(Troisième Chambre)
Vu le recours enregistré le 19 février 1996 au greffe de la Cour, présenté par le MINISTRE DE LA DEFENSE ;
Il demande que la Cour :
1 / réforme le jugement, en date du 12 décembre 1995, par lequel le tribunal administratif de Nancy n'a pas fait intégralement droit à sa demande de condamnation de la société Quillery à l'indemniser des conséquences des désordres affectant un casernement de gendarmerie à Verdun ;
2 / porte le montant de l'indemnité due par la société Quillery à la somme de 2 821 307 F toutes taxes comprises avec intérêts au taux légal à compter de la date d'enregistrement de la demande introductive d'instance ;
3 / condamne la société Quillery à lui verser une somme de 5 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 28 pluviôse An VIII ;
Vu le code civil ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 avril 2000 :
- le rapport de M. PIETRI, Président,
- les observations de Me LAFFON, avocat de la SOCIETE QUILLERY ;
- et les conclusions de M. VINCENT, Commissaire du Gouvernement ;
Sur le principe de la responsabilité :
Considérant en premier lieu qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des deux rapports d'expertise, que les fissures dans des prédales du bâtiment de la gendarmerie de Verdun et la dégradation de la peau de surface par des fers affleurants corrodés n'affectent pas la solidité de l'ouvrage et ne le rendent pas impropre à sa destination ; qu'en revanche, les fissures horizontales sur les acrotères et au niveau des planchers sont considérées par l'expert comme des désordres qui ont eu des effets permettant de les regarder comme relevant de la garantie décennale ; que le MINISTRE DE LA DEFENSE est fondé à rechercher la responsabilité décennale de la société Quillery pour ces derniers désordres ;
Considérant, en deuxième lieu, que nonobstant la circonstance que la maîtrise d'oeuvre des travaux de reprise des désordres a été assurée par les services de l'Etat, ce dernier n'est pas fondé, à défaut pour lui de justifier de dépenses particulières à demander à ce que la société Quillery soit condamnée à l'indemniser de ce chef de préjudice ;
Considérant, en troisième lieu, que le ministre n'établit pas qu'il ait engagé des frais en vue de réparer les troubles de jouissance subis par les occupants des immeubles en cause à raison des désordres dont la réparation incombe à la société Quillery ; que les conclusions présentées à ce titre doivent être rejetées ;
Sur le montant du préjudice :
Considérant qu'il ressort du rapport d'expertise que les travaux de reprises destinées à remédier aux fissures au sol, à celles des murs et des plafonds ainsi qu'aux infiltrations sont estimées par l'expert à la somme de 74 795 F toutes taxes comprises ; que dès lors le MINISTRE DE LA DEFENSE est fondé à demander que l'indemnité de 68 601 F TTC allouée par le jugement attaqué pour ce chef de préjudice soit portée à 74 795 F TTC ; que les frais de réparation des fissures horizontales sous les acrotères et au niveau des planchers s'élèvent respectivement à 218 954 F TTC et 496 941 F TTC ; qu'ainsi, le MINISTRE DE LA DEFENSE est fondé à soutenir que l'indemnité à laquelle la société Quillery a été condamnée par le jugement attaqué doit être augmentée de la somme de 729 589 F TTC ;
Sur l'appel en garantie de la société Véritas par la société Quillery :
Considérant que les conclusions d'appel en garantie formulée par la société Quillery à l'encontre de la société Véritas sont irrecevables comme présentées pour la première fois en appel ;
Sur les dépens :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, compte tenu de ce qui a été précédemment dit, de réformer la répartition de la charge des dépens fixée par le tribunal administratif entre l'Etat et la société Quillery ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce de condamner la société Quillery à payer à l'Etat la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la société Quillery la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La somme de cent cinq mille sept cent quatre-vingt huit francs (105 788 F) toutes taxes comprises que la société Quillery a été condamnée à verser à l'Etat par le jugement du tribunal administratif de Nancy du 12 décembre 1995 est portée à huit cent trente cinq mille trois cent soixante-dix-sept francs (835 377 F) toutes taxes comprises.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Nancy du 12 décembre 1995 est réformé de ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 3 : Le surplus des conclusions du recours du MINISTRE DE LA DEFENSE et les conclusions d'appel provoqué de la société Quillery sont rejetés.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE LA DEFENSE et à la société Quillery.