imposition sur le revenu au titre des bénéfices industriels et commerciaux de l'année 1991 ; qu'ainsi, la notification adressée à M. X, qui satisfait aux prescriptions précitées de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, mettait le requérant à même de solliciter la communication de l'ensemble des pièces de la procédure ; que, par ailleurs, aucune disposition législative ou réglementaire n'obligeait l'administration à mentionner dans la notification de redressement les articles du code général des impôts sur lesquels le redressement était fondé ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de la notification de redressement ne peut qu'être écarté ;

Sur le bien fondé des redressements :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la notification de redressements adressée le 6 décembre 1994 à la SNC 75 Allée de la Robertsau, à laquelle se référait la notification adressée à M. X, était fondée sur le motif que le versement de la commission en cause était constitutif d'un acte anormal de gestion, la commission de commercialisation payée à la société CTI n'ayant pas été engagée dans l'intérêt de la SNC ; que cette dernière n'a pas justifié de la nature, de la matérialité et de l'étendue des services rendus par la société CTI ; que, contrairement à ce que soutient à l'instance le requérant, cette motivation n'a pas été modifiée par l'administration au cours de l'instruction ; qu'il appartient, en règle générale, à l'administration d'établir les faits sur lesquels elle se fonde, soit pour invoquer le caractère anormal de l'acte, soit pour remettre en cause la réalité même d'une prestation ; que ce principe ne peut, toutefois, recevoir application que dans le respect des prescriptions législatives et réglementaires qui, dans le contentieux fiscal, gouvernent la charge de la preuve ; qu'il appartient, dans tous les cas, au contribuable, que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ait été saisie ou non, de justifier tant du montant de ses charges que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ;

En ce qui concerne la déductibilité de la somme en litige :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment des nouvelles pièces produites en appel, qu'à la date à laquelle l'immeuble a été acheté par la SNC 75 Allée de la Robertsau, soit le 27 février 1991, un contrat de bail avait déjà été signé, le 15 février 1991, entre la société COFINVAL et le ministère des affaires étrangères de l'Union Soviétique pour les locaux en cause ; qu'ainsi, la désignation de l'acquéreur était fixée, et celui-ci s'était déjà largement engagé dans cette opération, avant que n'intervienne la convention conclue le 1er mars 1991 entre ladite SNC et la société CTI, donnant mandat à cette dernière pour rechercher un acquéreur moyennant la commission en litige de 4 000 000 F ; que, dans ces conditions, le requérant n'établit pas la réalité de la prestation d'intermédiaire prétendument rémunérée par cette commission ;

Considérant que, par suite, M. X n'est pas fondé à demander la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu mises à sa charge, à proportion du nombre de parts qu'il détenait dans l'entreprise, suite à la réintégration de cette somme de 4 000 000 F dans les revenus de celle-ci ;

Sur les pénalités de mauvaise foi :

Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 p. 100 si la mauvaise foi de l'intéressé est établie ou de 80 p. 100 s'il s'est rendu coupable de manoeuvres frauduleuses ou d'abus de droits au sens de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales (...) ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions de l'article 1729 du code général des impôts que la majoration de 40 % n'est applicable qu'au contribuable dont la mauvaise foi est établie ; qu'en se bornant à invoquer l'importance de la somme en cause et l'absence de justification de la réalité de la prestation d'intermédiaire rémunérée, l'administration n'établit pas la mauvaise foi de M. X et il y a lieu d'accorder à ce dernier la décharge des majorations correspondantes ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que M. X est seulement fondé à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la décharge de la majoration pour mauvaise foi qui lui a été appliquée ;

Sur les conclusions du requérant tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de M. X tendant au remboursement des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Il est accordé à M. X la décharge de la majoration pour mauvaise foi prévue à l'article 1729 du code général des impôts, dont a été assortie la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1991.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Strasbourg en date du 17 février 2000 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Louis X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

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N° 00NC00556


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 00NC00556
Date de la décision : 30/06/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : Mme FELMY
Rapporteur ?: M. Pierre MONTSEC
Rapporteur public ?: Mme ROUSSELLE
Avocat(s) : SOCIETE BR CONSEILS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2005-06-30;00nc00556 ?
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