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18/05/2000 | FRANCE | N°96NC01500;96NC01832

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2e chambre, 18 mai 2000, 96NC01500 et 96NC01832


(Deuxième Chambre)
Vu, I, la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 20 mai 1996 sous le n 96NC01500, présentée par M. X... demeurant ... (Bas-Rhin) ;
M. X... demande à la Cour :
1 - d'annuler l'article 3 du jugement n 89172 en date du 20 mars 1996 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté le surplus de ses conclusions tendant à la décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1981, 1982 et 1983 ;
2 - de lui accorder la décharge de l'imposition restant en litige ;
3 - de condamner l'Etat

à lui rembourser les frais exposés ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres...

(Deuxième Chambre)
Vu, I, la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 20 mai 1996 sous le n 96NC01500, présentée par M. X... demeurant ... (Bas-Rhin) ;
M. X... demande à la Cour :
1 - d'annuler l'article 3 du jugement n 89172 en date du 20 mars 1996 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté le surplus de ses conclusions tendant à la décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1981, 1982 et 1983 ;
2 - de lui accorder la décharge de l'imposition restant en litige ;
3 - de condamner l'Etat à lui rembourser les frais exposés ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu, II, le recours, enregistré au greffe de la Cour le 5 juillet 1996 sous le n 96NC01832, présentée par le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES ; il demande à la Cour :
1 - de réformer l'article 2 du jugement n 89172 en date du 20 mars 1996 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a accordé à M. X... une réduction des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1981, 1982 et 1983 ;
2 - de remettre intégralement l'imposition contestée à la charge de M. X... ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 avril 2000 :
- le rapport de M. PAITRE, Président,
- les observations de Me SIFFERT, avocat de M. X...,
- et les conclusions de M. STAMM, Commissaire du Gouvernement ;

Considérant que la requête de M. X... et le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES, susvisés, sont dirigés contre le même jugement, en date du 20 mars 1996, par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a partiellement accueilli la demande de M. X... tendant à la décharge des compléments d'impôts sur le revenu et des pénalités auxquels il a été assujetti au titre des années 1981, 1982 et 1983, à la suite, notamment, d'une vérification approfondie de sa situation fiscale d'ensemble ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par une seule décision ;
Sur la requête de M. X... :
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant que M. X..., qui exploite à titre individuel un hôtel-restaurant à Klingenthal (Bas-Rhin), a fait l'objet, à partir du 6 mars 1985, d'une vérification de comptabilité qui a porté sur les années 1981 à 1983 ; que l'administration lui a adressé, le 24 avril 1985, un avis de vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble pour les mêmes années, et lui a demandé, le 12 août suivant, des justifications portant sur l'origine des soldes créditeurs de balances des espèces établies pour chacune des années, et de certaines sommes portées au crédit de ses comptes bancaires ;
Considérant, en premier lieu, que l'examen par le vérificateur, lors de sa première intervention sur place dans le cadre de la vérification de comptabilité, le 6 mars 1985, des comptes bancaires retraçant les opérations privées de M. X... ne caractérise pas le début d'une vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble de l'intéressé avant la date annoncée dans l'avis du 24 avril 1985, en méconnaissance des dispositions de l'article L.47 du livre des procédures fiscales, dès lors qu'il n'est ni établi ni même allégué que cet examen aurait eu un autre but que la vérification que ces comptes ne retraçaient pas des opérations professionnelles ; que l'engagement prématuré de la vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble ne peut davantage être déduit de la mention, dans la notification de redressement du 18 septembre 1986, que M. X... a "fait l'objet d'une vérification de comptabilité et d'une vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble du 6 mars 1985 au 2 septembre 1986", cette mention n'indiquant pas la date du début de la vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que le vérificateur a dressé au titre des années 1981, 1982 et 1983 des balances des espèces faisant apparaître, abstraction faite des dépenses de train de vie à la taxation desquelles l'administration a ultérieurement renoncé, des soldes créditeurs de 287 000 F en 1981, 597 885 F en 1982, et 406 707 F en 1983 ; que M. X... ne conteste pas ces modalités d'élaboration de ces balances, dont il a, contrairement à ce qu'il soutient, été informé, par les demandes de justifications qui lui ont été adressées ; qu'eu égard à l'importance des soldes créditeurs susmentionnés, l'administration a pu, sur le fondement du troisième alinéa de l'article L.16 du livre des procédures fiscales, demander à M. X... de justifier de l'origine desdits soldes, qui, à défaut de réponse de M. X... dans les délais impartis, étaient taxables d'office, sur le fondement de l'article L.69 du livre des procédures fiscales ;

