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08/04/2004 | FRANCE | N°98NC01705

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3eme chambre - formation a 3, 08 avril 2004, 98NC01705


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour les 5 et 10 août 1998 sous le n° 98NC01705, complétée par les mémoires enregistrés les 11 mai 1999 et 16 juillet 2002, présentée pour la SARL SCHIOCCHET dont le siège est fixé à Beuvillers, par la SCP Richard Mandelkern, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, puis par Mes Barbier et Schönberger, avocats ;

La SARL SCHIOCCHET demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 19 mai 1998 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implic

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour les 5 et 10 août 1998 sous le n° 98NC01705, complétée par les mémoires enregistrés les 11 mai 1999 et 16 juillet 2002, présentée pour la SARL SCHIOCCHET dont le siège est fixé à Beuvillers, par la SCP Richard Mandelkern, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, puis par Mes Barbier et Schönberger, avocats ;

La SARL SCHIOCCHET demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 19 mai 1998 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite du ministre de l'équipement, des transports et du tourisme rejetant sa demande d'indemnisation et à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 4 535 500 francs avec intérêts de droit à compter de la demande préalable ainsi qu'une indemnité mensuelle de 100 000 francs ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 650 400,54 euros avec les intérêts de droit ;

Code : C+

Plan de classement : 60-01-02-01-01-01

3°) subsidiairement, d'ordonner le renvoi devant la Cour de justice des communautés européennes afin qu'il soit statué sur la demande de validité et d'annulation de l'article 4 point 2 du règlement CEE n°684/92 du conseil du 16 mars 1992 et surseoir à statuer dans l'attente ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser une indemnité mensuelle de 100 000 francs à compter de la requête préalable jusqu'à cessation effective par la société Frisch de ses activités illégales avec intérêts de droit ;

5°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 12 000 francs au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a estimé que la société Frisch était dispensée d'autorisation au regard du règlement du 16 mars 1992, en considérant que l'article 2.1.3 n'avait pas pour objet de restreindre le champ d'application de l'article 4.2 ;

- c'est à tort que le tribunal a estimé que l'activité de la société Frisch antérieurement au 1er Juin 1992 n'était pas irrégulière ;

- le tribunal a méconnu l'autorité de la chose jugée qui s'attache au jugement du 20 avril 1993 ;

- l'article 4.2 du règlement précité est entaché d'illégalité ;

- contrairement à ce qu'a soutenu le tribunal, il appartenait à l'Etat de s'opposer au renouvellement de l'autorisation litigieuse ;

- l'Etat a l'obligation de prendre des mesures ayant un caractère effectif, proportionné et dissuasif dans la protection des droits économiques de la société ;

- en tout état de cause, la responsabilité de l'Etat peut être engagée sans faute, du fait de la rupture d'égalité devant les charges publiques ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 31 juillet 2001, présenté par le ministre de l'équipement, des transports et du logement ; le ministre conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- c'est à bon droit que le tribunal a considéré que la société concurrente était dispensée d'autorisation depuis l'entrée en vigueur du règlement ;

- en tout état de cause, les sociétés auraient dû être soumises à la même procédure d'autorisation que les services réguliers exécutés par la société requérante ;

- la requérante n'apporte aucun élément nouveau sur la méconnaissance par la société Frisch des autorisations délivrées ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le règlement C.E.E. n°517/72 du conseil du 28 février 1972 ;

Vu le règlement C.E.E. n°684/92 du conseil du 16 mars 1992 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 mars 2004 :

- le rapport de Mme MONCHAMBERT, Président,

- et les conclusions de M. ADRIEN, Commissaire du gouvernement ;

