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22/01/2004 | FRANCE | N°98NC02316

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ere chambre - formation a 3, 22 janvier 2004, 98NC02316


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 9 novembre 1998 sous le n° 98NC02316, présentée pour la COMMUNE DE ROMANSWILLER (67310), représentée par son maire en exercice, à ce habilité par une délibération du conseil municipal du 28 octobre 1998, par Me Ostermann, avocat au barreau de Strasbourg ;

La COMMUNE DE ROMANSWILLER demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 962089-971488 du 7 septembre 1998 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg :

- d'une part, à la demande de M. et Mme , a annulé la délibération du conseil municipal du

30 août 1996 décidant d'exercer le droit de préemption sur un terrain dont les int...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 9 novembre 1998 sous le n° 98NC02316, présentée pour la COMMUNE DE ROMANSWILLER (67310), représentée par son maire en exercice, à ce habilité par une délibération du conseil municipal du 28 octobre 1998, par Me Ostermann, avocat au barreau de Strasbourg ;

La COMMUNE DE ROMANSWILLER demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 962089-971488 du 7 septembre 1998 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg :

- d'une part, à la demande de M. et Mme , a annulé la délibération du conseil municipal du 30 août 1996 décidant d'exercer le droit de préemption sur un terrain dont les intéressés sont propriétaires et l'a condamnée à leur verser une indemnité de 12 000 francs,

- d'autre part, a rejeté ses conclusions tendant à ce que ce jugement soit déclaré commun à l'Etat ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. et Mme devant le Tribunal administratif de Strasbourg,

Code : C

Plan de classement : 68-02-01-01-01

3°) de déclarer l'arrêt à intervenir commun à l'Etat ;

Elle soutient que :

- dans le litige dont le juge de l'expropriation avait été saisi, une transaction est intervenue entre la commune et M. et Mme , aux termes de laquelle ils s'étaient engagés à se désister de toute autre demande ; dans ces conditions, leurs demandes devant le tribunal administratif n'étaient pas recevables ;

- selon l'arrêté préfectoral autorisant le lotissement de Rainmatte, les équipements de ce lotissement sont des équipements publics, que la commune avait donc l'obligation de financer ; l'exercice de son droit de préemption lui a permis de réaliser ces équipements ; l'objectif poursuivi est ainsi conforme aux dispositions de l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme ;

- outre qu'elles n'étaient pas recevables, les conclusions indemnitaires de M. et Mme n'étaient pas fondées, pour des raisons d'équité ;

- elle est susceptible de mettre en jeu la responsabilité de l'Etat, en raison de l'illégalité de l'arrêté préfectoral autorisant le lotissement ; cette circonstance justifiait sa demande de déclaration de jugement commun ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 22 février 1999, présenté pour M. et Mme , par la société civile professionnelle d'avocats au barreau de Strasbourg Marchessou-Radius-Viguier-Marty ;

M. et Mme concluent au rejet de la requête et à la condamnation de la COMMUNE DE ROMANSWILLER à leur verser la somme de 10 000 francs au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Ils soutiennent que :

- l'accord transactionnel homologué par le juge de l'expropriation ne leur interdisait ni de contester la délibération du 30 août 1996, ni de demander réparation du préjudice qui en est résulté pour eux ;

- cette délibération ne comporte pas la motivation exigée par l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme ; la commune a exercé son droit de préemption dans le but de revendre le terrain, ce qui ne répond pas aux objectifs définis à l'article L. 300-1 ; leurs deux parcelles, dont l'une seulement a été préemptée, constituent une unité foncière, ce qui faisait obstacle à l'exercice du droit de préemption ; le prix proposé par la commune a été fixé sans consultation du service des domaines ;

- les conclusions indemnitaires de leur demande étaient recevables ;

Vu l'ordonnance du président de la 1ère chambre de la Cour du 28 février 2003, fixant au 22 mars 2003 la date de clôture de l'instruction ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu l'ordonnance n° 2000-916 du 19 septembre 2000 portant adaptation de la valeur en euros de certains montants exprimés en francs dans les textes législatifs, ensemble le décret n° 2001-373 du 27 avril 2001 ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 décembre 2003 :

- le rapport de M. CLOT, président,

- les observations de Me OSTERMANN, avocat de la COMMUNE DE ROMANSWILLER, et de Me X..., de la SELARL M. et R., avocats, pour M. et Mme ,

- et les conclusions de M. ADRIEN, commissaire du gouvernement ;

Sur les fins de non recevoir opposées par la COMMUNE DE ROMANSWILLER aux demandes de M. et Mme devant le Tribunal administratif :