Considérant, en troisième lieu, que l'administration n'était pas tenue de procéder, par l'envoi de documents distincts, à la notification des redressements procédant de la vérification de comptabilité et à ceux procédant de la vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne prescrit la mention, dans une notification de redressement, des dates de début et d'achèvement des différentes vérifications dont procèdent les redressements ; que chacune des deux notifications de redressement mentionne la période d'imposition à laquelle elle se rapporte ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Considérant qu'eu égard à la régularité de la taxation d'office des soldes créditeurs susmentionnés, la charge de la preuve de l'exagération des compléments d'impôt sur le revenu assignés en conséquence incombe à M. X... ;
En ce qui concerne la taxation du solde créditeur des balances des espèces :
Considérant que ne sauraient être admises comme justifications de l'origine des soldes créditeurs des balances espèces, d'une part, des attestations dont les signataires allèguent avoir remboursé des prêts que M. X... leur avait consentis, alors que ces attestations, établies postérieurement à la notification des redressements litigieux, ne sont accompagnées ni de la justification de la réalité desdits prêts, ni des précisions et justifications concernant les remboursements, lesquels sont d'ailleurs, à s'en tenir aux mentions des attestations, intervenus, à l'exception d'un seul, en dehors de la période litigieuse, d'autre part, les allégations de M. X... relatives aux sommes qu'il a investies en Algérie entre 1978 et 1986, et aux rémunérations qu'il a perçues en contrepartie de ses activités dans ce pays de 1976 à 1985, dès lors qu'à supposer établie la réalité de ces investissements et rémunérations, M. X... ne démontre nullement qu'ils sont à l'origine des soldes créditeurs en litige ; que, dans ces conditions, l'administration était fondée, sur le fondement, invoqué dans la notification de redressement, des articles L.16 et L.69 du livre des procédures fiscales, à taxer d'office ces soldes créditeurs comme revenus d'origine indéterminée, et le moyen que tire le requérant de ce que, compte tenu de la régularité et de la sincérité de sa comptabilité pour les années 1982 et 1983, les versements en espèces sur le compte bancaire qui retrace habituellement les opérations professionnelles de l'intéressé pour des montants totaux de 100 389 F en 1982 et 210 912 F en 1983, inclus dans les disponibilités engagées des balances, ne pouvaient être imposés dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, est inopérant, alors même que, s'agissant de ces versements, le tribunal, faisant droit à une demande de substitution de base légale que l'administration lui avait présentée, a retenu cette catégorie d'imposition ;
En ce qui concerne la taxation des dépôts de chèques :
Considérant que M. X... ne justifie pas de l'origine des dépôts de chèques sur le compte bancaire privé pour des montants de 37 564 F en 1981, 25 214 F en 1982 et 36 877 F en 1983 ;
Sur les pénalités :

Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des articles 1728 et 1729, alors en vigueur, du code général des impôts, que le contribuable qui déclare ou fait apparaître une base ou des éléments d'imposition insuffisants ou incomplets est soumis, lorsque sa mauvaise foi est établie, à une majoration de 50 % ou de 30 % des droits correspondants, selon que ceux-ci excèdent ou non la moitié du montant des droits réellement dus ;
Considérant que l'administration se borne, pour justifier l'application de pénalités de mauvaise foi à M. X..., à invoquer la nature et l'importance des redressements notifiés au titre des revenus d'origine indéterminée, et la circonstance que M. X... n'a pas apporté, pour une partie des crédits en litige, la justification de l'origine alléguée ; que de tels motifs ne sont pas, à eux seuls, de nature à justifier les pénalités prévues par les dispositions mentionnées ci-dessus ; qu'à défaut pour l'administration de faire valoir d'autres circonstances propres à établir sa mauvaise foi, M. X... est fondé à soutenir que les droits en litige n'avaient pas à être assortis de pénalités de mauvaise foi ;
Sur le recours du MINISTRE :
Considérant que le MINISTRE fait appel du jugement du 20 mars 1996 en tant qu'il a déchargé M. X... de compléments d'impôt sur le revenu assignés en conséquence de la taxation d'office de virements effectués par M. Y... sur les comptes de M. X... à la Banque populaire, pour des montants de 426 530,07 F arrondis à 427 000 F en 1981, 409 110 F en 1982 et 142 176 F en 1983 ;
Considérant, en premier lieu, que les virements effectués en 1981 pour un montant total de 426 530,07 F, qui n'ont fait l'objet d'aucune taxation, ne pouvaient, en tout état de cause, donner lieu à décharge ;
Considérant, en second lieu, que M. X... ne peut être regardé comme établissant, par la production de conventions de prêt qui n'ont pas date certaine et ne sont au surplus pas accompagnées de justificatifs du remboursement des prétendus prêts dans les délais prévus par les conventions, que ces virements pour des montants totaux de 409 110 F en 1982 et 142 176 F en 1983 auraient été effectués par M. Y... en exécution de ces conventions ; que, dans ces conditions, l'administration était fondée à taxer d'office, sur le fondement des articles L.16 et L.69 du livre des procédures fiscales, au terme d'une procédure dont la régularité doit être admise pour les motifs ci-dessus indiqués lors de l'examen de la requête de M. X..., ces différents virements comme revenus d'origine indéterminée, y compris ceux de 1983, qui ne peuvent être regardés comme des bénéfices industriels et commerciaux du seul fait qu'ils ont été effectués sur le compte professionnel de l'intéressé et traités comme des apports personnels de celui-ci ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède, d'une part, que M. X... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy n'a pas, dans la limite du montant des majorations de mauvaise foi dont ont été assortis les redressements afférents aux revenus d'origine indéterminée des années 1982 et 1983, substitué à ces majorations les intérêts de retard prévus par l'article 1727 du code général des impôts, d'autre part que le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a déchargé M. X... des compléments d'impôt sur le revenu qui lui ont été assignés en conséquence de rehaussements de ses bases d'imposition pour des montants de 427 000 F en 1981, 409 110 F en 1982 et 142 176 F en 1983 ;
Sur les conclusions de M. X... tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, de condamner l'Etat à payer à M. X... la somme de 1 000 F au titre des frais non compris dans les dépens de l'instance 96NC01500 ; que les mêmes dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans l'instance 96NC01832, la partie perdante, soit condamné à verser à M. X... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens de cette instance ;
Article 1er : Les impositions degrevées en exécution du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 20 mars 1996 sont remises à la charge de M. X....
Article 2 : Les intérêts de retard sont substitués, dans la limite du montant desdites pénalités, aux pénalités de 30 % ou 50 % dont ont été assortis les compléments de droits assignés au titre des années 1981, 1982 et 1983 à M. X....
Article 3 : Les articles 2 et 3 du jugement du tribunal administratif de Strasbourg en date du 20 mars 1996 sont réformés en ce qu'ils ont de contraire au présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à M. X... une somme de 1 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. X... et au MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 96NC01500;96NC01832
Date de la décision : 18/05/2000
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - REGLES GENERALES D'ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - CONTROLE FISCAL - VERIFICATION APPROFONDIE DE SITUATION FISCALE D'ENSEMBLE (OU ESFP).

CONTRIBUTIONS ET TAXES - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - REQUETES D'APPEL - EFFET DEVOLUTIF DE L'APPEL OU EVOCATION.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES - IMPOT SUR LE REVENU - ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - TAXATION D'OFFICE - POUR DEFAUT DE REPONSE A UNE DEMANDE DE JUSTIFICATIONS (ARTICLES L - 16 ET L - 69 DU LIVRE DES PROCEDURES FISCALES).


Références :

CGI 1727
CGI Livre des procédures fiscales L47, L16, L69, 1728, 1729
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. PAITRE
Rapporteur public ?: M. STAMM

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2000-05-18;96nc01500 ?
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