Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 27 février 2002, complétée par mémoire enregistré le 8 novembre 2002, présentée par Mlle Yvette X, élisant domicile ... ;
Mlle X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 97-1755 et 98-905 en date du 4 décembre 2001 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ses demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujetties au titre des années 1994 et 1995 ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
Elle soutient :
- que sa mère est dans le besoin, au sens de l'article 205 du code civil ;
- qu'au cours des années 1994 et 1995 elle a versé une pension alimentaire en nature à sa mère, hébergée à son domicile en journée, en pourvoyant intégralement aux besoins alimentaires de cette dernière ;
- qu'elle peut déduire la pension alimentaire en procédant à une évaluation forfaitaire conformément à la doctrine contenue dans la documentation de base n° 5 B 2421 ;
- que l'administration a formellement pris position sur sa situation de fait au regard d'un texte fiscal dans l'avis de dégrèvement en date du 19 janvier 1993, relatif aux années 1989 à 1991 d'une part, et dans la notification de redressements en date du 17 janvier 1997 d'autre part ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les mémoires en défense, enregistrés les 26 juin 2002 et 16 janvier 2003, présentés par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre conclut au rejet de la requête ;
Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 février 2005 :
- le rapport de Mme Richer, président,
- et les conclusions de Mme Rousselle, commissaire du gouvernement ;
Sur l'application de la loi fiscale :
Considérant qu'aux termes de l'article 156 du code général des impôts : L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé eu égard aux propriétés et aux capitaux que possèdent les membres du foyer fiscal désignés à l'article 6-1 et 3, aux professions qu'ils exercent, aux traitements, salaires, pensions et rentes viagères dont ils jouissent ainsi qu'aux bénéfices de toutes opérations lucratives auxquelles ils se livrent, sous déduction : ...II. Des charges ci-après lorsqu'elles n'entrent pas en compte pour l'évaluation des revenus des différentes catégories : ... 2° ... ; pensions alimentaires répondant aux conditions fixées par les articles 205 à 211 et 367 du code civil ; ... ; qu'aux termes de l'article 205 du code civil : Les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin ; qu'aux termes de l'article 208 du même code : Les aliments ne sont accordés que dans la proportion du besoin de celui qui les réclame, et de la fortune de celui qui les doit ... ; qu'il résulte de ces dispositions que, si les contribuables sont autorisés à déduire du montant total de leurs revenus, pour l'assiette de l'impôt sur le revenu, les versements qu'ils font à leurs parents en état de besoin, il incombe à ceux qui ont pratiqué ou demandé à pratiquer une telle déduction de justifier, devant le juge de l'impôt, de l'importance des aliments dont le paiement a été rendu nécessaire par le défaut de ressources suffisantes de leurs ascendants ; qu'il ressort de l'instruction que Mlle X a déduit de ses revenus des années 1994 et 1995 les sommes respectives de 12 724 F et 12 913 F, au titre d'une pension alimentaire versée en nature à sa mère, Mme Ana Y ; que toutefois la requérante ne justifie pas de la réalité et du montant des dépenses effectuées pour subvenir aux besoins alimentaires de sa mère ; qu'ainsi, et sans qu'il y ait lieu de se demander si les ressources de cette dernière étaient suffisantes au regard des dispositions des articles 205 et 208 du code civil, les sommes versées par Mlle X à sa mère en 1994 et 1995 ne peuvent être regardées comme une pension alimentaire déductible en vertu des dispositions du 2 de l'article 156 II précité du code général des impôts ;
Sur le bénéfice de l'interprétation de la loi fiscale donnée par l'administration :
Considérant, d'une part, que si l'instruction n° 5 B 2421, dans sa partie consacrée aux pensions alimentaires versées aux ascendantes précise que les personnes qui ont recueilli sous leur toit un ascendant sans ressources et qui pourvoient à tous ses besoins (nourriture, logement ...) peuvent éprouver des difficultés pour produire des justifications précises du montant de la déduction et que pour ce motif, il a été admis, à titre de règle pratique, que les intéressés puissent défalquer de leur revenu global, sans avoir à fournir aucune justification, une somme correspondant à l'évaluation forfaitaire des avantages en nature fixée pour le calcul des cotisations de sécurité sociale il est constant que durant les années en litige Mme Y n'était hébergée par sa fille que pendant la journée, pour prendre ses repas, à l'exclusion de la nuit ; qu'ainsi elle ne pouvait être considérée comme recueillie sous le toit de Mlle X au sens de la doctrine ; que Mlle X n'est donc pas fondée à se prévaloir de la déduction forfaitaire prévue aux paragraphes 24 et 25 de la documentation de base n° 5 B 2421, quand bien même elle aurait subvenu intégralement aux besoins en nourriture de sa mère ;
Considérant, d'autre part, que ni les termes de la fiche de visite en date du 23 décembre 1992, ni l'avis de dégrèvement non motivé en date du 19 janvier 1993 ne constituent une prise de position formelle de l'administration sur l'appréciation de la situation de fait de la requérante au regard du texte fiscal ; que Mlle X ne saurait donc se prévaloir de cette fiche ou de cette décision sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;
Considérant, enfin, que Mlle X ne saurait en tout état de cause se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, de la notification de redressements qui lui a été adressée à la date du 17 janvier 1997, dès lors que celle-ci est postérieure aux dates de mise en recouvrement des impositions primitives des années en litige ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mlle X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mlle X est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mlle Yvette X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
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02NC00223