Sur la responsabilité de l'Etat :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la société de transport SCHIOCCHET, qui exploite plusieurs lignes de service régulier international entre la région Lorraine et le Luxembourg, a recherché la responsabilité de l'Etat à raison de l'abstention de l'administration à faire cesser les manquements de la société Frisch qui, selon elle, use de pratiques anticoncurrentielles à son égard en méconnaissance de la réglementation communautaire applicable aux services de transports réguliers et a sollicité la réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi de ce fait, pour une période allant du 10 août 1990 au 30 avril 1994 ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'en application du règlement communautaire susvisé du 28 février 1972, demeuré en vigueur jusqu'au 1er juin 1992, la société luxembourgeoise Frisch, titulaire d'un contrat conclu avec l'entreprise Villeroy et Boch pour assurer le transport domicile-travail des salariés de cette entreprise, a bénéficié d'une autorisation d'exploiter un service régulier spécialisé de transport sur la ligne Errouville-Luxembourg qui lui a été délivrée le 29 août 1988 par le ministre des transports du Luxembourg et renouvelée à deux reprises, en 1990 et 1992 ; que la SARL SCHIOCCHET, qui se borne, en appel, à reprendre ses allégations sur les agissements qu'elle estime illégaux de la société Frisch sans en apporter le moindre élément de preuve complémentaire, ne démontre pas que les premiers juges auraient, par les motifs qu'ils ont retenus et qu'il y a lieu d'adopter, commis une erreur en décidant que la responsabilité de l'Etat ne pouvait être recherchée sur cette première période, à raison de son abstention à s'opposer au renouvellement par les autorités luxembourgeoises des autorisations alors nécessaires ;

Considérant qu'en estimant qu'eu égard aux dispositions de l'article 4 paragraphe 2 du règlement communautaire susvisé du 13 mars 1992, la société Frisch, qui était toujours titulaire d'un contrat conclu avec l'entreprise Villeroy et Boch pour assurer le transport domicile-travail des salariés de cette entreprise, était, à compter du 1er Juin 1992, exemptée de toute autorisation, les premiers juges ont fait une exacte interprétation des dispositions applicables à cette société et en ont déduit à bon droit que la responsabilité de l'Etat ne pouvait être recherchée à raison de l'exploitation par cette société d'un service régulier spécialisé, ni à raison du refus de l'administration d'y faire obstacle ;

Considérant que l'article 75 paragraphe 1 a) du traité, en date du 25 mars 1957, instituant la communauté économique européenne prévoit l'instauration d'une politique commune des transports applicable notamment aux transports internationaux de voyageurs par route ; que si les règles communes exigent que l'accès aux marchés des transports internationaux soit garanti aux transporteurs de tous les Etats membres, sans discrimination en raison de la nationalité ou du lieu d'établissement, celles ci ne font pas obstacle, contrairement à ce que soutient la SARL SCHIOCCHET, à la définition de régimes juridiques distincts eu égard à la nature des services concernés et des exigences du marché ; qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il y ait lieu, en l'absence de difficulté sérieuse quant à la validité de l'article 4 paragraphe 2 du règlement communautaire susvisé du 13 mars 1992, à renvoi d'une question préjudicielle à la Cour de justice des communautés européennes en application de l'article 177 du Traité instituant la Communauté européenne, que le moyen tiré de la violation des articles 74 et 75 de ce traité doit être écarté ;

Considérant enfin qu'en l'absence de disposition contraire et eu égard à l'objet en vue duquel a été établie la réglementation communautaire relative aux règles communes pour les transports internationaux de voyageurs par autocars et autobus, les décisions légalement prises en application de cette réglementation ne sauraient engager la responsabilité de l'Etat sur le fondement du principe d'égalité devant les charges publiques ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête de la société requérante qui sont inopérants, que la SARL SCHIOCCHET n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions susvisées font obstacle à ce que la SARL SCHIOCCHET, partie perdante, puisse se voir allouer les sommes qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SARL SCHIOCCHET est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL SCHIOCCHET et au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.

5


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 98NC01705
Date de la décision : 08/04/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. KINTZ
Rapporteur ?: Mme MONCHAMBERT
Rapporteur public ?: M. ADRIEN
Avocat(s) : BARBIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2004-04-08;98nc01705 ?
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