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20/01/2005 | FRANCE | N°00NC01146

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2eme chambre - formation a 3, 20 janvier 2005, 00NC01146


Vu la requête, enregistrée le 6 septembre 2000, complétée une première fois par le mémoire enregistré le 5 avril 2001, présentée par M. Gilles X, élisant domicile ... ; M. X demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 95-1322 et 96-841, en date du 25 avril 2000, par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ne lui a accordé qu'une décharge partielle des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et à la contribution sociale généralisée auxquelles il a été assujetti au titre des années 1990 et 1991 ;

2°) de prononcer la d

écharge de la totalité des impositions supplémentaires auxquelles il a été assujetti au...

Vu la requête, enregistrée le 6 septembre 2000, complétée une première fois par le mémoire enregistré le 5 avril 2001, présentée par M. Gilles X, élisant domicile ... ; M. X demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 95-1322 et 96-841, en date du 25 avril 2000, par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ne lui a accordé qu'une décharge partielle des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et à la contribution sociale généralisée auxquelles il a été assujetti au titre des années 1990 et 1991 ;

2°) de prononcer la décharge de la totalité des impositions supplémentaires auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1990 ;

3°) de le maintenir au bénéfice du sursis de paiement prévu à l'article L. 277 du livre des procédures fiscales ;

Il soutient :

- que la S.A. Ardennes Investissement n'a commis aucun acte anormal de gestion en acquérant les titres qu'il détenait au prix de 1.300 F par action ;

- que, s'agissant de l'application de pénalités de mauvaise foi, l'administration n'a pas indiqué dans la réponse à ses observations qu'il disposait d'un délai de 30 jours pour répondre utilement à la motivation de ces pénalités, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 80 D modifié du livre des procédures fiscales ;

- qu'il entend invoquer sur ce point, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, le contenu d'une instruction du 5 janvier 1994 (BOI, 13 L - 1 - 94) ;

- que les pénalités de mauvaise foi sont insuffisamment motivées ;

- que sa mauvaise foi n'est pas établie ;

- que les redressements sont irrégulièrement motivés en droit dans la mesure où, les redressements effectués pour la S.A. Ardennes Investissement conduisant à la constatation d'un résultat positif, les redressements liés à des revenus considérés comme distribués auraient dû être fondés non sur les dispositions de l'article 109-1-1° du code général des impôts mais sur celles de l'article 109-1-2° du même code ;

- qu'il entend se prévaloir sur ce point, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la doctrine contenue dans une instruction administrative du 1er septembre 1989 (DB 4 J - 1213) ;

- que, par jugement du Tribunal de Grande Instance de Charleville-Mézières en date du 2 octobre 2000, il a été relaxé du chef du délit de fraude fiscale ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 2 avril 2001, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, tendant au rejet de la requête, regardée comme dirigée contre les seules cotisations supplémentaires mises en recouvrement au titre de l'année 1990, par les motifs qu'aucun des moyens présentés par M. X n'est fondé, que le maintien demandé du sursis de paiement n'est prévu par aucun texte et que, par jugement du Tribunal de Grande instance de Charleville-Mézières en date du 16 octobre 1995, M. X a été reconnu coupable d'avoir sciemment passé ou fait passer des écritures inexactes ou fictives dans les documents comptables des sociétés Ardennes Equipement et Véhicules X ;

Vu le mémoire complémentaire présenté par M. X, enregistré le 28 mai 2001, par lequel il précise qu'il entend bien contester les cotisations supplémentaires mises à sa charge au titre des années 1990 et 1991, qui sont nécessairement liées ; il reprend les moyens précédemment développés et soutient en outre que les faits concernés par le jugement du Tribunal de Grande instance de Charleville-Mézières en date du 16 octobre 1995 n'ont rien à voir avec le litige et que sa mauvaise foi alléguée est contredite par le jugement susmentionné du même tribunal en date du 2 octobre 2000 ;

Vu les mémoires en défense complémentaires, enregistrés le 22 août 2001 et le 4 février 2002, présentés par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, tendant aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens et par le moyen supplémentaire que l'autorité de chose jugée ne saurait s'attacher aux motifs du jugement de relaxe du Tribunal de Grande instance de Charleville-Mézières en date du 2 octobre 2000 ;

Vu les mémoires complémentaires enregistrés le 27 novembre 2001 et le 21 mars 2002, présentés par M. X, tendant aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens, et précisant qu'il n'entend pas invoquer l'autorité de chose jugée du jugement Tribunal de Grande instance de Charleville-Mézières en date du 2 octobre 2000 ;

