La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/04/2005 | FRANCE | N°00NC01122

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2eme chambre - formation a 3, 28 avril 2005, 00NC01122


Vu la requête, enregistrée le 1er septembre 2000, complétée par le mémoire enregistré le 15 juillet 2002, présentée pour Mme Christine X, élisant domicile ..., par le Bureau Francis Lefebvre, agissant par maîtres Lacombe et Lacroix, avocats ; Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 962156-971545, en date du 6 juin 2000, par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et pénalités y afférentes auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1

989, 1990 et 1991 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner...

Vu la requête, enregistrée le 1er septembre 2000, complétée par le mémoire enregistré le 15 juillet 2002, présentée pour Mme Christine X, élisant domicile ..., par le Bureau Francis Lefebvre, agissant par maîtres Lacombe et Lacroix, avocats ; Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 962156-971545, en date du 6 juin 2000, par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et pénalités y afférentes auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1989, 1990 et 1991 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à lui rembourser les frais qu'elle a exposés tant en première instance qu'en appel, sur le fondement des dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Elle soutient :

- que les travaux en cause constituent des grosses réparations déductibles de ses revenus imposables en application des dispositions de l'article 156-I-3° du code général des impôts ;

- qu'ils sont individualisables et dissociables du reste des travaux de réaménagement des locaux réalisés ;

- que l'administration ne peut lui opposer pour l'année 1989 que les sommes qu'elle a payées cette année là en paiement de ces travaux n'ont été perçus par les entrepreneurs qu'en 1990 ;

- que, compte tenu de l'ampleur et de l'approfondissement des recherches effectuées, l'administration doit être regardée comme ayant mis en oeuvre à son encontre une procédure d'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle, sans respecter les garanties inhérentes à cette procédure, relatives à l'envoi d'un avis préalable, à la remise de la charte du contribuable et à la limitation de la durée des investigations ;

- que la procédure est également irrégulière du fait du défaut de saisine de la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires et de l'absence de mention, dans la réponse de l'administration à ses observations, de la possibilité de demander cette saisine ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 16 avril 2002, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, tendant au rejet de la requête, par les motifs qu'aucun des moyens présentés par Mme X n'est fondé et que ses conclusions à fin de condamnation de l'Etat aux paiement des frais irrépétibles sont irrecevables à défaut d'être chiffrées ;

Vu le mémoire, enregistré le 18 septembre 2001, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 mars 2005 :

- le rapport de M. Montsec, président ;

- et les conclusions de Mme Rousselle, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme Christine X a acquis la nu-propriété de lots inclus dans deux bâtiments en cours de rénovation sis à Strasbourg, le premier 35 rue du Faubourg de Saverne - 30 rue Kageneck et le second 25 rue des Bateliers, par actes en dates respectivement des 22 décembre 1989 et 27 décembre 1990 ; qu'elle a déduit de son revenu imposable global, au titre des années 1989, 1990 et 1991, les déficits induits par sa quote-part de travaux sur ces lots immobiliers, sur le fondement des dispositions de l'article 156-I-3° du code général des impôts ; que l'administration a remis en cause ces déficits en estimant que les travaux concernés ne constituaient pas des grosses réparations au sens de ces dispositions et ne pouvaient dès lors être déduits du revenu global des nu-propriétaires des biens ; que Mme X fait régulièrement appel du jugement susvisé du Tribunal administratif de Strasbourg qui a rejeté ses demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et pénalités y afférentes auxquelles elle a été en conséquence assujettie au titre des années 1989, 1990 et 1991 ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, que les investigations du service auprès de tiers n'excédaient pas, contrairement à ce qu'affirme la requérante, celles du contrôle sur pièces mis en oeuvre à son encontre ; qu'elle n'est, par suite, fondée à soutenir ni que le service aurait en fait engagé un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle, sans en respecter les garanties, ni qu'il aurait dû mettre en oeuvre une telle procédure ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il est constant que l'administration, qui avait initialement invoqué un abus de droit pour motiver son redressement, a expressément renoncé, par la suite, à ce fondement légal de l'imposition ; qu'il suit de là, d'une part, que l'administration a pu, sans porter aucune atteinte aux garanties de la contribuable, renoncer à saisir le comité consultatif appelé à donner son avis dans le cadre des procédures d'abus de droit, d'autre part, invoquer devant le tribunal administratif une nouvelle base légale, constituée par les dispositions de l'article 156-I-3° du code général des impôts ;