Considérant que par délibération du conseil municipal du 30 août 1996, la COMMUNE DE ROMANSWILLER a décidé d'exercer son droit de préemption sur un terrain sis dans le lotissement Rainmatte, cadastré section A, n° 1216/710, appartenant à M. et Mme ; qu'à défaut d'accord amiable sur le prix d'acquisition, la commune a, le 25 septembre 1996, saisi le juge de l'expropriation, dans les conditions prévues à l'article L. 213-4 du code de l'urbanisme ; qu'une transaction, approuvée par le conseil municipal le 20 janvier 1997, a été homologuée par le juge de l'expropriation le 19 mars 1997 ;

Considérant, en premier lieu, que la transaction susmentionnée, intervenue postérieurement à la date d'enregistrement de la demande de M. et Mme devant le tribunal administratif, dirigée contre la délibération du 30 août 1996, est, dès lors, restée sans incidence sur la recevabilité de celle-ci et n'a pas pu avoir eu pour effet de la rendre sans objet ;

Considérant, en second lieu, qu'eu égard à son objet, ladite transaction n'a pas eu pour effet de priver M. et Mme du droit de demander la condamnation de la commune à les indemniser des conséquences dommageables de l'illégalité de la décision de cette collectivité d'exercer son droit de préeemption ;

Sur la légalité de la délibération du 30 août 1986 :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme, alors en vigueur : Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1, à l'exception de ceux visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement. - Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé. Toutefois, lorsque le droit de préemption est exercé à des fins de réserves foncières dans la cadre d'une zone d'aménagement différé, la décision peut se référer aux motivations générales mentionnées dans l'acte créant la zone ; qu'aux termes de l'article L. 300-1 du même code : Les actions ou opérations d'aménagement ont pour objets de mettre en oeuvre une politique locale de l'habitat, d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs, de lutter contre l'insalubrité, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels (...) ;

Considérant que la délibération du conseil municipal de Romanswiller du 30 août 1996 décidant la préemption de la parcelle n° 1216/710, située dans un secteur pour lequel un programme d'aménagement d'ensemble avait été approuvé, se bornait à mentionner l'utilité publique que constitue la réalisation de l'ouvrage PAE ; qu'ainsi, cette délibération, qui n'a pas suffisamment défini l'objet pour lequel le droit de préemption était exercé, a méconnu les dispositions précitées de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme ;

Sur les conclusions indemnitaires :

Considérant qu'en décidant, comme elle l'a fait par la délibération susmentionnée du 30 août 1996, d'exercer illégalement son droit de préemption, la COMMUNE DE ROMANSWILLER a commis une faute de nature à engager sa responsabilité à l'égard de M. et Mme ; qu'en se bornant à faire valoir que les intéressés ont tiré profit des travaux d'aménagement qu'elle a effectués dans le lotissement Rainmatte, la commune n'établit pas que les premiers juges auraient fait une évaluation exagérée du préjudice qu'ils ont subi ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNE DE ROMANSWILLER n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé la délibération du conseil municipal du 30 août 1996 et l'a condamnée à payer à M. et Mme une indemnité de 12 000 francs ;

Sur les conclusions en déclaration de jugement commun :

Considérant, d'une part, qu'il ne peut y avoir d'appel en déclaration de jugement commun en matière de recours pour excès de pouvoir ;

Considérant, d'autre part, que seuls peuvent faire l'objet d'une déclaration de jugement commun, devant une juridiction administrative, les tiers dont les droits et obligations à l'égard des parties en cause pourraient donner lieu à un litige dont la juridiction saisie eût été compétente pour connaître et auxquels pourrait préjudicier ledit jugement, dans des conditions leur ouvrant le droit de former tierce-opposition à ce jugement ; que la commune fait valoir que le préfet du Bas-Rhin ayant autorisé le lotissement Rainmatte, elle est susceptible de mettre en jeu la responsabilité de l'Etat ; que cette seule circonstance ne permet pas de regarder le jugement attaqué comme susceptible de préjudicier aux droits de l'Etat dans des conditions lui ouvrant le droit de former tierce-opposition ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE ROMANSWILLER n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses conclusions tendant à ce que ledit jugement soit déclaré commun à l'Etat ;

Considérant que, pour les motifs indiqués ci-dessus, la COMMUNE DE ROMANSWILLER n'est pas fondée à demander que le présent arrêt soit déclaré commun à l'Etat ;

Sur les conclusions de M. et Mme relatives aux frais exposés par eux à l'occasion du litige et non compris dans les dépens :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, reprenant celles de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, de condamner la COMMUNE DE ROMANSWILLER à payer à M. et Mme une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par eux en appel et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la COMMUNE DE ROMANSWILLER est rejetée.

Article 2 : La COMMUNE DE ROMANSWILLER versera à M. et Mme la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE ROMANSWILLER, à M. et Mme et au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ere chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 98NC02316
Date de la décision : 22/01/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. CLOT
Rapporteur public ?: M. ADRIEN
Avocat(s) : OSTERMANN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2004-01-22;98nc02316 ?
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