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16/12/2004 | FRANCE | N°99NC00329

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2eme chambre - formation a 3, 16 décembre 2004, 99NC00329


Vu la requête, enregistrée le 10 février 1999, complétée par deux mémoires enregistrés le 25 juin 2001, présentée par le DEPARTEMENT DU TERRITOIRE DE BELFORT, dûment représenté par le président de son Conseil général ; le DEPARTEMENT DU TERRITOIRE DE BELFORT demande à la Cour :

1°)' d'annuler le jugement n° 95-1299, du 3 décembre 1998, par lequel le Tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 28 décembre 1994 par lesquelles le ministre du budget a accordé à la société Thécla Industries l'agrément, prévu pa

r l'article 1465 du code général des impôts ;'

2°) de condamner l'Etat à lui verser...

Vu la requête, enregistrée le 10 février 1999, complétée par deux mémoires enregistrés le 25 juin 2001, présentée par le DEPARTEMENT DU TERRITOIRE DE BELFORT, dûment représenté par le président de son Conseil général ; le DEPARTEMENT DU TERRITOIRE DE BELFORT demande à la Cour :

1°)' d'annuler le jugement n° 95-1299, du 3 décembre 1998, par lequel le Tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 28 décembre 1994 par lesquelles le ministre du budget a accordé à la société Thécla Industries l'agrément, prévu par l'article 1465 du code général des impôts ;'

2°) de condamner l'Etat à lui verser les intérêts au taux légal à compter de la date à laquelle il aurait dû percevoir les recettes fiscales litigieuses jusqu'à la date de leur versement effectif ;

3°)' de condamner l'Etat à lui verser la somme de 20.000 F au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

4°) d'ordonner la communication du dossier examiné par le comité interministériel ;

5°) d'annuler l'avis rendu par le C.I.R.I. le 22 décembre 1993 ;

Il soutient :

- qu'il a intérêt pour agir ;

- que le comité interministériel de restructuration industrielle n'a pas examiné le dossier de reprise de l'entreprise en difficulté en tenant compte de l'exonération de taxe professionnelle ;

- que l'entreprise bénéficiaire de l'agrément ne pouvait être regardée comme étant en difficulté, et encore moins en état de cessation de paiement, à la date à laquelle la décision d'octroi dudit agrément a été prise ;

- que la société financière de Valois et la société Thécla ont commis une infraction fiscale dans les quatre années précédant l'octroi de l'agrément ;

- que, compte tenu du montant des aides accordées par l'État à la société Thécla, comparé au montant des dividendes distribués à ses actionnaires, l'administration a commis une erreur manifeste d'appréciation en délivrant l'agrément attaqué ;

- que, si la demande d'agrément date, au plus tard, du 21 décembre 1993, elle a fait l'objet d'une décision implicite de rejet qui a créé des droits au profit du département du territoire de Belfort et des communes concernées, qui ne pouvait faire l'objet légalement d'un retrait ;

- que, si la demande d'agrément a fait l'objet d'une nouvelle demande, postérieurement à la reprise litigieuse des deux établissements, l'agrément ne pouvait être accordé dès lors que l'entreprise n'était plus en difficulté ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les mémoires en défense, enregistrés le 15 février 2001 et le 27 octobre 2003, présentés pour le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, tendant au rejet de la requête, par les motifs qu'aucun des moyens présentés par le DEPARTEMENT DU TERRITOIRE DE BELFORT n'est fondé ;

Vu la lettre en date du 5 novembre 2004, informant les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la décision à intervenir était susceptible d'être fondée sur un moyen soulevé d'office, tiré de l'irrecevabilité du moyen de légalité externe soulevé pour la première fois en appel relatif à l'irrégularité de la procédure ;

Vu la lettre en date du 17 novembre 2004, informant les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la décision à intervenir était susceptible d'être fondée sur un moyen soulevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions, nouvelles en appel et dirigées contre un avis ne faisant pas grief, tendant à l'annulation de l'avis rendu le

22 décembre 1993 par le C.I.R.I. ;

