(Deuxi me Chambre)
Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 13 mai 1996, sous le n 96NC01456, présentée pour M. Z... demeurant à Machault (Aisne), par Me Jean-Paul Hameau, avocat à la Cour ;
M. Z... demande à la Cour :
1 / d'annuler le jugement n 93423 en date du 5 mars 1996 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1988 et 1989 sous les articles 50001 et 50002 du rôle mis en recouvrement le 31 mai 1992 ;
2 / de prononcer le dégrèvement d'une somme de 52 266 F y compris les intérêts moratoires ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 avril 2000 :
- le rapport de Mme GESLAN-DEMARET, Premier Conseiller,
- et les conclusions de M. STAMM, Commissaire du Gouvernement ;
Considérant que M. Z..., exploitant agricole imposable selon le régime réel, conteste la réintégration, dans les résultats de son exploitation au titre des années 1988 et 1989, d'une part, d'une partie des redevances versées à l'association foncière de remembrement correspondant aux dépenses de création et de réfection de chemins, à concurrence des sommes de 2 745 F et 2 592 F, et d'autre part, de la part des frais financiers imputables au solde débiteur du compte de l'exploitant à concurrence des montants de 68 900 F et 20 098 F, respectivement pour les deux années en litige ;
Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts, applicable aux exploitants agricoles soumis au régime réel d'imposition en vertu des dispositions de l'article 72 du m me code : "1 ... le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé par les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises ...2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période par l'exploitant ou par les associés ..." ; qu'aux termes de l'article 39 du même code : "1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges ..." ;
Sur les redevances d'association foncière :
Considérant que les taxes syndicales versées à l'association foncière de remembrement qui correspondent aux dépenses de création et de réfection de chemins, constituent des charges foncières qui ont eu pour effet la valorisation des terres ; qu'il est constant que M. Z... n'a pas inscrit ses terres au bilan de son exploitation par l'effet de l'option qu'il a exercée et qui lui est opposable ; que, par suite, c'est bon droit que l'administration a exclu ces taxes des charges déductibles des résultats de son exploitation ;
Considérant que M. Z... ne peut par ailleurs utilement invoquer, ni l'instruction 5 E 274 du 20 mars 1974 qui n'admet la déduction, par dérogation à la règle générale, que de certaines taxes au nombre desquelles ne figurent pas les taxes syndicales litigieuses, ni la réponse ministérielle M. X..., député, en date du 18 mai 1987, qui ne donne pas une énumération limitative des frais occasionnés par un remembrement ayant pour effet d'accroître la valeur patrimoniale des terres concernées, ni enfin la réponse ministérielle M. Y..., député, en date du 9 septembre 1985, qui n'admet le caractère déductible que des cotisations syndicales versées à des syndicats professionnels et non des taxes versées aux associations syndicales de propriétaires ;
Sur les frais financiers :
Considérant que, dans une entreprise individuelle, le capital engagé dans l'entreprise est à tout moment égal au solde créditeur du compte personnel de l'exploitant ; que le compte de celui-ci doit, à la clôture de chaque exercice, être crédité ou débité des résultats bénéficiaires ou déficitaires et doit, en cours d'exercice, être crédité ou débité des suppléments d'apports ou des prélèvements effectués ; qu'aucune obligation n'étant faite à l'exploitant, dont la responsabilité personnelle et illimitée garantit les droits des créanciers, de maintenir engagé dans l'entreprise, un capital minimum, les prélèvements qu'il effectue sur son compte personnel ne peuvent être regardés comme anormaux tant que ce compte ne présente pas, de ce fait, un solde débiteur ; que si, au contraire, le solde ainsi calculé devient débiteur, ce qui signifie que l'exploitant alimente sa trésorerie privée au détriment de celle de son entreprise, les prélèvements effectués ne peuvent, dans cette mesure, au cas où figure au passif du bilan de l'entreprise une dette correspondant à des emprunts ou à des découverts bancaires générateurs de frais financiers, qu'être assortis de la prise en charge personnelle, par l'exploitant, d'une quote-part appropriée de ces frais, laquelle doit, par suite, être soustraite des charges d'exploitation déductibles pour la détermination du bénéfice imposable en vertu du 1 de l'article 39 du code général des impôts ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'au cours des années 1988 et 1989, M. Z... a procédé à des prélèvements nets sur les fonds de son entreprise dont le montant annuel moyen s'est élevé respectivement à 559 136 F et 230 063 F alors que dans le même temps, le montant moyen annuel des prêts et découverts bancaires consentis à l'entreprise s'est élevé à 2 793 111 F et 3 531 359 F ; que s'il fait valoir que la situation nette de son entreprise s'est améliorée de 500 605 F entre le 31 décembre 1987 et le 31 décembre 1989, cette circonstance est sans incidence sur la détermination du solde net moyen du compte de l'exploitant qui est resté débiteur ; que l'examen du compte capital, qui ne peut être calculé en tenant compte de la valeur des terres maintenues dans son patrimoine privé par M. Z... par une décision de gestion qui lui est opposable, révèle que ce solde débiteur correspond effectivement à un excédent net des prélèvements sur les résultats dégagés par l'entreprise y compris sur l'exercice 1987 ; que, dès lors, l'administration était fondée à écarter des charges d'exploitation, la quote-part des frais financiers correspondant à l'excédent des prélèvements privés dont le montant n'est pas contesté, nonobstant la circonstance que les emprunts à caractère professionnel auraient été contractés à une époque où le solde du compte de l'exploitant était créditeur ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. Z... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué en date du 5 mars 1996, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1988 et 1989 ;
Article 1er : La requête de M. Z... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Z... et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.