Considérant, en troisième lieu, que Mme X ne peut utilement soutenir qu'elle aurait été privée de la possibilité de saisir la commission départementale des impôts, dans la mesure où celle-ci n'était pas compétente pour connaître du litige l'opposant à l'administration fiscale s'agissant du droit à la déduction de dépenses de son revenu global ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à soutenir que les suppléments d'impôts sur le revenu en litige seraient intervenus à l'issue d'une procédure irrégulière et à en solliciter pour ce motif la décharge ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant qu'en vertu de l'article 156 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années 1989, 1990 et 1991, l'impôt sur le revenu est établi sous déduction des déficits fonciers correspondant à des travaux effectués par les nus-propriétaires en application des articles 605 et 606 du code civil ; que ces dernières dispositions mettent à la charge du nu-propriétaire les grosses réparations, c'est-à-dire celles des gros murs et des voûtes, le rétablissement des poutres et des couvertures entières et celui des murs de soutènement et de clôture ; que, contrairement à ce que soutient l'administration, une partie des travaux réalisés peut être éventuellement dissociée afin d'apprécier si elle présente le caractère de grosses réparations au sens des dispositions susmentionnées, alors même, notamment, qu'une autre partie des travaux correspondrait à une extension de la surface habitable de l'immeuble ;

En ce qui concerne le bâtiment sis 35 rue du Faubourg de Saverne - 30 rue Kageneck :

Considérant qu'à l'appui de sa requête, Mme X produit une facture en date du 5 avril 1991, de l'entreprise Kesser, détaillant les travaux entrepris sur les appartements dont elle a acquis la nu-propriété, dont l'administration ne conteste pas qu'ils n'appartiennent pas à la partie de l'immeuble qui a fait l'objet d'une extension de la surface habitable par aménagement des combles ;

Considérant, en premier lieu, que le lot 1 gros oeuvre - démolitions inclut à la fois des travaux de remplacement de planchers, constituant des grosses réparations, et des aménagements portant sur la réfection des cloisonnements, portes et ouvertures et le bouchage d'ouvertures dans les maçonneries, ne répondant pas à cette définition ; que Mme X n'apporte aucun élément permettant de déterminer le montant des seuls travaux déductibles en application de l'article 156-I-3° précité ; que, dès lors, c'est à bon droit que l'administration fiscale a exclu cette dépense des déficits fonciers litigieux ;

Considérant, en deuxième lieu, que les lots 2 charpentes bois et 3 couverture-étanchéité qui consistent dans la dépose et reprise partielles de la charpente et totales de la couverture constituent en revanche, pour leur totalité, des grosses réparations au sens des dispositions susmentionnées ; que Mme X est par suite fondée à obtenir la déduction des dépenses correspondantes, pour des montants de respectivement 10 876,63 F TTC et 41 868,75 F TTC, imputables sur les revenus de l'année 1989 ;

Considérant, en troisième lieu, que le lot 5 bis pierres de taille consiste, d'après la facture susévoquée, en une réfection des soubassements côté rue, réfection des soubassements côté cour, réfection des appuis de fenêtre en grès, réfection des corniches abîmées en grès ; qu'ainsi défini, ce travail ne constitue pas une grosse réparation au sens des dispositions précitées ;

Considérant, en quatrième lieu, que le lot 6 chapes consiste, selon le document produit, dans la mise en oeuvre de chapes légères sur la totalité des planchers révisés, de type micro béton ; que ce travail, par sa nature, ne constitue pas une grosse réparation au sens des dispositions précitées ;