Vu le mémoire, enregistré le 18 novembre 2004, présenté pour le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, prenant acte de l'intention de la Cour de soulever d'office un moyen tiré de l'irrecevabilité du moyen de légalité externe soulevé par le requérant pour la première fois en appel ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 novembre 2004, présenté par le DEPARTEMENT DU TERRITOIRE DE BELFORT, répondant au moyen d'ordre public susmentionné tiré de l'irrecevabilité du moyen de légalité externe soulevé pour la première fois en appel, en faisant valoir qu'il ne lui a pas été possible de soulever ce moyen en première instance faute d'avoir pu obtenir les documents correspondants ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 novembre 2004 :

- le rapport de M. Montsec, rapporteur,

- et les conclusions de Mme Rousselle, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que, par une délibération en date du 10 décembre 1993, le DEPARTEMENT DU TERRITOIRE DE BELFORT a décidé d'accorder aux entreprises reprenant une entreprise en difficulté l'exonération de taxe professionnelle prévue par les dispositions de l'article 1465 du code général des impôts, pour une durée de deux ans ; que le comité interministériel de restructuration industrielle a, lors de sa réunion en date du 22 décembre 1993, rendu un avis favorable à la proposition de reprise des deux établissements de fonderie de la société Thécla Industries, situés à Delle et à Rougemont-Le-Château, dans le département du Territoire de Belfort ; qu'après reprise de ces deux établissements par la Compagnie Financière du Valois, réalisée dans le courant du mois de mars 1994, le ministre du budget a accordé, par deux décisions en date du 28 décembre 1994, l'agrément permettant aux deux établissements de bénéficier de l'exonération temporaire de taxe professionnelle ; que le DEPARTEMENT DU TERRITOIRE DE BELFORT fait régulièrement appel du jugement en date du 3 décembre 1998 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des deux décisions sus analysées du 28 décembre 1994 ;

Sur la légalité des décisions du 28 décembre 1994 :

En ce qui concerne le moyen de légalité externe :

Considérant que les dispositions de l'article L. 199 C du livre des procédures fiscales ne sont applicables qu'aux recours de plein contentieux en matière fiscale et non aux recours pour excès de pouvoir ; que le DEPARTEMENT DU TERRITOIRE DE BELFORT n'a contesté devant le Tribunal administratif de Besançon que la légalité interne de la décision ; que, dès lors, s'il soutient devant la Cour que ladite décision a été prise sur une procédure irrégulière, cette prétention, fondée sur une cause juridique distincte de celle qui servait de base à la demande présentée au tribunal administratif, constitue une demande nouvelle qui n'est pas recevable en appel ;

En ce qui concerne les moyens de légalité interne :

Considérant qu'aux termes des dispositions, applicables en l'espèce, de l'article 1465 du code général des impôts : Dans les zones définies par l'autorité compétente où l'aménagement du territoire le rend utile, les collectivités locales (...) peuvent (...) exonérer de la taxe professionnelle en totalité ou en partie les entreprises qui procèdent sur leur territoire, soit à des décentralisations, extensions ou créations d'activités industrielles ou de recherche scientifique et technique, ou de services de direction, d'études, d'ingénierie et d'informatique, soit à une reconversion d'activité industrielle, soit à la reprise d'établissements industriels en difficulté (...). Lorsqu'il s'agit de décentralisations, extensions ou créations d'établissements industriels ou de recherche scientifique et technique répondant à des conditions fixées par décret (...), l'exonération est acquise sans autre formalité. En cas de décentralisation, extension ou création de services de direction, d'études, d'ingénierie et d'informatique et en cas de reconversion d'activité industrielle ou de reprise d'établissements industriels en difficulté, elle est soumise à agrément (...) ; qu'aux termes de l'article 121 quinquies DB quater de l'annexe IV au même code : l'exonération de taxe professionnelle prévue à l'article 1465 du code général des impôts peut être accordée sur agrément dans les conditions définies aux articles 121 quinquies DB quinquies à 121 quinquies DB septies (...), sous réserve de l'appréciation des modalités techniques et financières des programmes présentés et dans la mesure où les entreprises intéressées n'ont commis aucune infraction fiscale exclusive de bonne foi dans les quatre ans précédant l'opération, ont produit leurs déclarations de résultats dans les délais légaux et sont dans une situation régulière vis-à-vis des services de recouvrement ; qu'aux termes de l'article 121 quinquies DB quinquies de l'annexe IV au même code : L'agrément ouvrant droit à l'exonération temporaire de taxe professionnelle prévue à l'article 1465 du code général des impôts peut être accordé aux entreprises qui, dans les zones définies par l'article 3 de l'arrêté du 16 décembre 1983, modifié par l'article 4 de l'arrêté du