Vu le mémoire, enregistré le 10 décembre 2004, présenté pour M. X, par Me Sorin ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 décembre 2004 :

- le rapport de M. Montsec, rapporteur ;

- et les conclusions de Mme Rousselle, commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie à la requête d'appel de M. Gilles X s'agissant des cotisations supplémentaires mises à sa charge au titre de l'année 1991 :

Sur le bien-fondé des cotisations supplémentaires en litige :

Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : 1- Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés actionnaires ou porteurs de parts et non prélevés sur les bénéfices (...) ;

Considérant que M. Gilles X était président-directeur- général de la S.A. Ardennes Equipement jusqu'au 7 juin 1991 et de la S.A. Véhicules X jusqu'au 31 décembre 1991, détenant alors à lui seul 44,12 % du capital de la première et, avec son épouse, 75 % du capital de la seconde ; qu'il détenait dès l'origine, avec son épouse, 33,33 % du capital de la S.A. Ardennes Investissement, créée en avril 1990 ; que, le 25 juin 1990, M. et Mme X ont cédé 4520 actions de la S.A. Véhicules X, à la S.A. Ardennes Investissement, pour un prix unitaire de 1.300 francs ; que, dans le cadre de la vérification de la comptabilité de la S.A. Ardennes Investissement, l'administration fiscale a estimé que la valeur vénale réelle des actions de la S.A. Véhicules X à la date de cette cession ne dépassait pas 10 francs ; qu'elle a par suite considéré que l'acquisition de ces titres au prix unitaire de 1.300 F était constitutive d'un acte anormal de gestion ; qu'elle a en conséquence analysé la majoration constatée et les frais financiers ayant permis l'opération comme une libéralité de la S.A Ardennes Investissement au profit de M. et Mme X, c'est à dire comme un revenu distribué imposable entre les mains de ces derniers dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers en vertu des dispositions susmentionnées du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts ;

Considérant que la valeur vénale d'actions non cotées en bourse doit être appréciée compte tenu d'un ensemble d'éléments qui permettent d'obtenir un chiffre aussi voisin que possible de celui résultant du jeu normal de l'offre et de la demande à la date de la cession ; qu'à défaut de pouvoir se référer au bilan ou à la rentabilité de l'entreprise, eu égard aux anomalies comptables affectant la comptabilité de la S.A. Véhicules X, mises en évidence à l'occasion des contrôles des sociétés anonymes Ardennes Equipement et Véhicules X, liées pour l'essentiel à l'absence délibérée de comptabilisation de charges importantes dans les écritures de la seconde, lesquelles charges avaient été transférées dans les comptes de la première, et alors au demeurant qu'il n'est pas contesté que les éléments comptables disponibles n'auraient eux-mêmes permis d'aboutir qu'à une valeur de l'ordre tout au plus de 66 francs par action, l'administration a pu à bon droit se référer à une transaction récente, intervenue le 27 juillet 1989, portant sur mille actions de la S.A. Véhicules X vendues par la S.A. Ardennes Equipement à Mme Brigitte X, épouse du requérant, pour le prix de 10 francs par action ; qu'ainsi, l'administration doit être réputée apporter la preuve qui lui incombe de ce que le prix de 1.300 F par action fixé pour la transaction intervenue le 25 juin 1990 ne correspondait pas à la valeur vénale réelle de ces actions ;

Considérant qu'en se bornant à produire des articles de presse de l'époque, M. X ne démontre pas que les perspectives de développement de la S.A. Véhicules X étaient favorables, alors d'ailleurs que ladite société venait de passer, le 15 décembre 1989, un protocole d'accord avec la société Amiri Motors, qui ne s'est finalement pas concrétisé mais qui prévoyait la cession à celle-ci des droits de développement et commercialisation de plusieurs prototypes de véhicules 4 X 4 mis au point par elle, lesquels, à défaut de correspondre alors à l'activité traditionnelle de la société, ainsi que le fait valoir à l'instance le requérant, représentaient nécessairement un élément essentiel de son actif, surtout dans la perspective d'un éventuel développement ; que M. X ne peut par ailleurs se prévaloir d'une augmentation de capital de la S.A. Véhicules X, intervenue le 16 mars 1990, par conversion de comptes courants d'associés, pour un prix de 100 F par action et une prime d'émission de 1.200 F par action, dès lors qu'elle était exclusivement réservée au requérant et à son père ; que le requérant ne peut davantage invoquer la proposition d'acquisition faite par les acquéreurs dès le 8 novembre 1989, dès lors qu'il devait lui-même participer pour un tiers au capital de la holding d'acquisition dont la constitution était prévue ; qu'ainsi, alors même qu'un jugement du Tribunal de Grande instance de Charleville-Mézières, en date du 2 octobre 2000, produit à l'instance par le requérant, l'a relaxé de poursuites de fraude fiscale, pour les mêmes faits, tout en le condamnant d'ailleurs pour abus de biens sociaux, les éléments de fait invoqués par M. X ne sont pas de nature à remettre en cause les éléments de preuve apportés par l'administration ;