Considérant, en cinquième lieu, que les pièces produites par la requérante ne permettent pas d'établir le caractère de grosses réparations des lots 5 menuiserie extérieure , 13 plomberie - sanitaire , 15 électricité , 16 ascenseurs et 17 aménagements extérieurs ;

En ce qui concerne le bâtiment sis 25 rue des Bateliers :

Considérant qu'à l'appui de sa requête, Mme X produit une facture en date du 24 novembre 1992, de la Société Auxiliaire d'Entreprises de l'Est (S.A.E.E.), détaillant les travaux entrepris sur l'immeuble dans lequel elle a acquis la nu-propriété de deux appartements ;

Considérant, en premier lieu, que le lot 1 gros oeuvre inclut à la fois des travaux de remplacement de planchers, constituant des grosses réparations, et des aménagements portant sur la suppression de conduites de fumées et le rebouchage des ouvertures, ne répondant pas à cette définition ; que Mme X n'apporte aucun élément permettant de déterminer le montant des seuls travaux déductibles en application de l'article 156-I-3° précité ; que, dès lors, c'est à bon droit que l'administration fiscale a exclu cette dépense des déficits fonciers litigieux ;

Considérant, en deuxième lieu, que le lot 6 chapes consiste, selon le document produit, dans la mise en oeuvre de chapes dans les appartements sur les planchers bois en mauvais état, dans les pièces humides, les parties communes ; que ce travail, par sa nature, ne constitue pas une grosse réparation au sens des dispositions précitées ;

Considérant, en troisième lieu, que le lot 11 ravalement pierre consiste, d'après la facture susévoquée, en une découpe d'éléments abîmés et une insertion d'éléments en pierre naturelle ou reconstituée ; qu'ainsi définis ces travaux se rattachent aux grosses réparations ; que la requérante est par suite fondée à obtenir la déduction de cette dépense, dont le montant est de 25 099 F TTC, imputable sur les revenus de l'année 1990 ;

Considérant, en quatrième lieu, que les pièces produites par la requérante ne permettent pas d'établir le caractère de grosses réparations des lots 4 plâtrerie, doublage, isolation , 5 menuiseries extérieures , 7 menuiseries intérieures , 13 plomberie - sanitaire , 14 ventilation mécanique contrôlée et 15 électricité -chauffage ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède Mme X est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué en date du 6 juin 2000, le Tribunal administratif de Strasbourg lui a refusé la réduction des bases de l'impôt sur le revenu pour des montants de 52 745,38 F, soit 8 040,98 euros, au titre de l'année 1989 et de 25 099 F, soit 3 826,32 euros, au titre de l'année 1990 ;

Sur les conclusions tendant au paiement des frais irrépétibles :

Considérant qu'il n'appartient pas au juge administratif, en se fondant sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de condamner une partie si une telle condamnation n'a pas été expressément chiffrée ; qu'ainsi et en tout état de cause, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat à payer à Mme X des frais irrépétibles ;

DECIDE

Article 1er : Pour la détermination des bases de l'impôt sur le revenu assigné à Mme X, les dépenses déductibles dans la catégorie des revenus fonciers et reportables sur le revenu global sont augmentées des montants respectifs de 8 040,98 euros au titre de l'année et de 1989 et 3 826,32 euros au titre de l'année 1990.

Article 2 : Mme X est déchargée des suppléments d'impôt sur le revenu résultant de la correction des bases d'imposition définies à l'article 1er ci-dessus.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X est rejeté.

Article 4 : Le jugement du 6 juin 2000 du Tribunal administratif de Strasbourg est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Christine X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

5

N°00NC01122


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 00NC01122
Date de la décision : 28/04/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : Mme RICHER
Rapporteur ?: M. Pierre MONTSEC
Rapporteur public ?: Mme ROUSSELLE
Avocat(s) : LACROIX

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2005-04-28;00nc01122 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award