12 juin 1990 et par les arrêtés du 8 août 1990 et du 21 janvier 1991, réalisent les opérations suivantes : 1° Reprise des moyens de production d'établissements industriels en difficulté susceptible de permettre la poursuite durable de l'activité et le soutien de l'emploi. L'agrément ne peut être accordé qu'à la condition qu'il y ait eu examen du plan de reprise et de redressement et du plan de financement correspondant par le comité départemental d'examen des problèmes de financement des entreprises (CODEFI) ou par le comité régional de restructuration industrielle (CORRI) ou par le comité interministériel de restructuration industrielle (CIRI) (...) ;

Considérant, en premier lieu, que, si le DEPARTEMENT DU TERRITOIRE DE BELFORT soutient que la société Thécla Industries ne se trouvait pas en situation de difficulté à la date du 28 décembre 1994 à laquelle la décision d'agrément a été accordée, l'administration doit se livrer à l'appréciation des difficultés de l'entreprise justifiant l'exonération de taxe professionnelle sur le fondement des dispositions de l'article 1465 du code général des impôts à la date de reprise de l'entreprise en difficulté ; qu'ainsi, le moyen ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que, comme le soutient le DEPARTEMENT DU TERRITOIRE DE BELFORT, qui se borne à invoquer l'existence de présomptions , la Compagnie Financière du Valois et la société Thécla Industries aient commis une infraction fiscale dans les quatre années précédant l'octroi de l'agrément, faisant obstacle à la délivrance de celui-ci en application des dispositions précitées de l'article 121 quinquies DB quater de l'annexe IV au code général des impôts ;

Considérant, en troisième lieu, que, comme il a été dit ci-dessus, l'appréciation de la situation financière de l'entreprise en difficulté s'apprécie à la date de la reprise ; que par suite, la circonstance, à la supposer établie, que la société Thécla Industries aurait bénéficié en 1991 d'une subvention de l'État, alors que simultanément des dividendes importants auraient été distribués à ses actionnaires, n'est pas de nature à démontrer qu'en accordant l'agrément contesté, le ministre du budget a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'en admettant même que les deux décisions attaquées puissent être regardées comme retirant de précédentes décisions par lesquelles le ministre du budget aurait implicitement rejeté les demandes d'octroi d'agrément, ces décisions ne pouvaient, en tout état de cause, créer de droits acquis au profit du DEPARTEMENT DU TERRITOIRE DE BELFORT ; que par suite le moyen tiré de l'irrégularité de ces retraits doit être écarté ;

Considérant, en cinquième et dernier lieu, que le ministre n'étant pas tenu de suivre l'avis rendu par le comité interministériel de restructuration industrielle, la circonstance que ledit avis serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation est, en tout état de cause, sans influence sur la légalité des décisions attaquées ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'ordonner la mesure d'instruction sollicitée, le DEPARTEMENT DU TERRITOIRE DE BELFORT n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions du département tendant à la condamnation de l'Etat à lui payer les intérêts au taux légal à compter de la date à laquelle il aurait dû percevoir les recettes fiscales litigieuses jusqu'à la date de leur versement effectif :

Considérant que, sans qu'il soit besoin de statuer sur leur recevabilité et par voie de conséquence de ce qui précède, ces conclusions ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'avis rendu par le C.I.R.I. le 22 décembre 1993 :

Considérant que ces conclusions, nouvelles en appel et dirigées contre un avis ne faisant pas grief, ne sont pas recevables ;

Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer au DEPARTEMENT DU TERRITOIRE DE BELFORT la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête du DEPARTEMENT DU TERRITOIRE DE BELFORT est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au DEPARTEMENT DU TERRITOIRE DE BELFORT et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

2

N° 99NC00329


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 99NC00329
Date de la décision : 16/12/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LUZI
Rapporteur ?: M. Pierre MONTSEC
Rapporteur public ?: Mme ROUSSELLE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2004-12-16;99nc00329 ?
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