Considérant que, dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme établissant que la S.A. Ardennes Investissement n'a pas agi dans le cadre d'une gestion commerciale normale en faisant l'acquisition à ce prix unitaire de 1.300 F des actions de la S.A. Véhicules X détenues par M. et Mme X ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient M. X, l'administration a pu à bon droit se fonder sur les dispositions du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts pour fonder en droit, dans les circonstances susmentionnées, les redressements en litige ; que l'instruction du 1er septembre 1989 qu'il entend invoquer sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, ne contient aucune interprétation du texte fiscal applicable au cas d'espèce, dont il puisse utilement se prévaloir ;

Sur les pénalités :

En ce qui concerne la régularité de la procédure :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public quand un document ou une décision adressée au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable. Toutefois, lorsque la pénalité mise en recouvrement ne constitue pas l'accessoire d'une imposition ou lorsqu'elle sanctionne une infraction dont la qualification est fondée sur l'appréciation du comportement du contribuable, la motivation est portée à sa connaissance au moins trente jours avant la notification du titre exécutoire ou de son extrait. Durant ce délai, le contribuable peut présenter des observations ;

Considérant que le requérant, qui ne conteste pas qu'il a disposé d'un délai d'au moins trente jours entre la communication qui lui a été faite des motifs de l'application de pénalités de mauvaise foi, dans la réponse à ses observations en date du 11 octobre 1993, et la mise en recouvrement des sommes dont s'agit, soutient ne pas avoir été informé de ce qu'il disposait de ce délai de trente jour pour présenter ses observations ; que, toutefois, ce courrier en date du 11 octobre 1993 comportait la mention : dans ce document figurent les sanctions fiscales applicables pour lesquelles vous disposez d'un délai de trente jour pour faire parvenir vos éventuelles observations ; qu'ainsi, sans que le requérant puisse en tout état de cause utilement invoquer sur ce point la doctrine administrative, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, le moyen manque en fait ;

En ce qui concerne la motivation et le bien-fondé des pénalités :

Considérant que, contrairement à ce que soutient le requérant, l'application des pénalités de mauvaise foi est clairement et abondamment motivée dans la réponse faite par l'administration à ses observations, en date du 11 octobre 1993, et ne résulte pas seulement de l'importance des droits éludés et du parallèle qui aurait pu être fait entre la situation des sociétés concernées et la sienne propre ; que l'administration a pu ainsi tenir compte de la position particulière de M. X au sein des diverses sociétés, telle que décrite ci-dessus, et des éléments de fait rappelés ci-dessus, notamment de ce qu'il ne pouvait ignorer les transferts de charges effectués d'une société à l'autre, pour considérer qu'il avait participé à une opération consistant à surévaluer en toute connaissance de cause la valeur des titres qu'il détenait dans la S.A. Véhicules X ; qu'ainsi l'administration apporte la preuve qui lui incombe de la mauvaise foi du contribuable, justifiant l'application des pénalités correspondantes ; que la notion de fraude fiscale étant indépendante en tout état de cause de celle de mauvaise foi, la circonstance que M. X ait été relaxé des poursuites de fraude fiscale pour les faits en cause, par le jugement susmentionné du Tribunal de Grande instance de Charleville-Mézières, en date du 2 octobre 2000, ne s'oppose pas à ce que les pénalités de mauvaise foi lui soient appliquées ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif Châlons-en-Champagne n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et à la contribution sociale généralisée auxquelles il a été assujetti au titre des années 1990 et 1991 ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Gilles X et au Ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

6

N°00NC01146


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 00NC01146
Date de la décision : 20/01/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. LUZI
Rapporteur ?: M. Pierre MONTSEC
Rapporteur public ?: Mme ROUSSELLE
Avocat(s) : SORIN

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2005-01-20;00nc01146 ?
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